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04/05/2018 | FRANCE | N°17PA01548

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 04 mai 2018, 17PA01548


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Le toit parisien a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 16 mars 2016 par laquelle le maire de Paris lui a refusé la délivrance d'une attestation de permis de construire tacite et a précisé que sa demande de permis de construire n° 075 111 14 V 00 40 avait fait l'objet d'un refus tacite de permis de construire le 26 septembre 2015.

Par un jugement n° 1607464 du 9 mars 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête enregistrée le 8 mai 2017, la société Le toit parisien, repré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Le toit parisien a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 16 mars 2016 par laquelle le maire de Paris lui a refusé la délivrance d'une attestation de permis de construire tacite et a précisé que sa demande de permis de construire n° 075 111 14 V 00 40 avait fait l'objet d'un refus tacite de permis de construire le 26 septembre 2015.

Par un jugement n° 1607464 du 9 mars 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 mai 2017, la société Le toit parisien, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1607464 du 9 mars 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, à titre principal, le refus de permis de construire qui lui a été opposé le 16 mars 2016, ou, à titre subsidiaire, le refus implicite de rejet de sa demande de permis de construire ;

3°) de constater qu'elle bénéficie d'un permis de construire tacite depuis le 19 août 2015 ;

4°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré de ce que la lettre du 16 mars 2016 doit être regardée comme faisant grief, dès lors qu'elle mentionne elle-même qu'elle peut être contestée devant le juge administratif ;

- le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré de ce qu'en cas d'avis favorable sans réserve de l'architecte des bâtiments de France, un refus de permis de construire ne peut être opposé que de façon expresse, en application des articles R. 423-2 et R. 423-3 du code de l'urbanisme ;

- la lettre, recommandée avec accusé de réception, du 16 mars 2016 par laquelle le maire de Paris lui a indiqué que sa demande de permis de construire a fait l'objet d'un refus de permis de construire tacite constitue une décision faisant grief, dès lors qu'elle constitue la seule notification dont elle a été destinataire et qu'elle mentionne qu'elle peut être contestée devant le juge administratif ;

- la lettre du 16 mars 2016 ne mentionne pas la qualité de son auteur en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;

- le refus de permis de construire est illégal, dès lors qu'elle n'a pas été avisée d'une prolongation du délai d'instruction de sa demande et que l'avis de l'architecte des bâtiments de France, s'il était défavorable, ne lui a pas été communiqué ;

- le refus tacite de permis de construire qui lui a été opposé est illégal, dès lors qu'en cas d'avis favorable sans réserve de l'architecte des bâtiments de France, un refus de permis de construire ne peut être opposé que de façon expresse en application des articles R. 423-2 et R. 423-3 du code de l'urbanisme ;

- le refus tacite de permis de construire a méconnu les dispositions de l'article R. 424-3 du code de l'urbanisme ; seul un avis défavorable de l'architecte des bâtiments de France ou un avis favorable avec réserves peut entraîner un refus tacite ;

- le refus tacite de permis de construire a méconnu les dispositions des articles

R. 423-35 et R. 423-37 du code de l'urbanisme ;

- le refus tacite de permis de construire est illégal, dès lors qu'il n'est pas motivé et ne comporte aucun visa, notamment celui de l'avis de l'architecte des bâtiments de France ;

- la demande de pièces complémentaires après le délai d'un mois prévu par le code de l'urbanisme était illégale et n'a pu prolonger les délais d'instruction de sa demande de permis de construire ;

- dès lors que l'architecte des bâtiments de France a émis un avis favorable, elle doit être regardée comme ayant bénéficié d'un permis de construire tacite à compter du 19 août 2015 ;

- le maire de Paris a entaché sa décision d'illégalité, en ne retenant pour justifier son refus que la circonstance que le projet est situé en site inscrit.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 février 2018, la ville de Paris, représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les conclusions à fin d'annulation du courrier du 16 mars 2016 sont irrecevables, dès lors que ce dernier ne constitue pas une décision faisant grief ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, désormais codifié à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, est inopérant ;

- les moyens tirés de la violation des articles R. 423-35 et R. 423-37 du code de l'urbanisme sont inopérants ;

- les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nguyên Duy,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- et les observations de Me Falala, avocat de la ville de Paris.

