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10/04/2018 | FRANCE | N°17PA00135

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 10 avril 2018, 17PA00135


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler, d'une part, la décision du 28 mai 2015, confirmée le 29 mai, ensemble la décision de rejet implicite résultant du silence gardé sur son recours gracieux en date du 11 juin 2015, par lesquelles la direction du service du transport des patients des hôpitaux universitaires Paris Centre l'a déchargé de sa responsabilité au sein de ce service à compter du 1er juin 2015, d'autre part, la décision implicite par laquelle le directeur des hôpita

ux universitaires de Paris Centre a refusé de lui octroyer le bénéfice de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler, d'une part, la décision du 28 mai 2015, confirmée le 29 mai, ensemble la décision de rejet implicite résultant du silence gardé sur son recours gracieux en date du 11 juin 2015, par lesquelles la direction du service du transport des patients des hôpitaux universitaires Paris Centre l'a déchargé de sa responsabilité au sein de ce service à compter du 1er juin 2015, d'autre part, la décision implicite par laquelle le directeur des hôpitaux universitaires de Paris Centre a refusé de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle, outre des conclusions à fin d'injonction et des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1513133/2-2 du 7 novembre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour:

Par une requête, enregistrée le 10 janvier 2017, M.A..., représenté par MeF..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 novembre 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions susvisées ;

3°) d'enjoindre aux hôpitaux universitaires de Paris Centre de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge des hôpitaux universitaires de Paris Centre une somme de 3.500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier faute de comporter les signatures des magistrats et du greffier ;

- c'est à tort que les premiers juges ont fait droit à la fin de non-recevoir de l'AP-HP dans la mesure où le changement d'affectation litigieux ne constitue pas une mesure d'ordre intérieur mais une mutation ainsi qu'une sanction déguisée ;

- les décisions verbales attaquées sont entachées d'incompétence ;

- elles sont entachées de défaut de motivation ;

- elles sont entachées de vices de procédure, d'une part, faute d'avoir été prises en respectant la règle de communication du dossier prévue par l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, d'autre part, faute de consultation de la commission administrative paritaire ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision de refus d'octroi de la protection fonctionnelle est illégale dans la mesure où il a fait l'objet d'un harcèlement moral, prohibé par l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2018, l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 1 440 euros soit mise à la charge de M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 6 mars 2018, la clôture d'instruction a été reportée au 20 mars 2018 à 12 heures.

Un mémoire a été déposé pour M. A...le 23 mars 2018 postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- les observations de Me E...pour M.A...,

- et les observations de Me B...pour l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris.

1. Considérant que M.A..., cadre supérieur kinésithérapeute du Groupe Hospitalier des Hôpitaux Universitaires de Paris Centre, rattaché à l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision verbale en date du 28 mai 2015 de la Coordinatrice générale des soins, confirmée par la décision verbale du 29 mai 2015 de la directrice des soins, de mettre fin à ses fonctions au sein de la direction du service du transport des patients et de l'affecter à temps plein dans les fonctions d'encadrant des kinésithérapeutes du pôle gériatrie au sein de l'hôpital Broca, fonction exercée jusqu'alors à mi-temps, d'autre part, de la décision implicite lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle, outre des conclusions à fin d'injonction ; que M. A...relève appel du jugement du 7 novembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que la minute du jugement attaqué comporte la signature du président-rapporteur, de l'assesseur le plus ancien et du greffier ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué manque en fait et ne peut donc qu'être écarté ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la fin de non recevoir accueillie par le Tribunal administratif de Paris à l'encontre des décisions verbales des 28 et 29 mai 2015 :

3. Considérant que les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours ; qu'il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent perte de responsabilités ou de rémunération ; que le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination, est irrecevable ;

4. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 1, M.A..., cadre supérieur kinésithérapeute au sein du groupe hospitalier des hôpitaux universitaires de Paris centre, rattaché à l'AP-HP, a été affecté par la décision contestée du 28 mai 2015, confirmée le 29 mai 2015, à temps plein, alors qu'il exerçait déjà cette fonction à mi-temps, en tant qu'encadrant des kinésithérapeutes du pôle gériatrie au sein de l'hôpital Broca ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que cette mesure a été prise dans l'intérêt du service, en vue de mettre fin à des difficultés relationnelles entre M. A...et plusieurs de ses collègues ; que ce changement d'affectation n'a entraîné pour M. A...ni diminution de ses responsabilités ni perte de rémunération ; qu'il est intervenu au sein du même groupe hospitalier et sans que soit porté atteinte aux droits statutaires ou aux droits et libertés fondamentaux du requérant ; qu'il ne ressort nullement des pièces du dossier que cette mesure révélerait une discrimination à l'égard de M. A...ou l'existence d'une sanction disciplinaire déguisée ; que, par suite, et alors même que ce changement d'affectation a été décidé pour des motifs tenant au comportement de M.A..., à savoir des difficultés relationnelles avec plusieurs de ses collègues, il présente le caractère d'une mesure d'ordre intérieur, qui ne fait pas grief et n'est donc pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a accueilli la fin de non recevoir opposée par l'AP-HP ;

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'annulation du refus d'octroi de la protection fonctionnelle :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire./(...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. " ; que ces dispositions établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général ; que cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, mais aussi d'assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu'il a subis ; que la mise en oeuvre de cette obligation peut notamment conduire l'administration à assister son agent dans l'exercice des poursuites judiciaires qu'il entreprendrait pour se défendre ; qu'il appartient dans chaque cas à l'autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce ;

7. Considérant qu'il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

8. Considérant que, M. A...soutient qu'en moins de 72 heures et hors de tout cadre légal, il a été muté d'office, et a reçu l'ordre de débarrasser l'ensemble de ses affaires de son bureau et a été mis à l'écart de son propre service sans avoir pu en informer directement ses subordonnées ;

9. Considérant, toutefois, que contrairement à ce que soutient M.A..., son changement d'affectation dans l'intérêt du service et la manière dont selon lui, il s'est déroulé, ne suffisent pas à laisser présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral dont il prétend avoir été victime ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le directeur des hôpitaux universitaires de Paris Centre a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle prévue par l'article 11 précité de la loi du 13 juillet 1983 ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et à l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2018 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 avril 2018.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA00135


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00135
Date de la décision : 10/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SCP MAUGENDRE MINIER AZRIA LACROIX SCHWAB

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-04-10;17pa00135 ?
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