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24/10/2017 | FRANCE | N°15PA01430

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 24 octobre 2017, 15PA01430


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... C..., Mme A...D..., et Mlle F...D..., ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler le permis de travaux immobiliers du

26 décembre 2013 délivré par le ministre chargé de l'urbanisme de la Polynésie française à

M. J...G...pour le compte de la société Matavai.

Par un jugement n° 1400217 du 2 décembre 2014, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête

enregistrée le 3 avril 2015, et un mémoire enregistré le 23 mai 2017,

M. H...C..., Mme A...D..., et Mlle F......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... C..., Mme A...D..., et Mlle F...D..., ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler le permis de travaux immobiliers du

26 décembre 2013 délivré par le ministre chargé de l'urbanisme de la Polynésie française à

M. J...G...pour le compte de la société Matavai.

Par un jugement n° 1400217 du 2 décembre 2014, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 avril 2015, et un mémoire enregistré le 23 mai 2017,

M. H...C..., Mme A...D..., et Mlle F...D..., représentés par la SELARL Froment-Meurice et Associés, avocats, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 2 décembre 2014 ;

2°) d'annuler le permis de travaux immobiliers délivré le 26 décembre 2013 à

M. J...G...pour la construction d'un centre commercial " Papeete Village " à

Tipaerui ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils justifient d'un intérêt à agir, la propriété de Mme et de Mlle D...jouxtant le terrain d'assiette du projet sur lequel elles ont des vues directes ;

- le ministre, qui s'est cru lié par les motifs d'un précédent jugement du tribunal administratif du 24 septembre 2013, en accordant le permis sans examen du dossier, a entaché sa décision d'incompétence négative ;

- l'annulation pour défaut de motivation du refus de permis de travaux immobiliers par le jugement du 24 septembre 2013 n'impliquait pas la délivrance du permis ;

- l'entrée en vigueur le 13 août 2012 de la " loi du Pays " modifiant le code de l'aménagement et notamment de ses articles LP 100-4 et LP 100-5 impliquait une nouvelle instruction de la demande ;

- l'entrée en vigueur de ces deux dispositions n'était pas subordonnée à l'intervention d'un règlement ;

- le projet ne répondait à aucun besoin commercial ;

- il ne favorise pas la cohésion sociale comme en font preuve les protestations des riverains ;

- le terrain d'assiette du projet fait l'objet de revendications territoriales de Polynésiens spoliés de leurs terres ;

- le service de l'urbanisme et le maire n'ont pas été consultés ;

- l'augmentation du trafic, sous-évaluée, provoquera des encombrements ;

- la simple adaptation du phasage des feux tricolores et les mesures destinées à fluidifier le trafic sont insuffisantes ;

- la réalisation des travaux d'infrastructure envisagée n'est pas certaine ;

- la délivrance du permis impose la réalisation par la collectivité de travaux hors de proportion avec les conditions normales de développement en méconnaissance de l'article

A 114-27 du code de l'aménagement ;

- l'accroissement des embouteillages va accroître la pollution et porte atteinte à la santé publique ;

- l'inadaptation des accès rend la circulation dangereuse ;

- l'accès des véhicules lourds (camions incendie et évacuation des déchets) n'est pas garanti ;

- la compatibilité du centre commercial avec l'habitat environnant n'est pas assurée en méconnaissance du règlement de la zone UB-b ;

- le tribunal n'a pas suffisamment motivé le rejet de ce moyen ;

- le jugement est entaché de contradiction ;

- le recul minimal de 6 mètres n'est pas justifié ;

- la hauteur de l'immeuble, non annoncée, excède les 16,50 mètres autorisés par l'article UB-B 10-1 du PGA ;

- la façade vitrée provoquera des réverbérations excessives en méconnaissance de l'article UB-b11-1 ;

- l'absence de plan au 1/100eme a privé l'administration de la possibilité de se prononcer utilement sur la demande ;

- les autorisations du propriétaire de la voie riveraine n'étaient pas jointes au dossier.

Par un mémoire enregistré le 12 juin 2015, la société Matavai, représentée par Me K...conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir ;

- les moyens ne sont pas fondés ;

Par un mémoire enregistré le 17 aout 2015, la Polynésie française représentée par MeI..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- Mlle D...qui fait état sans l'établir de sa qualité de propriétaire d'un commerce n'a pas qualité à agir de ce chef et la qualité de voisin des requérants n'est pas justifiée ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

- la loi du Pays n° 2012-17 du 13 août 2012 ;

- le code de l'aménagement de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative.

