Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner la ville de Paris à lui verser une somme de 15 000 euros en réparation des préjudices subis par elle résultant des différentes mesures de déplacement dont elle a fait l'objet à compter du 7 janvier 2010, en violation des dispositions de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983, de condamner la ville de Paris à lui verser, sur le fondement de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, une somme de 15 000 euros en réparation des violences physiques et psychologiques subies par elle depuis 2008 sur son lieu de travail et d'enjoindre à la ville de Paris de lui verser les sommes correspondant à l'ensemble de ses droits relatifs à la prime de rendement ainsi qu'à l'indemnité départementale exceptionnelle dont elle a été indûment privée depuis son accident de service survenu le 25 février 2010, et à procéder au remboursement des frais de transport et au report des congés annuels sur son compte épargne temps.
Par un jugement n° 1402651/2-3 du 19 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite de la ville de Paris rejetant la demande de report sur le compte épargne temps de Mme B...des jours de congés annuels non pris au titre des années 2009 et 2010, a enjoint à la ville de Paris de procéder dans un délai de trois mois à l'examen au fond de la demande de l'intéressée et a rejeté le surplus de sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 18 mai 2015 et 17 janvier 2017, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 1402651/2-3 du 19 mars 2015 en tant que par ce jugement le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à sa demande ;
2°) de condamner la ville de Paris à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis en raison des différentes mesures de déplacement dont elle a fait l'objet à compter du 7 janvier 2010 en violation des dispositions de l'article 6 quinquiès de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
3°) de condamner la ville de Paris à lui verser, sur le fondement de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, la somme de 15 000 euros en réparation des violences physiques et psychologiques qu'elle a subies depuis 2008 sur son lieu de travail ;
4°) d'annuler le refus implicite de la ville de Paris de lui verser les sommes correspondant à la régularisation de ses droits à la prime de rendement pour l'année 2011 et le mois de février 2012, à l'indemnité départementale de 2010 à 2013, à l'indemnité de transport de février 2010 à octobre 2013 et de reporter ses congés annuels non pris sur un compte épargne temps pour les années 2011 et 2012 ;
5°) d'enjoindre à la ville de Paris de lui verser la prime de rendement, l'indemnité départementale, l'indemnité de transport et de reporter ses congés annuels non pris sur un compte épargne temps pour les années 2011 et 2012 dans un délai de trois mois ;
6°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a fait l'objet de harcèlement moral ;
- elle a subi un préjudice du fait du refus de la ville de Paris de lui octroyer la protection prévue par l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ;
- elle a subi un préjudice en raison de ses mutations successives en violation de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 ;
- elle n'a pas perçu de prime de rendement en 2011 ni en février 2012 ;
- elle a perçu une indemnité départementale inférieure à celle de ses collègues dans la même situation qu'elle pour les années 2010 à 2013 ;
- elle n'a pas perçu l'indemnité de transport de février 2010 à octobre 2013 ;
- elle doit bénéficier du report de ses jours de congés non pris en 2011 et 2012 sur son compte épargne temps ;
- sa participation en décembre 2009 à la campagne de vaccination n'était pas une affectation de poste mais relevait du volontariat.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 octobre 2015, la ville de Paris, représentée par la société civile professionnelle (SCP) Foussard-Froger demande par la voie de l'appel incident l'annulation du jugement en tant qu'il fait partiellement droit à la demande de Mme B... et qu'il enjoint à la ville de Paris de procéder à l'examen au fond de la demande de l'intéressée de reporter sur son compte épargne temps 4,5 jours de congés annuels non pris au titre de 2009 et 34 jours au titre de l'année 2010, au rejet de la requête d'appel et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur l'appel incident :
- si le courrier du 10 novembre 2012 de la requérante devait être analysé comme une demande précise de report de ses jours de congés annuels, les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande sont irrecevables en raison de leur tardiveté ;
- la demande de report des jours de congés annuels pour la période 2009-2010 n'est pas fondée.
Sur l'appel principal :
- Mme B...ne peut être regardée comme ayant été l'objet d'agissements constitutifs de harcèlement moral ouvrant droit à la protection fonctionnelle ;
- la ville de Paris a essayé d'apaiser la situation conflictuelle au sein du service ;
- la décision de mutation de Mme B...n'a pas été prise en violation de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 ;
- les demandes relatives aux primes ne sont pas fondées ;
- la demande de prise en charge partielle du titre de transport n'est pas fondée ;
- la demande tendant à l'annulation de la décision implicite de refus de report des reliquats de jours de congés annuels au titre des années 2011 et 2012 et la demande d'injonction de régulariser cette situation sont irrecevables et ne sont pas fondées.
Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions de la ville de Paris tendant à la réformation du jugement attaqué qui doivent être regardées comme présentées par la voie de l'appel principal sont tardives et par suite irrecevables.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le décret n° 83-718 du 26 juillet 1983 relatif à la prise en charge partielle par les collectivités locales et leurs établissements publics à caractère administratif du prix des titres de transports de leurs agents pour le trajet domicile-travail en région parisienne et le décret
n° 2010-676 du 21 juin 2010 instituant une prise en charge partielle du prix des titres d'abonnement correspondant aux déplacements effectués par les agents publics entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail ;
- le décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 modifié relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux ;
- le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 portant dispositions statutaires relatives aux personnels des administrations parisiennes ;
- le décret n° 2004-878 du 26 août 2004 relatif au compte épargne temps dans la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mielnik-Meddah,
- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,
- et les observations de Me Lewy, avocat de la ville de Paris.
1. Considérant que MmeB..., adjoint administratif de la ville de Paris, exerçait les fonctions de secrétaire au sein d'un cabinet d'adjoint au maire depuis le mois de juin 2008 ; que par un courrier du 18 février 2014, Mme B...a sollicité l'indemnisation de divers préjudices et la régularisation de ses droits à plusieurs primes et indemnités ; que Mme B... relève appel du jugement n° 1402651/2-3 du 19 mars 2015 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la ville de Paris à lui verser une somme de 15 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis résultant des différentes mesures de déplacement dont elle a fait l'objet à compter du 7 janvier 2010, en violation des dispositions de l'article 6 quinquiès de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, à la condamnation de la ville de Paris à lui verser une somme de 15 000 euros en réparation des violences physiques et psychologiques qu'elle aurait subies depuis 2008 sur son lieu de travail, sur le fondement de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 et à ce qu'il soit enjoint à la ville de Paris de lui verser l'ensemble de ses droits relatifs à la prime de rendement, à l'indemnité départementale exceptionnelle ainsi qu'à l'indemnité de transport due de février 2010 à octobre 2013 et de procéder au report des congés annuels sur son compte épargne temps pour les années 2011 et 2012 ;
Sur les conclusions de la ville de Paris tendant à la réformation du jugement attaqué :
2. Considérant que la ville de Paris, devant les premiers juges, a opposé aux conclusions de Mme B...tendant au report de ses congés annuels non pris au titre des années 2009 à 2012 une fin de non recevoir tirée, d'une part de l'absence de demande précise de l'intéressée et par suite de décision de l'administration, d'autre part de la tardiveté desdites conclusions ; qu'en dépit de cette fin de non recevoir, le tribunal, par le jugement attaqué, a annulé la décision implicite de la ville de Paris rejetant la demande de report sur le compte épargne temps de Mme B... des jours de congés annuels non pris au titre des années 2009 et 2010 et a enjoint à la ville de Paris de procéder à l'examen au fond de la demande de l'intéressée de reporter sur son compte épargne temps 4,5 jours de congés annuels non pris au titre de 2009 et 34 jours au titre de l'année 2010 ; que la ville de Paris demande, par la voie de l'appel incident, le rejet de la requête de Mme B...et la réformation du jugement en tant qu'il a fait partiellement droit à la demande de l'intéressée s'agissant des congés annuels non pris au titre des années 2009 et 2010 ; que, toutefois, dès lors que l'appel de Mme B...ne porte, s'agissant du report de jours de congés non pris, que sur les années 2011 et 2012, la requête d'appel de la ville de Paris soulève un litige distinct qui ne pouvait être porté devant la Cour que par la voie de l'appel principal dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement ; qu'il ressort des pièces du dossier que la ville de Paris a accusé réception le 20 mars 2015 du courrier portant notification du jugement ; que, dès lors, ses conclusions susanalysées qui doivent être regardées comme présentées par la voie de l'appel principal le 30 octobre 2015 sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur la demande de report de jours de congés non pris pour les années 2009 à 2012 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative dans sa version alors en vigueur : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet. / Les intéressés disposent, pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux mois à compter du jour de l'expiration de la période mentionnée au premier alinéa. Néanmoins, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient dans ce délai de deux mois, elle fait à nouveau courir le délai du pourvoi (...) " ; qu'en vertu de l'article 18 de la loi du 12 avril 2000 susvisée relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, les relations entre les autorités administratives et leurs agents sont exclues du champ d'application de l'article 19 de cette loi, aux termes duquel : " Toute demande adressée à une autorité administrative fait l'objet d'un accusé de réception délivré dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...). / Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications prévues par le décret mentionné au premier alinéa (...) " ;
