Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...D...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris :
1°) d'annuler :
- la décision du 11 avril 2013 par laquelle le président de l'Université Paris VI, Pierre et Marie Curie, l'a placée en congé sans rémunération pour une période d'un an,
- la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 28 mai 2013,
- la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique du 17 juillet 2013 ;
2°) de condamner l'Université à lui verser rétroactivement son traitement contractuel depuis décembre 2012.
Par un jugement n° 1313912/5-3 du 28 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2015, MmeA..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler la décision du 11 avril 2013 du président de l'Université Paris VI, Pierre et Marie Curie ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 28 mai 2013 ;
3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique du 17 juillet 2013 ;
4°) de condamner l'Université à lui verser rétroactivement son traitement contractuel ;
5°) de mettre à la charge de l'Université le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à la part contributive de l'Etat.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué n'a pas répondu à son argumentation tirée de l'absence de justification d'un congé sans traitement pris le 11 avril 2013, alors qu'avertie de son état de santé depuis le 9 novembre 2011, l'Université aurait eu le temps de rechercher un reclassement sans lui imposer une mesure privative de toute rémunération ;
- le jugement n'a pas non plus répondu au moyen tiré de l'absence de congé pour maladie, ce qui est la condition réglementaire du placement en congé sans traitement ;
- le jugement est affecté d'" anachronisme " ce qui le prive de motifs, puisqu'il justifie l'arrêté du 11 avril 2013 par l'inaptitude définitive qui aurait été constatée par la suite, ce dont le tribunal n'était pas saisi et ce qui n'était de toute façon pas de nature à justifier la décision du 11 avril 2013 ;
- le jugement n'a pas répondu à son argumentation selon laquelle le reclassement supposait une recherche de postes de travail compatibles avec son état de santé, et selon laquelle cette recherche ne pouvait être limitée au seul site de Jussieu et aux seules fonctions de bibliothécaire ;
- le jugement n'a pas répondu à sa contestation de l'impossibilité d'isoler son poste de travail des ondes électromagnétiques ;
- l'arrêté du 11 avril 2013 méconnait l'obligation de reclassement qui pesait sur l'Université puisqu'il n'est pas justifié de l'impossibilité d'un reclassement, en l'absence de recherche effective d'un poste de bibliothécaire ou de tout autre poste, non exposé aux champs électromagnétiques sur le site de Jussieu ou sur tout autre site ;
- la suspension de son traitement n'était pas justifiée, alors qu'avertie de son état de santé depuis le 9 novembre 2011, l'Université avait eu le temps de rechercher un reclassement ;
- le retard pris par le médecin de l'établissement pour émettre son avis, le 11 avril 2013, longtemps après épuisement du droit à congés avec traitement en décembre 2012, alors que le handicap avait été signalé dès le 9 novembre 2011, engage la responsabilité de l'Université ; il lui a causé un préjudice qui doit être compensé par le versement de son traitement anormalement interrompu, ce jusqu'à son reclassement effectif ;
- l'Université n'établit pas qu'elle aurait été placée dans une situation de congé pour maladie, dont la fin serait le point de départ du congé sans traitement, le 11 avril 2013, ainsi que l'exige le 2°) de l'article 17 du décret du 17 janvier 1986 ; elle n'est pas malade, mais intolérante aux ondes électromagnétiques, et n'a jamais été placée en congé pour maladie ;
- elle avait toujours sollicité sa réintégration ; les congés, avec ou sans traitement, lui ont été imposés ;
- les dispositions de l'article 17 du décret du 17 janvier 1986 méconnaissent le principe d'égalité en ce qu'elles introduisent une disparité de traitement avec les salariés relevant des dispositions de l'article L. 1226-11 du code du travail.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 janvier 2016, l'Université Paris VI, Pierre et Marie Curie, représentée par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de mettre à la charge de Mme A...le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 19 avril 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 mai 2016.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 18 décembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un jugement du 13 mai 2009, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision de l'Université Paris VI, Pierre et Marie Curie, mettant fin aux fonctions de bibliothécaire adjointe que Mme C...D...A...avait exercées en exécution de contrats de travail à durée déterminée du 3 février 1998 au 14 avril 2005, et a enjoint à l'Université de la réintégrer dans son emploi ; que, par un jugement du 5 octobre 2011, le tribunal a enjoint à l'Université, dans le cadre des dispositions de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, de procéder à la réintégration de Mme A...dans un emploi d'assistant des bibliothèques de classe normale à temps complet ; que l'Université lui a, au mois de novembre 2011, proposé un contrat de travail à durée indéterminée ; que, par un courrier du 9 novembre 2011, Mme A...lui a demandé à être affectée à un poste de travail non exposé aux ondes électromagnétiques, aux effets des antennes relais et à l'amiante ; qu'elle a été placée en congé d'office à plein traitement du 15 novembre 2011 au 7 février 2012, puis en congés de maladie, à plein traitement pour trois mois à partir du 9 février 2012, à demi traitement pour trois mois à partir du 10 mai 2012 et sans traitement du 10 août 2012 au 21 janvier 2013 ; qu'elle a été examinée par le médecin de prévention de l'Université à quatre reprises les 31 janvier, 24 juillet et 13 décembre 2012, et le 11 avril 2013 ; que le médecin de prévention a estimé lors de ce dernier examen que le poste de bibliothécaire qui lui était proposé n'était pas conforme aux préconisations qu'il avait formulées