La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/11/2016 | FRANCE | N°14PA03252

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 29 novembre 2016, 14PA03252


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) à lui verser la somme de 186 440 euros, augmentée des intérêts au taux légal, eux-mêmes capitalisés, en réparation des préjudices résultant de la décision du 30 mars 2012 refusant de le titulariser, en fin de stage, dans le corps des assistants en gestion administrative.

Par un jugement n° 1309705/5-2 du 22 mai 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.<

br>
Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 juillet 2014 et des...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) à lui verser la somme de 186 440 euros, augmentée des intérêts au taux légal, eux-mêmes capitalisés, en réparation des préjudices résultant de la décision du 30 mars 2012 refusant de le titulariser, en fin de stage, dans le corps des assistants en gestion administrative.

Par un jugement n° 1309705/5-2 du 22 mai 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 juillet 2014 et des mémoires enregistrés le 16 septembre 2014, le 14 octobre 2014 et le 11 avril 2016, M.D..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 22 mai 2014 ;

2°) de condamner l'INRA à lui verser la somme de 186 440 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 2012, eux-mêmes capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de l'INRA la somme de 2 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a omis de statuer sur ses conclusions tendant à la réparation des préjudices résultant de sa non-admissibilité aux concours externes 2012 d'assistants ingénieurs en gestion financière et comptable et d'ingénieur d'études chargés de la gestion financière et comptable ;

- il n'a pas été mis en mesure par l'INRA d'exercer les fonctions pour lesquelles il a été recruté ; en effet, il a été pénalisé par le retard avec lequel des identifiants lui ont été donnés pour les outils informatiques ; il n'a pas été autorisé à superviser le sous-secteur marchés-travaux ; il n'a pas bénéficié d'offres de formation ; il n'a pas bénéficié de l'aide d'un agent référent ; sa responsable hiérarchique était elle-même stagiaire ; le " comité de suivi " mis en place de manière inédite par l'INRA n'a pas eu pour objectif réel de l'aider ; l'INRA ne lui pas accordé une prolongation de stage ; il n'a pas bénéficié d'un entretien de fin de stage ; le compte-rendu de stage lui a été caché ;

- les missions qui lui ont été confiées ne correspondaient pas à celles d'un assistant ingénieur en gestion administrative ; il s'est heurté à l'hostilité de sa hiérarchie et de ses collègues ;

- les reproches qui lui ont été adressés, notamment ceux relatifs aux problèmes relationnels qu'il aurait rencontrés, ne sont pas fondés ; sa responsable directe a fait preuve de partialité ; les évaluations successives de son travail sont contradictoires, le contenu du rapport d'évaluation à mi-stage du 30 mars 2011 et celui du premier compte-rendu du comité de suivi sont divergents ; il n'a reçu aucune offre concrète de formation pendant sa deuxième période de stage ; aucune lettre de mission n'a défini clairement ses missions ; le refus de titularisation est, dès lors, entaché d'illégalité ; tous les autres stagiaires ont été titularisés ; il a bénéficié ensuite d'une évaluation très satisfaisante ;

- la décision mettant fin au stage ne comporte pas le visa de la consultation de la commission mixte paritaire ;

- sa non-admissibilité aux deux concours précités s'explique par la discrimination dont il a fait l'objet, liée au refus de titularisation ; il a obtenu la même note, alors qu'il s'agissait de deux concours différents.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2014, l'INRA représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de M. D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 6 juillet 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 juillet 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le décret n° 83-1260 du 30 décembre 1983 fixant les dispositions statutaires communes aux corps de fonctionnaires des établissements publics scientifiques et technologiques (EPST) ;

- le décret n° 84-1207 du 28 décembre 1984 modifié relatif au statut particulier des corps de fonctionnaires de l'Institut national de la recherche agronomique ;

- le décret n° 94-874 du 7 octobre 1994 modifié relatif aux dispositions communes applicables aux stagiaires de l'Etat et de ses établissements publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Petit,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- les observations de MeA..., pour M.D...,

- et les observations de MeC..., pour l'INRA.

Une note en délibéré a été présentée le 19 novembre 2016 pour M. D...par MeA....

