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24/04/2018 | FRANCE | N°16PA03517

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 24 avril 2018, 16PA03517


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 24 février 2016 par lequel elle a été placée en congé de longue maladie pour une période de six mois du 18 février 2016 au 17 août 2016 et d'enjoindre au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social de la réintégrer dans les services.

Par un jugement n° 1606402 du 29 septembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour

:

Par une requête et un mémoire enregistrés les 29 novembre 2016 et 4 octobre 2017, MmeB...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 24 février 2016 par lequel elle a été placée en congé de longue maladie pour une période de six mois du 18 février 2016 au 17 août 2016 et d'enjoindre au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social de la réintégrer dans les services.

Par un jugement n° 1606402 du 29 septembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 29 novembre 2016 et 4 octobre 2017, MmeB..., représentée par Me F...puis par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 septembre 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 février 2016 par lequel Mme B...a été placée d'office en congé de longue maladie pour une période de six mois du 18 février 2016 au 17 août 2016 ;

3°) d'enjoindre au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social de la réintégrer dans les services ;

4°) A titre subsidiaire d'ordonner une expertise aux fins de décrire son état psychique ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme portée en dernier lieu à 3 000 euros à verser à Mme B...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité en ce qu'il n'a pas répondu à son moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué ;

- le tribunal aurait du soulever d'office l'incompétence de l'auteur de la décision litigieuse dès lors qu'elle n'aurait pu être signée que par le ministre et que son signataire ne justifie pas d'une délégation régulière à cette fin ;

- la décision contestée est entachée d'insuffisance de motivation ;

- elle est entachée de vices de procédures et méconnait le principe du contradictoire dans la mesure où Mme B...n'a pas été mise à même de consulter l'intégralité de son dossier et de présenter des observations et n'a pu par ailleurs vérifier que le comité médical était régulièrement composé ;

- le comité médical était irrégulièrement composé ;

- le tribunal n'a pu sans erreur de droit écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant l'arrêté attaqué alors qu'elle produit divers certificats médicaux et témoignages attestant qu'elle ne présente pas de pathologie justifiant la mise en congé longue maladie d'office contestée ; la décision attaquée est ainsi entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de fait ;

- elle est entachée d'erreur de droit, l'administration, qui s'est exclusivement fondée sur l'avis du comité médical, s'étant à tort cru liée par celui-ci ;

- elle est entachée de détournement de pouvoir ;

- à titre subsidiaire il appartient le cas échéant à la Cour d'ordonner une expertise permettant de l'éclairer sur l'état de santé de la requérante.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 février 2018, le ministre du travail conclut au rejet de cette requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 19 février 2018, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 8 mars 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

1. Considérant que MadameB..., adjoint administratif de 1ère classe auprès du ministre du travail, sans affectation depuis le 23 avril 1999, a été reçue le 4 mai 2015 par la mission des parcours professionnels de la direction des ressources humaines du secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales ; qu'à la suite de cet entretien elle a été convoquée pour une consultation par le médecin du service qui l'a reçue le 7 septembre 2015 et a conclu à une inaptitude temporaire de l'intéressée et à la nécessité de saisir le comité médical ; que celui-ci a été saisi du cas de Mme B...en octobre 2015 et, à l'issue de sa séance du 17 février 2016, a émis un avis favorable à sa mise en congé de longue maladie d'office pour une période de six mois, du 18 février au 17 août 2016 ; que cette mesure a été prise par arrêté du 24 février 2016 dont Mme B... a demandé l'annulation auprès du Tribunal administratif de Paris ; que celui-ci a rejeté sa demande par jugement du 29 septembre 2016 dont la requérante interjette appel ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que si dans ses écritures en date des 6 mai 2016 et 12 mai 2016 la requérante a indiqué avoir écrit le 14 mars 2016 au président du comité médical ministériel pour demander à connaitre le motif de son placement en congé longue maladie d'office, et si elle produit cette lettre, elle ne peut pour autant, alors surtout que cette autorité n'est pas l'auteur de la décision attaquée, être regardée comme ayant entendu invoquer devant le tribunal le défaut de motivation de la décision contestée ; qu'elle n'est par suite, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que les premiers juges auraient entaché leur jugement d'irrégularité en ne répondant pas à un tel moyen ;

3. Considérant qu'il est constant que Mme B...n'a pas, devant le tribunal, soulevé de moyen relatif à la compétence du signataire de l'arrêté attaqué ; que cette incompétence alléguée en appel ne ressortait pas des pièces du dossier de première instance, rien ne permettant de mettre en doute que le signataire de la décision attaquée soit titulaire d'une délégation régulièrement consentie par le ministre ; que la requérante n'est par suite pas fondée à soutenir que les premiers juges se seraient à tort abstenus de soulever d'office le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente ;

