La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2016 | FRANCE | N°15PA01924

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 01 décembre 2016, 15PA01924


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme N...A..., Mme T...B..., Mme K...J..., M. L... J..., M. Q... J..., M. et MmeO..., M. et MmeC..., M. H...W..., M. M... S..., Mme U...P...et Mme E...R...ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 19 juin 2013 par lequel le maire de la commune de Jouarre a accordé un permis de construire à la SCI du Cloître, en vue de l'édification de deux bâtiments d'habitation comprenant 27 logements sur un terrain situé 16 rue Milon, ensemble la décision implicite de rejet de leur recour

s gracieux.

Par un jugement n° 1310164 du 12 mars 2015, le tribunal adm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme N...A..., Mme T...B..., Mme K...J..., M. L... J..., M. Q... J..., M. et MmeO..., M. et MmeC..., M. H...W..., M. M... S..., Mme U...P...et Mme E...R...ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 19 juin 2013 par lequel le maire de la commune de Jouarre a accordé un permis de construire à la SCI du Cloître, en vue de l'édification de deux bâtiments d'habitation comprenant 27 logements sur un terrain situé 16 rue Milon, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1310164 du 12 mars 2015, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du maire de Jouarre du 19 juin 2013 en tant qu'il autorise la création d'un nouvel accès au terrain d'assiette du projet d'une largeur utile inférieure à 3,50 mètres, rejeté le surplus des conclusions de la requête ainsi que les conclusions de la SCI du Cloître et de la commune de Jouarre présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 mai 2015, Mme K...J..., M. L...J..., M. Q...J..., M. et Mme N...A...et Mme T...B..., représentés par Me F..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1310164 du 12 mars 2015 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Jouarre du 19 juin 2013 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Jouarre la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier, dès lors que le tribunal administratif de Melun n'a pas indiqué les motifs qui l'ont conduit à écarter tous les autres moyens d'annulation soulevés en première instance, alors qu'il a prononcé l'annulation partielle du permis de construire contesté ;

- le tribunal administratif de Melun ne pouvait prononcer une annulation partielle, puisque la méconnaissance des dispositions de l'article UA 3.3 du plan d'occupation des sols de la commune de Jouarre ne peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif ; en effet les nouvelles dessertes, destinées à desservir 27 logements, ne pourront présenter une largeur suffisante, sauf à réduire l'accès piéton et donc à méconnaître l'article 3.2 du POS ou à modifier l'implantation du bâtiment A ;

- le dossier comporte des imprécisions, des incohérences et des omissions en méconnaissance des articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme, dès lors qu'il ne permettait pas d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement et l'accès au projet ;

- le permis de construire a méconnu l'article UA 11 du plan d'occupation des sols ;

- le permis de construire a méconnu l'article UA 12.1 du plan d'occupation des sols, dès lors qu'il n'est pas établi que la réalisation de 38 places de stationnement corresponde aux besoins du projet.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 octobre 2015, la SCI du Cloître, représentée par Me Heusèle, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise solidairement à la charge de Mme K...J..., M. L...J..., M. Q...J..., M. et Mme N...A...et Mme T... B...la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est entaché d'aucune irrégularité ;

- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 juin 2016 et un mémoire du 10 novembre 2016, la commune de Jouarre, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise solidairement à la charge des requérants la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est régulier ;

- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'énergie ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 31 janvier 1986 relatif à la protection contre l'incendie des bâtiments d'habitation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nguyên Duy,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- les observations de Me Lepicard, avocat de Mme et MMJ..., I...et

M. A...et de MmeB..., et de Me Heusèle, avocat de la SCI du Cloître.

Des notes en délibéré, présentées par Me F...pour les requérants, Me Heusèle pour la SCI du Cloître et Me D...pour la commune de Jouarre, ont été enregistrées les 18 et

28 novembre 2016.

