Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 mai 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 1509286/3-2 du 24 novembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 décembre 2015, M. A..., représenté par Me Le Gloan, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1509286/3-2 du 24 novembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté préfectoral du 20 mai 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que la durée de son séjour en France ainsi que son intégration dans la société et l'intensité de sa vie privée sur le territoire national constituent des considérations humanitaires au sens de ces dispositions ;
- elle est entachée d'une erreur de fait, dès lors que, contrairement à ce qu'indique le préfet de police, il justifie d'une promesse d'embauche qui a été communiquée aux services de la préfecture le 3 février 2015 par l'intermédiaire de son conseil ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour, invoquée par voie d'exception ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Blanc,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de Me Le Gloan, avocat de M.A....
1. Considérant que M.A..., de nationalité tunisienne, né en 1977, est entré en France le 20 mars 2004 selon ses déclarations ; qu'il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant de la durée de sa résidence sur le territoire national ainsi que de son intégration dans la société française ; que par un arrêté du 20 mai 2015, le préfet de police a rejeté sa demande et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination ; que M. A...relève appel du jugement du 24 novembre 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;
3. Considérant que M. A...soutient qu'il est entré en France le 20 mars 2004 et qu'il s'est établi à partir de cette date sur le territoire national ; que si le préfet de police, aux termes de l'arrêté litigieux du 20 mai 2015, a contesté que le requérant ait résidé sur le territoire national au cours des années 2005 à 2009, M.A..., pour justifier du caractère habituel de sa résidence en France au cours de ces cinq années, a produit un grand nombre de pièces dont, notamment, la copie de son acte de mariage avec une ressortissante française, de nombreuses ordonnances médicales comportant les mentions des factures correspondantes, des résultats d'examens radiographiques et d'analyses biologiques, des attestations de l'aide médicale d'Etat dont il a bénéficié chaque année depuis 2005 et des courriers annuels du Syndicat des transports d'Ile-de-France portant renouvellement de sa " carte solidarité transport " ; qu'au titre des années 2010 et 2012, pour lesquelles le préfet de police a également contesté la résidence habituelle du requérant en France, celui-ci a produit de nombreux résultats d'examens radiographiques, des attestations de l'aide médicale d'Etat, de nombreuses ordonnances médicales comportant les mentions des factures correspondantes, des courriers du Syndicat des transports d'Ile-de-France portant renouvellement de sa " carte solidarité transport ", une proposition de rectification de la direction générale des finances publiques ainsi que les relevés de deux comptes bancaires ouverts à son nom auprès de la Banque postale et du Crédit du Nord, faisant état de nombreux mouvements au cours de l'année 2012 correspondant, pour la plupart, à des retraits d'espèces, des remises de chèque et des paiements par carte bancaire ; que les pièces versées au dossier sont ainsi suffisamment nombreuses et probantes pour établir le caractère habituel de la résidence de M. A...sur le territoire français au cours des dix années ayant précédé l'arrêté contesté ; qu'il s'ensuit que cet arrêté a été pris au terme d'une procédure irrégulière, faute pour le préfet de police d'avoir recueilli l'avis de la commission du titre de séjour avant de rejeter la demande de titre de séjour dont il était saisi ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au moyen précédemment retenu, qui est, en l'état de l'instruction, le seul de nature à justifier l'annulation du refus de séjour litigieux, le présent arrêt n'implique pas qu'une carte de séjour temporaire soit délivrée à M.A..., mais seulement que le préfet de police réexamine sa demande, après l'avoir soumise pour avis à la commission du titre de séjour ; qu'il y a lieu de prescrire ce réexamen dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1509286/3-2 du 24 novembre 2015 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 20 mai 2015 du préfet de police sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, de réexaminer la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. A....
Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 26 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
- M. Blanc, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 9 juin 2016.
Le rapporteur,
P. BLANCLe président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA04718