1. Considérant que M. D...a été titularisé à compter du 1er septembre 2007 dans le corps des techniciens de la recherche de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) ; qu'à la suite de sa réussite au concours externe d'assistant ingénieur, corps de catégorie A, il a été affecté, à compter du 1er octobre 2010, en qualité de stagiaire, dans les services déconcentrés d'appui à la recherche (SDAR) du centre de recherche de Paris, pour y exercer les fonctions de responsable du secteur " achats/marchés " ; que la commission administrative paritaire a rendu le 17 octobre 2011 un avis défavorable à sa titularisation ; que par une décision du 27 décembre 2011, confirmée par un arrêté du 30 mars 2012, la présidente de l'INRA a mis fin au stage de M. D...à compter du 1er octobre 2011, refusant ainsi de le titulariser ; que M. D... a dû réintégrer son corps d'origine mais a présenté en 2012, deux concours de catégorie A organisés par l'INRA, auxquels il n'a pas été admissible ; qu'il a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner l'INRA à lui verser une somme de 186 440 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de ce refus de titularisation ; que par un jugement du 22 mai 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que M. D... fait appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que, dans ses écritures de première instance, M. D...n'a pas invoqué le caractère fautif que présenterait sa non-admissibilité aux concours externes 2012 d'assistants ingénieurs en gestion financière et comptable et d'ingénieur d'études chargés de la gestion financière et comptable ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier pour avoir omis de statuer sur la responsabilité de l'INRA du fait de cette non-admissibilité ;

Sur la responsabilité de l'INRA à raison du refus de titularisation :

3. Considérant, en premier lieu, que l'institution d'un stage avant la titularisation de l'agent a pour objet de permettre à l'autorité investie du pouvoir de nomination de vérifier à l'issue d'une période prédéterminée, éventuellement prolongée, que l'agent possède les aptitudes suffisantes pour occuper les fonctions correspondant à son corps ou à son cadre d'emplois ; qu'il doit en conséquence avoir été mis en mesure d'exercer les fonctions pour lesquelles il a été recruté ;

4. Considérant que s'il est constant que M. D...n'a obtenu des identifiants informatiques que plusieurs semaines après le début de son stage, le requérant admet lui-même qu'il a pu se servir des identifiants de ses collègues ; que s'il est également constant qu'il n'a pas été chargé, contrairement au libellé de la fiche de poste, de superviser le sous-secteur " marchés-travaux ", lequel relevait du secteur " achats/marchés ", les dispositions de l'article 93 du décret du 30 décembre 1983 susvisé fixant les dispositions statutaires communes aux corps de fonctionnaires des établissements publics scientifiques et technologiques (EPST) ne prévoient pas que les assistants ingénieurs assurent systématiquement des missions d'encadrement ; qu'il résulte de l'instruction que si les fonctions confiées au requérant ont été, au fil du stage, allégées et simplifiées, ces mesures s'expliquent par les difficultés rencontrées par M.D... ; que l'INRA a mis en place, à compter de mars 2011, compte tenu de ces difficultés, un " comité de suivi ", chargé d'accompagner le stagiaire et composé de deux " référents-métiers " ainsi que d'un représentant syndical, dispositif, prévu par une note de service du 16 février 1995 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce comité aurait eu pour véritable objectif de ne pas l'aider à surmonter ses difficultés ; qu'alors que plusieurs offres de formation ont été proposées au requérant, celui-ci a estimé, contre l'avis de sa hiérarchie, que le traitement des dossiers qui lui étaient confiés était prioritaire ; que des réunions hebdomadaires ont été organisées avec le supérieur hiérarchique ; qu'une " lettre de mission " a permis de déterminer les dossiers de marchés devant être traités en priorité ; que, dans ces conditions, M. D... n'établit pas que des dysfonctionnements dans l'organisation du service où il était affecté l'auraient empêché de faire la preuve de son aptitude à exercer, en qualité de stagiaire, les fonctions correspondant aux emplois qu'il serait appelé à occuper après sa titularisation ; qu'enfin, il ne résulte pas de l'instruction que son environnement professionnel lui aurait été hostile ; qu'ainsi, M. D...n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas été mis en mesure de faire la preuve de ses aptitudes ;