1. Considérant que la SCI du Cloître a déposé, le 27 décembre 2012, une demande de permis de construire tendant à la réalisation de deux bâtiments collectifs de 20 et 7 logements sur un terrain situé 16 rue Milon à Jouarre (77640), après démolition des constructions existantes sur la parcelle ; que le maire de Jouarre lui a délivré, le 19 juin 2013, un permis de construire valant autorisation de démolir ; qu'à la suite du rejet de leur recours gracieux formé le 7 août 2013 contre l'arrêté du 19 juin 2013, plusieurs voisins du projet ont saisi le tribunal administratif de Melun d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre ces deux décisions ; qu'après l'octroi à la SCI du Cloître, le 6 février 2015, d'un permis de construire modificatif, le tribunal administratif de Melun a, par le jugement du 12 mars 2015 dont appel, annulé partiellement l'arrêté du maire de Jouarre du 19 juin 2013 en tant qu'il autorise la création d'un nouvel accès au terrain d'assiette du projet d'une largeur utile inférieure à 3,50 mètres ; que, postérieurement à l'introduction de la requête d'appel, le maire de Jouarre a délivré à la SCI du Cloître un second permis modificatif par arrêté du 18 septembre 2015 afin de régulariser le vice constaté par le tribunal ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 600-5 du code de l'urbanisme : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation " ;

3. Considérant que lorsque le juge de première instance estime qu'un moyen susceptible de fonder l'annulation du permis litigieux est tiré d'un vice qui peut être régularisé par un permis modificatif et qu'il décide de faire usage de la faculté qui lui est ouverte par l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme de ne prononcer qu'une annulation partielle de l'autorisation de construire, il lui appartient de constater préalablement qu'aucun des autres moyens soulevés par les demandeurs n'est fondé et n'est susceptible d'entraîner l'annulation totale du permis de construire ; qu'il doit pour ce faire indiquer dans son jugement pour quels motifs ces moyens doivent être écartés ;

4. Considérant qu'en prononçant une annulation partielle du permis de construire litigieux sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme sans statuer expressément sur le bien-fondé des autres moyens soulevés par les demandeurs en première instance, le tribunal administratif de Melun a insuffisamment motivé son jugement ; que, dès lors, les requérants sont fondés à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier ; qu'il doit par conséquent être annulé en ce qu'il a rejeté le surplus des conclusions de la demande de première instance ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement, dans cette mesure, sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Melun ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. Considérant, d'une part, que lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises ; que les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial ;

7. Considérant, d'autre part, que la régularisation d'une illégalité affectant une partie identifiable du projet ne peut légalement faire l'objet d'un permis modificatif que si les travaux autorisés par le permis initial ne sont pas achevés et si les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité ne peuvent être regardées, par leur nature ou leur ampleur, comme remettant en cause sa conception générale ; que la seule circonstance que les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité portent sur des éléments tels que son implantation, ses dimensions ou son apparence ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce qu'elles fassent l'objet d'un permis modificatif ;

8. Considérant qu'après avoir délivré à la SCI du Cloître un permis de construire par arrêté du 19 juin 2013, le maire de Jouarre a accordé à cette dernière deux permis de construire modificatifs les 6 février et 18 septembre 2015 ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ressort des pièces du dossier que les modifications ainsi apportées au permis initial, qui portent essentiellement sur le revêtement extérieur et les couvertures des bâtiments, l'aspect et le style des façades ainsi que sur la largeur de l'accès au terrain d'assiette, ne sont pas d'une ampleur telle qu'elles auraient nécessité l'octroi d'un nouveau permis de construire ;

En ce qui concerne la légalité externe :

9. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'en application de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, le maire de Jouarre a donné délégation, par arrêté du 31 mars 2008, à M. K...V..., 5ème adjoint, pour signer tous les documents en matière d'urbanisme ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 19 juin 2013 doit être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que si, dans son avis du 9 janvier 2013, ERDF a indiqué au maire avoir fondé sa réponse sur l'hypothèse d'une puissance de raccordement de 183 kVA en l'absence d'informations concernant celle nécessitée effectivement par le projet, il ressort des pièces du dossier que la SCI du Cloître avait expressément indiqué, dans le formulaire de demande de permis de construire initial, que le projet exigeait une puissance électrique d'environ 300 kVA ; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la consultation d'ERDF aurait été irrégulière, faute pour ce service d'avoir disposé d'un dossier complet ; qu'en tout état de cause, l'erreur ainsi commise par ERDF, qui n'a eu d'incidence que sur l'application de la contribution financière prévue à l'article L. 342-6 du code de l'énergie pour le raccordement des consommateurs au réseau de distribution, n'a pas privé les intéressés d'une garantie et n'a pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise par le maire de Jouarre ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure doit donc être écarté ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des articles R. 423-50 et suivants du code de l'urbanisme que le maire de Jouarre n'était pas tenu de consulter le service départemental d'incendie et de secours, dès lors que le permis de construire ne porte pas sur la construction d'un immeuble de grande hauteur, d'un établissement recevant du public ou d'une installation classée pour la protection de l'environnement ; que la seule circonstance que le pétitionnaire avait rédigé une notice de sécurité expliquant les mesures prises pour assurer le respect des règles de sécurité incendie et pour permettre aux engins de secours d'accéder aux bâtiments n'obligeait pas le maire à procéder à cette consultation et le défaut de consultation est en lui-même sans influence sur la validité de l'appréciation que le maire a portée, au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, en ne refusant pas de délivrer le permis de construire au regard des risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique ; que le moyen tiré du vice de procédure pour défaut de consultation de ce service doit donc être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

S'agissant de la composition du dossier de permis de construire :

12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinant (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain " ;

13. Considérant que la circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable ;

14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les demandes de permis de construire initial et modificatifs décrivent l'état initial du terrain d'assiette du projet ainsi que de ses abords et comportent une note de présentation et plusieurs photographies permettant de situer ce terrain dans son environnement proche ; que les plans complétés par les photographies ainsi que par les documents graphiques joints aux dossiers font également apparaître les immeubles achevés dans leur environnement et permettent d'apprécier l'insertion du projet, y compris celle du bâtiment B situé en fond de parcelle, par rapport à la hauteur, au volume mais également à l'aspect extérieur des constructions avoisinantes ; que les plans PC5 ou PCM5 étant une vue droite de la façade sur rue, ils ne pouvaient faire apparaître que l'accès des véhicules et des piétons est en recul de 5 m et non à l'alignement ; que si le plan PC7 semble figurer un accès à l'alignement, le plan PC6 figure nettement le retrait de 5 m en représentant un véhicule à l'arrêt devant le portail ; que l'implantation de l'accès ressort également du plan de masse, de la note de présentation et de la notice de sécurité ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le dossier de demande de permis de construire ne décrirait pas suffisamment l'insertion du projet dans son environnement en méconnaissance des articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ; qu'en tout état de cause, les incohérences ou insuffisances du dossier n'ont pas été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable ;

15. Considérant, en deuxième lieu, que la délivrance à la SCI du Cloître d'un permis de construire modificatif le 6 février 2015 a eu pour effet de régulariser le permis initial qui avait omis de mentionner précisément l'existence d'une remise au nombre des constructions à démolir, en plus du garage et de l'habitation principale existant sur la parcelle du projet ;

16. Considérant, en troisième lieu, que l'article R. 451-1 du code de l'urbanisme dispose que : " La demande de permis de démolir précise : (...) / c) La date approximative à laquelle le ou les bâtiments dont la démolition est envisagée ont été construits. " ;

17. Considérant qu'il est constant que ni le formulaire de demande de permis de construire initial, ni les deux formulaires de demande de permis modificatifs ne précisent la date approximative des constructions à démolir ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'étaient jointes aux permis de construire initial et modificatif des photographies représentant l'habitation principale, la remise et le garage dont la démolition est envisagée, ainsi que des cartes indiquant leur localisation sur le terrain d'assiette du projet ; que, dans ces conditions, l'omission de la date approximative de construction de ces bâtiments n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative ; que le moyen tiré de la violation de l'article R. 451-1 du code de l'urbanisme doit donc être écarté ;

18. Considérant, en quatrième lieu, que, dès lors que les pièces jointes aux deux demandes de permis de construire, initial et modificatif, ne peuvent s'apprécier séparément, il ne ressort pas des pièces du dossier que le permis de construire modificatif du 6 février 2015 aurait été délivré au vu d'un dossier incomplet au regard des dispositions des articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ;

