Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 22 avril 2010 par laquelle le commandant des forces françaises stationnées au Cap-Vert a procédé à son licenciement pour insuffisance professionnelle, d'enjoindre au ministre de la défense de lui accorder un rappel de salaires au titre de la période du 1er juin 2001 au 22 avril 2010, de l'indemniser des pathologies dont elle est atteinte conformément aux dispositions prévues par le code du travail et le code de la sécurité sociale, de lui accorder une pension d'invalidité, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 200 000 euros en réparation du préjudice matériel et moral et des troubles dans les conditions d'existence subis du fait des souffrances physiques et morales endurées et de son incapacité permanente à exercer la profession de secrétaire comptable et de rectifier l'indication figurant sur les contrats de travail qu'elle a signés les 1er juin 2001 et 15 décembre 2002 avec la direction du commissariat de la marine du Cap-Vert et qui ne mentionnent que sa nationalité sénégalaise alors qu'elle dispose également de la nationalité française.
Par un jugement n° 1220978/5-1 du 5 décembre 2013, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 février 2014, et par des mémoires complémentaires, enregistrés les 20 avril 2014 et 2 août 2015, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 5 décembre 2013 ;
2°) d'annuler la décision de licenciement du 22 avril 2010 ;
3°) d'ordonner la reconstitution de sa carrière ;
4°) de condamner l'État à lui verser respectivement les sommes de 83 120,04 euros à titre de rappel de traitement pour la période du 1er juin 2001 au 22 avril 2010, 8 312 euros à titre de congés payés sur rappel de traitement, 43 673,04 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 142 000 euros à titre de préjudice moral, 13 647,82 euros à titre d'indemnité de licenciement, 3 639,42 euros à titre d'indemnité de préavis et 363,94 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis, lesdites sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2012 et de leur capitalisation ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de licenciement ayant été prise en raison de son état de santé, est entachée d'un détournement de procédure ;
- son insuffisance professionnelle n'est nullement caractérisée ;
- elle a droit aux rappels de traitements et accessoires, ainsi qu'à la réparation des préjudices susmentionnés en application des textes de droit français dont elle relève eu égard à sa nationalité française, le droit local sénégalais ne lui étant pas applicable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2015, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions de la requérante tendant à la condamnation de l'État à lui verser des dommages-intérêts, une indemnité de licenciement, une indemnité de préavis, ainsi que des congés payés sont irrecevables comme nouvelles en appel ;
- la décision contestée, prise en raison des difficultés relationnelles persistantes imputables à l'intéressée, son manque d'esprit d'équipe et son attitude non collaborative nuisant au bon fonctionnement du service, ainsi qu'il ressort de ses fiches de notation, consécutive à trois changements d'affectation, une mise en garde et deux sanctions disciplinaires, n'est entachée d'aucune erreur d'appréciation ;
- les rappels de salaire réclamés ne sont pas justifiés ;
- il s'en remet pour le surplus à ses écritures de première instance qu'il joint.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 20 février 2014.
Par un arrêt n° 14PA00546 du 31 décembre 2015, la Cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de MmeA..., annulé ce jugement et rejeté les demandes comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Par un arrêt n° 399793 du 27 janvier 2017, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la Cour.
