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27/09/2016 | FRANCE | N°15PA03078

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 27 septembre 2016, 15PA03078


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2014 par lequel le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande tendant à ce que soit reconnue l'imputabilité au service de la pathologie dont il est atteint et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconnaître l'imputabilité au service de cette pathologie ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de se prononcer à nouveau sur sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notific

ation du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 144879/5-1 du 28 mai 2015...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2014 par lequel le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande tendant à ce que soit reconnue l'imputabilité au service de la pathologie dont il est atteint et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconnaître l'imputabilité au service de cette pathologie ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de se prononcer à nouveau sur sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 144879/5-1 du 28 mai 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 28 juillet 2015 et le 21 mars 2016, M. A..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 144879/5-1 du 28 mai 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2014 par lequel le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande tendant à ce que soit reconnue l'imputabilité au service de la pathologie dont il est atteint ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconnaitre l'imputabilité au service de la pathologie dont il est atteint ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de se prononcer à nouveau sur sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- les premiers juges ont omis de statuer sur un moyen tiré de l'irrégularité de la procédure ;

- le jugement n'est pas motivé.

Sur le bien fondé du jugement :

- la décision attaquée n'est pas motivée ;

- l'avis de la commission de réforme est irrégulier ;

- la composition du collège d'experts est irrégulière ;

- M. A... n'a pas pu prendre connaissance du rapport établi par le collège d'experts ;

- la maladie de M. A... est imputable au service ;

- la décision est entachée de détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mars 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- et les observations de Mme D...G..., représentant le ministre de l'intérieur.

1. Considérant que M. A..., attaché d'administration de l'intérieur et de

l'outre-mer, a été affecté au bureau des taxis et transports publics au sein de la préfecture de police en qualité d'adjoint au chef de bureau à compter du 18 septembre 2000 ; qu'il a été placé en congé maladie ordinaire à partir de la mi-décembre 2005 jusqu'à février 2006 puis diagnostiqué d'un syndrome anxieux dépressif sévère le 22 juin 2007 et placé, après avis du comité médical ministériel, en congé de longue maladie du 28 août 2007 au 27 mai 2008, renouvelé jusqu'au 27 août 2008 ; qu'à compter du 28 août 2008, M. A... a été placé en congé de longue durée régulièrement renouvelé, après avis du comité médical ministériel et de la commission de réforme, jusqu'au 27 novembre 2010 ; que par un jugement n° 1105253/5-1 du 25 octobre 2012, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 10 janvier 2011 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'affection psychopathologique dont est atteint M. A... pour défaut de motivation et enjoint au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de la demande de M. A..., tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie, dans un délai de deux mois ; que par un arrêté du 30 janvier 2014, le ministre de l'intérieur a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie dont il est atteint ; que M. A... fait appel du jugement du 28 mai 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) " ; que les causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite incluent, notamment, les cas de " blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les sept expertises ainsi que les avis du psychiatre et du médecin traitant de M. A... sont contradictoires ; que, toutefois, il ressort des rapports d'expertise du DrC..., psychiatre, du 26 janvier 2012 que la pathologie dont est atteint M. A... est une " dépression réaction professionnelle en lien avec les contraintes organisationnelles ou sociales de l'entreprise " et qu'il présente des " troubles psychiatriques à type de dépression, anxiété et manifestations post-traumatiques qui peuvent être directement mises en relation avec sa situation professionnelle " et du rapport d'expertise du Dr I..., psychiatre, du 14 février 2013 qu'il " s'agit bien d'une maladie d'origine professionnelle " ; que les rapports du Dr H...du 20 février 2008 et du Dr F...du 2 juillet 2008, psychiatres, émettent des réserves quant à l'imputabilité au service de la pathologie anxio-dépressive de l'intéressé sans l'écarter ; qu'il est constant que M. A... ne présente aucun antécédent médical de troubles anxio-dépressifs ; que son état de santé s'est dégradé à compter de décembre 2005, date précise et constante à laquelle il a cessé d'exercer l'intérim à la tête du bureau des taxis et des transports publics en raison de l'arrivée du nouveau chef de bureau ; que la circonstance que le requérant ait persisté à démontrer que le préjudice qu'il estime avoir subi résulte des conditions du service ne remet pas en cause les constatations des experts ; que l'imputabilité au service d'une maladie n'est pas nécessairement liée à la reconnaissance d'un fait de harcèlement moral et que, par suite, la circonstance que le Tribunal administratif de Paris a rejeté par un jugement n° 1014066/5-1 du 25 octobre 2012 sa demande en ce sens est sans incidence sur le présent litige ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que son état anxio-dépressif résulterait d'une cause étrangère au service ; que, dans ces circonstances, le lien de causalité entre la situation de stress vécue dans le milieu professionnel, qui n'est pas contestée par le ministre et qui ressort des rapports d'expertise, et l'affection

anxio-dépressive dont est atteint M. A..., doit être regardé comme établi ; que cette affection qui a, dès lors, été contractée à l'occasion des fonctions doit elle-même être regardée comme imputable au service ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2014 par lequel le ministre de l'intérieur a refusé de reconnaitre comme imputable au service la psychopathologie dont il est atteint ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le ministre de l'intérieur reconnaisse l'imputabilité au service de la pathologie anxio-dépressive dont est atteint M. A... ; qu'il y a lieu, dès lors, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconnaitre l'imputabilité au service de la pathologie dont est atteint M. A..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de M. A... de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 144879/5-1 du 28 mai 2015 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 30 janvier 2014 du ministre de l'intérieur sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie anxio-dépressive dont souffre M. A..., dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 13 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président de chambre,

M. Auvray, président-assesseur,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 27 septembre 2016.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA03078


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03078
Date de la décision : 27/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : ANDRIEUX

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-09-27;15pa03078 ?
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