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23/02/2016 | FRANCE | N°15PA03896

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 23 février 2016, 15PA03896


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... Authenac a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2011 par lequel le maire de Paris, président du conseil d'administration du Centre d'action sociale de la ville de Paris (CASVP) a prononcé à son encontre la sanction de révocation, d'autre part, à ce qu'il soit fait injonction à cette autorité de le rétablir dans ses fonctions.

Par un jugement n° 1107096/5-3 en date du 18 juillet 2012, le Tribunal administratif

de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13PA01212 du 17 juin 2014, la Cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... Authenac a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2011 par lequel le maire de Paris, président du conseil d'administration du Centre d'action sociale de la ville de Paris (CASVP) a prononcé à son encontre la sanction de révocation, d'autre part, à ce qu'il soit fait injonction à cette autorité de le rétablir dans ses fonctions.

Par un jugement n° 1107096/5-3 en date du 18 juillet 2012, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13PA01212 du 17 juin 2014, la Cour administrative d'appel de Paris a, d'une part, annulé le jugement du Tribunal administratif de Paris du 18 juillet 2012 ainsi que l'arrêté litigieux et, d'autre part, enjoint au Président du CASVP de procéder à la réintégration de M. Authenac dans le délai d'un mois à compter de son arrêt.

Par une décision n° 383718 du 14 octobre 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt du 17 juin 2014 et a renvoyé l'affaire à la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mars 2013, et des mémoires, enregistrés les 28 mai 2014 et 29 janvier 2016, M. Authenac, représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107096/5-3 du 18 juillet 2012 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) d'enjoindre au Président du CASVP de le rétablir dans ses fonctions dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du Centre d'action sociale de la ville de Paris une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'incompétence ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'insuffisance de motivation ;

- l'arrêté attaqué est entaché de vices de procédure du fait de l'irrégularité de l'annulation du conseil de discipline du 1er octobre 2010, du fait de la violation de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 et du fait de la violation de l'article 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans le choix de la sanction ;

- l'arrêté attaqué et la décision de changement d'affectation qui l'a précédé sont entachés de détournement de pouvoir.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 juillet 2013, 5 juin 2014 et 25 janvier 2016, le Centre d'action sociale de la ville de Paris, représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. Authenac au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable pour défaut de motivation car elle se borne à reprendre les écritures de première instance en ajoutant seulement le moyen tiré de la violation de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 qui est dirigé contre l'arrêté de révocation et non contre le jugement attaqué ;

- les moyens soulevés par M. Authenac sont infondés ;

Par une décision du 17 janvier 2013 le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a accordé à M. Authenac le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- les observations de MeB..., pour M. Authenac, et de Me C..., pour le Centre d'action sociale de la ville de Paris.

Une note en délibéré, enregistrée le 2 février 2016, a été présentée pour le Centre d'action sociale de la ville de Paris.

1. Considérant que, par un arrêté du 14 février 2011, prenant effet le 1er mars 2011, le directeur adjoint du Centre d'action sociale de la ville de Paris a prononcé à l'encontre de M. Authenac, secrétaire administratif, une sanction disciplinaire de révocation pour " manquement répété à l'obligation d'obéissance hiérarchique, comportement nuisible au fonctionnement du service et absence totale de service fait " ; que M. Authenac relève régulièrement appel du jugement du 18 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2011 par lequel le directeur adjoint du Centre d'action sociale de la ville de Paris l'a révoqué pour faute disciplinaire, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à cet établissement de le rétablir dans ses fonctions ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le Centre d'action sociale de la ville de Paris :

2. Considérant qu'en liminaire de sa requête d'appel, le requérant demande l'annulation du jugement du 18 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande du 18 avril 2011 ; que, dès lors que lui est ouverte la voie de réformation qu'est à titre principal l'appel, le requérant peut se borner, s'il y a convenance, à soumettre au juge d'appel le réexamen de sa demande de première instance aux fins de faire à nouveau juger le litige ; qu'en tout état de cause, comme l'admet le Centre d'action sociale de la ville de Paris, la requête d'appel comporte un nouveau moyen tiré de la méconnaissance de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée ; qu'ainsi, la circonstance que le requérant n'a pas cru devoir modifier, pour l'essentiel, l'argumentation déjà vainement présentée au tribunal administratif ne saurait équivaloir à l'absence totale d'exposé de moyens que l'article R. 411-1 du code de justice administrative sanctionne par l'interdiction de toute régularisation après l'expiration du délai d'appel ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le Centre d'action sociale de la ville de Paris et tirée de ce que la requête en appel présente les mêmes moyens que ceux qui avaient été présentés en première instance sans diriger de moyens contre le jugement attaqué ne peut qu'être rejetée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. " ; qu'aux termes de l'article 14 du décret du 24 mai 1994 susvisé, pris pour l'application de l'article 118 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. (...) / Quatrième groupe : - la mise à la retraite d'office ; - la révocation (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Authenac, qui travaillait depuis 2007 au bureau du budget du service des finances et des contrôles a été avisé le 25 mars 2009 du transfert de son poste au service des ressources humaines dans le cadre d'une réorganisation dont le comité technique paritaire avait été saisi le mois précédent ; qu'il a alors exprimé son opposition à ce changement d'affectation, et a été placé en congé de maladie à partir du 2 avril 2009 sans avoir rejoint son poste, jusqu'au 5 mai 2009, puis à nouveau, à compter du 16 juin 2009 sans discontinuité jusqu'au 13 avril 2010 date à laquelle il a été jugé apte par la médecine de contrôle, à reprendre le travail ; qu'à son retour le 14 avril 2010, il a à nouveau refusé de travailler dans le service des ressources humaines où son poste avait été transféré, a signalé chaque jour par le badge électronique sa présence dans les locaux, tout en stationnant dans le hall de l'immeuble sans travailler jusqu'au prononcé de la sanction ;

