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07/06/2016 | FRANCE | N°15PA03010

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 07 juin 2016, 15PA03010


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler, d'une part l'arrêté du 11 mars 2014 par lequel le ministre de la culture et de la communication lui a infligé un avertissement ensemble la décision du 30 juin 2014 rejetant son recours gracieux, d'autre part l'arrêté du 30 juin 2014 par lequel le ministre de la culture et de la communication lui a infligé un blâme.

Par un jugement n° 1413686/5-1 du 28 mai 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 11 mars 2014

ensemble la décision du 30 juin 2014, enjoint au ministre de la culture et de la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler, d'une part l'arrêté du 11 mars 2014 par lequel le ministre de la culture et de la communication lui a infligé un avertissement ensemble la décision du 30 juin 2014 rejetant son recours gracieux, d'autre part l'arrêté du 30 juin 2014 par lequel le ministre de la culture et de la communication lui a infligé un blâme.

Par un jugement n° 1413686/5-1 du 28 mai 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 11 mars 2014 ensemble la décision du 30 juin 2014, enjoint au ministre de la culture et de la communication de retirer du dossier administratif de M. C... l'arrêté annulé ainsi que toute mention y faisant référence dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 28 et 30 juillet 2015 ainsi que le 16 mai 2016, M. C..., représenté par Me Arvis, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1413686/5-1 du 28 mai 2015 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette la demande d'annulation de l'arrêté du 30 juin 2014 par lequel le ministre de la culture et de la communication lui a infligé un blâme ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 juin 2014 contesté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- il n'a pas été mis en mesure, en méconnaissance de l'article R. 711-3 du code de justice administrative, de connaître, avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public comptait proposer à la formation de jugement ;

- le jugement mentionne " les autres moyens soulevés par M. B... " alors qu'il ne s'agit pas d'une partie au litige au sens de l'article R. 741-2 du code de justice administrative.

Sur l'arrêté attaqué du 30 juin 2014 :

- l'arrêté du 30 juin 2014 n'est pas suffisamment motivé ;

- le délai dont il a bénéficié pour présenter sa défense était insuffisant ;

- la sanction disciplinaire en litige a été prise en méconnaissance du principe de non bis in idem dès lors qu'elle repose sur les mêmes faits que l'avertissement pris par arrêté du 11 mars 2014 annulé par le jugement du 28 mai 2015 attaqué ;

- il n'a pas commis de faute de nature à justifier une sanction ;

- l'arrêté du 30 juin 2014 est entaché d'erreur de qualification juridique et d'erreur matérielle des faits ;

- le blâme infligé par l'arrêté attaqué est une sanction disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2015, le ministre de la culture et de la communication conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. C... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah,

- les conclusions de M. Ouardes , rapporteur public,

- et les observations de Me Arvis, avocat de M. C....

1. Considérant que M. C..., attaché principal d'administration, est affecté depuis septembre 2006 en qualité de chargé de tutelle au sein du bureau des opérateurs culturels nationaux du service des affaires financières et générales du secrétariat général du ministère de la culture et de la communication ; que, par un arrêté du 11 mars 2014, le ministre de la culture et de la communication lui a infligé un avertissement puis, par une décision du 30 juin 2014, a rejeté explicitement le recours gracieux formé par M. C... contre cet arrêté ; que, par un arrêté du 30 juin 2014, le ministre de la culture et de la communication a infligé à M. C... un blâme ; que, par une requête enregistrée à la Cour le 28 juillet 2015, M. C... relève appel du jugement n° 1413686/5-1 du 28 mai 2015 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris, après avoir annulé l'arrêté du 11 mars 2014 ensemble la décision du 30 juin 2014 et enjoint au ministre de la culture et de la communication de retirer du dossier administratif de M. C... l'arrêté annulé ainsi que toute mention y faisant référence dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2014 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que le premier alinéa de l'article R. 711-3 du code de justice administrative dispose que : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne (...) " ;

3. Considérant que la communication aux parties du sens des conclusions, prévue par les dispositions de l'article R. 711-3 du code de justice administrative, a pour objet de mettre les parties en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu'elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l'appui de leur argumentation écrite et d'envisager, si elles l'estiment utile, la production, après la séance publique, d'une note en délibéré ; qu'en conséquence, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que cette exigence s'impose à peine d'irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public ;