S'agissant de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :

19. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " ;

20. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 111-3-1 du code de l'urbanisme alors applicable : " Les projets d'aménagement et la réalisation des équipements collectifs et des programmes de construction qui, par leur importance, leur localisation ou leurs caractéristiques propres peuvent avoir des incidences sur la protection des personnes et des biens contre les menaces et les agressions, doivent faire l'objet d'une étude préalable de sécurité publique permettant d'en apprécier les conséquences. " ; que l'article R. 111-48 du même code, pris pour l'application de l'article L. 111-3-1 précité, fixe la liste des opérations soumises à l'étude de sécurité publique prévue au h) de l'article R. 431-16 du même code ;

21. Considérant que si les requérants soutiennent que la notice de sécurité jointe à la demande de permis de construire comporte des erreurs et omissions, il résulte des dispositions précitées que le projet litigieux n'entre dans aucune des hypothèses dans lesquelles une telle notice devait être produite par le pétitionnaire ; que si cette notice ne mentionne pas l'emplacement de la borne incendie la plus proche, il ressort des pièces du dossier que les deux bâtiments à usage d'habitation collectif dont la construction est envisagée seront accessibles aux véhicules par un portail de 3,5 m de large situé en retrait de 5 m par rapport à la rue Milon, en sens unique de circulation ; qu'il en ressort également que ces immeubles seront desservis par des voies de dessertes internes de 5 m de large, que les appartements du bâtiment A seront accessibles par des coursives et un escalier à l'air libre et que les logements du bâtiment B disposeront d'un escalier " encloisonné " à l'abri des fumées situé au plus à 7,83 m des paliers les plus éloignés ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'arrêté du 31 janvier 1986 relatif à la protection contre l'incendie des bâtiments d'habitation n'impose pas que l'escalier de secours soit situé à moins de 7 m des portes palières ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la desserte du terrain et la configuration des bâtiments ne permettraient pas l'accès et la circulation des véhicules de lutte contre l'incendie et une évacuation rapide de leurs occupants ; que, par suite, le maire de Jouarre n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans son appréciation des risques, en particulier d'incendie, auxquels pourraient être exposées les constructions projetées ; par suite, le moyen tiré de la violation de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

S'agissant du moyen tiré de la violation de l'article UA 3 du plan d'occupation des sols de la commune de Jouarre :

22. Considérant qu'aux termes de l'article UA 3 " accès et voirie " du plan d'occupation des sols de la commune de Jouarre, s'agissant des accès : " 3.1. Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisins dans les conditions fixées à l'article 682 du code civil. / 3.2 Les accès et voies de desserte doivent présenter des caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de sécurité, de la défense contre l'incendie et de la protection civile et être adaptés à l'importance et à la destination de l'opération future. / 3.3 Les nouveaux accès et nouvelles voies de dessertes doivent présenter une largeur utile d'au moins 3,5 m (...) et permettre le croisement de deux files de voitures, avoir moins de 75 m de longueur et desservir au plus 5 logements ou des établissements occupant moins de 10 personnes. " ;

23. Considérant que si l'entrée " véhicules " du terrain, donnant sur la rue Milon, ne mesurait initialement que 3,28 m de large, le permis de construire modificatif délivré le

18 septembre 2015 a porté sa largeur à 3,50 m, en maintenant un portail piéton de 90 cm de large prolongé par une allée de 1,28 m de large ; que si les requérants font par ailleurs valoir que les voies de circulation créées sur la parcelle du projet, entre les bâtiments A et B, ne permettent pas le croisement de deux files de voitures alors qu'elles ont vocation à desservir les parkings des 27 logements, les prescriptions ainsi visées de l'article 3.3 du POS doivent être regardées, compte tenu de l'économie globale de ce document d'urbanisme, comme ne s'appliquant qu'aux voies de desserte extérieures du projet, à l'exclusion des voies de circulation internes à celui-ci ; que, d'ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'accès au terrain présenterait une dangerosité particulière, alors que celui-ci sera situé en retrait par rapport à l'alignement, qu'il se fera par la rue Milon qui est en sens unique de circulation et que l'agence routière territoriale consultée sur le projet a émis un avis favorable le 15 février 2013 ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article UA 3 doit être écarté ;

