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30/12/2016 | FRANCE | N°16PA01585

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 30 décembre 2016, 16PA01585


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...E...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 novembre 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination.

Par un jugement n° 1519871/3-2 du 30 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2016, le préfet de po

lice demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 mars 2016 du Tribunal administratif de Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...E...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 novembre 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination.

Par un jugement n° 1519871/3-2 du 30 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2016, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 mars 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme E...devant le Tribunal administratif de Paris.

Il soutient que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'arrêté en litige n'a pas été pris en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er juillet 2016, MmeE..., représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Petit a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeE..., de nationalité algérienne, née le 27 septembre 1977, entrée en France le 19 août 2009 sous couvert d'un visa Schengen, a, en dernier lieu, le 16 décembre 2014, sollicité un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 7b de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, par l'arrêté attaqué du 3 novembre 2015, le préfet de police a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination ; que par un jugement du 30 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté au motif qu'il méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ; que le préfet de police fait appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E...est entrée en France au mois d'août 2009 sous couvert d'un visa ; qu'elle justifie, par les bulletins de salaires qu'elle produit, avoir exercé en France une activité professionnelle d'une part entre février 2010 et mars 2011 et, d'autre part, entre février 2013 et novembre 2013 ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que son père, handicapé à 80 %, et ses deux frères sont titulaires de cartes de résident ; que, toutefois, à la date de l'arrêté en litige, sa mère ne séjournait pas régulièrement en France et sa soeur résidait en Algérie ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que son père ne pourrait être assisté par les autres membres de la famille ; que Mme E...est divorcée et sans charge de famille ; que, dans ces conditions, et eu égard à la faible durée de séjour en France de MmeE..., l'arrêté du préfet de police du 3 novembre 2015 n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ; que, par suite, c'est à tort que pour annuler l'arrêté en litige, le tribunal administratif s'est fondé sur le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ;

4. Considérant toutefois qu'il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance et en appel par MmeE... ;

5. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté du 21 octobre 2015, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 30 octobre suivant, le préfet de police a donné délégation à Mme D...A..., attachée d'administration, pour signer tous actes dans la limite de ses attributions, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités, dont il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l'arrêté en litige ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de cet arrêté ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que selon l'article 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, les ressortissants algériens doivent, notamment pour séjourner en France au titre de l'article 7b) de cet accord, qui concerne les certificats de résidence délivrés en qualité de salarié, justifier être entrés en France sous couvert d'un visa de long séjour ; qu'il est constant que Mme E...n'est pas entrée en France sous couvert d'un tel visa de long séjour ; que Mme E... ne pouvait ainsi prétendre à la délivrance d'un titre de séjour, en qualité de salariée, sur le fondement de l'article 7b) de l'accord franco-algérien ;

7. Considérant, en troisième lieu, que si les dispositions de l'article L. 313-14 ne sont pas applicables aux ressortissants algériens et si l'accord franco-algérien ne prévoit pas de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, un préfet peut délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et il dispose à cette fin d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; qu'il ressort des pièces du dossier que le dossier adressé à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi par l'entreprise qui envisageait d'embaucher Mme E...n'était pas complet, de sorte qu'un avis défavorable a été émis par cette direction, en application de l'article

R. 5221-20 du code du travail ; que, dans ces conditions, et eu égard à l'absence de motif justifiant une admission exceptionnelle au séjour, le préfet de police ne peut être regardé comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

8. Considérant, en dernier lieu, que Mme E...ne peut utilement invoquer la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, qui est dépourvue de valeur réglementaire ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé son arrêté du 3 novembre 2015 ; que les conclusions présentées par Mme E...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1519871/3-2 du Tribunal administratif de Paris du 30 mars 2016 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme E...devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions présentées devant la Cour au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme C...E....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 13 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 décembre 2016.

Le rapporteur,

V. PETIT Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY-PASSUELLO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01585


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01585
Date de la décision : 30/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SADOUN

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-30;16pa01585 ?
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