Vu le jugement du tribunal administratif de la Polynésie française n° 1300149 du

24 septembre 2013.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bernier ;

- les conclusions de, Mme Delamarre, rapporteur public,

- les observations de MeE..., représentant M. C...et autres.

1. Considérant que la société Matavai a déposé le 30 décembre 2010 une demande de permis de travaux immobiliers pour la construction d'un centre commercial sur les parcelles cadastrées CZ n° 6 et 36 à Papeete, qui a été rejetée par une décision du 2 juillet 2012 ; que, par un jugement n° 1300149 du 24 septembre 2013 devenu définitif, le tribunal administratif de Polynésie française a annulé B...décision et enjoint à la Polynésie française de se prononcer à nouveau sur la demande de la société Matavai ; que, par une décision du 26 décembre 2013, le ministre de l'équipement, de l'urbanisme et des transports terrestres et maritimes a accordé le permis de travaux sollicité ; que M. H... C..., Mme A...D..., et Mlle F... D...relèvent appel du jugement n° 1400217 du 2 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté leur demande tendant à l'annulation de B...décision ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que le tribunal, au point 10 de son jugement, après avoir rappelé que la zone UB-b du plan général d'aménagement de la commune de Papeete était destinée à recevoir des habitations, des commerces et services et les installations destinées aux activités qui sont le complément naturel de l'habitat, et mentionné les caractères essentiels du projet de centre commercial a estimé que l'importance de ce projet n'était pas telle qu'il puisse être regardé comme incompatible avec l'usage d'habitat de la zone UB-b ; qu'il a, ce faisant, suffisamment motivé son jugement ;

3. Considérant que si les requérants font valoir que le jugement attaqué comporte une contradiction entre ses points 3 et 4 concernant la production de plans à l'échelle de 1/100ème, une éventuelle contradiction sur ce point n'affecterait pas la régularité du jugement mais seulement, le cas échéant, son bien-fondé ;

Sur le moyen tiré de l'incompétence négative du ministre de l'équipement, de l'urbanisme et des transports terrestres et maritimes :

4. Considérant qu'après l'intervention du jugement d'annulation du 24 septembre 2013, le ministre de l'équipement, de l'urbanisme et des transports terrestres et maritimes était toujours saisi de la demande déposée le 30 décembre 2010 par la société Matavai ; que la décision contestée du 26 décembre 2013 vise au demeurant B...première demande et le jugement du tribunal ; que le ministre devait y statuer sans procéder à une nouvelle instruction à moins que des circonstances de droit ou de fait n'y fassent obstacle ;

5. Considérant que, pour annuler le refus de délivrance de permis de travaux immobiliers qui avait été opposé le 2 juillet 2012 à la société Matavai, le tribunal ne s'est pas uniquement fondé, ainsi que le soutiennent les requérants, sur le motif tiré de l'insuffisance de la motivation ; qu'il a également censuré les motifs tirés de la méconnaissance des articles

A 114-27 et A 114-28 du code de l'aménagement de la Polynésie français, en considérant que l'accès au site des véhicules de lutte contre l'incendie était assuré, que l'augmentation du trafic routier n'occasionnerait pas une gêne excessive pour la circulation et que la réalisation du projet n'appelait pas la réalisation d'équipements supplémentaires ; que ce jugement d'annulation pour excès de pouvoir avait l'autorité absolue de la chose jugée ; que le fait que l'autorité administrative, qui ne pouvait opposer un nouveau refus fondé sur les motifs sanctionnés par le juge, a accordé le permis de travaux immobiliers, n'est pas, à lui seul, de nature à révéler qu'elle se serait estimée en situation de compétence liée ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article LP 100-4 du code de l'aménagement de la Polynésie française, issu de la " loi du Pays " n° 2012-17 du 13 août 2012 : " Le développement durable organise la satisfaction des besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Il vise à promouvoir une alternative au modèle de développement basé sur la seule croissance économique en lui associant les objectifs d'amélioration du niveau et de la qualité de la vie et de création d'une solidarité entre les générations et entre les peuples. A B...fin, le développement durable constitue un principe directeur pour l'application et les évolutions de toutes les dispositions du présent code " ; qu'aux termes de l'article LP 100-5 du même code, issu de la " loi du Pays " n° 2012-17 du 13 août 2012 : " I. Toute décision en matière d'aménagement et d'urbanisme doit préalablement être évaluée au regard des quatre critères cumulatifs suivants : / - économique : contribuer à favoriser la croissance, l'innovation et l'efficacité économiques ; / - social : satisfaire les besoins humains ; favoriser l'équité et la cohésion sociale ; / - écologique : concourir à préserver, valoriser et améliorer l'environnement, les écosystèmes et les ressources naturelles pour l'avenir ; respecter les principes généraux de précaution, d'action préventive et de correction, de pollueur payeur et d'intégration de l'environnement dans les politiques sectorielles ; / - patrimonial : veiller à la préservation, la connaissance et la transmission des biens matériels et immatériels aux générations futures. (...) " ;