1. Considérant que, le 4 novembre 2014, la société Le toit parisien a déposé une demande de permis de construire portant sur la démolition de deux bâtiments sur cour, la surélévation d'un bâtiment sur rue et la construction en fond de parcelle d'un bâtiment de trois étages sur deux niveaux de sous-sol, sur une parcelle située au 40-42 rue de la Folie Méricourt dans le 11ème arrondissement de Paris ; que, par courrier du 25 novembre 2014, la ville de Paris a demandé au pétitionnaire de produire des pièces supplémentaires afin de compléter son dossier ; qu'estimant que le dossier était toujours incomplet malgré l'envoi effectué par le pétitionnaire le 19 février 2015, la ville de Paris lui a adressé, le 6 mars 2015, une seconde demande de pièces, à la suite de laquelle de nouvelles pièces ont été déposées le 26 mars suivant ; que des pièces complémentaires ont encore été produites les 4 mai, 12 mai et 25 septembre 2015, en réponse notamment à une demande de la préfecture de police ; que, par courrier du 21 janvier 2016, la société Le toit parisien a sollicité la délivrance d'une attestation de délivrance d'un permis de construire tacite ; que, par lettre du 16 mars 2016, le sous-directeur chargé du permis de construire et du paysage de la rue à la direction de l'urbanisme de la ville de Paris l'a informée que sa demande de permis de construire avait fait l'objet, le 26 septembre 2015, d'une décision implicite de rejet et non d'un permis tacite ; que la société Le toit parisien a contesté la décision du 16 mars 2016 devant le tribunal administratif de Paris, lequel a rejeté sa demande par un jugement du 9 mars 2017 dont elle relève régulièrement appel ;

Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre la décision du 16 mars 2016 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme alors applicable : " En cas de permis tacite ou de non-opposition à un projet ayant fait l'objet d'une déclaration, l'autorité compétente en délivre certificat sur simple demande du demandeur, du déclarant ou de ses ayants-droit (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Le toit parisien, estimant être titulaire d'un permis de construire tacite, a demandé au maire de Paris de lui en délivrer certificat ; que par le courrier litigieux du 16 mars 2016, notifié par pli recommandé avec accusé de réception et mentionnant les voies et délais de recours, le sous-directeur chargé du permis de construire et du paysage de la rue à la direction de l'urbanisme de la ville de Paris a rejeté cette demande au motif que la demande de permis de construire avait fait l'objet, le 26 septembre 2015, d'une décision implicite de rejet et non d'un permis de construire tacite ; que cette décision, qui refuse de délivrer le certificat de permis tacite prévu par l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme, fait grief et peut, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que la société requérante est fondée à demander l'annulation pour irrégularité du jugement attaqué, en tant qu'il rejette comme irrecevables ses conclusions dirigées contre la décision du 16 mars 2016 ;

4. Considérant qu'il y a lieu pour la cour de statuer par la voie de l'évocation sur les conclusions dirigées contre la décision du 16 mars 2016 et par la voie de l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions de la requête ;

Sur l'existence d'un permis de construire tacite :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 424-2 du code de l'urbanisme : " Le permis est tacitement accordé si aucune décision n'est notifiée au demandeur à l'issue du délai d'instruction. Un décret en Conseil d'Etat précise les cas dans lesquels un permis tacite ne peut être acquis " ; qu'aux termes de l'article R. 423-28 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le délai d'instruction (...) est (...) porté à six mois : / (...) b) Lorsqu'un permis de construire ou d'aménager porte sur un projet situé dans le périmètre de protection des immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques (...) ; c) Lorsqu'un permis de construire porte sur des travaux relatifs à un établissement recevant du public " ; qu'aux termes de l'article R. 423-19 du même code : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet " ; qu'aux termes de l'article R. 423-22 du même code : " (...) le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41 " ; qu'aux termes de l'article R. 423-38 du même code : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...) indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes " ; qu'aux termes de l'article R. 423-39 du code de l'urbanisme : " L'envoi prévu à l'article R. 423-38 précise : a) Que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ; b) Qu'à défaut de production de l'ensemble des pièces manquantes dans ce délai, la demande fera l'objet d'une décision tacite de rejet en cas de demande de permis ou d'une décision tacite d'opposition en cas de déclaration ; c) Que le délai d'instruction commencera à courir à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie " ; qu'aux termes de l'article R. 423-41 de ce code : " Une demande de production de pièce manquante notifiée après la fin du délai d'un mois prévu à l'article R. 423-38 n'a pas pour effet de modifier les délais d'instruction définis aux articles R. 423-23 à R. 423-37-1 et notifiés dans les conditions prévues par les articles R. 423-42 à R. 423-49 " ;

