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02/02/2016 | FRANCE | N°15PA01976

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 02 février 2016, 15PA01976


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C...a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juillet 2014, modifié le 23 juillet 2014, par lequel le maire de Paris a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de la révocation à compter du 9 août 2014.

Par un jugement n° 1420149/2-3 du 19 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 mai 2015, Mme C...représentée par MeA...,

demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1420149/2-3 du 19 mars 2015 du Tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C...a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juillet 2014, modifié le 23 juillet 2014, par lequel le maire de Paris a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de la révocation à compter du 9 août 2014.

Par un jugement n° 1420149/2-3 du 19 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 mai 2015, Mme C...représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1420149/2-3 du 19 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté du 17 juillet 2014, modifié par l'arrêté du 23 juillet 2014 ;

3°) de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'incompétence car M. Chotard, qui était en congé de maladie, n'a pu valablement le signer ;

- la sanction litigieuse méconnaît la règle du " non bis in idem " dès lors qu'elle repose sur des faits déjà sanctionnés par le juge pénal, alors qu'au surplus ces faits ont été commis en dehors du service ;

- la sanction litigieuse est disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 novembre 2015, la ville de Paris, représentée par la SCP Foussard-Froger, conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme C...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;

- le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- les observations de Me A...pour MmeC...,

- et les observations de MeB..., pour la ville de Paris.

1. Considérant que MmeC..., agent technique de la petite enfance (ATEPE) de 1ère classe née le 27 juin 1983, affectée à la direction des familles et de la petite enfance (DFPE) de la ville de Paris et en poste au sein de la crèche collective sise 40 rue Piat à Paris (75020) depuis le 29 août 2011, a fait l'objet d'un arrêté du maire de Paris en date du 17 juillet 2014, modifié le 23 juillet 2014, prononçant la sanction disciplinaire de la révocation à compter du 9 août 2014 ; que Mme C...relève régulièrement appel du jugement en date du 19 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, que M. Chotard, secrétaire général de la ville de Paris et signataire de l'arrêté contesté du 17 juillet 2014 modifié par celui du 23 juillet suivant, a reçu, par arrêté en date du 5 avril 2014 régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris, délégation pour signer tous arrêtés, actes et décisions préparés par les services placés sous son autorité ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'attestation jointe au mémoire en défense de la ville de Paris, que M. Chotard n'était pas en congé de maladie à cette date ni d'ailleurs durant toute l'année 2014, contrairement aux allégations de la requérante explicitées pour la première fois en cause d'appel ; que dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté litigieux manque en fait et doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale " ; qu'aux termes de l'article 14 du décret du 24 mai 1994 susvisé, pris pour l'application de l'article 118 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. (...) / Quatrième groupe : - la mise à la retraite d'office ; - la révocation (...) " ; que les procédures disciplinaire et pénale, qui sont indépendantes l'une de l'autre, poursuivent des objectifs distincts et sont de nature différente ;

4. Considérant que la requérante soutient que le principe " non bis in idem " a été violé par la ville de Paris dès lors qu'elle a déjà été condamnée par un jugement correctionnel du Tribunal de grande instance de Paris en date du 29 mars 2013 à huit mois de prison dont six avec sursis avec mise à l'épreuve pendant une période de deux ans ; que, toutefois, d'une part, aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit à l'administration de se fonder sur les faits ayant motivé une condamnation pénale pour déclencher une procédure disciplinaire à l'encontre d'un agent, dans l'intérêt du service ; que, d'autre part, bien qu'étrangers au service, les faits à raison desquels l'intéressée a été condamnée pénalement et qui sont incompatibles avec les fonctions qu'elle exerce, sont de nature à justifier, à supposer même que ces faits n'auraient ni porté atteinte à la réputation de la ville de Paris, ni eu un retentissement sur le service, une sanction disciplinaire ; qu'ainsi Mme C...n'est pas fondée à soutenir que le maire de Paris aurait entaché son arrêté d'erreur de droit pour avoir méconnu le principe " non bis in idem " et pris en compte des agissements dont elle s'est rendue coupable en dehors de l'exercice de ses fonctions ;