7. Considérant que l'entrée en vigueur des dispositions précitées de LP 100-4 du code de l'aménagement de la Polynésie française qui se bornent à définir le contenu de la notion de développement durable ne présentait pas le caractère de circonstance de droit nouvelle imposant une nouvelle instruction au sens de la règle rappelée au point 4 ; que les dispositions précitées de l'article LP 105 ont pour objet de préciser les critères au regard desquels doivent être appréciées les décisions en matière d'aménagement et d'urbanisme ; que le dossier de demande de permis de construire déposé en 2010 qui comportait notamment une note de présentation du projet, une étude d'impact sur l'environnement et une étude de trafic permettait à l'administration d'évaluer la demande au regard des quatre critères cumulatifs énoncés par l'article LP 100-5 du code de l'aménagement ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la décision du 26 décembre 2013 aurait été prise sans que ces critères aient été pris en compte à la faveur du nouvel examen qui a suivi le jugement du 24 septembre 2013 ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'administration se serait crue tenue de délivrer le permis de travaux immobiliers sans procéder à un nouvel examen du dossier de demande doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article LP. 114-7 du code de l'aménagement :

9. Considérant qu'aux termes de l'article LP 114-7 du code de l'aménagement de la Polynésie française : " Les permis de travaux immobiliers (...) sont délivrés ou refusés par l'autorité compétente, sur avis du service de l'urbanisme qui recueille l'avis du maire et vérifie la conformité du dossier technique fourni par le pétitionnaire avec les règles d'aménagement et d'urbanisme " ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des avis exigés a été recueilli à l'occasion de l'instruction de la demande de permis de travaux présentée en 2010 ; que l'avis favorable, du service de l'urbanisme a été émis le 18 avril 2012 et précisé le 12 juin 2012, et celui, défavorable, du maire de Papeete a été émis le 25 mai 2012 ; que ce dernier avis a été renouvelé le 18 décembre 2013 dans le cadre du réexamen auquel a donné suite l'annulation du premier refus par le tribunal ; que la circonstance que la société Matavai ait cru nécessaire de déposer le 18 décembre 2013 une demande identique, en l'occurrence superfétatoire, à sa demande initiale n'impliquait pas que la procédure d'instruction soit reprise dans sa totalité ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article LP. 114-7 du code de l'aménagement manque en fait ;

Sur l'insuffisance du dossier de demande :

11. Considérant que le permis, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme ; que, dès lors, si l'administration et le juge administratif doivent s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à B...voie, il ne leur appartient de vérifier ni la validité de B...servitude, ni l'existence d'un titre permettant l'utilisation de la voie qu'elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique ;

12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le site est accessible depuis la route principale de Tipearui qui longe l'une des parcelles ; qu'il n'est pas soutenu que le terrain ne serait pas desservi par une voie ouverte à la circulation publique et qu'il serait de ce fait enclavé ; que la circonstance que le pétitionnaire n'ait pas produit les autorisations des propriétaires d'une voie riveraine (parcelle cadastrée n°45 section DH) pour permettre un accès et une sortie du centre commercial à partir de B...voie n'est pas de nature à justifier un refus d'autorisation ;

13. Considérant que la circonstance que le dossier de demande de permis de travaux immobiliers ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'aménagement de la Polynésie française, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable ;