auparavant ; que le président de l'Université l'a, par un arrêté du 11 avril 2013, placée en congé sans rémunération pour une période d'un an, dans l'attente de l'avis du comité médical sur les possibilités de reclassement ; que, par un jugement du 28 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté, ainsi que des décisions nées du silence conservé par le président de l'Université et par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur son recours gracieux et sur son recours hiérarchique, ainsi que ses conclusions tendant à ce que l'Université soit condamnée à lui verser rétroactivement son traitement ; que Mme A...doit être regardée comme demandant l'annulation de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'à l'appui de sa demande devant le tribunal administratif, Mme A...avait entendu faire valoir un moyen tiré de l'absence de congé de maladie avant l'arrêté attaqué la plaçant en congé sans traitement ; que le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen qui n'était pas inopérant ; que son jugement doit donc être annulé ;
3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif ;
Sur la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif :
4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du principe général du droit dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi, que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement ; que ce principe est applicable en particulier aux agents contractuels de droit public, catégorie à laquelle appartient MmeA... ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que Mme A...aurait été déclarée définitivement inapte à occuper son emploi avant l'intervention de l'arrêté attaqué ; qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir que cet arrêté serait intervenu en méconnaissance de ce principe, faute pour l'Université d'avoir cherché à procéder à son reclassement ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 12 du décret du 17 janvier 1986 : " L'agent non titulaire en activité bénéficie, sur présentation d'un certificat médical, pendant une période de douze mois consécutifs si son utilisation est continue ou au cours d'une période comprenant trois cents jours de services effectifs si son utilisation est discontinue, de congés de maladie dans les limites suivantes : (...) Après trois ans de services : - trois mois à plein traitement ; - trois mois à demi-traitement (...) " ; qu'aux termes de l'article 17 du même décret : " 2° L'agent non titulaire temporairement inapte pour raison de santé à reprendre son service à l'issue d'un congé de maladie, de grave maladie, ou de maternité, de paternité ou d'adoption est placé en congé sans traitement pour une durée maximum d'une année. Cette durée peut être prolongée de six mois s'il résulte d'un avis médical que l'agent sera susceptible de reprendre ses fonctions à l'issue de cette période complémentaire (...) A l'issue de ses droits à congé sans traitement prévus au 2° du présent article et à l'article 16 du présent décret, l'agent non titulaire inapte physiquement à reprendre son service est licencié (...) " ;
6. Considérant que, si Mme A...fait valoir qu'elle n'était plus placée en situation de congé pour maladie à la date du 11 avril 2013 à compter de laquelle elle a été placée en congé sans traitement, elle ne conteste pas que ses droits à congé de maladie étaient expirés à cette date ; que l'université ne pouvait légalement que la placer en congé sans traitement à compter du 11 avril 2013 dans l'attente de l'avis du comité médical sur les possibilités de reclassement ; qu'elle n'établit pas en tout état de cause, que ses congés, avec ou sans traitement, lui auraient été imposés ;
7. Considérant, en troisième lieu, que, compte tenu des différences de situation qui distinguent les agents contractuels de l'Etat, des salariés relevant du code du travail, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que les dispositions citées ci-dessus de l'article 17 du décret du 17 janvier 1986 méconnaitraient le principe d'égalité en ce qu'elles introduiraient une disparité de traitement avec les salariés relevant des dispositions de l'article L. 1226-11 de ce code, qu'elle ne saurait en tout état de cause invoquer ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le médecin de prévention de l'Université a, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, examiné Mme A...dès le 31 janvier 2012, puis, notamment, le 11 avril 2013 ; qu'il en résulte également que l'Université a saisi le comité médical du rectorat de Paris, à la suite du nouvel examen par le médecin de prévention le 11 avril 2013, le 29 avril suivant ; que Mme A...n'est, dans ces conditions, pas fondée à faire état d'un retard fautif de leur part, dont elle serait susceptible de demander réparation ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté attaqué et des décisions rejetant ses recours gracieux et hiérarchique, ni à demander le versement rétroactif du traitement dont elle a été privée ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761 1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Université Paris VI, Pierre et Marie Curie, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme A...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
11. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...la somme que l'Université Paris VI, Pierre et Marie Curie, demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1313912/5-3 du Tribunal administratif de Paris du 28 octobre 2015 est annulé.
Article 2 : La demande de Mme A...devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête devant la Cour sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions de l'Université Paris VI, Pierre et Marie Curie, tendant l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...D...A...et à l'Université Paris VI, Pierre et Marie Curie.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Petit, premier conseiller.
Lu en audience publique le 20 juin 2016.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
O. FUCHS-TAUGOURDEAU
Le greffier,
A-L. CHICHKOVSKY-PASSUELLO
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA04015
Classement CNIJ :
C