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07/06/2016 | FRANCE | N°15PA03912

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 07 juin 2016, 15PA03912


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 14PA05046 du 15 décembre 2014, enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Paris le 23 décembre 2014, la Cour administrative d'appel de Paris a renvoyé au Tribunal administratif de Paris le dossier de la requête de M. F... E....

M. F... E...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 8 octobre 2014 par laquelle le ministre de la défense, après avis de la commission des recours militaires, a rejeté son recours préalable contre la décision lui

refusant le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 14PA05046 du 15 décembre 2014, enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Paris le 23 décembre 2014, la Cour administrative d'appel de Paris a renvoyé au Tribunal administratif de Paris le dossier de la requête de M. F... E....

M. F... E...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 8 octobre 2014 par laquelle le ministre de la défense, après avis de la commission des recours militaires, a rejeté son recours préalable contre la décision lui refusant le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 et de ses accessoires et d'enjoindre au ministre de la défense de lui attribuer le bénéfice de cette indemnité et de ses accessoires à compter du 1er juillet 2013.

Par un jugement n° 1431689/5-1 du 10 septembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement le 26 octobre 2015 et le 4 avril 2016, M. E..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1431689/5-1 du 10 septembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du 8 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au ministre de la défense de lui octroyer le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 et de ses accessoires à partir du 1er juillet 2013 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du 10 septembre 2015 est entaché d'une erreur de droit et d'un défaut de motivation ;

- la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'une erreur de droit ;

- elle méconnaît les dispositions de l'instruction n° 10100/DEF/SGA/DRH-MD du 29 mai 2013 dès lors qu'en application de ces dispositions, l'accord du 21 mars 2005 par lequel son ex-épouse a été désignée bénéficiaire du premier taux particulier de l'indemnité pour charges militaires est devenu caduc du fait de la séparation de fait des époux autorisée par une ordonnance de non-conciliation du 13 juin 2013.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 février 2016, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. E... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code général des impôts ;

- le décret n° 59-1193 du 13 octobre 1959 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le décret n° 2011-38 du 10 janvier 2011 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.

1. Considérant que M. E..., engagé au sein de l'armée de l'air depuis le 16 août 1989, sert en qualité d'officier au sein du commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes sur la base 117 de Paris-Balard depuis le 29 août 2013 ; que de son union célébrée le 26 juillet 1996 avec MmeB..., également militaire, sont nés deux enfants ; que, par une déclaration conjointe du 21 mars 2005, Mme B...a été désignée comme bénéficiaire de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 à compter du 1er avril 2005 ; que, par une ordonnance de non conciliation du 13 juin 2013, le juge des affaires familiales du Tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne les a autorisés à résider séparément et a fixé la résidence habituelle de l'un des enfants au domicile de M. E... et celle de l'autre au domicile de MmeB... ; que, par une décision du 26 mars 2014, le ministre de la défense a refusé à M. E... le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 et de ses accessoires ; que, par une décision du 8 octobre 2014, après avis défavorable de la commission des recours des militaires saisie par M. E... par un courrier du 24 avril 2014, le ministre de la défense a rejeté le recours préalable de M. E... contre la décision du 26 mars 2014 ; que par une requête enregistrée le 26 octobre 2015, M. E... fait appel du jugement du 10 septembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; que M. E... soutient que le jugement attaqué ne fait apparaitre aucune motivation concernant la circonstance qu'il ne peut utilement se fonder sur l'instruction n° 101000/DEF/SGA/DRH-MD du 29 mai 2013 relative aux droits financiers du personnel militaire, de ses ayants droit et de ses ayants cause ; qu'il ressort toutefois des motifs du jugement attaqué que les premiers juges ont considéré que M. E... ne pouvait se prévaloir des dispositions illégales du point B du tableau II de cette instruction dès lors qu'elles ne sont pas conformes à l'article 3 du décret du 13 octobre 1959 en ce qu'elles précisent que l'option devient caduque dans le cas où le militaire conjoint est séparé de fait de son conjoint militaire ; que, par suite, le jugement attaqué est suffisamment motivé ; que par ailleurs M. E... ne peut utilement invoquer, pour contester la régularité du jugement, une erreur de droit que le tribunal aurait commise, un tel moyen ayant trait, en tout état de cause, au bien-fondé du jugement et non à sa régularité ;

Sur le bien fondé du jugement :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 27 juillet 2005 : " Les ministres et secrétaires d'Etat peuvent, par un arrêté publié au Journal officiel de la République française, donner délégation pour signer tous actes, à l'exception des décrets, au directeur et au chef de leur cabinet, ainsi qu'à leurs adjoints, en ce qui concerne les affaires pour lesquelles délégation n'est pas donnée à l'une des personnes mentionnées à l'article 1er(...) " ; qu'aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " I.-Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 4125-17 du même code : " Lorsqu'elle statue sur un recours formé à l'encontre d'un acte pris par le ministre de la défense, la commission des recours des militaires adresse sa recommandation à ce ministre. / La décision sur le recours est prise par le ministre de la défense " ;