Par ordonnance du 14 mars 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 avril 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le décret n° 67-290 du 28 mars 1967 ;
- le décret n° 69-697 du 18 juin 1969 ;
- l'arrêté du 14 décembre 1995 portant application aux agents contractuels du ministère de la défense en service dans les postes permanents à l'étranger du décret n° 67-290 du 28 mars 1967 et du décret n° 69-697 du 18 juin 1969 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'ayant souscrit un contrat à durée déterminée de six mois à compter du 1er décembre 2000 à la direction du commissariat de la marine au Cap-Vert, puis les deux contrats en litige, l'un à durée déterminée, conclu à compter du 1er juin 2001, l'autre à durée indéterminée, conclu à compter du 1er décembre 2002, MmeA..., ressortissante française possédant également la nationalité sénégalaise, a été recrutée en qualité de secrétaire comptable au sein du commandement des "Forces françaises du Cap-Vert", devenues " Eléments français au Sénégal " depuis le 1er août 2011 ; que, par une décision du 22 avril 2010, le Général, commandant les forces françaises stationnées au Cap-Vert, a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ; que, par un arrêt du 31 décembre 2015, la Cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de MmeA..., annulé le jugement du 5 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté comme non fondée sa demande tendant notamment à l'annulation de cette décision et comme irrecevable sa demande tendant à l'indemnisation de divers chefs de préjudices, mais a rejeté à son tour cette demande au motif qu'elle ne relevait pas de la compétence de la juridiction administrative française ; que, par un arrêt du 27 janvier 2017, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la Cour ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que pour prendre la décision attaquée du 22 avril 2010 licenciant MmeA..., pour insuffisance professionnelle, le commandant des Forces françaises stationnées au Cap-Vert s'est fondé sur ses difficultés relationnelles qui avaient justifié les mutations dont elle avait fait l'objet le 12 mars et le 19 décembre 2007, ainsi que sur la persistance de relations tendues avec sa hiérarchie et avec ses collègues dans le cadre de l'emploi qu'elle occupait depuis le 18 mai 2009, constatées par l'inspecteur du travail, en rappelant les plaintes qu'elle avait formulées à propos de son environnement de travail dans le cadre de ce dernier emploi, et en relevant notamment l'absence d'effort de sa part pour " s'intégrer à une équipe ", son " instabilité " et son " attitude agressive persistante " ; que le ministre fait en outre valoir que Mme A...a fait l'objet d'un avertissement le 26 janvier 2007 en raison de heurts avec une de ses collègues le 10 janvier précédent, et d'une mise en garde le 21 décembre 2007 en raison de ses difficultés relationnelles, et que ces mêmes difficultés ont été relevées dans ses fiches de notations pour les années 2006 à 2008, ses notations étant limitées à 9,4/20, 8,4/20 et 9/20 ; que Mme A...ne conteste pas sérieusement les difficultés relationnelles sur lesquelles l'administration s'est ainsi fondée en faisant état du caractère " subjectif " de ces reproches, en faisant allusion aux innovations qu'elle soutient avoir apportées à l'organisation du travail dans chacun des emplois auxquels elle a été affectée, en déniant sa responsabilité dans les heurts du 10 janvier 2007, en tentant d'expliquer sa mutation le 19 décembre 2007 par les besoins du service, en soutenant avoir présenté " simplement de nombreuses réclamations (...) visant à faire respecter ses droits " et en tentant d'expliquer ses notations par ses relations conflictuelles avec l'administration ; qu'elle ne produit aucun élément de nature à démontrer comme elle l'affirme, que la décision de licenciement aurait, en réalité, été prise pour des motifs tenant à son état de santé ; qu'ainsi c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que ces faits, dont la matérialité est établie, étaient de nature, contrairement à ce que soutient la requérante, à justifier un licenciement pour insuffisance professionnelle ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que par le jugement attaqué le tribunal a rejeté comme irrecevables les conclusions de Mme A...tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité en réparation du préjudice moral et des troubles qu'elle soutient avoir subis dans ses conditions d'existence, en relevant qu'elle n'avait pas, avant d'introduire sa requête ou en cours d'instance, présenté à l'administration une demande tendant à l'octroi d'une indemnité ; que Mme A...n'a pas plus soutenu devant la Cour que devant le tribunal avoir présenté une telle demande ; que par suite, ainsi que l'ont estimé les premiers juges ces conclusions sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées;
4. Considérant, en troisième lieu, que les conclusions de Mme A...tendant à la condamnation de l'État à lui verser des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité de licenciement, une indemnité de préavis, ainsi que des congés payés sur préavis, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont, par suite, irrecevables ;
5. Considérant, en quatrième lieu, qu'ainsi que le ministre l'a fait valoir dans ses écritures de première instance concluant au rejet comme irrecevables de ses conclusions autres que celles dirigées contre la décision de licenciement du 22 avril 2010, Mme A...n'a pas, avant d'introduire sa requête ou en cours d'instance, présenté une demande indemnitaire auprès de l'administration ; que ses conclusions tendant à ce que l'État soit condamné à lui verser un rappel de traitement pour la période du 1er juin 2001 au 22 avril 2010 et des congés payés correspondant à ce rappel de traitement, doivent donc être rejetées comme irrecevables ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à MmeA..., au ministre de la défense et au ministre de la fonction publique.
Délibéré après l'audience du 2 mai 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Petit, premier conseiller.
Lu en audience publique le 16 mai 2017.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA00555