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18/11/2016 | FRANCE | N°16PA01629

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 18 novembre 2016, 16PA01629


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Abjidado a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, à titre principal, de prononcer la décharge de la totalité des rehaussements d'impôts et de pénalités d'un montant de 15 567 022 F CFP et, à titre subsidiaire, de prononcer la déductibilité des déficits de l'année 2012 sur les résultats de l'année 2013.

Par un jugement n° 1500311-1 du 17 mars 2016, le Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Pr

océdure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 mai 2016, la société à responsabilité limit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Abjidado a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, à titre principal, de prononcer la décharge de la totalité des rehaussements d'impôts et de pénalités d'un montant de 15 567 022 F CFP et, à titre subsidiaire, de prononcer la déductibilité des déficits de l'année 2012 sur les résultats de l'année 2013.

Par un jugement n° 1500311-1 du 17 mars 2016, le Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 mai 2016, la société à responsabilité limitée Abjidado, représentée par la SELARL Chevalier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500311-1 du 17 mars 2016 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes d'un montant de 13 295 728 F CFP ;

3°) de mettre à la charge de la Nouvelle Calédonie la somme de 200 000 F CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire distinct et un mémoire complémentaire enregistrés le 30 août 2016 et

21 octobre 2016, la société à responsabilité limitée Abjidado représentée par la SELARL Chevalier demande à la Cour, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête tendant à la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge d'un montant de 13 295 728 F CFP au titre de l'exercice 2013, relatives au rejet de la déductibilité ses provisions, amortissements et salaires et des prélèvements qui en découlent, de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 156 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie dans sa version applicable avant son abrogation partielle par l'article 7 de la loi du pays n° 2015-9 du 31 décembre 2015 .

Elle soutient que ces dispositions, applicables aux impositions en litige, méconnaissent les principes de nécessité, de proportionnalité et d'individualisation des peines qui découlent de

l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et que la question n'a jamais été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que la question n'est pas dépourvue de caractère sérieux.

Par des mémoires, enregistrés le 21 septembre 2016 et 24 octobre 2016,

la Nouvelle-Calédonie, représentée par la SELARL de Greslan-Lentignac soutient que les conditions posées par l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies, et, en particulier que la question soulevée est dépourvue de caractère sérieux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- la loi du pays n° 2015-9 du 31 décembre 2015 ;

- l'article 156 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie dans sa version applicable avant son abrogation partielle par l'article 7 de la loi du pays n° 2015-9 du 31 décembre 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mosser, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public.

1. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que la Cour administrative d'appel saisi d'un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux ; que le second alinéa de l'article 23-2 de la même ordonnance précise que : " En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative, d'une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d'autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'Etat (...) " ;

2. Considérant qu'aux termes du I de l'article 153 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie alors en vigueur : " Toute personne physique ou morale versant des traitements, émoluments, salaires ou rétributions imposables est tenue de remettre aux services fiscaux, avant le 30 avril de chaque année, une déclaration sur un imprimé fourni par l'administration des impôts " ; que le II de l'article 156 du même code, alors en vigueur, avant son abrogation partielle par l'article 7 de la loi du pays n° 2015-9 du 31 décembre 2015 dispose : " Les personnes physiques ou morales qui n'ont pas déclaré les sommes visées à l'article 153 perdent le droit de les porter dans leurs frais professionnels pour l'établissement de leurs propres impositions./ Toutefois, cette sanction n'est pas applicable, en cas de première infraction, lorsque les intéressés ont réparé leur omission, soit spontanément, soit à la première demande de l'administration des impôts avant la fin de l'année au cours de laquelle la déclaration devait être souscrite. " ;

3. Considérant, en premier lieu, que la société Abjidado soutient que l'article 156 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, en tant qu'il prévoit que le fait, pour un tiers déclarant, de ne pas se conformer aux obligations déclaratives prévues à l'article 153 du même code entraîne la perte du droit de les porter dans leurs frais professionnels pour l'établissement de leurs propres impositions, porterait atteinte au principe de proportionnalité des peines résultant de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; que, toutefois, la disposition contestée sanctionne le non respect d'obligations permettant à l'administration fiscale de procéder aux recoupements nécessaires au contrôle du respect, par les bénéficiaires des versements, de leurs obligations fiscales et, ainsi, contribue au respect de l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale ; qu'en fixant la sanction encourue en proportion des sommes versées, du fait de leur réintégration au résultat imposable, le législateur l'a proportionnée, compte tenu du taux de l'impôt alors applicable, à la gravité des manquements réprimés, appréciée à raison de l'importance des sommes non déclarées ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le II de l'article 156 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie alors en vigueur méconnaît les principes de nécessité et de proportionnalité des peines est dépourvu de caractère sérieux ;

4. Considérant, en second lieu, que si la société Abjidado soutient que les mêmes dispositions méconnaissent le principe d'individualisation des peines, résultant également de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, il ressort de leur texte même que le législateur a prévu, pour la première infraction et en cas de manquement involontaire du déclarant, que la sanction n'est pas applicable lorsque l'intéressé a procédé spontanément à la réparation de son omission avant la fin de l'année où la déclaration devait être souscrite, soit spontanément soit à la première demande de l'administration des impôts ; qu'ainsi, compte tenu de l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale poursuivi par ces dispositions, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'individualisation des peines est également dépourvu de caractère sérieux ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question soulevée tirée de ce que l'article 156 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie alors applicable porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est dépourvue de caractère sérieux ; qu'ainsi, il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Abjidado.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Abjidado et à la Nouvelle-Calédonie.

Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 4 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Boissy, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 18 novembre 2016.

Le rapporteur,

G. MOSSERLe président,

L. DRIENCOURT Le greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01629


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01629
Date de la décision : 18/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-10-05-03-02 Procédure.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève MOSSER
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : SELARL DE GRESLAN-LENTIGNAC

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-11-18;16pa01629 ?
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