La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/06/2017 | FRANCE | N°16PA01643

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 06 juin 2017, 16PA01643


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner l'Etat, à lui payer la somme de 7 168 825 F CFP au titre de l'indemnisation intégrale des préjudices subis du fait de la carence fautive de l'Etat dans la gestion de sa situation à la suite du transfert par l'Etat à la Nouvelle-Calédonie des compétences et du personnel de la direction de la sécurité civile, à procéder à la reconstitution rétroactive de sa carrière et de ses droits à pension, à lui payer la somme d

e 300 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner l'Etat, à lui payer la somme de 7 168 825 F CFP au titre de l'indemnisation intégrale des préjudices subis du fait de la carence fautive de l'Etat dans la gestion de sa situation à la suite du transfert par l'Etat à la Nouvelle-Calédonie des compétences et du personnel de la direction de la sécurité civile, à procéder à la reconstitution rétroactive de sa carrière et de ses droits à pension, à lui payer la somme de 300 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1500290 du 17 mars 2016, le Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 10 mai 2016 et le 31 mars 2017, M. C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500290 du 17 mars 2016 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 7 168 825 F CFP au titre de l'indemnisation intégrale des préjudices subis du fait de la carence fautive de l'Etat dans la gestion de sa situation à la suite du transfert à la Nouvelle-Calédonie des compétences et du personnel de la direction de la sécurité civile ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de procéder à la reconstitution rétroactive de sa carrière et de ses droits à pension ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, soit 2 500 euros au titre des frais engagés en première instance et 1 000 euros pour les frais engagés en appel.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de droit en estimant que l'Etat n'était plus lié à lui à partir du 1er janvier 2014 ;

- le tribunal a écarté à tort ses conclusions indemnitaires, dès lors que l'Etat a commis dans la gestion de sa situation administrative une faute de nature à engager sa responsabilité ; par suite, l'Etat est redevable des salaires de septembre à décembre 2014 soit 2 712 080 F CFP, de 127 575 F CFP en remboursement de frais d'agence immobilière, de 301 764 F CFP d'hébergement hôtelier, de 27 406 F CFP de frais d'huissier ainsi que de la somme de 4 millions de F CFP en réparation de son préjudice moral.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2017, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 4 avril 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 avril 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la

Nouvelle-Calédonie ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires, ensemble la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- la loi du pays n° 2012-1 du 20 janvier 2012 relative au transfert à la

Nouvelle-Calédonie de la compétence de l'Etat en matière de sécurité civile ;

- le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 modifié relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux ;

- le décret n° 90-850 du 25 septembre 1990 modifié portant dispositions communes à l'ensemble des sapeurs-pompiers professionnels ;

- le décret n° 96-1026 du 26 novembre 1996 relatif à la situation des fonctionnaires de l'Etat et de certains magistrats dans les territoires d'outre-mer de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis et Futuna ;

- le décret n° 2001-682 du 30 juillet 2001 portant statut particulier du cadre d'emplois des capitaines, commandants, lieutenants-colonels et colonels de sapeurs-pompiers professionnels ;

- le décret n° 2013-1250 du 27 décembre 2013 portant transfert à la Nouvelle-Calédonie du service de l'Etat chargé de la sécurité civile ;

- la convention de transfert de la direction de la sécurité civile de l'Etat à la

Nouvelle-Calédonie ;

- l'arrêté du 5 juin 2014 portant approbation de la convention de transfert de la direction de la sécurité civile de l'Etat à la Nouvelle-Calédonie ;

- le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Legeai,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.

1. Considérant que M. C..., capitaine de sapeurs-pompiers professionnels en fonction au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Guyane a, par un arrêté du préfet de la Guyane en date du 21 avril 2011, été détaché auprès du ministère de l'intérieur pour être affecté au haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie, en qualité d'adjoint au directeur de la direction de la sécurité civile ; que son détachement a été prolongé pour une durée de deux ans par un arrêté du préfet de la Guyane en date 5 juin 2013, à compter du 3 mai 2013 ; que la loi du pays n° 2012-1 du 20 janvier 2012 susvisée a transféré à la

Nouvelle-Calédonie, la compétence en matière de sécurité civile à partir du 1er janvier 2014 et le décret n° 2013-1250 susvisé du 27 décembre 2013 a, en conséquence, transféré à la

