Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société M B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler ou subsidiairement de réformer trente-et-un titres de perception.
Par un jugement n° 1504463/3-2 du 1er mars 2017, le Tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit à la demande de la société MB..., en la déchargeant de l'obligation de payer les sommes mises à sa charge par vingt-huit de ces titres de perception, et en réduisant de 150,59 euros l'obligation de payer résultant du titre de recette n° 13868 du 17 novembre 2014.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 mars 2017, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 1er mars 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société M B...devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer sur la fin de non-recevoir, tirée de l'absence de décision préalable dans le cadre d'un recours de plein contentieux ;
- la demande devant le tribunal administratif était irrecevable en raison de l'absence de recours administratif et de décision préalables ;
- le tribunal administratif a méconnu son office en ne relevant pas de son propre chef l'irrecevabilité tenant à l'absence de décision préalable ;
- les avis de recouvrement contiennent tous les éléments permettant d'identifier les titres exécutoires sur lesquels ils se fondent ; la société n'a effectué aucune démarche pour avoir copie de ces titres ; les avis de recouvrement ont été édités concomitamment aux titres exécutoires correspondants ;
- le tribunal administratif a méconnu son office en ne faisant pas usage de ses pouvoirs d'instruction sur ce point ;
- son jugement est entaché de contradiction de motifs et d'insuffisance de motivation en ce qu'il annule des titres qu'il estime inexistants ;
- le tribunal administratif ne pouvait être saisi à l'encontre d'avis de sommes à payer insusceptibles de recours puisque purement informatifs ;
- il n'avait pas compétence pour connaitre du litige qui lui était soumis par la société, ce litige ne portant pas sur l'existence, le montant ou l'exigibilité des créances, et relevant donc de la compétence du juge judiciaire ;
- le préfet de police se réfère à ses écritures de première instance pour ce qui concerne le bien-fondé des créances.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 23 janvier et le 14 mai 2018, la société M B..., représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) à titre subsidiaire, dans l'hypothèse d'une annulation du jugement, de la décharger de l'obligation de payer l'ensemble des sommes contestées dans sa demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de la ville de Paris ou, subsidiairement, de l'Etat, le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 10 avril 2018, le préfet de police conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.
Il soutient en outre que le tribunal administratif s'est mépris sur la portée des écritures de la société M B...en lui accordant la décharge de l'obligation de payer les sommes en litige alors qu'elle ne concluait qu'à l'annulation des titres attaqués ; il a, ce faisant, commis une erreur de droit.
Par une ordonnance du 11 avril 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 mai 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales,
- le livre des procédures fiscales,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Il résulte de l'instruction que la société M B...est titulaire du lot n° 1 du marché conclu, à compter du 15 octobre 2012, avec la préfecture de police, agissant pour le compte de la ville de Paris, relatif aux opérations d'enlèvement de la voie publique des engins à moteur à deux, trois ou quatre roues, remorques et caravanes en stationnement illicite à Paris et aux opérations de transfert de préfourrières en fourrières. Elle a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge de l'obligation de payer les sommes mises à sa charge par trente-et-un titres de perception émis par le préfet de police en exécution de ce marché. Par un jugement du 1er mars 2017, le tribunal administratif a partiellement fait droit à sa demande en la déchargeant de l'obligation de payer les sommes correspondant à vingt-huit de ces titres de perception, et en réduisant l'obligation de payer résultant du titre de recette n° 13868 du 17 novembre 2014. Le préfet de police fait appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6 (...) ". Aux termes de l'article R. 613-3 de ce code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction (...) ".
3. D'autre part, aux termes du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite ".
4. Les dispositions citées ci-dessus du 2°) de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ne subordonnant pas la recevabilité de l'action dont dispose un débiteur pour contester un titre exécutoire à l'exercice d'un recours administratif préalable obligatoire, le préfet de police n'est donc pas fondé à soutenir que la demande de la société M B...devant le tribunal administratif était irrecevable en raison de l'absence d'un tel recours ou en l'absence de décision préalable. La circonstance que le tribunal administratif a dans son jugement, visé le mémoire en défense qu'il avait présenté après la clôture de l'instruction, sans l'analyser et sans examiner la fin de non-recevoir tirée du défaut de recours administratif et de décision préalables qu'il contenait, ne peut, dans ces conditions, avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire. Le préfet de police n'est donc, en tout état de cause, pas fondé à contester pour ce motif la régularité de ce jugement. Il n'est pas davantage fondé à soutenir que le tribunal aurait méconnu son office en ne relevant pas d'office l'irrecevabilité entachant selon lui la demande de première instance.
5. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient le préfet de police, le tribunal administratif ne s'est pas mépris sur la demande de la société MB..., en prononçant, non l'annulation des titres de perception en litige, mais la décharge de l'obligation de payer les sommes correspondantes.
6. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient le préfet de police, la demande dont la société M B...a saisi le tribunal administratif, portait, non sur la régularité en la forme des titres de perception en litige, mais sur l'existence et sur le montant de l'obligation de payer. Elle ne relevait donc pas de la compétence du juge judiciaire.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
7. En premier lieu, si le préfet de police soutient que les premiers juges auraient à tort estimé que les " avis des sommes à payer " litigieux constituaient des décisions faisant grief, alors qu'il ne s'agissait selon lui que d'actes " purement informatifs ", insusceptibles de recours, ces avis faisaient expressément référence aux titres exécutoires correspondants, établis conformément aux dispositions de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales, et des articles L. 1617-5, R. 2342-4, R. 3342-8-1 et D. 1617-23 du code général des collectivités territoriales, et mentionnaient d'ailleurs les voies et délai de recours contre un titre exécutoire.
8. En deuxième lieu, pour décharger la société M B...de l'obligation de payer les sommes correspondant à vingt-sept des trente-et-un titres de perception en litige, le tribunal administratif a relevé que le préfet de police n'avait pas répondu au moyen par lequel la société avait soutenu qu'il ne lui avait pas notifié les arrêtés valant titre de perception pour vingt-sept avis de recettes, que l'existence de ces titres n'était par conséquent pas démontrée et que les avis de recettes avaient donc été émis à l'issue d'une procédure irrégulière. Si le préfet de police soutient en appel que les avis de sommes à payer ont été édités concomitamment aux titres de perception correspondants, il ne produit toujours pas devant la Cour, ces titres de perception. Il n'est donc pas fondé à soutenir que le tribunal administratif aurait méconnu son office, et que son jugement serait entaché de contradiction de motifs ou d'insuffisance de motivation, en ce qu'il a déchargé la société M B...de l'obligation de payer les sommes mentionnées ci-dessus.
9. En troisième lieu, compte tenu de ce qui vient d'être dit, le préfet de police ne saurait utilement faire valoir que les avis de sommes à payer contiennent les éléments permettant d'identifier les titres exécutoires sur lesquels ils se fondent.
10. Il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit à la demande de la société MB....
Sur les conclusions de la société M B...présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la ville de Paris le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société M B...et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : La ville de Paris versera à la société M B...une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à la société MB....
Copie en sera adressée au préfet de police et à la ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 8 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 janvier 2019.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
T. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA0883