14. Considérant qu'aux termes du 2 du II de l'article A 114-6 du code de l'aménagement de la Polynésie française, le dossier joint à la demande du permis de construire comprend : " A une échelle de 1/100e ou une échelle supérieure si elle est nécessaire à une bonne lecture du projet, les plans cotés des travaux, notamment le plan des fondations et sous-sols éventuels avec indication des canalisations, le plan du rez-de-chaussée et de chacun des étages, les élévations de chacune des façades, les vues en coupe correspondantes " ;

15. Considérant que si les plans produits étaient établis selon les cas à l'échelle 1/200eme ou de 1/ 250ème, ils étaient complets et parfaitement lisibles, et complétés par les nombreuses précisions que comportaient les notices annexes ; que l'autorité administrative a pu à bon droit estimer qu'elle disposait ainsi d'éléments suffisants pour prendre sa décision en toute connaissance de cause ; que la circonstance qu'elle a prescrit par la décision attaquée la production des plans à l'échelle de 1/100eme ne remet pas en cause la pertinence de B...appréciation ; que par suite le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de permis de travaux immobiliers doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance des critères de l'article LP 100-5 du code de l'aménagement de la Polynésie française :

16. Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle se prononce sur une demande en matière d'aménagement et d'urbanisme d'évaluer le projet au vu des quatre critères de l'article LP 100-5 du code de l'aménagement de la Polynésie française, cités au point 6 du présent arrêt ;

17. Considérant que si les requérants soutiennent " qu'en raison de la présence d'autres centres commerciaux assez proches, les besoins auquel répondrait ce projet n'est pas très évident ", ce moyen est dépourvu de toute précision ; qu'il n'est pas établi ni au demeurant soutenu, que le projet serait insusceptible de contribuer à favoriser la croissance et l'efficacité économiques et à satisfaire les besoins humains ;

18. Considérant que la circonstance que le projet ait suscité l'hostilité de certains riverains ne saurait établir en elle-même que l'autorité administrative ne l'aurait pas évalué en tenant compte de l'équité et de la cohésion sociale ;

19. Considérant que les controverses portant sur la transmission des biens matériels et immatériels des Polynésiens aux générations futures ne sauraient être utilement invoquées contre B...autorisation d'urbanisme ; que les requérants n'établissent pas la réalité de " revendications patrimoniales de Polynésiens spoliés " sur ces parcelles ; qu'en tout état de cause, les autorisations d'urbanisme sont délivrées sous réserve des droits des tiers ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance du plan général d'aménagement de la commune de Papeete :

20. Considérant qu'aux termes de l'article A 111-4 du code de l'aménagement de la Polynésie française: " (...) Une zone urbaine UB est définie comme devant recevoir des habitations individuelles ou collectives et les installations destinées aux activités qui sont le complément naturel de l'habitat. Les bâtiments sont construits en retrait de l'alignement. (...) " ; que le règlement du plan général d'aménagement de la commune de Papeete définit la zone UB-b comme une " zone urbaine à moyenne densité destinée à recevoir des habitations collectives et éventuellement individuelles, des commerces et services et les installations destinées aux activités qui sont le complément naturel de l'habitat " ;

21. Considérant les dispositions applicables à la zone UB-b citées au point précédent ne comportent aucune restriction quant à la nature des installations destinées à l'activité commerciale pouvant être autorisées en zone UB ; qu'en particulier, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la création d'établissements commerciaux n'est pas limitée aux seuls commerces de proximité de type " superette " destinés à pourvoir aux besoins quotidiens de la clientèle de quartier ; que ces dispositions ne font pas obstacle à la création d'un centre commercial qui satisfera les besoins de la population de la ville dans son ensemble et attirera une clientèle étrangère au quartier ;

22. Considérant que le projet autorisé, situé à proximité du centre-ville en zone UB-b, est un centre commercial constitué d'un bâtiment principal à trois niveaux comportant 18 boutiques, 2 moyennes surfaces, 5 " food courts " et une brasserie, et d'un bâtiment annexe comportant 3 moyennes surfaces, pour une surface de vente totale d'environ 30 000 m² ; qu'en dépit de son importance, la réalisation de ce projet n'affectera pas les caractéristiques de ce quartier où les zones d'habitat, les commerces d'importance variable et les services coexistent ; que les dispositions précitées applicables à la zone UB-b n'ont donc pas été méconnues ;

