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29/11/2016 | FRANCE | N°15PA04076

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 29 novembre 2016, 15PA04076


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler la décision du 29 mars 2013 par laquelle le jury statuant sur sa demande de validation des acquis de l'expérience en vue de l'obtention du diplôme d'éducateur spécialisé a refusé de lui attribuer ce diplôme et ne lui a validé aucun domaine de compétence, d'autre part, d'enjoindre au service interacadémique des examens et des concours des académies de Créteil-Paris-Versailles de lui délivrer le diplôme d'éducateur spéci

alisé.

Par un jugement n° 1303552 du 22 octobre 2015, le Tribunal administratif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, d'annuler la décision du 29 mars 2013 par laquelle le jury statuant sur sa demande de validation des acquis de l'expérience en vue de l'obtention du diplôme d'éducateur spécialisé a refusé de lui attribuer ce diplôme et ne lui a validé aucun domaine de compétence, d'autre part, d'enjoindre au service interacadémique des examens et des concours des académies de Créteil-Paris-Versailles de lui délivrer le diplôme d'éducateur spécialisé.

Par un jugement n° 1303552 du 22 octobre 2015, le Tribunal administratif de Melun a annulé cette décision du jury du 29 mars 2013 et a enjoint au service interacadémique des examens et des concours des académies de Créteil-Paris-Versailles de réexaminer dans un délai de six mois sa candidature à l'obtention du diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé par la validation des acquis de l'expérience.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 9 novembre 2015 et un mémoire enregistré le 4 septembre 2016, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 22 octobre 2015 en tant qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au service interacadémique des examens et des concours des académies de Créteil-Paris-Versailles de lui délivrer le diplôme d'éducateur spécialisé ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale de lui délivrer le diplôme d'éducateur spécialisé dans un délai de deux mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé au regard des exigences de l'article L. 9 du code de justice administrative ; le rejet des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui délivrer le diplôme d'éducateur spécialisé impliquait que le tribunal administratif indique les motifs pour lesquels les autres moyens, en particulier celui tiré du détournement de pouvoir, étaient écartés ;

- l'administration ne pouvait reprendre, après l'annulation de sa première décision, une décision encore plus défavorable, en vertu du principe de l'interdiction de la " reformatio in pejus " ; or, en l'espèce, la nouvelle décision d'ajournement ne l'a pas fait bénéficier de la dispense prévue par l'article 2 de l'arrêté du 20 juin 2007 relatif au diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé, contrairement à la première décision d'ajournement annulée en 2013 par le tribunal ; l'annulation de la nouvelle décision ne doit donc pas la priver du bénéfice de la dispense prévue par ces dispositions ;

- la décision en litige est entachée de détournement de pouvoir ; le nouvel ajournement constitue une sanction déguisée ; les membres du jury ont procédé à un examen superficiel de son dossier ;

- l'annulation d'une délibération d'un jury d'examen, au motif d'un détournement de pouvoir, peut impliquer la délivrance du diplôme sollicité ;

- les moyens soulevés par le ministre dans son appel incident ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 août 2016, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement.

Il soutient que :

- le moyen tiré de ce que la division du jury en 41 groupes d'examinateurs était illégale n'a pas été soulevé par Mme B...devant le tribunal administratif ;

- compte tenu des difficultés à recruter des examinateurs, il a été nécessaire de diviser le jury en 41 groupes d'examinateurs ; que cette division du jury était donc justifiée et n'a pas porté atteinte au principe d'égalité ;

- que le jury était régulièrement composé ;

- Mme B...a été mise à même d'actualiser son dossier de candidature avant que le jury ne se prononce à nouveau sur son cas.

Une ordonnance du 29 août 2016 a fixé la clôture de l'instruction au 15 septembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de l'éducation ;

- l'arrêté du 20 juin 2007 relatif au diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Petit,

