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19/01/2016 | FRANCE | N°14PA01541

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 19 janvier 2016, 14PA01541


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Soffimat a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008.

Par un jugement n° 1303820 du 11 février 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 avril 2014, la société Soffimat, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annul

er le jugement n° 1303820 du 11 février 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décha...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Soffimat a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008.

Par un jugement n° 1303820 du 11 février 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 avril 2014, la société Soffimat, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303820 du 11 février 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- s'agissant du bien fondé des impositions, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'administration établissait l'acte anormal de gestion de la SA Energie Europe Service du fait de la vente à son profit d'un stock à un prix minoré et, par voie de conséquence, établissait la libéralité dont elle aurait bénéficié, imposable en tant que revenus distribués ;

- elle est fondée à demander la décharge des intérêts de retard car le taux de l'intérêt de retard ne devrait pas dépasser le taux de l'intérêt légal et, en outre, dans une instruction du 19 février 2007, l'administration a précisé que pour les infractions commises avant le 1er janvier 2006 elle ferait application rétroactive de la loi plus douce ;

- elle est fondée à demander la décharge des pénalités pour manquement délibéré car l'administration ne prouve pas le manquement délibéré ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Soffimat ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.

1. Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la société Energie Europe Service, appartenant au même groupe économique informel que la SA Soffimat, société requérante, l'administration a considéré que la vente d'un stock de pièces détachées consentie par la société Energie Europe Service à la SA Soffimat était constitutive, compte tenu d'un prix de cession considéré comme insuffisant, d'une libéralité ; que la minoration de prix considérée à été, par voie de conséquence, soumise à l'impôt sur les sociétés dans le chef de la SA Soffimat ; que cette dernière relève régulièrement appel du jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 11 février 2014 qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008 ;

Sur le bien fondé des impositions :

2. Considérant qu'à la fin de l'exercice clos en 2008 la SA Soffimat, qui exerce une activité de commercialisation de matériel électrique, a acquis de la société Energie Europe Service et pour un prix HT de 210 000 euros, un stock de pièces détachées destinées à la maintenance de modules de cogénération de gaz naturel à partir de groupe électrogène ;

3. Considérant qu'aux termes des dispositions du 3 de l'article 38 du code général des impôts : " les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient " ;

4. Considérant que l'administration relève, en premier lieu, que le stock litigieux était inscrit au bilan au 31 décembre 2007 de la société venderesse pour un montant HT de 489 142,30 euros, en deuxième lieu que cette dernière n'avait constaté aucune provision pour dépréciation dudit stock, en troisième lieu que la transaction est intervenue entre deux sociétés faisant partie d'un groupe économique informel, exerçant la même activité, domiciliées à la même adresse et dirigées par deux personnes portant le même patronyme ;

5. Considérant qu'en réponse la SA Soffimat soutient que la méthode de cogénération aurait commencé à disparaître dès 2007, que la société Energie Europe Service, comme

elle-même, auraient dû diversifier leurs activités et se tourner vers les énergies renouvelables et que le stock litigieux de pièces détachées pour le maintien des modules de cogénération, n'était plus d'aucune utilité ni valeur ; qu'à l'appui de ces allégations la requérante cite des extraits d'une revue indiquant que l'inspection générale des finances aurait émis de fortes réserves sur le maintien d'un soutien actif de la filière et qu'il était annoncé en 2007 que la cogénération entrerait dans une phase d'extinction ;

6. Considérant, toutefois, que l'administration relève encore que, dans la même revue, les articles cités par la requérante mentionnent l'existence de 800 installations de cogénération pour en déduire à juste titre, comme l'ont estimé avec raison les premiers juges, que ces installations nécessitent l'emploi de pièces détachées de maintenance, ce qui contredit l'assertion selon lequel le stock dont s'agit ici aurait été frappé d'obsolescence, nonobstant la circonstance que les sociétés Soffimat et Energie Europe Service auraient souhaité se désengager de l'activité de cogénération ;

7. Considérant que la SA Soffimat soutient encore que la transaction serait intervenue dans des conditions normales, et déclare que la société venderesse aurait avec succès démarché l'un de ses propres clients et que le stock litigieux n'aurait été en sa possession qu'un instant de raison, puis vendu audit client ;

8. Considérant, cependant, qu'il est constant que la cession envisagée n'a pas eu lieu et que le stock était encore inscrit au bilan de la SA Soffimat pour le même montant de 210 000 euros à la clôture de l'exercice 2009, comme le montre l'attestation du Président Directeur Général certifiée par le commissaire aux comptes produite par la société ; que, d'ailleurs, aucun élément n'établit la réalité dudit projet de cession ;

9. Considérant, enfin, que la SA Soffimat, d'une part, ne présente aucune description précise du stock litigieux et de sa consistance, qu'elle n'apporte aucune précision sur la méthode ayant conduit à le valoriser à 210 000 euros, et, d'autre part, qu'elle ne démontre pas que sa société mère aurait effectué les diligences suffisantes pour trouver acquéreur dans des conditions normales ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'administration, nonobstant l'avis favorable à l'abandon du redressement rendu le 24 novembre 2011 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, prouve l'insuffisance du prix de vente consenti à la requérante et, partant, le bien-fondé de l'avantage ainsi consenti, sans contrepartie, par la SA Soffimat à sa société mère, et de l'imposition entre les mains de la première de la libéralité qui lui a de ce fait été distribuée ;

Sur les intérêts de retard :

11. Considérant que l'intérêt de retard vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; que les dispositions combinées de l'article 1er du premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 14 de la même convention sont sans portée dans les rapports institués entre la puissance publique et un contribuable à l'occasion de l'établissement et du recouvrement de l'impôt ; qu'en outre, les dispositions de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme sont inapplicables dans la mesure où l'intérêt de retard visé aux articles 1727 et 1729 du code général des impôts n'est pas une sanction ; qu'enfin, l'intérêt de retard n'étant pas une sanction, la requérante ne peut se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales de l'instruction administrative du 19 février 2007 précisant que pour les infractions commises avant le 1er janvier 2006 l'administration ferait une application rétroactive de la loi plus douce ;que, par suite, la société Soffimat n'est pas fondée à demander la décharge des intérêts de retard ;

Sur les pénalités :

12. Considérant, qu'aux termes des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré " ;

13. Considérant qu'en relevant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus , que la transaction était intervenue entre deux sociétés faisant partie d'un groupe économique informel, exerçant la même activité, domiciliées à la même adresse et dirigées par deux personnes portant le même patronyme, pour en inférer que les parties à la transaction ne pouvaient ignorer l'existence d'une minoration de prix de cession, l'administration établit la volonté délibérée d'éluder l'impôt ; qu'en outre, contrairement à ce que soutient la requérante, le caractère réitéré d'une infraction fiscale ne constitue pas une condition nécessaire à l'établissement de la volonté délibérée d'éluder l'impôt ; que, par suite, l'administration prouve le manquement délibéré de la société Soffimat ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Soffimat n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Soffimat est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Soffimat et au ministre des finances et des comptes publics. Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (Direction du contrôle fiscal Ile-de-France Ouest).

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président de chambre,

M. Auvray, président-assesseur,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 19 janvier 2016.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. RENE-MINE

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics , en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA01541


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01541
Date de la décision : 19/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : CABINET J-P FOUCAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-01-19;14pa01541 ?
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