Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 27 avril 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 1508802/3-2 du 23 septembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 octobre 2015, complétée le 6 avril 2016, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1508802/3-2 du 23 septembre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 avril 2015 contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours suivant la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours suivant la décision à intervenir sous la même astreinte et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler durant cet examen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges auraient dû apprécier les pièces produites dans leur ensemble et s'interroger sur la cohérence générale du dossier, qu'ils ont méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'ils ont commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté préfectoral attaqué n'est pas motivé et sa demande n'a pas fait l'objet d'un examen attentif et personnalisé ;
- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie dès lors qu'il justifie de dix ans de présence sur le territoire ;
- il est fondé à solliciter son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision attaquée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est fondée sur une décision de refus de titre de séjour illégale ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée des mêmes illégalités que la décision de refus de titre de séjour ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mielnik-Meddah,
- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.
1. Considérant que M. B..., ressortissant tunisien, né le 5 juillet 1976 à Jerba, entré en France le 20 mars 2001 selon ses déclarations, a sollicité son admission au séjour ; que, par un arrêté du 27 avril 2015, le préfet de police a rejeté sa demande et a assorti ce rejet d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours en fixant le pays de destination ; que, par une requête enregistrée à la Cour le 27 octobre 2015, M. B... relève appel du jugement n° 1508802/3-2 du 23 septembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que M. B... soutient que les premiers juges auraient dû apprécier les pièces produites dans leur ensemble et s'interroger sur la cohérence générale du dossier, qu'ils ont méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'ils ont commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, ce faisant le requérant ne peut utilement invoquer ni l'erreur de droit, ni la dénaturation du dossier, ni l'erreur de qualification qu'auraient commises les premiers juges pour contester la régularité de leur jugement, laquelle ne dépend pas du caractère fondé ou non des motifs pour lesquels ont été écartés ses moyens ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment ses articles 3 et 8, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment son article L. 511-1 ainsi que l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ; qu'il précise l'identité de l'intéressé, la date alléguée de son entrée en France ainsi que le fondement de sa demande de titre de séjour et la date à laquelle il a été reçu à la préfecture ; qu'il relève que M. B... ne remplit pas les conditions prévues par l'article L. 313-14 dès lors qu'il ne justifie pas d'une présence en France depuis plus de dix ans ; qu'il n'entre pas dans le champ d'application de ces dispositions ; qu'en outre, il indique que l'intéressé n'atteste pas d'une vie privée et familiale en France dès lors qu'il est célibataire et sans charge de famille et qu'il n'est pas démuni d'attaches familiales à l'étranger où résident sa mère et une partie de sa fratrie et qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé à une vie privée et familiale ; que la circonstance que le préfet n'ait pas mentionné précisément les années pour lesquelles l'intéressé ne justifie pas, d'après lui, de sa présence sur le territoire, ni l'ensemble des éléments relatifs à sa situation personnelle est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors que celle-ci comporte les éléments de fait et de droit qui la fondent ; que la circonstance que le préfet de police ait opposé un refus à la demande de M. B... en dépit de la production de documents destinés à établir l'ancienneté de sa présence en France et l'intensité de sa vie privée et familiale sur le territoire ne permet pas de remettre en cause la réalité de l'examen particulier auquel il s'est livré ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en fait de la décision en litige doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ;
5. Considérant que M. B... soutient qu'il résidait en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté en litige ; que, toutefois, il ne produit au titre de l'année 2005 que des courriers et des relevés bancaires qui, en mentionnant exclusivement, outre des cotisations trimestrielles, un versement d'espèces et l'émission d'un chèque, ne permettent pas de déterminer qu'il aurait effectué des opérations nécessitant sa présence en France ; qu'il produit pour la première fois en appel une facture qui n'est pas nominative et, en tout état de cause, insuffisante pour justifier de sa présence pour le reste de l'année ; que, pour l'année 2006, il ne produit pour le premier semestre que des relevés bancaires indiquant, outre les cotisations susmentionnées, quatre versements d'espèces et l'émission d'un chèque et n'attestant ainsi d'aucun mouvement de nature à déterminer qu'il se trouvait sur le territoire ; qu'il en va de même pour la période allant de février à mai, puis de juillet à novembre 2007 ; qu'ainsi, les pièces produites ne sont ni suffisamment probantes, ni diversifiées pour démontrer la réalité de la résidence habituelle en France depuis une durée de dix ans à la date de la décision en litige ; que, dans ces conditions, le moyen tiré du vice de procédure lié au défaut de consultation de la commission du titre de séjour ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant qu'il ressort de ce qui précède que M. B... ne justifie pas résider de façon habituelle sur le territoire national depuis plus de dix ans ; que s'il fait valoir une intégration sur le territoire français, il ressort des pièces du dossier qu'il n'occupe un emploi stable en qualité de vendeur que depuis le 1er novembre 2014, qu'il n'a travaillé qu'entre août et décembre 2006, avril et mai 2007 puis de janvier à juin 2009 et qu'il ne justifie d'aucune qualification professionnelle ; qu'il ne fait état d'aucune intégration particulière en France et réside chez son père ; qu'il n'allègue pas que sa présence serait indispensable à ses côtés sur le territoire ; qu'il est célibataire et sans charge de famille en France ; que, dans ces circonstances, le préfet a pu sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, estimer que M. B... ne faisait état ni de considérations humanitaires, ni de motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant que si M. B... soutient qu'il a fixé le centre de sa vie privée et familiale en France et qu'il n'a plus de contact avec sa mère demeurée en Tunisie, il est célibataire et sans charge de famille en France et ne justifie d'aucun lien particulier sur le territoire, notamment avec sa soeur, en dehors de son père chez qui il réside ; que son intégration professionnelle est récente et peu qualifiée ; qu'il ne justifie pas d'autre forme d'intégration sur le territoire ; que dans ces conditions, alors même que le père et la soeur de M. B... sont titulaires d'une carte de résident, le préfet a pu lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sans porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et donc sans méconnaître les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;
10. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 5 à 8, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'obligation de quitter le territoire français comporterait des conséquences telles qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 12 avril 2016 à laquelle siégeaient :
M. Auvray, président de la formation de jugement,
Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,
M. Pagès, premier conseiller,
Lu en audience publique le 10 mai 2016.
Le rapporteur,
A. MIELNIK-MEDDAH
Le président,
B. AUVRAY
Le greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°15PA03931