4. Considérant que, préalablement à l'audience qui s'est tenue devant le Tribunal administratif de Paris le 13 mai 2015 à 9h00, le rapporteur public a, le 7 mai 2015 à 15h59, soit dans un délai raisonnable avant cette audience, renseigné dans l'application " Sagace " la rubrique " sens synthétique des conclusions " en indiquant " 1/ Annulation de l'arrêté du 11 mars 2014 infligeant la sanction de l'avertissement pour insuffisante motivation, ainsi que, par voie de conséquence, du rejet du recours gracieux en date du 28 avril 2014, intervenu le 30 juin 2014 2/ Injonction à l'administration de faire disparaître cette sanction du dossier de M. C... 3/ Rejet au fond des conclusions de la requête tendant à l'annulation de la sanction du blâme 4/ Mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative 5/ Rejet du surplus des conclusions " ; qu'il a ainsi mis les parties ou leurs mandataires en mesure de connaître le sens de ses conclusions et d'apprécier, par suite, l'opportunité d'assister à l'audience publique ainsi que de préparer, le cas échéant, des observations orales et d'envisager la production après cette audience d'une note en délibéré ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 711-3 du code de justice administrative manque en fait et doit être écarté ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application (...) " ;

6. Considérant que si les visas du jugement attaqué indiquent, en raison d'une erreur de plume, que le ministère de la culture soutient " que les autres moyens soulevés par Monsieur B...ne sont pas fondés ", le nom du requérant est correctement indiqué dans le reste du jugement et notamment dans les visas ; que cette erreur de plume, purement matérielle, n'a pu avoir aucune incidence sur la solution du litige, ni affecter la compréhension du jugement par les parties ; que, par suite, M. C... n'est pas fondé à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

7. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué du 30 juin 2014 vise les textes applicables, le rapport de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire en date du 23 avril 2014 et les observations de M. C... du 28 avril 2014 ; qu'il indique que M. C... " est l'auteur de courriels datés des 2 et 3 décembre 2013 et 16 janvier 2014 qui traduisent une méconnaissance de la règle de la validation hiérarchique, et présentent un caractère irrespectueux ", " que l'intéressé n'a pas pris en compte les instructions de sa hiérarchie quant à son positionnement en maintenant une attitude d'insubordination " et " qu'au regard des fonctions de l'intéressé ce comportement est constitutif d'une faute disciplinaire, préjudiciable au bon fonctionnement du service et à son entourage professionnel " ; que cette relation des faits reprochés à M. C... qui est suffisamment précise et qui n'est pas stéréotypée, contrairement à ce que soutient l'intéressé, lui permet de connaître les éléments de fait et de droit sur lesquels se fonde la sanction ; que par ailleurs l'arrêté du 30 juin 2014 a pu valablement mentionner les observations de M. C... présentées dans son recours gracieux du 28 avril 2014 tendant au retrait de l'avertissement du 11 mars 2014, dès lors que, par ce recours gracieux, l'intéressé a également présenté des observations relatives à l'engagement de la procédure disciplinaire ayant donné lieu au prononcé de la sanction en litige par l'arrêté attaqué ; qu'en conséquence les premiers juges ont pu juger à juste titre que la décision attaquée était suffisamment motivée alors même qu'ils avaient censuré, pour ce motif, l'avertissement infligé à M. C... par un arrêté du 11 mars 2014 dont la motivation, qui ne mentionnait pas précisément les courriels en cause, était différente de celle de l'arrêté en litige ; que M. C... n'est dès lors pas fondé à soutenir que cette décision méconnaît les dispositions de la loi susvisée du 11 juillet 1979, ni celles de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que M. C... ne conteste pas avoir été informé, par lettre du 12 mai 2014 notifiée le 15 mai suivant, de son droit à la communication de l'intégralité de son dossier administratif et avoir bénéficié d'un délai de trois semaines pour lui permettre de préparer sa défense entre la date à laquelle il a consulté son dossier, le 5 juin 2014, et l'arrêté en litige du 30 juin 2014, notifié le 4 juillet suivant ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'eu égard aux faits en cause ce délai était suffisant pour permettre à l'intéressé de prendre connaissance de son dossier et de faire connaître ses observations sur la mesure envisagée ; que la seule circonstance qu'il n'ait pu consulter son dossier que le 5 juin 2014 alors qu'il avait formulé une demande en ce sens dès le 12 mai 2014 est sans incidence sur l'appréciation du délai pour préparer sa défense postérieurement à cette consultation ; qu'il en va de même de la circonstance que M. C... a sollicité un entretien par courriel du 26 juin 2014 demeuré sans réponse dès lors que l'intéressé pouvait présenter en temps utile ses observations par écrit ; que, par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que les droits de la défense ont été méconnus ;

9. Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté du 11 mars 2014 infligeant un avertissement à M. C... a été annulé par le jugement du 28 mai 2015 dont il n'est pas demandé l'annulation sur ce point ; que cette décision est donc réputée n'avoir jamais existé ; que, par suite, compte tenu de l'effet attaché au jugement du 28 mai 2015, le ministre de la culture doit être regardé comme ayant régulièrement infligé à M. C... le 30 juin 2014 la seconde sanction en litige, alors même qu'elle reposait au moins partiellement sur les mêmes faits que celle prononcée précédemment, sans méconnaître le principe général du droit " non bis in idem " ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 28 de la loi du 13 juillet 1983 : " Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. Il n'est dégagé d'aucune des responsabilités qui lui incombent par la responsabilité propre de ses subordonnés " ;

11. Considérant que, de façon récurrente et notamment ainsi que cela ressort des courriels des 2 et 3 décembre 2013 et 16 janvier 2014, M. C... a adressé directement des informations ou des remarques relatives aux orientations du bureau des opérateurs culturels nationaux à M. Collin, secrétaire général du ministère de la culture et de la communication, sans en aviser son chef de bureau ou, à défaut, le chef de service, outrepassant ainsi la voie hiérarchique ; qu'il a répondu de façon condescendante à ses supérieurs hiérarchiques et notamment M. Corbin, secrétaire général adjoint, lorsque des rappels à l'ordre lui étaient faits concernant sa méconnaissance des voies hiérarchiques ; que dès lors qu'il n'est pas allégué que ce comportement eut été justifié par une illégalité manifeste de nature à compromettre gravement un intérêt public, aucun des motifs invoqués par M. C... ne pouvait le dispenser de se conformer à son devoir d'obéissance hiérarchique tel que prévu à l'article 28 précité de la loi du 13 juillet 1983 ; qu'il ressort également de ces courriels que l'ensemble de la hiérarchie de M. C... lui a rappelé à de nombreuses reprises ses obligations vis-à-vis d'elle et notamment son devoir de loyauté ; que ce comportement récurrent malgré les mises en garde qui ont été prodiguées à M. C... constitue une faute et est de nature à lui seul à justifier le blâme qui lui a été infligé, sans que l'intéressé puisse se prévaloir au soutien de sa demande d'annulation de cette sanction du comportement de ses supérieurs hiérarchiques, ni des méthodes de recrutement des chefs et adjoints du bureau des opérateurs où il est affecté, ni des difficultés qui seraient, selon lui, nées de l'irrégularité de la gestion de sa carrière ; que, par suite, c'est sans erreur matérielle, ni erreur de qualification juridique des faits, ni erreur d'appréciation que le ministre a pu qualifier le comportement de M. C..., révélé dans les courriels précités, de fautif ;

12. Considérant, en dernier lieu, qu'eu égard aux faits reprochés à M. C... et notamment leur récurrence et l'absence de prise en compte des remarques qui lui ont été faites à plusieurs reprises à propos de son comportement, le blâme, sanction du premier groupe, n'est pas une sanction disproportionnée ; que, contrairement à ce que soutient M. C..., la sanction en litige n'est pas motivée par la récidive des faits qui ont été sanctionnés par l'avertissement annulé par les premiers juges et la circonstance que le blâme en cause constitue une première sanction ne saurait à elle seule justifier l'application d'une sanction de niveau inférieur ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2014 ; que les conclusions de sa requête tendant à la réformation dudit jugement et à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2014 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, celles tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de la culture et de la communication.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2016 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président de chambre,

M. Auvray, président-assesseur,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

Lu en audience publique le 7 juin 2016.

Le rapporteur,

A. MIELNIK-MEDDAH

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de la culture et de la communication en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA03010


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03010
Date de la décision : 07/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : SCP ARVIS et KOMLY-NALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-06-07;15pa03010 ?
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