Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1500128/3-1 du 7 juillet 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de police de délivrer à Mme B...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 août et 8 septembre 2015, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- le Tribunal administratif de Paris a considéré à tort que l'arrêté du 10 janvier 2014 méconnaissait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- en rejetant la demande de titre de séjour présentée par Mme B...et en prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français, il n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur la situation personnelle de l'intéressée ;
- le refus de séjour litigieux ne méconnait pas les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- s'agissant des autres moyens soulevés par la requérante en première instance, il entend conserver l'entier bénéfice de ses écritures présentées devant le Tribunal administratif de Paris.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2016, MmeB..., représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que le traitement médical dont elle bénéficie en France n'est pas disponible en Côte d'Ivoire.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 18 décembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Blanc a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme B...est une ressortissante ivoirienne, née le 12 décembre 1993, qui est entrée en France en 2009 ; qu'elle a sollicité, en janvier 2012, la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant de la gravité de son état de santé ; que, par un arrêté du 10 janvier 2014, le préfet de police a rejeté la demande de Mme B...et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de destination ; que le préfet de police fait appel du jugement du 7 juillet 2015, par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et lui a enjoint de délivrer à Mme B...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ;
3. Considérant qu'aux termes de son avis du 23 juillet 2013, au vu duquel le préfet de police s'est prononcé sur la demande de titre de séjour de MmeB..., le médecin-chef du service médical de la préfecture de police a estimé que si l'état de santé de l'intéressée nécessitait un traitement dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait bénéficier néanmoins d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il ressort toutefois des pièces médicales produites par MmeB..., qu'elle souffre d'une épilepsie chronique sévère et complexe, pouvant entrainer des pertes de connaissance ou des crises généralisées tonico-cloniques secondaires ; qu'elle est suivie depuis son arrivée en France, pour le traitement de cette pathologie, par le service spécialisé du groupe hospitalier la Pitié-Salpêtrière et qu'elle est soumise à une trithérapie à base de Keppra, Tégrétol et Zonégran ; que si le préfet de police se prévaut de ce que les médicaments antiépileptiques et les régulateurs thymiques, en particulier, la substance active du Tégrétol, figurent sur la liste nationale des médicaments essentiels en Côte d'Ivoire, ni la substance active du Keppra, ni celle du Zonégran, entrant dans la composition du traitement médical de l'intéressée, ne figurent sur cette liste ; qu'il ressort, en outre, des termes du certificat médical établi, le 10 octobre 2012, par un médecin agréé, spécialisé en neurochirurgie, dont l'appréciation a été ensuite confirmée par un certificat médical établi le 7 mai 2015 par le praticien hospitalier assurant le suivi médical de MmeB..., qu'une opération chirurgicale est envisagée, dès lors que l'épilepsie dont elle souffre est pharmaco-résistante ; que si la Côte d'Ivoire dispose de services de neurologie et de neurochirurgie, il ressort des termes du certificat médical précité du 7 mai 2015 que le traitement auquel est soumise Mme B...et l'opération chirurgicale envisagée ne peuvent être réalisés qu'au sein de structures très spécialisées, selon des techniques actuellement indisponibles en Côte d'Ivoire ; qu'ainsi, eu égard, en particulier, à la prise en charge spécifique dont Mme B...bénéficie en France, dont l'interruption pourrait avoir des conséquences extrêmement graves, le préfet de police, en rejetant la demande de titre de séjour dont il était saisi, a méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 précitées ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 10 janvier 2014 et lui a enjoint de délivrer à Mme B...le titre de séjour qu'elle sollicitait ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :
5. Considérant que Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C...de la somme de 1 000 euros, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera, au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 000 euros à MeC..., sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme A...B....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 12 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Dalle, président,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
- M. Blanc, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 26 mai 2016.
Le rapporteur,
P. BLANCLe président,
D. DALLELe greffier,
C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA03252