Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...C...épouse A...a saisi le Tribunal administratif de la Polynésie française d'une demande tendant à l'annulation de la décision n° 368075 en date du
18 mars 2014 du vice-recteur de la Polynésie française en tant qu'elle comporte une retenue sur traitement pour un trop perçu d'un montant de 1 657,24 euros versé entre le 1er juin 2012 et le 31 janvier 2014 au titre de la bonification indiciaire, outre des conclusions à fin d'injonction, des conclusions à fin d'indemnisation et des conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1400323 du 10 février 2015, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 mai 2015, et un mémoire, enregistré le
29 novembre 2016, MmeA..., représentée par Me D...B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1400323 du 10 février 2015 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;
2°) d'annuler la décision contestée ;
3°) d'enjoindre à l'Etat, d'une part, de lui restituer la somme indûment prélevée, d'autre part, de lui attribuer sans délai la nouvelle bonification indiciaire ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision attaquée est illégale car elle remplissait les fonctions d'infirmière exerçant dans un internat, lesquelles ouvrent droit à la nouvelle bonification indiciaire ;
- à supposer même qu'elle ne remplisse pas les conditions d'octroi de la nouvelle bonification indiciaire, la décision attaquée est illégale car elle retire illégalement une décision créatrice de droit quatre mois après son édiction.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2016, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991, notamment son article 27 ;
- la loi n° 2000- 321 du 12 avril 2000 ;
- l'arrêté n° 2013-02 du 9 décembre 2013 portant fixation des contingents d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire dans les établissements d'enseignements du second degré public à certains personnels relevant des ministres de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pagès,
- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.
1. Considérant que Mme C...épouse A...a saisi le Tribunal administratif de la Polynésie française d'une demande tendant à l'annulation de la décision n° 368075 du
vice-recteur de la Polynésie française en tant qu'elle comporte une retenue sur traitement pour un trop perçu d'un montant de 1 657,24 euros versé entre le 1er juin 2012 et le 31 janvier 2014 au titre de la bonification indiciaire, outre des conclusions à fin d'injonction, des conclusions à fin d'indemnisation et des conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par un jugement du 10 février 2015, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande ; que Mme A...relève régulièrement appel dudit jugement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de l'arrêté n° 2013-02 du 9 décembre 2013 portant fixation des contingents d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire dans les établissement d'enseignements du second degré public à certains personnels relevant des ministres de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur : " La nouvelle bonification indiciaire d'un montant de dix points d'indice est attribuée aux infirmiers exerçant leurs fonctions dans les internats des établissements d'enseignements du second degré dans la limite de 13 emplois " ;
3. Considérant que le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire instituée par les dispositions précitées n'étant pas lié au grade détenu mais uniquement à l'exercice effectif des fonctions qui y ouvrent droit, les premiers juges ont estimé que le vice-recteur de la Polynésie française avait commis une erreur de droit en estimant que la promotion de Mme A...au grade d'infirmier de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur de classe supérieure relevant de la catégorie A faisait obstacle à l'octroi de la nouvelle bonification indiciaire instituée par les dispositions de l'arrêté précité ; qu'en revanche, les premiers juges ont fait droit à la substitution de motifs sollicitée par le haut-commissaire de la République en Polynésie en substituant au motif initial le motif tiré de ce que cette dernière n'était pas, à la date de cette décision, " une infirmière d'internat " ;
4. Considérant que Mme A...soutient qu'à supposer même qu'elle ne puisse être considérée comme exerçant des fonctions en internat, la décision attaquée est illégale car elle retire illégalement une décision créatrice de droit quatre mois après son édiction ;
5. Considérant que, sous réserve des dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; qu'une décision administrative explicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage ; qu'il en va de même, dès lors que le bénéfice de l'avantage en cause ne résulte pas d'une simple erreur de liquidation ou de paiement, de la décision de l'administration accordant un avantage financier qui, sans avoir été formalisée, est révélée par les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la situation du bénéficiaire et au comportement de l'administration ;
6. Considérant, en premier lieu, que si la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, dans son mémoire en défense, se prévaut des dispositions de l'article 37-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, en l'absence de disposition législative prévoyant son application en Polynésie française, ledit article, qui ne relève pas du statut des agents publics de l'Etat, ne peut s'appliquer aux créances résultant de paiement indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents ;
7. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des bulletins de paye de l'intéressée, que l'administration avait décidé de lui accorder la nouvelle bonification indiciaire au titre de l'article 3 précité de l'arrêté n° 2013-02 du 9 décembre 2013 alors même qu'elle ne remplissait pas toutes les conditions pour en bénéficier, notamment l'exercice des fonctions en internat ; que la décision n° 368075 du vice-recteur de la Polynésie française, en tant qu'elle comporte une retenue sur traitement pour un trop perçu d'un montant de 1 657,24 euros versé entre le 1er juin 2012 et le 31 janvier 2014 au titre de la bonification indiciaire, doit être regardée comme une décision de retrait de la décision non formalisée d'octroi de la nouvelle bonification indiciaire à compter du mois de juin 2012 ; que cette décision de retrait ne pouvait légalement intervenir plus de quatre mois après le 1er juin 2012 alors qu'elle est intervenue le 18 mars 2014 ; que, par suite, Mme A...est fondée, pour ce motif, à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Considérant que si les motifs du présent arrêt impliquent nécessairement que l'administration restitue à Mme A...la somme de 1 657,24 euros, ils n'impliquent pas nécessairement que la nouvelle bonification indiciaire lui soit attribuée pour l'avenir ; qu'il y a lieu, dès lors, en vertu de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de restituer à Mme A...la somme susvisée de 1 657,24 euros, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de rejeter le surplus des conclusions à fin d'injonction ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1400323 du 10 février 2015 du Tribunal administratif de la Polynésie française et la décision n° 368075 du vice-recteur de la Polynésie française en date du
18 mars 2014 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, de reverser à Mme A...la retenue sur traitement opérée sur son " bulletin de paye " du mois de mars 2014 qui lui a été notifiée par la décision du 18 mars 2014 pour la part correspondant à la nouvelle bonification indiciaire versée entre le 1er juin 2012 et le 31 janvier 2014.
Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...C...épouse A...et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Krulic, président de chambre,
M. Auvray, président-assesseur,
M. Pagès, premier conseiller,
Lu en audience publique le 30 décembre 2016.
Le rapporteur,
D. PAGES
Le président,
J. KRULIC
Le greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA01799