S'agissant du moyen tiré de la violation de l'article UA 10 du plan d'occupation des sols de la commune de Jouarre :

24. Considérant qu'aux termes de l'article UA 10 du plan d'occupation des sols de la commune de Jouarre : " 10.1 La hauteur des constructions à usage d'habitation, mesurée du sol naturel, ne peut excéder R+2+C, soit 9 m à l'égout du toit et 15 m au faîtage, 10.2 Les combles aménageables ne peuvent constituer au maximum qu'un étage. Dans tous les cas, la hauteur des bâtiments devra tenir compte des hauteurs voisines et ne pourra être inférieure à 6 m à l'égout du toit " ;

25. Considérant, en premier lieu, que les requérants soutiennent que les bâtiments A et B du projet excéderaient de 2,94 m la hauteur maximale de 9 m à l'égout du toit, en raison de la présence, en décrochage de la façade, de bow-windows s'élevant jusqu'au niveau des combles compris ; qu'il ressort toutefois des plans de façade du permis de construire modificatif du

6 février 2015 que ces éléments ont été supprimés sur la façade du bâtiment A donnant sur la rue Milon et remplacés, sur le bâtiment B, par des décrochages de façade surmontés d'une toiture à double pente ; que, dans ces conditions, ces nouveaux éléments doivent être regardés comme faisant partie intégrante des combles et non comme un niveau supplémentaire, de sorte que seule la hauteur maximale de 15 m au faîtage s'imposait à eux ;

26. Considérant, en deuxième lieu, que l'article UA 10.3 qui fixe une hauteur minimale ne s'applique qu'aux bâtiments à usage d'habitation, à l'exclusion des bâtiments annexes à

ceux-ci tels que les garages et abris de jardin ; que, par suite, le permis de construire a pu légalement prévoir que le local prévu pour le stationnement des véhicules à deux roues ne mesurerait que 3,31 m de haut ;

27. Considérant, en troisième lieu, que si les constructions projetées comportent deux étages ainsi que des combles et présentent une hauteur maximale de 8,80 m à l'égout du toit et de 13,59 m au faîtage alors que plusieurs bâtiments avoisinants comportent un étage de moins, il ressort des pièces du dossier, notamment du plan de la façade du bâtiment A, des photographies et documents graphiques joints aux demandes de permis de construire initial et modificatif, que le bâtiment A jouxte un bâtiment d'une hauteur à l'égout de 8,20 m et que le projet est également situé dans le voisinage d'immeubles comportant 3 à 4 étages ; que les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que le projet n'aurait pas tenu compte des hauteurs voisines ;

28. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 10 du POS doit être écarté ;

S'agissant du moyen tiré de la violation de l'article UA 11 du plan d'occupation des sols de la commune de Jouarre :

29. Considérant qu'aux termes de l'article UA 11 du plan d'occupation des sols de la commune de Jouarre : " 11.1 Les constructions et installations doivent par leur situation, leurs dimensions et leur aspect extérieur respecter le caractère et l'intérêt des lieux avoisinants, des sites, des paysages naturels et urbains locaux. / 11.2 Les différents murs d'un bâtiment ou d'un ensemble de bâtiments aveugles ou non, visibles ou non de la voie publique, doivent présenter une unité d'aspect. En particulier, les constructions annexes seront traitées comme les façades et pignons du bâtiment principal. / (...) 11.6 Les façades et pignons seront soit traités en pierre du pays ou de taille, soit recouverts d'un enduit gratté, taloché ou lissé, à l'exclusion de tout autre matériau. L'enduit sera de teinte beige, gris-beige, ocre, gris ocré ou pierre. / (...) 11.8 Les débords en façade et sur pignon sont interdits. / (...) 11.16 Les toitures terrasses sont interdites (...) " ;