Nouvelle-Calédonie la direction de la sécurité civile du haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie avec l'ensemble de ses biens, droits et obligations à compter du 1er janvier 2014 ; qu'une convention de transfert de la direction de la sécurité civile a été conclue, le 15 avril 2014, entre l'Etat et la Nouvelle-Calédonie ; que l'article 4 de cette convention constate qu'est consacré à l'exercice des compétences transférées l'équivalent de six emplois à temps complet, parmi lesquels celui de capitaine occupant le poste d'adjoint, conformément à l'annexe III à cette convention ; que M. C... a, par courrier du 25 mars 2014, fait acte de candidature sur le poste de conseiller technique - expert planification et sécurité au sein de la direction de la sécurité civile et de la gestion des risques de la

Nouvelle-Calédonie ; que le 5 mai 2014, le président du gouvernement a informé M. C... qu'il ne donnerait pas suite à la procédure de recrutement le concernant ; que par un courrier daté du même jour, le chef de l'exécutif a également informé le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie qu'il ne souhaitait pas procéder au recrutement de M. C... ; qu'une lettre de l'exécutif gouvernemental en date du 16 juin 2014 remise au requérant le même jour par exploit d'huissier précise à l'intéressé que ses fonctions prendront fin le 30 juin 2014 ; que le SDIS de Guyane, par arrêté du 9 janvier 2015, a placé M. C... en position de disponibilité pour une période de trois ans à compter du 4 janvier 2015 ; que par un recours administratif préalable en date du 13 avril 2015, M. C... a sollicité le paiement par l'Etat d'une somme de 7 168 825 F CFP au titre de l'indemnisation intégrale des préjudices subis du fait de la carence fautive du Haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie dans la gestion de sa carrière ainsi que la reconstitution rétroactive de sa carrière et de ses droits à pension ; que par un jugement n° 1500290 du 17 mars 2016, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté les demandes de M. C... ; que, par la présente requête M. C... relève régulièrement appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant, d'une part, que la loi du pays n° 2012-1 du 20 janvier 2012 susvisée a transféré à la Nouvelle-Calédonie la compétence en matière de sécurité civile à partir du 1er janvier 2014, que le décret n° 2013-1250 susvisé du 27 décembre 2013 a, en conséquence, transféré à la Nouvelle-Calédonie la direction de la sécurité civile du haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie avec l'ensemble de ses biens, droits et obligations à compter du 1er janvier 2014 et que la convention de transfert de la direction de la sécurité civile de l'Etat à la Nouvelle-Calédonie, prise sur le fondement de l'article 2 du décret n° 2013-1250 du 27 décembre 2013, a été conclue, le 15 avril 2014, entre l'Etat et la Nouvelle-Calédonie ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 64 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 : " Le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son corps d'origine mais continuant à bénéficier, dans ce corps, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / Il est prononcé sur la demande du fonctionnaire. (...) " ; qu'aux termes de l'article 10 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 modifié relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux : " Il peut être mis fin au détachement avant le terme fixé par l'arrêté le prononçant à la demande soit de l'administration ou de l'organisme d'accueil, soit de l'administration d'origine (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 de la convention susvisée : " Les officiers de sapeurs-pompiers professionnels dont la liste nominative figure au 1. de l'annexe III, non soumis aux règles de mise à disposition prévues par l'article 59 de la loi organique du 19 mars 1999 susvisée restent régis par les statuts qui leur sont applicables à la date du transfert et notamment la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et par le décret