6. Considérant qu'il est constant que, par courrier du 25 novembre 2014, la ville de Paris a demandé à la société Le toit parisien de produire des pièces supplémentaires afin de compléter son dossier déposé le 4 novembre 2014 ; qu'estimant que le dossier était toujours incomplet malgré la réception de pièces le 19 février 2015, la ville de Paris a adressé au pétitionnaire, le 6 mars 2015, une seconde demande de pièces, à la suite de laquelle de nouvelles pièces ont été déposées le 26 mars suivant ; qu'il ressort des pièces du dossier que cette seconde demande portait notamment sur des plans de masse, de coupe et de façade qui sont au nombre des pièces requises par le code de l'urbanisme ; qu'il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient la société Le toit parisien, son dossier de demande de permis de construire doit être regardé comme ayant été complété, non le 19 février 2015, mais le 26 mars 2015 ainsi que l'indique elle-même la ville de Paris, les pièces produites postérieurement à cette date n'ayant eu pour objet que de remédier à quelques imprécisions du dossier de demande ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction (...), le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : (...) / b) Permis de construire, permis d'aménager ou permis de démolir tacite " ; qu'aux termes de l'article R. 424-2 du même code : " Par exception au b de l'article R. 424-1, le défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction vaut décision implicite de rejet dans les cas suivants : (...) / i) Lorsque le projet porte sur une démolition soumise à permis en site inscrit " ; qu'aux termes de l'article R. 424-3 du même code : " Par exception au b de l'article R. 424-1, le défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction vaut décision implicite de rejet lorsque la décision est soumise à l'accord de l'architecte des bâtiments de France et que celui-ci a notifié, dans les délais (...) un avis défavorable ou un avis favorable assorti de prescriptions " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 451-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque la démolition est nécessaire à une opération de construction ou d'aménagement, la demande de permis de construire (...) peut porter à la fois sur la démolition et sur la construction (...). Dans ce cas, le permis de construire (...) autorise la démolition " ;

8. Considérant que le projet de permis de construire litigieux, s'il comportait des démolitions en site inscrit nécessitant l'accord de l'architecte des bâtiments de France, n'est pas un projet " portant sur une démolition " au sens du i) de l'article R. 424-2 du code de l'urbanisme, qui vise les demandes de permis ou les déclarations préalables portant uniquement sur des travaux de démolition ; que, contrairement à ce que soutient la ville de Paris, une décision implicite d'acceptation était donc susceptible de naître sur ce projet de construction, dans les conditions prévues par les articles R. 424-1 et R. 424-3 du même code ; qu'il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que le projet envisagé a fait l'objet, le 24 mars 2015, d'un avis favorable sans réserve de l'architecte des Bâtiments de France, qui a notamment donné son accord exprès aux démolitions en site inscrit ; que la ville de Paris n'invoque aucune autre circonstance ayant pu faire obstacle à la naissance d'un permis de construire tacite à l'expiration du délai d'instruction ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Le toit parisien doit être regardée comme s'étant vu délivrer, le 26 septembre 2015, un permis de construire tacite ; qu'elle est fondée à soutenir que c'est illégalement que le maire de Paris a refusé, le 16 mars 2016, de lui en délivrer certificat ; que, pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen de la requête ne paraît, en l'état de l'instruction, susceptible de fonder l'annulation de cette décision ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué, que la société Le toit parisien est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les frais liés au litige :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Le toit parisien, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la ville de Paris demande au titre des frais exposés pour sa défense ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société le Toit parisien en première instance et en appel ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris n° 1607464 du 9 mars 2017 est annulé.

Article 2 : La décision du 16 mars 2016 par laquelle le maire de Paris a refusé à la société Le toit parisien la délivrance d'un certificat de permis de construire tacite est annulée.

Article 3 : La ville de Paris versera à la société Le toit parisien la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Le toit parisien et à la ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 12 avril 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 mai 2018.

Le rapporteur,

P. NGUYÊN DUY La présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 17PA01548


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01548
Date de la décision : 04/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-02-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Procédure d'attribution. Formes de la décision.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Pearl NGUYÊN-DUY
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : L. MOREL-RAGER

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-05-04;17pa01548 ?
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