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la requérante n'a pas soulevé devant les premiers juges le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée ; qu'il est constant qu'elle n'avait soulevé aucun autre moyen mettant en cause la légalité externe de cette décision ; que le moyen, soulevé pour la première fois devant la Cour, tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée, relève ainsi d'une cause juridique nouvelle en appel et n'étant pas par ailleurs d'ordre public, est dès lors irrecevable et ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant de même que les moyens tirés de la méconnaissance du principe du contradictoire d'une part, et de la composition irrégulière du comité médical d'autre part, relèvent également d'une cause juridique nouvelle en appel, et ne sont pas d'ordre public ; qu'ils sont dès lors irrecevables et ne peuvent qu'être écartés ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1 du décret susvisé du 27 juillet 2005 : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : /1° Les secrétaires généraux des ministères, les directeurs d'administration centrale, les chefs des services à compétence nationale mentionnés au premier alinéa de l'article 2 du décret du 9 mai 1997 susvisé et les chefs des services que le décret d'organisation du ministère rattache directement au ministre ou au secrétaire d'Etat ; /2° Les chefs de service, directeurs adjoints, sous-directeurs, les chefs des services à compétence nationale mentionnés au deuxième alinéa de l'article 2 du décret du 9 mai 1997 susvisé ainsi que les hauts fonctionnaires et les hauts fonctionnaires adjoints mentionnés aux articles R. 1143-1 et R. 1143-2 du code de la défense (...) " ; qu'en application de ces dispositions le directeur des ressources humaines avait reçu délégation régulière de signature à l'effet de signer l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous son autorité ; que par arrêté du 4 février 2016 régulièrement publié au journal officiel du 6 février suivant, il a lui-même consenti une délégation de signature à M.D..., attaché d'administration au sein du bureau des personnels administratifs et techniques de catégorie B et C, signataire de la décision attaquée, " à l'effet de signer, au nom des ministres chargés des affaires sociales, de la santé, des droits des femmes, du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle, du dialogue social, de la ville, de la jeunesse et des sports, tous les actes relatifs aux affaires relevant de (ses) attributions à l'exception des décrets " ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée manque dès lors en fait et ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant que si l'autorité administrative a visé dans la décision attaquée, l'avis du comité médical, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle se serait cru liée par cet avis, alors surtout que la procédure de placement en congé longue maladie a été diligentée à son initiative, à la suite du rapport de la conseillère mobilité carrière ayant reçu la requérante le 4 mai 2015 et de l'avis du médecin de prévention l'ayant reçue le 7 septembre 2015 ; que le moyen tiré de l'erreur de droit résultant de ce que l'administration se serait, à tort, cru liée par cet avis doit dès lors être écarté ;

8. Considérant que si Mme B...soutient que la décision litigieuse serait entachée d'erreur matérielle et d'erreur manifeste d'appréciation et si elle produit à cette fin plusieurs certificats médicaux faisant état de ce qu'elle ne souffrirait d'aucune pathologie psychiatrique, ces certificats émanent tous de son médecin généraliste, sans qu'elle produise aucun document émanant d'autres praticiens, notamment d'un psychiatre, corroborant cette indication ; que les certificats médicaux produits ne suffisent pas à remettre en cause les conclusions concordantes d'une part du DrC..., médecin de prévention qui à l'issue de son rendez-vous avec l'intéressée du 7 septembre 2015, a estimé qu'elle n'était pas apte à reprendre son travail et préconisé la saisine du comité médical pour la placer en congé maladie d'office, d'autre part du rapport du 1er février 2016 du Docteur Frebault, psychiatre préconisant un placement en congé longue maladie pour une durée de six mois, et enfin de l'avis des membres du comité médical qui se sont prononcés en faveur de cette mesure ; que si elle produit également quelques attestations de proches et des justificatifs d'adhésion à diverses associations de protection des animaux, destinés à établir qu'elle aurait une vie sociale normale, de tels documents ne suffisent pas davantage à remettre en cause les conclusions médicales susrappelées quant à l'existence d'une pathologie justifiant le placement en congé longue maladie ; que le moyen tiré tant de l'erreur matérielle que de l'erreur manifeste d'appréciation doit dès lors être écarté ;

9. Considérant que si Mme B...soutient enfin que la décision attaquée serait entachée d'un détournement de pouvoir, la réalité d'un tel détournement ne ressort pas des pièces versées au dossier, alors surtout que cette décision, comme il vient d'être dit, est conforme à tous les avis médicaux recueillis dans le cadre de la procédure ayant conduit à son édiction ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 24 février 2016 par lequel elle a été placée en congé de longue maladie pour une période de six mois du 18 février 2016 au 17 août 2016 ; que sa requête doit dès lors être rejetée y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...B...et au ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 avril 2018.

Le rapporteur,

M-I. LABETOULLELe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA03517


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03517
Date de la décision : 24/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-02 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Congés de longue maladie.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : LECLERC DE HAUTECLOCQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-04-24;16pa03517 ?
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