4. Considérant que si, pour contester la décision litigieuse, M. E... soutient que son signataire était incompétent, il ressort des pièces du dossier que M. A... C..., directeur adjoint du cabinet civil et militaire du ministre de la défense, bénéficiait, par arrêté du 26 août 2014, d'une délégation permanente régulièrement publiée à l'effet de signer au nom du ministre de la défense tous actes, arrêtés ou décisions, en ce qui concerne les affaires pour lesquelles délégation n'est pas donnée aux personnes mentionnées à l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 susvisé ; que ces autorités conformément au premier alinéa de l'article 1er du même décret ne peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, que les actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité ; que, dès lors, que les décisions que le ministre de la défense prend après avis de la commission des militaires en application de l'article R. 4125-17 du code de la défense ne relèvent pas de la compétence des autorités visées à l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 précité et qu'il n'est pas établi, ni même allégué, qu'une de ces autorités aurait bénéficié d'une délégation à l'effet de signer ces décisions, le moyen tiré de l'incompétence de M. C..., directeur adjoint du cabinet ministériel, pour signer la décision en litige ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 du décret du 13 octobre 1959 fixant le régime de l'indemnité pour charges militaires : " Les militaires visés à l'article 1er bénéficient, quelle que soit leur situation de famille, d'un taux de base. / Sous réserve du quatrième alinéa du présent article, les militaires mariés ou liés par un pacte civil de solidarité, conclu depuis au moins deux ans ou ayant un ou deux enfants à charge (...) peuvent bénéficier en plus du taux de base d'un taux particulier correspondant à cette situation de famille. / (...) Lorsque les deux conjoints ou les deux partenaires d'un pacte civil de solidarité sont militaires, celui auquel est alloué le ou les taux particuliers prenant en compte la situation de famille est désigné d'un commun accord entre les intéressés, l'autre militaire bénéficiant uniquement du taux de base. L'option ne peut être remise en cause qu'au terme d'un an. / La législation fiscale sert de référence pour la définition de l'enfant à charge " ; qu'aux termes de l'article 196 du code général des impôts : " Sont considérés comme étant à la charge du contribuable, que celle-ci soit exclusive, principale ou réputée également partagée entre les parents, à la condition de n'avoir pas de revenus distincts de ceux qui servent de base à l'imposition de ce dernier : / 1° Ses enfants âgés de moins de 18 ans ou infirmes (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en application du quatrième alinéa de l'article 3 du décret du 13 octobre 1959 régissant la situation des couples de militaires mariés ou liés par un pacte civil de solidarité pour l'attribution du ou des taux particuliers de l'indemnité pour charges militaires prenant en compte la situation de famille, l'épouse de M. E... en a été désignée bénéficiaire en vertu d'un commun accord entre les intéressés signé le 21 mars 2005 ; que, par une ordonnance de non-conciliation du 13 juin 2013, le juge des affaires familiales du Tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne a autorisé M. E... et son épouse à résider séparément et a fixé la résidence habituelle de l'un des enfants au domicile de M. E... et celle de l'autre au domicile de MmeB... ; que dès lors qu'à la date de l'édiction de la décision attaquée, cette ordonnance, laquelle en tout état de cause ne comporte aucune indication sur le sort réservé à l'indemnité dont s'agit, n'avait pas dissous le mariage, le divorce n'ayant été prononcé que par un jugement du 18 février 2015, la circonstance que, par cette même ordonnance, un des deux enfants du couple soit désormais à la charge de M. E... au sens de la législation fiscale n'a pu avoir légalement pour effet de remettre en cause l'accord par lequel l'épouse de M. E... a été désignée, en application du quatrième alinéa de l'article 3 du décret du 13 octobre 1959, comme bénéficiaire du taux particulier de l'indemnité pour charges militaires prenant en compte la situation de famille ; qu'ainsi, le ministre de la défense, en rejetant le recours préalable de M. E... contre la décision lui refusant le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n° 1 et de ses accessoires, n'a pas commis d'erreur de droit ;

7. Considérant, en troisième lieu, que M. E... se prévaut de l'instruction n° 101000/DEF/SGA/DRH-MD du 29 mai 2013 relative aux droits financiers du personnel militaire, de ses ayants droit et de ses ayants cause qui mentionne au point B du tableau II que, pour un couple de conjoints militaires séparés de fait en présence de personnes à charge, l'accord par lequel ils ont indiqué lequel des deux époux devait bénéficier du taux particulier de l'indemnité pour charges militaires en application du quatrième alinéa de l'article 3 du décret du 13 octobre 1959 devient caduc ; que, toutefois, cette disposition qui a pour effet de créer un cas de caducité de l'accord non prévu à l'article 3 du décret du 13 octobre 1959 et, s'agissant des couples de militaires mariés ou liés par un pacte civil de solidarité, de conférer à la situation d'enfant à charge un critère d'attribution du taux particulier, alors que seul l'accord susmentionné permet, dans le cas de ces couples, de désigner l'unique allocataire, est contraire aux dispositions du décret et, par suite, illégale ; qu'il suit de là que c'est à juste titre que le tribunal administratif a jugé que M. E... ne pouvait se prévaloir de cette disposition contraire au décret du 13 octobre 1959 ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... E...et au ministre de la défense.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2016 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président de chambre,

M. Auvray, président-assesseur,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

Lu en audience publique le 7 juin 2016.

Le rapporteur,

A. MIELNIK-MEDDAH Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA03912


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03912
Date de la décision : 07/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Armées et défense - Personnels militaires et civils de la défense - Questions communes à l'ensemble des personnels militaires - Soldes et avantages divers.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Statuts spéciaux - Militaires (voir : Armées).


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : CHASTEL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-06-07;15pa03912 ?
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