5. Considérant, d'une part, qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ; que, d'autre part, il incombe à l'administration, dans le choix de la sanction qu'elle retient, de tenir compte non seulement de la nature et de la gravité des faits répréhensibles, mais aussi de la situation d'ensemble de l'agent en cause, à la date à laquelle la sanction pénale est prononcée, compte tenu, le cas échéant, des éléments recueillis, des expertises ordonnées et des constatations faites par le juge pénal ;

6. Considérant que Mme C...soutient que l'arrêté litigieux est entaché d'une erreur d'appréciation ; que, toutefois, il résulte du jugement correctionnel du Tribunal de grande instance de Paris en date du 29 mars 2013 que l'exploitation de l'enregistrement audio-vidéo de l'autobus, dans lequel se sont déroulés les faits litigieux le 30 janvier 2013, a mis en évidence qu'au cours de la montée dans cet autobus, l'ami accompagnant Mme C...a invectivé une personne âgée de 63 ans qui se tenait près du conducteur lui reprochant d'avoir donné des coups de parapluie à la requérante et d'avoir proféré des propos racistes alors même que la personne âgée " cherchait à faciliter leur montée en se poussant au maximum ", qu'" à aucun moment [la personne âgée de 63 ans] n'a été vue portant un coup sur Mme C...et n'a tenu de propos à caractère raciste à l'encontre du couple ", que " Mme C...décrite comme étant en état d'excitation extrême, s'avançait vers [la personne âgée de 63 ans] qui lui tournait le dos pour lui porter plusieurs coups de poing au visage et sur le dos avant de quitter le bus, la victime ne réagissant plus " et enfin que " Mme C...n'hésite pas à remonter dans le bus pour tirer les cheveux de la [personne âgée de 63 ans] et la secouer, provoquant la chute de ses lunettes sur le sol " ; qu'eu égard à la gravité des faits commis, lesquels ont entraîné pour la victime une incapacité supérieure à huit jours, et à la circonstance que la requérante a, dans un premier temps, au cours de l'enquête pénale, nié les coups portés à la victime, de tels agissements sont incompatibles avec la fonction d'agent technique de la petite enfance de la ville de Paris exercée par la requérante, susceptible d'être en contact tant avec de jeunes enfants qu'avec des adultes, collègues ou parents, et étaient de nature à justifier une sanction disciplinaire nonobstant la circonstance alléguée que la requérante était dans une situation de fragilité psychologique du fait d'un début de grossesse difficile ; qu'en outre, si Mme C...se prévaut de ses qualités professionnelles et de l'absence d'antécédents disciplinaires, il est constant que l'intéressée, nommée agent stagiaire le 27 septembre 2010 et titularisée le 27 septembre 2011, exerçait ainsi ses fonctions au sein de la ville de Paris depuis peu de temps à la date des faits litigieux du 30 janvier 2013 et que de telles fonctions, du fait notamment de l'interaction qu'elles imposent avec les enfants contrairement à ce qu'allègue la requérante et quand bien même il ne s'agirait pas de fonctions pédagogiques, nécessitent un comportement mesuré dont elle n'a manifestement pas su faire preuve au cours des faits en litige ; que les circonstances que le juge pénal a sollicité la non inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressée et a assorti la peine de huit mois d'emprisonnement, dont six avec sursis, d'une mise à l'épreuve de deux ans, laquelle comporte l'exercice d'une activité professionnelle, est sans incidence sur la sanction contestée dès lors, en tout état de cause, que l'activité professionnelle mentionnée par le juge pénal ne vise pas nécessairement l'emploi exercé par l'intéressée au sein des services de la ville de Paris et qu'en toute hypothèse, l'activité professionnelle peut, aux termes mêmes du jugement pénal dont s'agit, être remplacée par un enseignement ou une formation professionnelle ; que, dans ces conditions, eu égard à la gravité des faits, lesquels sont incompatibles avec l'exercice de la fonction d'agent technique de la petite enfance, la ville de Paris n'a pas commis d'erreur d'appréciation en infligeant la sanction de révocation à MmeC..., comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que soit mise à la charge de la ville de Paris, qui n'est pas la partie perdante en la présente instance, la somme que Mme C...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C...le versement au profit de la ville de Paris d'une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la ville de Paris présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C...et à la ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

M. Auvray, président de la formation de jugement,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 2 février 2016.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

B. AUVRAY

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA01976


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01976
Date de la décision : 02/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09 Fonctionnaires et agents publics. Discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : AARPI EVIN ET BORG

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-02;15pa01976 ?
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