4. Considérant qu'il ressort des dispositions précitées applicables au présent litige que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires y dérogeant, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'administration sur une demande ou une réclamation de l'un de ses agents vaut décision de rejet ; que, sauf dans les cas énumérés aux 1° à 3° de l'article R. 421-3 du code de justice administrative ou lorsqu'une décision explicite de rejet intervient dans ce même délai de deux mois, l'agent dispose d'un délai de deux mois francs, à compter de la naissance de cette décision implicite, pour former un recours administratif ou contentieux à l'encontre de cette dernière ;
5. Considérant que le courrier du 18 décembre 2012 adressé par Mme B...à la secrétaire générale du conseil de Paris ne peut être regardé comme une demande de report de jours de congés non pris pour les années 2011 et 2012 ; qu'en tout état de cause, le refus implicite né du silence gardé par l'administration pendant plus de deux mois à la suite de cette réclamation n'a pas été contesté dans le délai de recours contentieux ; que, par suite, alors que, par ailleurs, le silence gardé par l'administration sur la nouvelle demande de l'intéressée en date du 18 février 2014 a donné lieu à une décision de rejet purement confirmative non susceptible de rouvrir les délais de recours contentieux, la ville de Paris est fondée à soutenir que la demande de Mme B...concernant les années 2011 et 2012 est tardive et par suite irrecevable ; qu'il suit de là que les conclusions de la requérante relatives au report de ses congés non pris pour les années 2011 et 2012 ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur le refus implicite de protection fonctionnelle et la responsabilité de la ville de Paris :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, dans sa version applicable au litige : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire. / Lorsqu'un fonctionnaire a été poursuivi par un tiers pour faute de service et que le conflit d'attribution n'a pas été élevé, la collectivité publique doit, dans la mesure où une faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions n'est pas imputable à ce fonctionnaire, le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui. / La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. / La collectivité publique est tenue d'accorder sa protection au fonctionnaire ou à l'ancien fonctionnaire dans le cas où il fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle. / La collectivité publique est subrogée aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des menaces ou attaques la restitution des sommes versées au fonctionnaire intéressé. Elle dispose, en outre, aux mêmes fins, d'une action directe qu'elle peut exercer au besoin par voie de constitution de partie civile devant la juridiction pénale. Les dispositions du présent article sont applicables aux agents publics non titulaires " ; qu'aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés (...) " ;
7. Considérant, d'une part, qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
8. Considérant, d'autre part, que, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé ;
9. Considérant que Mme B...soutient qu'elle a fait l'objet d'agissements constitutifs de harcèlement moral de la part d'une de ses collègues à compter d'octobre 2008 ; qu'elle fait valoir plus précisément que sa collègue lui a pris le combiné de téléphone des mains pour raccrocher à deux reprises alors qu'elle était en conversation téléphonique privée, a donné des coups de pieds dans ses cartons lors d'un déménagement en septembre 2009, l'a griffée et l'a empêchée d'allumer la lumière de son bureau en janvier 2010, a délibérément omis de lui communiquer certaines informations et a tenté de l'empêcher de se rendre en réunion ; que Mme B... soutient également que ses supérieures hiérarchiques ne l'ont pas soutenue et ont même cherché à l'évincer du service la considérant comme l'agresseur et non l'agressée ; que ces événements ont provoqué chez l'intéressée, selon ses dires, des insomnies, une perte d'appétit, un malaise et un trouble anxio-dépressif sévère à l'origine de plusieurs arrêts de travail en octobre et novembre 2009 ; qu'il résulte de l'instruction que Mme B...a connu de réelles difficultés relationnelles avec une de ses collègues et que cette mésentente a provoqué un état de stress au travail et perturbé le service du secrétariat ; que Mme B...produit à l'appui de ses allégations des documents médicaux établissant son état anxio-dépressif, des procès verbaux et mains courantes relatant les incidents décrits ci-dessus et une plainte pour harcèlement moral déposée par elle-même le 1er septembre et 29 octobre 2009 au titre des faits survenus depuis le 22 octobre 2008, quelques échanges de mails avec une collègue d'un syndicat sollicitée pour apporter son soutien, ainsi que les témoignages de sa fille et de son assureur dont les communications téléphoniques avaient été interrompues et qui relatent les bruits d'altercation