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

1. Considérant que MmeB..., travailleur social, s'est portée candidate à la validation des acquis de l'expérience du diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé en 2011 : que, par une décision du 25 mars 2011, le jury a refusé de lui attribuer ce diplôme, ne lui a validé aucun domaine de compétences, mais a admis, en application des dispositions du II de l'article L. 335-5 du code de l'éducation, la dispense des titres ou diplômes en principe exigés des candidats par l'article 2 de l'arrêté du 20 juin 2007 relatif au diplôme d'Etat d'éducateur spécialisé ; que cette décision du 25 mars 2011 a été annulée par le Tribunal administratif de Melun par un jugement n° 1103847 du 7 février 2013 ; qu'en exécution de ce jugement, Mme B...a été convoquée le 5 mars 2013 à une nouvelle épreuve d'entretien le 29 du même mois ; que le jury a, le 29 mars 2013, décidé à nouveau de ne lui valider aucun domaine de compétences, sans la dispenser des titres ou diplômes exigés par l'article 2 de l'arrêté du 20 juin 2007 précité, et a refusé de lui délivrer le diplôme ; que Mme B...a alors saisi à nouveau le Tribunal administratif de Melun en lui demandant d'annuler cette décision du 29 mars 2013 et d'enjoindre au service interacadémique des examens et des concours des académies de Créteil-Paris-Versailles de lui délivrer le diplôme d'éducateur spécialisé ; que par un jugement du 22 octobre 2015, le Tribunal administratif de Melun a annulé cette décision du jury du 29 mars 2013, en estimant, d'une part, que la division du jury en 41 groupes d'examinateurs n'était pas justifiée et avait été décidée en méconnaissance des dispositions de l'article D. 451-44 du code de l'action sociale et des familles et, d'autre part, que Mme B...n'avait pas été mise à même de fournir un dossier actualisé relatif à ses acquis professionnels ; qu'il a, en conséquence, par l'article 2 de son jugement, enjoint au service interacadémique des examens et des concours des académies de Créteil-Paris-Versailles de réexaminer dans un délai de six mois la candidature de l'intéressée ; que Mme B...doit être regardée comme demandant à la Cour de réformer l'article 2 de ce jugement et d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de lui délivrer le diplôme d'éducateur spécialisé ; que le ministre présente des conclusions d'appel incident tendant à l'annulation de la totalité du jugement ;

Sur l'appel incident du ministre :

2. Considérant que contrairement à ce que soutient le ministre, le moyen tiré de ce que la division du jury en 41 groupes d'examinateurs était illégale a été soulevé par Mme B...en première instance ; que le jugement n'est donc pas entaché d'irrégularité en ce qu'il s'est fondé notamment sur ce moyen pour annuler la décision en litige ;

3. Considérant, en premier lieu, que le dernier alinéa de l'article D. 451-44 du code de l'action sociale et des familles permet au jury délivrant le diplôme d'éducateur spécial de se subdiviser en groupes d'examinateurs " en tant que de besoin " ; que la division du jury en groupes d'examinateurs n'est légalement possible, pour toute épreuve, que si elle est nécessaire à l'organisation de l'examen compte tenu, notamment du nombre des candidats et des caractères de l'épreuve en cause, et si, eu égard aux modalités retenues, elle ne compromet pas l'égalité entre les candidats ; qu'il y a lieu, pour apprécier la nécessité pour le jury de se subdiviser ainsi en groupes d'examinateurs, de prendre notamment en considération le nombre des candidats et la nature des épreuves et de vérifier que les exigences relatives à l'égalité entre les candidats ont été respectées ; qu'en l'espèce, ni la circonstance que la durée de l'épreuve serait, pour chaque candidat, d'environ une heure, ni celle que le recrutement d'examinateurs serait difficile, compte tenu notamment de la faiblesse de la rémunération qui leur est allouée, ne suffisent à justifier la mise en place de 41 groupes d'examinateurs pour 214 candidats ; qu'ainsi, la décision en litige est intervenue en méconnaissance du principe d'égalité ; qu'en revanche, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il ne ressort pas des pièces du dossier que la composition des différents groupes d'examinateurs, qui comprenaient chacun trois membres représentant, respectivement, les centres de formation d'éducateurs spécialisés, les professionnels et les ministres concernés, conformément aux prescription de l'arrêté du 6 juillet 1990 fixant les modalités de sélection et de formation des éducateurs spécialisés et d'organisation des examens pour l'obtention du diplôme d'Etat, aurait été irrégulière ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé la décision du jury en date du 29 mars 2013 ;

Sur l'appel principal de MmeB... :

5. Considérant que le tribunal administratif n'était pas tenu de se prononcer sur le bien-fondé de l'ensemble des moyens soulevés en première instance par MmeB..., ni, en tout état de cause, sur un moyen d'ordre public tiré de ce que la seconde décision d'ajournement ne pouvait être plus défavorable que la première ; que l'annulation de la décision du jury du 29 mars 2013 implique seulement, compte tenu du motif d'annulation confirmé par le présent arrêt, le réexamen de la candidature de la requérante, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif n'a pas enjoint au service interacadémique ou au ministre chargé de l'éducation nationale de lui délivrer le diplôme d'éducateur spécialisé ; qu'en conséquence, ses conclusions à fins d'injonction ainsi que celles prononcées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 novembre 2016.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY-PASSUELLO

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 15PA04076


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04076
Date de la décision : 29/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

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Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : PLATEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 10/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-11-29;15pa04076 ?
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