Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...A...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de les décharger, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1612198/1-2 du 23 mai 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 juillet 2017 et 20 mars 2018, M. et Mme A..., représentés par Me Jérôme Piton, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1612198/1-2 du 23 mai 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée devant ce tribunal ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure d'imposition est irrégulière faute de motivation suffisante des propositions de rectification qui leur ont été adressées ;
- c'est à tort que l'administration a requalifié en revenus de capitaux mobiliers les sommes perçues par M. A...et déclarées comme des salaires ;
- c'est à tort que leur ont été appliquées les pénalités de 40 % pour manquement délibéré.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 octobre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Appèche,
- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,
- et les observations de Me Jérôme Piton, avocat de M. et Mme A....
1. Considérant que M. et Mme A...ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle à l'issue duquel ils ont été assujettis, sur le fondement des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2011 et 2012, assorties de pénalités, à raison de revenus distribués par la SARL " Auber Global " ; qu'après avoir en vain demandé au Tribunal administratif de Paris de les décharger de ces impositions et majorations, ils relèvent appel du jugement n° 1612198/1-2 du 23 mai 2017 de ce tribunal rejetant leur demande ;
Sur la procédure d'imposition :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (... ) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet
article " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, l'année d'imposition et la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rehaussements envisagés, de manière à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les propositions de rectification du
10 décembre 2014, relative à l'année 2011, et du 13 mai 2015, relative à l'année 2012, indiquent clairement l'impôt concerné, l'année d'imposition, le montant en base des redressements envisagés, la nature des rectifications opérées et les motifs de fait et de droit qui les sous-tendent ainsi que leurs conséquences financières ; qu'en effet, le vérificateur y indique notamment que Mme A...était " cogérante de fait " et " maître de l'affaire " de la SARL " Auber Global " et que les revenus distribués ont pris la forme d'un emploi fictif en faveur de M. C...son époux, ainsi que d'une acquisition d'un véhicule personnel de marque " Porsche " ; que la nature et le montant des revenus distribués sont précisés ; que si la proposition de rectification du 13 juin 2014 relative à la SARL
" Auber Global " mentionnée dans les propositions qui leur ont été adressées n'a pas été annexée à celles-ci, il résulte de l'instruction que les deux propositions litigieuses, après avoir rappelé la procédure suivie à l'encontre de la société et résumé les constatations faites dans ce cadre par le service vérificateur et ayant justifié le redressements des résultats sociaux, reprennent les différents éléments de fait et de droit justifiant qu'en conséquence, des rehaussements des bases de l'imposition personnelle de M. et Mme A...soient envisagés sur le fondement de l'article 110 et du 1°) du 1. de l'article 109 du code général des impôts, expressément mentionnés dans ces propositions ; qu'ainsi, les requérants, qui ne peuvent utilement, à cet égard, faire grief à l'administration de ne pas avoir mentionné l'article 111 dudit code dès lors qu'elle ne s'est pas appuyée sur ce texte pour opérer les redressements litigieux, ont pu présenter utilement leurs observations auxquelles l'administration a répondu par une lettre du 16 juillet 2015 ; qu'au surplus, l'administration soutient sans être contredite qu'une copie de la proposition de rectification du
13 juin 2014 a été notifiée régulièrement à Mme A...le 21 juillet 2014 comme en atteste l'accusé de réception du 23 juillet produite par l'administration ; que, par suite, il résulte de ce qui précède, que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article
L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté comme manquant en fait ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; que s'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure de redressement mise en oeuvre, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis dans l'exercice de son droit de communication afin que l'intéressé soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition, elle n'est tenue à cette obligation d'information et de communication qu'en ce qui concerne ceux des renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements ;
5. Considérant que dans la proposition de rectification du 13 mai 2015 concernant l'année 2012, le vérificateur indique que, pour estimer que M. A... était le bénéficiaire des sommes engagées par la société Auber Global pour le paiement partiel d'un véhicule de marque Porsche, il s'est fondé sur les factures établies au nom de ce dernier par le fournisseur du véhicule auprès duquel un droit de communication a été exercé ; qu'il précise également que la perquisition effectuée au domicile de M. A... par les services de police avait permis de constater la présence dudit véhicule ; que les requérants ne sauraient dès lors sérieusement prétendre que l'administration ne les aurait pas informés de l'origine et de la teneur des éléments obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée ; que s'ils ont ce faisant entendu se prévaloir de la méconnaissance des dispositions susénoncées, leur moyen ne peut qu'être écarté comme non fondé ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : 1°) tous les bénéficies ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) " ; " ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. (...) " ;
7. Considérant, d'une part, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'administration n'apporte pas la preuve du caractère fictif de l'emploi prétendument occupé par M A... au sein de la SARL " Auber Global " et de " l'absence de lien de subordination ", alors que le ministre verse au dossier le procès verbal d'audition de l'intéressé, établi par un officier de police judiciaire le 12 juin 2013, d'où il ressort que M.A..., qui exerçait précédemment la profession de professeur de musique, a expressément admis qu'il n'avait pas exercé les " professions " de commercial ou de gérant au sein des cabinets Auber global, mentionnées sur les fiches de paye établies à son nom, mais que son épouse avait fait établir ces fiches de paye afin qu'il puisse " gagner des points de retraite grâce aux cotisations " ;
8. Considérant, d'autre part. que la proposition de rectification du 13 juin 2014 adressée à la société, qui a été versée au dossier, indique qu'il ressort des procès-verbaux d'audition que le gérant statutaire n'avait aucune fonction, que Mme A...et le cogérant de fait avaient imité la signature de la personne ayant mandat pour signer les chèques, qu'elle avait fait bénéficier son époux d'une rémunération pour un emploi fictif et qu'elle s'était attribuée la moitié de la somme mensuelle de 5 000 euros encaissée en espèces par la société ; que M. et MmeC..., qui ne contestent pas sérieusement le faisceau d'éléments circonstanciés et concordants relevés par l'administration ne sont pas fondés à soutenir que celle-ci n'aurait pas démontré que Mme C...disposait de la maîtrise de l'affaire lui ayant permis d'appréhender les sommes en cause, désinvesties de l'entreprise ;
Sur les pénalités :
9. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ;
10. Considérant que, pour établir le manquement délibéré, l'administration fait valoir que Mme A...ne pouvait ignorer que les sommes versées à son époux, dans le cadre d'un emploi fictif, et la prise en charge par la société Auber global de l'achat au profit son époux d'un véhicule personnel ne constituaient pas des dépenses engagées dans l'intérêt de l'entreprise ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que Mme A...exerçait, au sein de la société Auber global dont l'activité consistait en la tenue de comptabilité et l'aide aux formalités juridiques des entreprises, des fonctions dans les domaines comptable, administratif et juridique, et qu'elle partageait la co-gestion de fait de l'entreprise avec un autre salarié ; que, par suite, l'administration doit être regardée comme établissant l'intention délibérée des requérants d'éluder l'impôt ; qu'il suit de là qu'elle était fondée à assortir les impositions rappelées de la majoration de 40% prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; que les conclusions aux fins d'annulation du jugement et de décharge présentées par eux devant la Cour doivent être rejetées ; qu'il en va de même, en conséquence, de celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'ayant pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante :
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.
Délibéré après l'audience du 11 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- Mme Jimenez, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 mai 2018
Le rapporteur,
S. APPECHELe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 17PA02407