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04/07/2017 | FRANCE | N°17PA00606

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 04 juillet 2017, 17PA00606


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal Administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2015 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1509303 du 15 décembre 2016, le Tribunal Administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2017, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1509303 du 15 décembre 2016 du T

ribunal Administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2015 ;

3°) d'enjoindre à l'intér...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal Administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2015 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1509303 du 15 décembre 2016, le Tribunal Administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2017, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1509303 du 15 décembre 2016 du Tribunal Administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2015 ;

3°) d'enjoindre à l'intéressé de lui délivrer dans un premier temps, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dès la notification de la décision à intervenir, puis dans un second temps, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de deux mois suite à cette notification ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'auteur de la décision attaquée est incompétent ;

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du royaume du Maroc du 9 octobre 1987 ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du même code, éclairées par la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du royaume du Maroc du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Dellevedove a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.C..., ressortissant marocain né le 28 avril 1985, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 21 septembre 2015, le préfet du

Val-de-Marne a rejeté sa demande ; que M. C...fait appel du jugement du 15 décembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2013/405 du 5 février 2013 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le lendemain, visé dans l'arrêté contesté, le préfet du Val-de-Marne a donné à M. E... D..., directeur de l'immigration et de l'intégration, délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que le refus de titre de séjour opposé à M. C...le 21 septembre 2015 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'ainsi le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

5. Considérant que si le requérant fait valoir qu'il réside en France depuis 2010 avec son épouse et leurs deux enfants, dont le premier est né le 27 juin 2011 en Espagne, il ressort toutefois des pièces du dossier que son épouse, également ressortissante de nationalité marocaine, résidait en France en situation irrégulière à la date de la décision attaquée ; qu'il ne ressort pas plus des pièces du dossier que des circonstances feraient obstacle à ce que M. C...retourne avec son épouse et ses deux enfants au Maroc et à ce que la cellule familiale s'y reconstitue, la scolarisation actuelle de ses enfants en France ne faisant pas obstacle à leur scolarisation dans un autre pays ; qu'enfin, il n'est pas établi ni même allégué que l'intéressé serait dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire, l'arrêté susvisé n'a pas porté au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, l'arrêté contesté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord... " ; que l'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention ''salarié''... " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

7. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du

9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ; qu'en revanche, les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont applicables aux ressortissants marocains en matière de délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'attestation de dépôt d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour délivrée par le préfet du Val-de-Marne le

3 août 2015, que le titre de séjour sollicité par M. C... l'a été sur le fondement des dispositions tirées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non sur l'article 3 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du royaume du Maroc du 9 octobre 1987 ; qu'ainsi, M. C... ne peut utilement invoquer une méconnaissance par la décision attaquée des stipulations de cet accord ;

9. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Val-de-Marne ne pouvait légalement rejeter la demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée par M. C...en se fondant sur les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Melun a substitué à cette base légale erronée celle tirée du pouvoir, dont dispose le préfet, de régulariser ou non la situation d'un étranger dès lors que cette substitution de base légale n'a pas eu pour effet de priver l'intéressé d'une garantie et que l'administration disposait du même pouvoir d'appréciation, dans l'exercice de son pouvoir général de régularisation, que lorsqu'elle examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en l'espèce si M. C...justifie avoir travaillé entre 2013 et 2015 en tant que boucher auprès de différents employeurs, ces circonstances ne suffisent pas à démontrer son insertion par le travail ; qu'en conséquence, le préfet du Val-de-Marne n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de ce pouvoir de régularisation ;

10.Considérant d'autre part, en ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale ", que si l'intéressé établit sa présence sur le territoire français depuis 2010, une résidence habituelle en France, fût-ce sur une période de sept ans, ne suffit pas à caractériser un motif exceptionnel ou une considération humanitaire au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce énoncées notamment au point 5, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet doivent être écartés ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, président,

- M. Dellevedove, premier conseiller,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 juillet 2017.

Le rapporteur,

E. DELLEVEDOVE

Le président assesseur,

En application de l'article R. 222-26

du code de justice administrative,

P. HAMON

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA00606


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00606
Date de la décision : 04/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : DENEUVE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-07-04;17pa00606 ?
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