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29/05/2018 | FRANCE | N°17PA01018

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 29 mai 2018, 17PA01018


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 11 156,15 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'elle estime avoir subis en raison de l'illégalité fautive de la décision par laquelle le ministre de la défense l'a admise à la retraite et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Par un jugement n° 1510529 du 26 janvier 2017, le Tribunal ad

ministratif de Paris a rejeté sa demande ;

Procédure devant la Cour :

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 11 156,15 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'elle estime avoir subis en raison de l'illégalité fautive de la décision par laquelle le ministre de la défense l'a admise à la retraite et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Par un jugement n° 1510529 du 26 janvier 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 mars 2017 et 28 février 2018, Mme B..., représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 26 janvier 2017 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme totale de 15 130,75 euros, à parfaire, en réparation des préjudices divers résultant de l'illégalité fautive de la décision de l'administration et de son comportement fautif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros à lui verser en application de l'article L761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a entaché son jugement d'erreur de droit en écartant le moyen tiré du défaut de motivation de la décision estimant qu'une décision d'admission à la retraite n'est pas soumise à une exigence de motivation, sans tenir compte de ce que cette décision doit aussi s'analyser comme abrogeant les décisions créatrices de droit lui accordant un congé de longue maladie, et comme devant dès lors être motivée ;

- le tribunal a, à tort, retenu la possibilité pour la décision attaquée d'être rétroactive sans être illégale ;

- le tribunal a commis une erreur de fait et de droit en jugeant qu'elle ne justifiait pas avoir déposé une demande de prolongation d'activité avant le 11 juillet 2014, date de ses soixante cinq ans ;

- l'arrêté attaqué est entaché de défaut de motivation alors qu'il abroge deux décisions créatrices de droit la plaçant en congé longue maladie ;

- cet arrêté méconnait les principes généraux du droit en ce qu'il est rétroactif ;

- elle justifie avoir déposé sa demande de prolongation d'activité dès le 2 décembre 2013 et l'avait reformulée, sur demande de l'administration, dès le 2 juin 2014 soit avant son anniversaire ;

- le lien de causalité entre l'illégalité de la décision attaquée et les préjudices subis peut être tenu pour établi ;

- elle justifie d'un préjudice de 5 000 euros correspondant à la différence entre son salaire à plein traitement, dû pendant un congé longue maladie, et sa pension de retraite, d'un préjudice de 8130,75 euros résultant des coûts occasionnés pour avoir inutilement conservé son appartement parisien dans l'attente de sa reprise d'activité, et d'un préjudice moral à hauteur de 2 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 21 février 2018, le ministre des armées conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 1er mars 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 mars 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n°2009-1744 du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public ,

-le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle,

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

1. Considérant que MmeB..., attachée d'administration du ministère de la défense a, alors qu'elle atteignait son soixante-cinquième anniversaire le 11 juillet 2014, été placée en congé de longue maladie du 9 décembre 2013 au 8 septembre 2014 par un arrêté du 4 juillet 2014 ; que ce congé a été renouvelé du 9 septembre 2014 au 8 décembre 2014, par un arrêté du 8 décembre 2014 ; que, par un arrêté du 19 décembre 2014, Mme B...a été mise à la retraite d'office à compter du 11 juillet 2014, date de son 65ème anniversaire ; que, par courrier en date du 10 mars 2015, Mme B... a demandé au ministre de la défense de lui verser une indemnité d'un montant total de 11 000 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité fautive de cette décision du ministre de la défense l'admettant à la retraite ; que dans le silence de l'administration gardé sur sa réclamation préalable, elle a saisi le Tribunal administratif de Paris aux fins de condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant total de 11 156,15 euros en réparation des préjudices qu'elle allègue avoir subis ; que le tribunal a toutefois rejeté cette demande par un jugement du 26 janvier 2017 dont elle interjette appel ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant que Mme B...soutient avoir formé régulièrement une demande de prolongation d'activité avant le 11 juillet 2014 ; que s' il ressort des pièces du dossier qu'elle avait déposé le 2 décembre 2013 une telle demande de prolongation d'activité pour une durée d'un an, cette demande ne respectait pas les formes requises et notamment ne comportait pas les avis de ses supérieurs hiérarchiques ; qu'il lui a été indiqué par courriel du 14 mai 2014 du secrétariat général pour l'administration du ministère des armées, qu'elle devait reformuler sa demande, notamment en la présentant revêtue de ces avis ; que si elle indique avoir satisfait à cette invitation en reformulant sa demande par lettre du 2 juin 2014 qu'elle produit au dossier, il ressort de cette lettre qu'elle ne contient pas davantage que la demande initiale, les avis requis ; qu'au surplus elle ne justifie ni de l'envoi de cette lettre ni de sa réception par l'administration avec laquelle, dans ses échanges ultérieurs de courriels versés au dossier, elle ne mentionne jamais ce document, se bornant à évoquer sa demande de décembre 2013 ; qu'au demeurant et en tout état de cause, aux termes de l'article 3 du décret susvisé du 30 décembre 2009 : " La prolongation d'activité ne peut être demandée par les fonctionnaires qui, à la date de leur limite d'âge, sont placés en congé de longue maladie, en congé de longue durée ou accomplissent un service à temps partiel pour raison thérapeutique " ; qu'il est constant que Mme B...était placée en congé longue maladie par arrêté du 4 juillet 2014 à la date de son soixante-cinquième anniversaire le 11 juillet 2014 ; qu'elle ne pouvait par suite, bénéficier d'une prolongation d'activité ; que dans ces conditions, les moyens tirés de ce qu'elle justifierait avoir régulièrement sollicité sa prolongation d'activité avant la date de son soixante-cinquième anniversaire et qu'elle aurait pu bénéficier d'une décision implicite d'acceptation ne peuvent qu'être écartés ;

