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23/05/2016 | FRANCE | N°15PA02269

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 23 mai 2016, 15PA02269


Vu, I, sous le n°15PA02269 la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Enter Air a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les 61 décisions par lesquelles l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) lui a infligé des amendes en raison du dépassement, par ses aéronefs, entre le 22 juin et le 2 septembre 2013, des heures limites d'atterrissage ou de décollage applicables à l'aérodrome de Paris-Charles de Gaulle.

Par un jugement n°1422787 et suivants du 7 avril 2015, le Tribunal administratif de Paris

a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le ...

Vu, I, sous le n°15PA02269 la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Enter Air a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les 61 décisions par lesquelles l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) lui a infligé des amendes en raison du dépassement, par ses aéronefs, entre le 22 juin et le 2 septembre 2013, des heures limites d'atterrissage ou de décollage applicables à l'aérodrome de Paris-Charles de Gaulle.

Par un jugement n°1422787 et suivants du 7 avril 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 juin 2015 et deux mémoires enregistrés le 11 décembre 2015 et le 22 mars 2016, la société Enter Air, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 7 avril 2015 ;

2°) d'annuler les 61 décisions du 11 juin 2014 par lesquelles l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) lui a infligé des amendes en raison du dépassement, par ses aéronefs, entre le 22 juin et le 2 septembre 2013, des heures limites d'atterrissage ou de décollage applicables à l'aérodrome de Paris-Charles de Gaulle, et de la décharger des sommes correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'ACNUSA la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les certificats acoustiques émis en 2010 et 2011 étaient erronés ; le bruit effectivement émis par les aéronefs en cause était conforme aux restrictions posées par le IV de l'article 1er de l'arrêté du 20 septembre 2011 portant restriction d'exploitation de l'aérodrome de Paris Charles de Gaulle ; l'écart entre les valeurs certifiées initialement par les autorités polonaises et les valeurs certifiées en 2013 résulte de la prise en compte de panneaux acoustiques renforcés ; les aéronefs en cause ont été équipés dès 1997, soit avant même la délivrance des premiers certificats, de panneaux acoustiques renforcés ; le manuel de vol de l'un de ces aéronefs confirme cette présence initiale des panneaux acoustiques renforcés et la pertinence des valeurs certifiées par l'autorité polonaise en 2013 ;

- l'interprétation des textes réglementaires retenue par les premiers juges conduit à admettre une présomption irréfragable de culpabilité, en méconnaissance des principes garantis par l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de l'article 6 § 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense enregistrés les 21 août 2015, 6 janvier 2016, 19 janvier 2016 et 6 avril 2016, l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, représentée par la Selas Adamas, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Enter Air au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 mars 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 avril 2016.

Vu, II, sous le n° 15PA03017, la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Enter Air a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les titres de perception émis le 26 juin 2014 par le directeur général des finances publiques pour le recouvrement de 61 amendes qui lui ont été infligées par l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) en raison du dépassement, par ses aéronefs, entre le 22 juin et le 2 septembre 2013, des heures limites d'atterrissage ou de décollage applicables à l'aérodrome de Paris-Charles de Gaulle, et de la décharger des sommes correspondantes, ainsi que les décisions des 1er septembre et 18 septembre 2014 de l'ACNUSA rejetant ses recours gracieux formés contre ces titres de perception.

Par un jugement n°1425921/2-1, 1425924/2-1 du 2 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juillet 2015 et deux mémoires enregistrés le 11 décembre 2015 et le 22 mars 2016, la société Enter Air, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 2 juin 2015 ;

2°) d'annuler les titres exécutoires émis à son encontre le 26 juin 2014 ainsi que les décisions des 1er septembre et 18 septembre 2014 de l'ACNUSA rejetant ses recours gracieux, et de la décharger des sommes correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'ACNUSA la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soulève les mêmes moyens que ceux soulevés dans l'instance n° 15PA02269.

Par des mémoires en défense enregistrés les 30 septembre 2015, 6 janvier 2016, 19 janvier 2016 et 6 avril 2016, l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, représentée par la Selas Adamas, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Enter Air au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 mars 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 avril 2016.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le règlement CE n° 1702/2003 de la Commission du 24 septembre 2003 établissant des règles d'application pour la certification de navigabilité et environnementale des aéronefs et produits, pièces et équipements associés, ainsi que pour la certification des organismes de conception et de production, modifié par le règlement n° 335/2007 de la Commission du 28 mars 2007 ;

- le code de l'aviation civile ;

- le code des transports ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

- l'arrêté du 20 septembre 2011 portant restrictions d'exploitation de l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle (Val-d'Oise) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Petit,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour la société Enter Air.