5. Considérant en deuxième lieu, qu'aucune disposition législative ou règlementaire ne prévoit qu'une décision de non titularisation soit précédée d'un entretien préalable avec le stagiaire ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir, sur ce point, de la note interne de l'INRA du 16 février 1995 ; que si M. D...soutient que le bilan de stage établi par ses supérieurs hiérarchiques en vue de la commission administrative paritaire consultée, le 17 octobre 2011, ne lui a pas été préalablement communiqué, un agent public qui a, à la suite de son recrutement, la qualité de stagiaire, se trouve dans une situation probatoire et provisoire ; qu'il en résulte qu'alors même que la décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne, elle n'est pas - sauf à revêtir le caractère d'une mesure disciplinaire - au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier, et n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et les règlements ; qu'enfin, l'INRA n'était pas tenu de prolonger le stage avant de décider de ne pas titulariser M. D... ;

6. Considérant, en troisième lieu, que selon le rapport de mi-stage du 7 avril 2011, qui comporte un avis réservé sur la titularisation et propose la mise en place d'un compte de suivi, " M. D...est un agent sérieux qui s'investit dans son nouveau poste. Il s'approprie les processus et les outils associés à son poste. Toutefois, il semble rencontrer quelques difficultés pour assimiler cet environnement nouveau pour lui, dans un contexte de sollicitation forte. Ces difficultés sont peut-être source de stress et nuisent parfois aux bonnes relations avec ses collègues et expliquent pour partie des retards de traitement de certains dossiers et une gestion des priorités pas toujours adaptée... " ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, ce rapport de mi-stage avait déjà mis en évidence des difficultés ; qu'au cours des mois suivants, ses supérieurs hiérarchiques ainsi que le comité de suivi ont relevé la persistance d'erreurs ou d'incompréhensions, auxquelles se sont ajoutées des tensions dans ses relations avec ses collègues ; que l'évaluation établie postérieurement à la décision de non titularisation, pour une période incluant le stage, n'est pas contradictoire avec l'appréciation portée sur les aptitudes du requérant pendant cette période, dès lors qu'elle précise que le requérant possède les qualités nécessaires à l'exercice des fonctions de technicien, grade de catégorie B ; que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, l'INRA n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que M. D...ne possédait pas les aptitudes suffisantes pour occuper des fonctions correspondant au corps d'assistant ingénieur ; qu'enfin, la circonstance invoquée par le requérant que les stagiaires l'ayant précédé auraient tous été titularisés est sans incidence sur l'appréciation portée par l'INRA sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé ; qu'il résulte de ce qui précède que les conditions de déroulement de son stage et sa non titularisation ne peuvent être regardés comme révélant une faute de l'administration susceptible d'engager sa responsabilité et d'ouvrir droit à réparation des préjudices réclamés par M. D... ;

Sur la responsabilité de l'INRA à raison de la non-admissibilité du requérant à d'autres concours externes organisés en 2012:

7. Considérant que, comme il a été dit au point 3 ci-dessus, le préjudice qui résulterait de la faute qu'aurait commise le jury en le déclarant non-admissible à ces concours se rattache à un fait générateur différent de celui, tiré du refus de titularisation dans le corps des assistants ingénieurs, qui a seul été invoqué devant le tribunal administratif ; que les conclusions tendant à la réparation de ce préjudice sont, par suite, irrecevables ; qu'au demeurant, il ne résulte pas de l'instruction que les jurys de ces concours auraient cherché à éliminer le requérant en raison de sa non-titularisation dans le corps des assistants ingénieurs ; qu'ainsi, et en tout état de cause, la non-admissibilité du requérant à ces concours ne peut être regardée comme révélant un comportement fautif de la part de l'INRA ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D...le versement à l'INRA de la somme de

1 000 euros au titre des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : M. D...versera à l'Institut national de la recherche agronomique la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et à l'Institut national de la recherche agronomique.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 novembre 2016.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY-PASSUELLO

La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chacun en ce qui les concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 14PA03252


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03252
Date de la décision : 29/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-03-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Nominations. Titularisation.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : ICARD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-11-29;14pa03252 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award