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14/03/2016 | FRANCE | N°15PA00576

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 14 mars 2016, 15PA00576


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société 3A a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 mai 2014 par lequel le préfet de police a décidé la fermeture de l'établissement " SITIS ", situé 158 rue La Fayette à Paris, pour une durée de 30 jours et condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice subi.

Par un jugement n° 1408795/3-1 du 30 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête e

nregistrée le 6 février 2015, la société 3A, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société 3A a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 mai 2014 par lequel le préfet de police a décidé la fermeture de l'établissement " SITIS ", situé 158 rue La Fayette à Paris, pour une durée de 30 jours et condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice subi.

Par un jugement n° 1408795/3-1 du 30 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 février 2015, la société 3A, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 30 décembre 2014 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du police du 19 mai 2014 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de cet arrêté ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, relatives au principe du contradictoire, ont été méconnues ; le délai de 8 jours accordé à la société requérante était insuffisant pour que celle-ci puisse présenter utilement des observations et, en particulier, évaluer l'impact d'une fermeture administrative sur ses résultats comptables ;

- l'arrêté en litige est entaché d'erreur de droit ; en effet, l'article L. 332-1 du code de la sécurité intérieure ne concerne que les établissements de vente de boissons alcoolisées à emporter ; or, l'établissement SITIS est un commerce d'alimentation générale ;

- l'activité de l'établissement n'a pas causé de troubles à l'ordre public ; les incidents invoqués par le préfet n'ont pas été causés ou favorisés par une vente illicite d'alcool par l'établissement SITIS ; un seul incident, à savoir une rixe intervenue le 21 février 2014, a un lien avec la fréquentation du magasin ; ce fait isolé ne justifie pas une fermeture administrative ;

- l'arrêté préfectoral porte une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie et à la liberté d'entreprendre ; qu'il n'était pas nécessaire pour assurer la préservation de l'ordre public ; qu'en tout état de cause, la durée de la fermeture est excessive.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2015, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 septembre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Petit,

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

1. Considérant que par un arrêté du 19 mai 2014, pris sur le fondement de l'article L. 332-1 du code de la sécurité intérieure, le préfet de police a décidé la fermeture de l'établissement " SITIS ", exploité par la société 3A et situé 158 rue La Fayette à Paris, pour une durée de 30 jours ; que par un jugement du 30 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société 3A tendant à l'annulation de cet arrêté et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi ; que la société requérante fait appel de ce jugement ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 susvisée, alors en vigueur et repris aujourd'hui à l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 14 avril 2014, notifié le 1endemain, le préfet de police a informé le gérant de la société 3A qu'il envisageait de prononcer la fermeture administrative de l'établissement " SITIS " à la suite de la constatation, les 28 janvier, 12 février, 13 février, 21 février et 13 mars, de troubles à l'ordre public en lien avec les conditions de gestion de l'établissement, et a invité le gérant à présenter ses observations dans un délai de huit jours ; que le gérant a présenté des observations orales le 23 avril 2014 lors d'un entretien à la préfecture de police puis des observations écrites le 25 avril 2014 ; que si la requérante soutient que le délai de huit jours qui lui était imparti pour présenter des observations était trop court, il résulte de ce qui a été dit-dessus qu'elle a bénéficié, en réalité, pour ce faire, d'un délai supérieur, l'arrêté n'ayant au demeurant été adopté que le 19 mai 2014 ; que la société requérante ne peut utilement invoquer que le bilan n'avait pas encore été établi par l'expert-comptable, cette circonstance étant sans lien avec le bien-fondé de la mesure de police administrative envisagée par le préfet de police et ne faisant pas obstacle, en tout état de cause, à ce qu'elle invoque devant l'administration les conséquences, pour son activité, d'une telle mesure ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 doit dès lors être écarté ;

3. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 332-1 du code de la sécurité intérieure : " Les établissements fixes ou mobiles de vente à emporter de boissons alcoolisées ou d'aliments assemblés et préparés sur place, destinés à une remise immédiate au consommateur, dont l'activité cause un trouble à l'ordre, la sécurité ou la tranquillité publics peuvent faire l'objet d'un arrêté de fermeture administrative d'une durée n'excédant pas trois mois pris par le représentant de l'Etat dans le département (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'établissement en cause vendait des boissons alcoolisées à emporter ; que, par suite, alors même qu'il était immatriculé en qualité de magasin d'alimentation générale au registre du commerce et des sociétés, il était susceptible de faire l'objet d'une mesure de fermeture administrative en application des dispositions précitées ; que le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise sur ce point le préfet de police doit ainsi être écarté ;

4. Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les services de police sont intervenus dans l'établissement le 28 janvier 2014 à la suite d'une rixe entre un client et un employé du magasin, puis pour une rixe aux abords de l'établissement le 13 février 2014 et enfin devant l'établissement en raison de troubles causés par des clients venus y acheter de l'alcool le 21 février 2014 ; qu'il ressort, par ailleurs des pièces du dossier, et notamment du procès verbal du 14 mars 2014, dont les indications font foi jusqu'à preuve contraire, qu'à cette date, a été constatée, à partir de 21h10, la présence d'une quinzaine de personnes en train de consommer de l'alcool et de vociférer à hauteur du 158 de la rue de La Fayette (75010) ; qu'interrogée sur la provenance des boissons alcoolisées, l'une de ces personnes, interpellée, a déclaré qu'elles avaient été achetées au " SITIS " ; que dans ces conditions, et alors même que le gérant n'aurait pas méconnu la réglementation applicable à la vente d'alcool, l'activité de l'établissement doit être regardée, en raison de cette répétition d'incidents, comme ayant causé un trouble à l'ordre public ; que le préfet de police pouvait dès lors légalement décider une mesure de fermeture administrative ; qu'en fixant la durée de cette fermeture à trente jours, il n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, ni porté une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre ou à la liberté du commerce et de l'industrie ;

6. Considérant que l'illégalité de l'arrêté en litige n'étant pas établie, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de police aurait commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société 3A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; qu'en conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société 3A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société 3A et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 19 février 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 mars 2016.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLOLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA00576


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00576
Date de la décision : 14/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

49-05-04 Police. Polices spéciales. Police des débits de boissons.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : BENKIMOUN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-03-14;15pa00576 ?
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