30. Considérant, en premier lieu, que si le permis de construire initial a été délivré en violation des dispositions précitées de l'article UA 11 du plan d'occupation des sols, il ressort des pièces du dossier que le permis de construire modificatif accordé à la SCI du Cloître le

6 février 2015 a prévu, d'une part, la suppression des terrasses du bâtiment A, des balcons du bâtiment B ainsi que de toutes les toitures terrasses et notamment de celle du local de stationnement des deux roues, et leur remplacement par des couvertures à deux pentes ou à faible pente, et d'autre part, le traitement identique des façades des bâtiments principaux et des bâtiments annexes par enduit " gratté ", en substitution des habillages en bois initialement prévus ; que, dans ces conditions, le permis de construire modificatif a eu pour effet de régulariser le permis de construire initial au regard des dispositions des articles UA 11.2, 11.6, 11.8 et 11.16 de l'article 11 du plan d'occupation des sols ;

31. Considérant, en second lieu, que si le projet est situé dans un quartier comportant plusieurs maisons individuelles anciennes comportant un étage avec combles, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 27, que d'autres constructions avoisinantes sont d'une hauteur plus importante qui s'harmonise avec la volumétrie des deux bâtiments projetés ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que, dans le cadre du permis de construire modificatif, les façades contemporaines revêtues d'habillage en bois initialement prévues ont été modifiées afin de leur conférer un style " briard " et les toitures terrasses remplacées par des toitures à pente afin de rapprocher les caractéristiques des bâtiments, en ce qui concerne les matériaux, l'aspect extérieur et les toitures, de celles des constructions voisines ; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le permis de construire a été accordé en méconnaissance des dispositions de l'article UA 11.1 du POS ;

S'agissant du moyen tiré de la violation de l'article UA 12 du plan d'occupation des sols :

32. Considérant aux termes de l'article UA 12 du plan d'occupation des sols : " 12.1 Les places réservées au stationnement des véhicules doivent correspondre aux besoins des constructions admises dans la zone et être réalisées en dehors des voies publiques. / (...) 12.3 Il est exigé un emplacement au droit de chaque logement. En cas de copropriété, il est exigé une place de stationnement pour 50 m² d'habitation. / (...) Pour les projets non prévus aux alinéas précédents, les places réservées au stationnement des véhicules doivent correspondre aux besoins des constructions admises dans la zone et être réalisées en dehors des voies publiques " ;

33. Considérant que si les 27 appartements projetés sont destinés à la location et resteront donc la propriété de la SCI du Cloître, il ressort des pièces du dossier que le permis de construire, qui doit conduire à la création d'une surface de plancher de 1 769 m², a prévu la création de 38 places de stationnement, soit trois places de plus que dans le cas où les deux immeubles seraient placés sous un régime de copropriété ; que, dans ces conditions, le maire de Jouarre a pu estimer que le nombre de places ainsi réservées au stationnement des véhicules correspondait aux besoins du projet ; qu'ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en ne prévoyant pas au moins deux places de stationnement par logement de deux à trois pièces, le permis de construire aurait méconnu l'article UA 12 du POS ;

34. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fin de non-recevoir opposées par la SCI du Cloître et la commune de Jouarre, que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 19 juin 2013 modifié les 5 février et 18 septembre 2015 ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des requérants les sommes demandées par la SCI du Cloître et la commune de Jouarre au titre des frais exposés pour leur défense ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administrative de Melun en date du 12 mars 2015 est annulé en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de la demande de première instance.

Article 2 : Le surplus des conclusions de première instance et d'appel de Mme K...J..., de M. L... J..., de M. Q... J..., de M. et Mme N... A...et de Mme T... B... sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SCI du Cloître et la commune de Jouarre sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme K...J..., à M. L...J..., à M. Q... J..., à M. et Mme N...A..., à Mme T...B..., à la commune de Jouarre et à la SCI du Cloître.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.

Lu en audience publique le 1er décembre 2016.

Le rapporteur,

P. NGUYÊN DUY La présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M. G...La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA01924


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01924
Date de la décision : 01/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Pearl NGUYÊN-DUY
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : SELARL MARTIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-01;15pa01924 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award