23. Considérant qu'aux termes de l'article UB-b. 6-1 du plan général d'aménagement de la commune de Papeete: " Le plan vertical d'une façade doit respecter un recul minimal de 6 m par rapport à l'alignement d'une voie publique, l'emprise d'un espace public ou la limite d'une voie privée " ;

24. Considérant qu'il ne ressort pas des documents cartographiques, et en particulier du plan de masse, parfaitement lisible à cet égard bien qu'il soit produit à l'échelle d'1/250eme, que les façades du bâtiment seraient éloignées de moins de six mètres de l'emprise d'une voie publique, d'un espace public ou de la limite d'une voie privée ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article UB-b. 6-1, qui est au demeurant dépourvu de toute précision, doit être écarté ;

25. Considérant qu'aux termes de l'article UB-b.10-1 du plan général d'aménagement de la commune de Papeete: " Les façades des constructions ne peuvent dépasser une hauteur de 16,50 m. B...hauteur "H" est mesurée dans le plan vertical de façade, épaisseur de couverture dans ce plan comprise " ;

26. Considérant qu'il ne ressort pas des hauteurs des différents niveaux, qui sont détaillées dans le dossier d'assistance technique de la demande présentée au titre des installations classées pour la protection de l'environnement, que la hauteur maximale du bâtiment dépasserait 12,95 mètres ; que si les requérants affirment que " le détail des hauteurs sous plafond mentionnés peut légitimement laisser à penser que la hauteur totale est supérieure à 16,50 mètres ", leurs doutes, que n'ont pas retenus le service instructeur et la commune de Papeete, ne sont assortis d'aucune critique des calculs du pétitionnaire ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UB-b.10-1 du plan général d'aménagement doit dès lors être écarté ;

27. Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article UB-b. 11-1 du plan général d'aménagement de la commune de Papeete : " Les façades très vitrées de type "mur-rideau" ne sont pas prohibées mais doivent être utilisées à bon escient afin de s'intégrer dans le site urbain, par exemple pour contribuer à atténuer un effet de masse. À défaut de traitement particulier elles sont à éviter lorsque, en fonction de leur orientation, elles risquent de provoquer des réverbérations excessives pour les habitants d'immeubles proches en vis-à-vis " ;

28. Considérant que les requérants n'établissent pas, et d'ailleurs ne soutiennent pas véritablement, que des immeubles proches seraient susceptibles d'être affectés par la réverbération excessive des façades vitrées ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UB-b. 11-1 du plan général d'aménagement ne peut qu'être écarté ;

29. Considérant qu'aux termes de l'article UB-a.13-1 du plan général d'aménagement de la commune de Papeete : " Les parcelles doivent être aménagées de telle façon qu'une superficie représentant 50 % de celle du terrain soit constituée par un sol végétalisé et planté. Outre les parties de terrain laissées en espace vert, peuvent notamment être considérés comme sols végétalisés : / - une partie d'une construction enterrée ou en élévation recouverte d'une couche suffisante de terre permettant un engazonnement et des plantations florales ou arbustives, ainsi que leur entretien commode ; / - une aire de stationnement en dalles ajourées ou à reliefs prévues spécialement pour le développement du gazon ; / - une aire de stationnement revêtue mais comportant des arbres de haute tige ou d'ombrage, pour l'emprise moyenne de leur frondaison normale. Le décompte de la superficie végétalisée sera fourni à l'appui de la demande de permis de construire " ;

.

30. Considérant que le plan de coupe joint à la demande de permis de construire précise que les espaces paysagers végétalisés auront une superficie de 21 805 m2, correspondant à 58% de la surface du terrain soit 21 900 m2 ; qu'en outre une partie importante de la toiture sera végétalisée ; que les exigences de l'article UB-a.13-1 du plan général d'aménagement n'ont dès lors pas été méconnues ;

Sur les moyens tirés de l'insuffisance de l'infrastructure routière :

En ce qui concerne la chose jugée par le tribunal administratif de Polynésie Française dans son jugement définitif du 24 septembre 2013 :

31. Considérant qu'aux termes de l'article A 114-27 du code de l'aménagement et de l'urbanisme de la Polynésie française : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales, si les constructions, par leur situation, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier : - sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, imposent la réalisation par la collectivité d'équipements publics nouveaux hors de proportion avec les conditions normales de développement, ou sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains " ;