n° 86-68 du 13 janvier 1986 modifié relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l'intégration. Le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie propose à chacun d'eux un poste au sein de la direction de la sécurité civile et de la gestion de risques (DSCGR) de la Nouvelle-Calédonie créée afin d'accueillir la compétence transférée. Le poste proposé a vocation à être occupé par voie de détachement. L'accord de l'agent à occuper le poste est formalisé par le biais du dépôt de sa candidature dans le cadre de l'avis de vacance de poste (AVP) lancée afin de pourvoir le poste idoine. La durée de l'AVP est fixée à 15 jours. L'absence de dépôt de candidature dans les délais impartis de la part de l'agent constitue un refus d'accepter le poste. Dès lors que la candidature de l'agent est acceptée, celui-ci dispose d'un délai de 15 jours maximum pour solliciter son détachement auprès de son administration d'origine. La durée de détachement auprès du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie est au moins équivalente au solde de la durée de détachement restant à courir auprès de l'Etat à la date du recrutement. " ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 5 mai 2014, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a informé M. C... de son intention de ne pas poursuivre la procédure de recrutement le concernant et que, le 16 juin suivant, il lui a fait signifier par exploit d'huissier sa décision du même jour fixant au 30 juin 2014 la cessation de ses fonctions au sein de la direction de sécurité civile et de la gestion des risques (DSCGR) de la Nouvelle-Calédonie, service succédant à direction de la sécurité civile (DSC), alors placée auprès du haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, consécutivement au transfert de compétence au profit de cette collectivité en application de l'article 1er de la loi du pays du 20 janvier 2012 ; que, par ailleurs, en vertu de deux arrêtés du 24 juillet 2014 signés du préfet de la Guyane et du président du conseil d'administration du SDIS de la Guyane, d'une part, il a été mis fin au détachement de M. C... auprès de l'Etat à effet du 1er janvier 2014 avec réintégration à la même date de l'intéressé dans son administration d'origine, le SDIS de la Guyane, d'autre part, a été prononcé le détachement de M. C... auprès de la DSCGR de la Nouvelle-Calédonie en qualité de conseiller technique du 1er janvier 2014 au 2 mai 2015 ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient M. C..., c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que l'Etat avait cessé d'être son administration gestionnaire à compter du 1er janvier 2014, date à laquelle son détachement auprès du haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie avait pris fin dans les conditions prévues à l'article 10 du décret du 13 janvier 1986, nonobstant la double circonstance, invoquée par le requérant, tirée de ce que, par arrêté du 5 juin 2013, en tout état de cause antérieur à la date d'entrée en vigueur, fixée au 1er janvier 2014, du transfert de compétence en matière de sécurité civile au profit de la Nouvelle-Calédonie, son détachement auprès des services de l'Etat avait été renouvelé jusqu'au 3 mai 2015, et de ce que ce n'est qu'à compter du 4 janvier 2015 que, par arrêté du 9 janvier 2015, le président du conseil d'administration du SDIS de la Guyane a placé l'intéressé en position de disponibilité pour une durée de trois ans ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que M. C... demande à la Cour de condamner l'Etat à lui verser une somme de 4 millions de F CFP au titre du préjudice moral qu'il estime avoir subi du fait que l'Etat n'a pas assuré la garantie de ses droits d'agent public à laquelle il pouvait légitimement croire, une somme de 2 712 080 F CFP correspondant aux soldes dont il soutient avoir été illégalement privé au titre des mois de septembre à décembre 2014 ainsi que diverses sommes de 127 575 F CFP, 301 764 F CFP et 27 406 F CFP correspondant à des dépenses liées à l'obligation dans laquelle il s'est trouvé de libérer, le 30 juin 2014, le logement mis à sa disposition au titre des fonctions précédemment exercées au sein de la direction de la sécurité civile (DSC) du haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie ;

7. Considérant toutefois, que, comme les premiers juges l'ont relevé, les conclusions indemnitaires formulées par M. C... à l'encontre de l'Etat sont mal dirigées dès lors que, pour les raisons exposées au point 5, son détachement auprès du haut-commissariat de la République en Nouvelle-Calédonie avait pris fin au 1er janvier 2014, date à compter de laquelle il a été réintégré dans son administration d'origine, le SDIS de la Guyane, et mis à la disposition de la Nouvelle-Calédonie qui a refusé de le recruter et a, en tout état de cause, mis fin à ses fonctions à effet du 30 juin 2014 ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie a rejeté ses demandes ; que ses conclusions tendant à l'annulation du jugement doivent, dès lors, être rejetées ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction, et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2017 à laquelle siégeaient :

M. Auvray, président de la formation de jugement,

M. Pagès, premier conseiller,

M. Legeai, premier conseiller,

Lu en audience publique le 6 juin 2017.

Le rapporteur,

A. LEGEAI

Le président,

B. AUVRAY

Le greffier,

C. RENE-MINE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 16PA01643


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01643
Date de la décision : 06/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-04-03 Fonctionnaires et agents publics. Changement de cadres, reclassements, intégrations. Reclassement dans les corps métropolitains des fonctionnaires ayant servi outre-mer.


Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : SELARL RAPHAELE CHARLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-06-06;16pa01643 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award