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07/07/2017 | FRANCE | N°17PA00402;17PA00752

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 07 juillet 2017, 17PA00402 et 17PA00752


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision en date du 8 octobre 2015 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse et de son fils, ensemble la décision portant rejet de son recours gracieux du 28 décembre 2015 contre ledit arrêté.

Par jugement n° 1603852/1-3 du 28 juillet 2016 le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I°) Par une requête en

registrée sous le n°17PA00402 le 1er février 2017, M. A..., représenté par Me Maghrebi-Mansouri,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision en date du 8 octobre 2015 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse et de son fils, ensemble la décision portant rejet de son recours gracieux du 28 décembre 2015 contre ledit arrêté.

Par jugement n° 1603852/1-3 du 28 juillet 2016 le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I°) Par une requête enregistrée sous le n°17PA00402 le 1er février 2017, M. A..., représenté par Me Maghrebi-Mansouri, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1603852/1-3 du 28 juillet 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions attaquées ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte, de lui accorder le regroupement familial au bénéfice de son épouse et de son fils, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de lui enjoindre, sous astreinte, de procéder à un nouvel examen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Maghrebi-Mansouri sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- en refusant de lui accorder sur le fondement de l'article 4 de l'accord franco-algérien le regroupement familial qui est un droit constitutionnel protégé en application du 10ème alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, le préfet de police a commis une erreur de droit en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- eu égard à son handicap, le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation et, en faisant application des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien, l'a placé dans une situation de discrimination au sens de l'article 14 combiné à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'argument retenu par le tribunal selon lequel il n'allègue pas conserver de liens avec son épouse et son fils, invoqué pour la première fois par le préfet de police dans son mémoire en défense, ne saurait prospérer ;

- atteint d'un handicap reconnu par la MDPH à un taux supérieur à 80 %, la présence de son épouse et de son fils à ses côtés est nécessaire à son état de santé.

La requête a été communiquée le 2 mars 2017 au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 décembre 2016.

II°) Par une requête enregistrée sous le n° 17PA00752 le 28 février 2017, transmise à la Cour par ordonnance n° 1701935 du 7 février 2017 du président du Tribunal administratif de Paris, en application de l'article R. 351-3 alinéa 1er du code de justice administrative, M.A..., représenté par Me Maghrebi-Mansouri, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1603852/1-3 du 28 juillet 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions attaquées ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte, de lui accorder le regroupement familial au bénéfice de son épouse et de son fils, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de lui enjoindre, sous astreinte, de procéder à un nouvel examen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Maghrebi-Mansouri sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soulève des moyens identiques à ceux invoqués dans la requête n° 17PA00402.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- et les observations de M. A....

1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien né le 26 mai 1956 à Mostaganem, relève régulièrement appel du jugement du 28 juillet 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en annulation de la décision du 8 octobre 2015 par laquelle le préfet de police a refusé sur le fondement de l'article 4 de l'accord franco-algérien de lui accorder le regroupement familial sollicité en faveur de son épouse et de leur enfant, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux du 28 décembre 2015 ;

Sur la requête enregistrée sous le n° 17PA00752 :

2. Considérant que les deux requêtes n° 17PA00752 et n° 17PA00402 présentées par M. A... sont dirigées contre le même jugement et comportent des conclusions identiques ; que la requête n° 17PA00752 constitue, en réalité, un doublon de la requête n° 17PA00402 ; que, par suite, la requête n° 17PA00752 doit être radiée du registre du greffe de la Cour ;

Sur la requête enregistrée sous le n° 17PA00402 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de l'accord franco-algérien du

27 décembre 1968 modifié : " Les membres de la famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent. Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente. Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1 - le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales. L'insuffisance des ressources ne peut motiver un refus si celles-ci sont égales ou supérieures au salaire minimum interprofessionnel de croissance (...) " ; qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ; qu'aux termes de l'article 8 de la même convention : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant que les stipulations précitées de l'article 4 de l'accord franco-algérien ne sauraient être interprétées comme permettant d'opposer une condition de ressources à un demandeur titulaire de l'allocation aux adultes handicapés définie par l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale ; que l'autorité compétente ne saurait, pour rejeter une demande de regroupement familial présentée par un ressortissant algérien qui, du fait de son handicap, est titulaire de cette allocation, se fonder sur l'insuffisance de ses ressources, sans introduire, dans l'appréciation de son droit à une vie privée et familiale normale, une discrimination à raison de son handicap prohibée par les stipulations combinées des articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en refusant d'accorder à M. A...le bénéfice du regroupement familial au seul motif que l'intéressé, titulaire de l'allocation adultes handicapés, ne disposait pas de ressources suffisantes, sans apprécier son droit à une vie privée et familiale normale, le préfet de police a commis une erreur de droit en méconnaissance des stipulations combinées des articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision contestée, du 8 octobre 2015, ensemble la décision du rejet de son recours gracieux du 28 décembre 2015 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

7. Considérant que le présent arrêt, par lequel la Cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par M. A...n'implique cependant pas, eu égard au motif d'annulation ci-dessus énoncé, qu'il soit fait droit à la demande de regroupement familial du requérant au bénéfice de son épouse et de leur enfant, mais seulement que cette demande soit réexaminée ; qu'il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet de police de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par le requérant ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Maghrebi-Mansouri, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Maghrebi-Mansouri de la somme de 1 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 17PA00752 est rayée des registres du greffe de la Cour et rattachée à la requête enregistrée sous le n° 17PA00402.

Article 2 : Le jugement n° 1603852/1-3 du 28 juillet 2016 du Tribunal administratif de Paris et la décision du 8 octobre 2015 par laquelle le préfet de police a refusé d'accorder à M. A...le regroupement familial qu'il avait sollicité au profit de son épouse et de leur fils, ensemble la décision de rejet du recours gracieux du 28 décembre 2015, sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de regroupement familial présentée par M. A...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Maghrebi-Mansouri, avocat de M. A..., une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Maghrebi-Mansouri renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2017 à laquelle siégeaient :

M. Auvray, président de la formation de jugement,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 7 juillet 2017.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

B. AUVRAY

Le greffier,

C. RENE-MINE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 17PA00402, 17PA00752


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00402;17PA00752
Date de la décision : 07/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS BMM

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-07-07;17pa00402 ?
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