1. Considérant que la société Enter Air s'est vue infliger par l'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA), le 11 juin 2014, 61 amendes, dont les montants sont compris entre 3 000 et 20 000 euros, pour avoir fait atterrir et décoller de nuit des aéronefs, à l'aéroport de Paris Charles de Gaulle, pendant la période comprise entre le 22 juin et le 2 septembre 2013, en méconnaissance des restrictions d'exploitation imposées par l'arrêté du 20 septembre 2011 concernant cet aéroport ; que des titres de perception ont été émis le 26 juin 2014 par le directeur général des finances publiques pour le recouvrement de ces amendes ; que par des décisions des 1er septembre et 18 septembre 2014, l'ACNUSA a rejeté les recours gracieux formés par la société Enter Air contre ces titres de perception ; que par des jugements du 7 avril 2015 et du 2 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté les demandes de la société Enter Air tendant à l'annulation de l'ensemble de ces décisions ; que par les deux requêtes susvisées, qu'il y a lieu de joindre, la société Enter Air fait appel de ces deux jugements ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6361 12 du code des transports :

" L'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires prononce une amende administrative à l' encontre : 1° De la personne exerçant une activité de transport aérien public au sens de l'article L. 6412-1 ne respectant pas les mesures prises par l'autorité administrative sur un aérodrome fixant, notamment : a) Des restrictions permanentes ou temporaires d'usage de certains types d'aéronefs en fonction de leurs émissions atmosphériques polluantes, de la classification acoustique, de leur capacité en sièges ou de leur masse maximale certifiée au décollage ; b) Des restrictions permanentes ou temporaires apportées à l'exercice de certaines activités en raison des nuisances environnementales qu'elles occasionnent ; c) Des procédures particulières de décollage ou d'atterrissage en vue de limiter les nuisances environnementales engendrées par ces phases de vol (... ) " ; que l'article L. 6361-13 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose que : " Les amendes administratives mentionnées à l'article L. 6361-12 ne peuvent excéder, par manquement constaté, un montant (...) de 20 000 € pour une personne morale " ; que selon l'article R. 227-10 du code de l'aviation civile : " Celles des restrictions d'exploitation visées à l'article R. 227-7 qui sont définies par référence à des critères de performances se fondent sur le bruit émis par l'aéronef, déterminé par la procédure de certification menée conformément à l'annexe 16 de la convention relative à l'aviation civile internationale du 7 décembre 1944 " ; que selon les dispositions du IV de l'article 1er de l'arrêté du 20 septembre 2011 portant restriction d'exploitation de l'aérodrome de Paris-Charles de Gaulle : " (...) les aéronefs certifiés chapitre 3 avec une marge cumulée inférieure à 8 EPNdB ne peuvent atterrir entre 22 heures et 6 heures locales ; quitter le point de stationnement, en vue d'un décollage, entre 22 heures et 6 heures locales " ; qu'enfin, selon les dispositions du règlement CE n°1702/2003 modifié par le règlement n°335/2007 du 28 mars 2007 de la Commission européenne, les certificats acoustiques exigés en matière de navigabilité et d'environnement ne peuvent être amendés ou modifiés que par l'autorité compétente de l'Etat membre d'immatriculation ;

3. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que les restrictions d'exploitation imposées par l'arrêté précité du 20 septembre 2011 sont exclusivement définies par référence à la certification établie par l'autorité compétente de l'Etat membre d'immatriculation, soit, en l'espèce, l'office de l'aviation civile polonais et que le niveau de bruit pris en compte pour l'application de cet arrêté est le niveau de bruit ainsi certifié ;

4. Considérant que la société Enter Air soutient que les certificats acoustiques de ses aéronefs, délivrés le 5 novembre 2010 et le 11 mars 2011, étaient erronés, que le bruit émis par ces aéronefs respectait dès la construction de ceux-ci en 1997 le seuil fixé par l'arrêté du 20 septembre 2011 grâce à la présence de panneaux acoustiques renforcés et que les certificats émis par les autorités polonaises les 1er octobre et 5 novembre 2013 ont corrigé cette erreur ; que l'ACNUSA soutient quant à elle que ces certificats émis en 2013 ont tiré les conséquences de travaux d'amélioration sonore effectués sur les aéronefs postérieurement aux dates des infractions en litige ;

5. Considérant que si la société Enter Air soutient que les certificats délivrés en 2010 et 2011 auraient retenu des valeurs inexactes, il est constant qu'à la date des infractions en litige, ils n'avaient pas été modifiés et n'avaient pas même fait l'objet d'une demande de modification ; que la société Enter Air ne justifie avoir saisi les autorités polonaises que le 6 septembre 2013, soit postérieurement aux infractions constatées ; que, dans ces conditions, l'ACNUSA n'a pas commis d'erreur de droit en appréciant l'existence d'une infraction au regard de la valeur indiquée par les certificats délivrés en 2010 et 2011 ; que la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'une telle interprétation de la réglementation en vigueur méconnaîtrait le principe de la présomption d'innocence, garanti tant par la Constitution que par l' article 6 § 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que les certificats acoustiques sont établis et modifiés en fonction des informations délivrées aux autorités de l'Etat d'immatriculation par les exploitants des aéronefs et que la société Enter Air ne fait état d'aucun obstacle qui l'aurait empêchée de solliciter la rectification des certificats avant septembre 2013 ;

6. Considérant que dès lors que les infractions étaient constituées, l'ACNUSA a pu légalement, sans méconnaître le principe de proportionnalité, tenir compte de l'heure à laquelle le manquement avait été commis et de la réitération des infractions pour fixer le montant des amendes infligées;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Enter Air n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif a rejeté ses demandes ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Enter Air le versement à l'ACNUSA de la somme de 1 500 euros au titre des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de la société Enter Air sont rejetées.

Article 2 : La société Enter Air versera à l'ACNUSA la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires et à la société Enter Air.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 mai 2016.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA02269, 15PA03017


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02269
Date de la décision : 23/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Nature et environnement - Divers régimes protecteurs de l`environnement - Lutte contre les nuisances sonores et lumineuses.

Transports - Transports aériens - Aéroports - Nuisances causées aux riverains.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : DE FROMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-05-23;15pa02269 ?
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