Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1800827 du 5 mars 2018, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 13 avril 2018, M.C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 mars 2018 du magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 18 janvier 2018 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'une erreur de fait ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 3 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Labetoulle a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C...est un ressortissant kosovar né le 20 octobre 1973 à Gjilan (Kosovo). Selon ses déclarations, il est entré pour la première fois en France en mars 2015. Il a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) du 22 septembre 2016, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 13 janvier 2017. Par un arrêté du 18 janvier 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 5 mars 2018, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. M. C...fait appel de ce jugement.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ". Et aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. Il résulte des termes de l'arrêté attaqué qu'il vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs il rappelle notamment que la demande d'asile de M. C...a été rejetée par le directeur de l'OFPRA puis par la CNDA. Cet arrêté comporte ainsi l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui fondent la décision attaquée, et doit par suite être regardé comme suffisamment motivé, alors même que toutes les indications relatives à la situation privée et familiale de M. C...n'y sont pas mentionnées. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté comme manquant en fait.
4. En deuxième lieu, M. C...soutient que l'arrêté est entaché d'une erreur de fait au regard de sa situation familiale puisque le préfet de la Seine-Saint-Denis a mentionné à tort qu'il n'avait pas d'enfant alors qu'il en a huit. Toutefois il ressort des pièces du dossier que son épouse, dont la demande d'asile a également été rejetée, est elle aussi en situation irrégulière en France, et qu'aucune circonstance particulière ne s'oppose à ce qu'ils poursuivent leur vie familiale avec leurs enfants dans leur pays d'origine ; dès lors l'erreur commise, pour regrettable qu'elle soit, n'a pas eu d'incidence sur le sens de la décision attaquée, prise au demeurant en raison du rejet définitif de la demande d'asile de l'intéressé, et est par suite sans incidence sur sa légalité.
5. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
6. M. C...fait valoir qu'il réside sur le territoire français depuis le mois de mars 2015 avec son épouse et leurs huit enfants qui sont scolarisés. Toutefois, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de quarante-deux ans. Par ailleurs il ne fait état d'aucune circonstance qui s'opposerait à ce que la cellule familiale se reconstitue hors de France, dès lors notamment que, ainsi qu'il a déjà été dit son épouse, qui a également vu sa demande d'asile rejetée, réside aussi irrégulièrement en France. Dans ces conditions, M. C...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
8. Comme il a été dit au point 6 du présent arrêt, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue hors de France. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas méconnu ces stipulations.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter aussi ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 8 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
M. Niollet, président-assesseur,
Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 janvier 2019.
Le rapporteur,
M-I. LABETOULLE
Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
T. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18PA01245 5