3. Considérant que la survenance de la limite d'âge des fonctionnaires, telle qu'elle est déterminée par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur, entraîne de plein droit la rupture du lien de ces agents avec le service ; que les décisions administratives individuelles prises en méconnaissance de la situation née de la rupture de ce lien sont entachées d'un vice qui doit les faire regarder comme nulles et non avenues et ne sauraient, en conséquence, faire naître aucun droit au profit des intéressés ;

4. Considérant que les arrêtés des 4 juillet et 22 septembre 2014 ont eu pour effet de maintenir Mme B...en activité au-delà du 11 juillet 2014 , date à laquelle elle avait atteint la limite d'âge qui lui était applicable en vertu du statut du corps des attachés d'administration auquel elle appartenait ; que ces arrêtés sont dès lors entachés d'un vice les rendant nuls et non avenus et n'ont pu faire naître aucun droit au profit de l'intéressée ; qu'il suit de là, que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 19 décembre 2014, prononçant sa mise à la retraite, a eu pour effet d'abroger des décisions créatrices de droit contenues dans les arrêtés des 4 juillet et 22 septembre précédents et devait à ce titre être motivé ; qu'il est par ailleurs constant que, comme l'a à juste titre rappelé le tribunal, les décisions d'admission à la retraite par limite d'âge ne sont pas au nombre des décisions individuelles devant être motivées ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté doit être écarté ;

5. Considérant que, si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, l'administration peut cependant, en dérogation à cette règle générale, conférer une portée rétroactive aux décisions relatives à la carrière des fonctionnaires dans la mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, Mme B...avait atteint la limite d'âge de 65 ans applicable à son corps le 11 juillet 2014, sans qu'il ait été fait droit, même implicitement, à une demande de prolongation d'activité valablement formée avant cette date et que les arrêtés des 4 juillet et 22 septembre suivants la plaçant en congé de longue maladie étaient dès lors entachés d'un vice les rendant nuls et non avenus ; que le ministre était dès lors tenu de l'admettre à la retraite à compter du 11 juillet 2014 pour procéder à la régularisation de sa situation ; que Mme B...n'est par suite pas fondée à soutenir que l'arrêté du 19 décembre 2014 serait entaché d'une rétroactivité illégale ;

6. Considérant enfin que si Mme B...soutient que le tribunal a à tort jugé qu'aucune demande de prolongation d'activité n'avait été présentée avant le 11 juillet 2014, elle ne justifie, ainsi qu'il a été dit au point 2, avoir déposé qu'une demande incomplète le 2 décembre 2013 et le 2 juin 2014, à supposer même l'existence de cette dernière établie ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal a, pour rejeter sa requête, retenu l'absence de demande de prolongation d'activité, laquelle, comme il vient d'être dit, ne pouvait en tout état de cause être valablement présentée dès lors qu'elle se trouvait placée en congé longue maladie à la date de son soixante-cinquième anniversaire ;

7. Considérant que Mme B...n'est dès lors pas fondée à soutenir que le ministre des armées aurait entaché son arrêté du 19 décembre 2014 d'une illégalité constitutive d'une faute de nature à engager sa responsabilité ; que ses conclusions à fins d'indemnisation des préjudices résultant d'une telle illégalité doivent dès lors, en tout état de cause, être rejetées ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que sa requête ne peut dès lors qu'être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 15 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 mai 2018.

Le rapporteur,

M-I. LABETOULLELe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA01018


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01018
Date de la décision : 29/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-01 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Mise à la retraite pour ancienneté ; limites d'âge.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : DAMON Marie Pierre

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-05-29;17pa01018 ?
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