32. Considérant qu'aux termes de l'article A 114-28 du même code : " Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance et à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles qui y sont édifiés, notamment en ce qui concerne la commodité de la circulation et des accès et des moyens d'approche permettant une lutte efficace contre

l'incendie " ;

33. Considérant que, pour rejeter la demande de permis de travaux immobilier déposée le 30 septembre 2010, le ministre de l'aménagement et du logement a considéré que les constructions, qui par leur situation et leur dimension étaient de nature à porter atteinte à la sécurité publique, ne satisfaisaient pas aux conditions posées par l'article A 114-27 et que les terrains n'étaient pas desservis par des voies correspondant à l'importance et à la destination des immeubles notamment en ce qui concerne la commodité de la circulation et des accès et des moyens d'approche permettant une lutte efficace contre l'incendie, en méconnaissance de l'article A 114-28 du code de l'aménagement de la Polynésie Française ;

34. Considérant que par son jugement définitif du 24 septembre 2013, le tribunal administratif de Polynésie Française a censuré ces deux motifs qui fondaient la décision de refus ; qu'il a considéré d'une part que l'afflux de circulation engendré par l'implantation du centre commercial projeté se fera principalement en dehors des heures de pointe, que l'augmentation du trafic routier ainsi induite ne sera que de 15% et pourra être gérée par l'adaptation du phasage des feux tricolores sans que la réalisation d'équipements supplémentaires soit nécessaire ; qu'il a considéré d'autre part que l'accès des véhicules de lutte contre l'incendie et de secours n'avait pas suscité de réserves des services compétents ;

35. Considérant que l'autorité absolue de chose jugée qui s'attache à ces motifs qui constituent le soutien nécessaire de l'annulation prononcée par le jugement du 24 septembre 2013 s'opposent à ce qu'ils soient rediscutés à l'occasion du présent litige sur la délivrance de l'autorisation ; que dès lors, le moyen tiré de ce que la mise en service du centre commercial aggravera les conditions d'accès existantes et provoquera des encombrements dans le quartier, que l'augmentation du trafic routier sera supérieure aux 15% évalués par le pétitionnaire dans son étude d'impact, que le phasage des feux tricolores constitue un expédient insuffisant, que des travaux d'aménagement sont nécessaires, et que ceux qui sont envisagés, dont la date de réalisation est au demeurant incertaine, seront insuffisants, et que l'accès des véhicules de sapeurs-pompiers n'est pas assuré ne peut être accueilli ;

Sur l'atteinte à la santé et à la sécurité publique et à l'environnement :

36. Considérant que si les requérants, qui n'invoquent la méconnaissance d'aucune disposition particulière du code de l'aménagement, font valoir que l'accroissement du trafic automobile par des véhicules polluants va provoquer une augmentation de l'émission de gaz à effet de serre et de particules nocives, et de manière générale une aggravation de la pollution de l'air à Papeete, les données très générales sur lesquelles ils se fondent ne permettent pas de déterminer l'impact précis sur l'environnement du projet qu'ils contestent; que s'il relèvent que les abords du site sont fréquentés par les piétons dont de nombreux enfants, B...circonstance ne suffit pas à établir que la délivrance du permis est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

37. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que StellioC..., Mme A...D..., et Mlle F... D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Polynésie française a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

38. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions des requérants tendant à la mise à la charge de la Polynésie Française, qui n'est pas la partie qui succombe, des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge commune de

M. H...C..., Mme A...D..., et Mlle F... D...la somme globale de 1 500 euros à verser à la Polynésie française et la somme globale de 1 500 euros à verser à la société Matavai ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. H...C..., Mme A...D..., et Mlle F... D...est rejetée.

Article 2 : M. H...C..., Mme A...D..., et Mlle F... D...verseront une somme globale de 1 500 euros à la Polynésie Française et une somme globale de 1 500 euros à la société Matavai sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H...C..., à Mme A...D..., à Mme F...D..., au président de la Polynésie française et à la société Matavai.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 octobre 2017.

Le rapporteur,

Ch. BERNIERLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la République en Polynésie Française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 10PA03855

2

N° 15PA01430


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01430
Date de la décision : 24/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : FROMENT-MEURICE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-10-24;15pa01430 ?
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