qu'ils ont entendus ; que, toutefois, son comportement a été mis en cause à compter de l'automne 2008 par sa hiérarchie, notamment à l'occasion d'un rapport du 1er septembre 2009, établi par la directrice de cabinet de l'adjointe au maire, indiquant que ses conversations téléphoniques personnelles nuisaient au bon déroulement du service par leur fréquence et leur volume ; que ses supérieures hiérarchiques ont entendu résoudre les difficultés relationnelles rencontrées par Mme B... au sein du service en proposant à l'intéressée, dès juillet 2009, de rechercher, dans l'intérêt du service et de son propre équilibre psychologique, une nouvelle affectation et lui ont suggéré de rencontrer un psychologue du travail ; que Mme B...a refusé de se rendre à plusieurs reprises à ces entretiens ; qu'à la suite du dépôt de plainte de Mme B... pour harcèlement moral la communication est devenue impossible entre l'intéressée et ses collègues qui par ailleurs s'entendaient bien entre elles et travaillaient dans un bon esprit d'équipe ;
10. Considérant, comme l'ont relevé les premiers juges, que si les documents produits par les parties témoignent de relations conflictuelles entre deux agents qui ont donné lieu périodiquement à des altercations sur une période d'une année environ et auxquelles il a été mis un terme par le changement d'affectation de MmeB..., les quelques scènes décrites par celle-ci ne reposent que sur son propre témoignage ; que les témoignages favorables produits par l'intéressée émanent de personnes qui toutes la côtoient ou l'ont côtoyée dans le travail, mais à d'autres moments de sa vie professionnelle ; que ni l'unique échange de courriels avec la collègue incriminée qui révèle une certaine animosité de cette dernière, ni aucun autre document ne permet de regarder comme établi que cette collègue se serait efforcée de nuire à la réputation de Mme B... ou d'entraver systématiquement son travail ; que si l'état de stress de Mme B... pendant cette période en relation avec sa vie professionnelle ressort des certificats médicaux produits, le compte rendu du service hospitalier des urgences où elle a été conduite après son malaise le 22 octobre 2009 ainsi que le rapport destiné à l'autorité judiciaire établi le 2 novembre 2009 par un médecin de l'unité médico-judiciaire de l'Hôtel Dieu, tous deux produits par la requérante, font état d'un suivi psychologique de l'intéressée antérieur à son affectation en juin 2008 dans le service ; que si Mme B...fait état de longues périodes de congé de maladie, et d'opérations chirurgicales à la suite de chutes survenues sur le trajet entre son travail et son domicile ainsi que sur son lieu de travail, ces préjudices au demeurant pris en charge dans le cadre de la législation sur les accidents de travail ne témoignent pas de l'existence du prétendu harcèlement dont elle se plaint ; que, dans ces conditions, Mme B... ne saurait être regardée comme ayant été victime de faits constitutifs de harcèlement moral de nature à lui ouvrir droit à la protection fonctionnelle, telle que prévue par l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 et dont l'intéressée n'a, au surplus, demandé expressément le bénéfice qu'à l'occasion de la présentation de sa demande préalable d'indemnisation le 18 février 2014 ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction, que contrairement à ce que soutient la requérante, la ville de Paris ne s'est pas désintéressée de la situation, mais s'est efforcée à plusieurs reprises de l'apaiser, que ce soit avant ou après le dépôt de plainte par l'intéressée, lors d'entretiens destinés à trouver une issue au conflit ainsi qu'une nouvelle affectation susceptible de la satisfaire ; que, notamment, Mme B... s'est vu confier une mission de remplacement temporaire de secrétariat au sein de la mission informatique et téléphonie à compter du 8 janvier 2010 ; que cette affectation que l'intéressée a déclaré vouloir conserver dans sa lettre du 8 avril 2010 adressée au directeur de cabinet du maire de Paris et qui, prise dans l'intérêt du service, avait vocation à mettre un terme à la situation conflictuelle constatée dans l'ancien service de Mme B... ne peut dès lors être regardée comme ayant présenté un caractère disciplinaire ; qu'ainsi la ville de Paris n'a commis, de ce chef, aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;
11. Considérant que si MmeB..., placée en congé maladie du 25 février 2010 au 19 mai 2012, puis en mi-temps thérapeutique jusqu'au 18 septembre 2012 avant d'être de nouveau placée en congé maladie jusqu'au 1er avril 2013, n'a été affectée qu'à compter du 3 décembre 2013 de façon pérenne sur le poste de secrétaire qu'elle souhaitait conserver au sein de la mission informatique et téléphonie, il résulte de l'instruction qu'il n'existait pas de possibilité d'affectation définitive dans ce service avant cette date à laquelle un poste supplémentaire a été créé ; que, par suite, alors même que Mme B...a été affectée de façon provisoire sur plusieurs postes, la ville de Paris ne peut être regardée, au regard de ces initiatives, comme ayant commis de faute de nature à engager sa responsabilité de ce chef ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions indemnitaires de Mme B...en réparation des fautes qu'aurait commises l'administration ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les demandes de versement de primes et indemnités :
13. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient MmeB..., il ressort des bulletins de paye qu'elle a produits devant la Cour qu'elle a bien bénéficié de la prime de rendement pour l'année 2011 ainsi qu'au titre du mois de février 2012 à hauteur de 97 euros ; que Mme B... ne conteste pas le montant de cette prime ; que, par suite, en l'absence de contestation du montant, c'est à bon droit que la ville de Paris a rejeté sa demande ;
14. Considérant, en deuxième lieu, que Mme B...soutient que la prime départementale, versée chaque mois de février au titre de l'année précédente, dont elle a bénéficié à hauteur de 405 euros par an pour l'année 2010 et 2011 puis de 415 euros pour l'année 2012 n'a pas été suffisamment revalorisée par rapport à ses collègues ; que, toutefois, elle n'apporte comme justificatif au soutien de ses allégations qu'un bulletin de paye d'une collègue d'un grade supérieur au sien ; que, par suite, Mme B...n'établit pas avoir été traitée différemment des autres agents dans une situation comparable à la sienne ; que, par suite, c'est à bon droit que la ville de Paris a rejeté sa demande ;
15. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret du 26 juillet 1983, en vigueur jusqu'au 1er juillet 2010, relatif à la prise en charge partielle par les collectivités locales et leurs établissements publics à caractère administratif du prix des titres de transports de leurs agents pour le trajet domicile-travail en région parisienne au terme duquel : " (...) les personnels des collectivités locales et de leurs établissements publics à caractère administratif dont la résidence administrative est située à l'intérieur de la zone de compétence de l'autorité organisatrice des transports parisiens bénéficient, à compter du 1er novembre 1982, de la prise en charge partielle du prix des titres d'abonnement correspondant aux déplacements effectués au moyen de transports publics de voyageurs entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail " ; qu'aux termes de l'article 6 du décret du 21 juin 2010 instituant une prise en charge partielle du prix des titres d'abonnement correspondant aux déplacements effectués par les agents publics entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail en vigueur à compter du 1er juillet 2010 : " La prise en charge partielle des titres de transport est suspendue pendant les périodes de congé de maladie, de congé de longue maladie, de congé de grave maladie, de congé de longue durée, de congé pour maternité ou pour adoption, de congé de paternité, de congé de présence parentale, de congé de formation professionnelle, de congé de formation syndicale, de congé d'accompagnement d'une personne en fin de vie, de congé pris au titre du compte épargne-temps ou de congés bonifiés. " ; qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Le fonctionnaire en activité a droit : / 1° A un congé annuel avec traitement dont la durée est fixée par décret en Conseil d'Etat (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) " ;
16. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que la prise en charge partielle des titres de transport est liée à l'existence de frais effectivement engagés par l'agent pour son déplacement entre sa résidence habituelle et son lieu de travail ; que, par suite, Mme B...n'est pas fondée à demander le bénéfice de cette indemnité pendant la durée de ses congés maladie alors même qu'ils résultaient d'un accident de service ouvrant droit au maintien de l'intégralité du traitement jusqu'à la reprise du service ou la mise à la retraite en application du deuxième alinéa du 2°de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 ; que Mme B...ne saurait pas plus prétendre, sur le fondement de l'article 6 du décret du 21 juin 2010 précité, à la prise en charge de ses déplacements entre son lieu de résidence habituelle et les établissements médicaux où elle était suivie médicalement pendant ses congés de maladie ; qu'en outre, si Mme B... entend soulever l'exception d'illégalité du décret du 21 juin 2010 au regard de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, ce moyen est inopérant dès lors que le bénéfice de la prise en charge partielle des titres de transport est lié à l'engagement par l'agent de frais pour son déplacement entre sa résidence habituelle et son lieu de travail et non à la position statutaire d'activité ; que, par suite, c'est à bon droit que la ville de Paris a rejeté la demande de Mme B... ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de ses demandes ; que les conclusions de sa requête tendant à la réformation du jugement précité ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, celles à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la ville de Paris au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la ville de Paris tendant à la réformation du jugement attaqué sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la ville de Paris présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et à la ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2017 à laquelle siégeaient :
M. Krulic, président de chambre,
M. Auvray, président-assesseur,
Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,
Lu en audience publique le 7 février 2017.
Le rapporteur,
A. MIELNIK-MEDDAH
Le président,
J. KRULIC
Le greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 15PA01994