5. Considérant que M. Authenac soutient, toutefois, que le changement d'affectation qui lui a été notifié au mois de mars 2009 et auquel il s'est opposé, était destiné à se " débarrasser de lui " dans son ancien service et révélait un désir de vengeance personnelle qui doit être regardé comme un détournement de pouvoir ; que, cependant, ces allégations ne ressortent aucunement des pièces du dossier ; qu'en particulier, les allégations selon lesquelles il aurait fait l'objet de rétention d'informations ou d'ordres contradictoires de sa hiérarchie ne sont étayées par aucun élément de fait ; que le choix de la personne de M. Authenac, parmi les trois agents du service susceptibles d'être transférés dans l'autre service, trouve sa justification objective dans les connaissances particulières de celui-ci en informatique et en gestion de la paye, bien adaptées au profil du poste ; que les fonctions étaient, par ailleurs, similaires aux fonctions qu'il exerçait jusqu'alors ; qu'ainsi, le détournement de pouvoir allégué à l'encontre de la décision de changement d'affectation n'est pas établi ;

6. Considérant que M. Authenac a donc commis une faute en refusant d'exercer ses nouvelles fonctions alors même que, comme il vient d'être dit, il n'établit pas l'illégalité de sa nouvelle affectation ; qu'au surplus, il s'est rendu coupable de manquement à l'obligation de réserve, le Tribunal de grande instance de Paris statuant en matière correctionnelle le 22 mai 2012 l'ayant condamné à 300 euros d'amende avec sursis pour injures publiques envers quatre de ses supérieurs hiérarchiques, tout en le renvoyant des fins de la poursuite en diffamation publique envers l'un de ses supérieurs hiérarchiques ; que, si ces faits étaient constitutifs de faute professionnelle justifiant une sanction disciplinaire, eu égard aux circonstances, d'une part, que M. Authenac, fonctionnaire de catégorie B, était bien noté depuis son entrée en fonctions en 2001 jusqu'à l'année 2008, d'autre part, qu'il n'avait fait l'objet d'aucune sanction auparavant, le choix de la sanction de la révocation, qui est la sanction la plus sévère, doit être regardé, au regard de ce passé professionnel, comme entaché d'erreur d'appréciation ; que, par suite, M. Authenac est fondé, pour ce motif, à demander l'annulation de l'arrêté attaqué ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Authenac est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que l'annulation de l'arrêté du 14 février 2011 par lequel le directeur adjoint du Centre d'action sociale de la ville de Paris a révoqué M. Authenac pour faute disciplinaire implique nécessairement que M. Authenac soit réintégré par cet établissement ; qu'il y a lieu, dès lors, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de faire droit aux conclusions du requérant en enjoignant au Président du Centre d'action sociale de la ville de Paris de procéder à la réintégration de l'intéressé dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, toutefois il n'y a pas lieu, en l'espèce, d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par le requérant ;

Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que M. Authenac, qui a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle, demandait dans ses premières écritures une somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et demande, dans son dernier mémoire enregistré le 29 janvier 2016, qu'une somme soit mise à la charge du Centre d'action sociale de la ville de Paris au seul titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du Centre d'action sociale de la ville de Paris le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. Authenac et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. Authenac, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que le Centre d'action sociale de la ville de Paris demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1107096/5-3 du 18 juillet 2012 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 14 février 2011 par lequel le directeur adjoint du Centre d'action sociale de la ville de Paris a révoqué M. Authenac pour faute disciplinaire sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au Président du Centre d'action sociale de la ville de Paris de procéder à la réintégration de M. Authenac dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le Centre d'action sociale de la ville de Paris versera la somme de 1 000 euros à M. Authenac sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. Authenac est rejeté.

Article 5 : Les conclusions présentées par le Centre d'action sociale de la ville de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... Authenac et au Centre d'action sociale de la ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 2 février 2016 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président de chambre,

M. Auvray, président-assesseur,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 23 février 2016.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. RENE-MINE

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile de France, préfet de Paris, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA03896


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03896
Date de la décision : 23/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09 Fonctionnaires et agents publics. Discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : GAMBOTTI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-23;15pa03896 ?
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