Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...E...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris :
1°) d'annuler la décision implicite du 9 janvier 2012 par laquelle le président de l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie a rejeté sa demande indemnitaire du 9 novembre 2011 ;
2°) de condamner l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie à lui verser la somme de 132 883,46 euros, soit la somme de 80 007,80 euros après déduction du montant de
52 875, 66 euros versé à titre d'acompte par l'université, assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 mai 2009.
Par un jugement n° 1200669/5-3 du 25 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a :
- constaté un non lieu à statuer sur les conclusions aux fins d'indemnisation de la requête de Mme A...à concurrence d'un montant de 52 875,66 euros au titre de l'indemnité compensatrice de traitement de la période du 15 avril 2005 au 14 novembre 2011 ;
- décidé que cette somme porterait intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2011 et jusqu'au 7 novembre 2012 ;
- condamné l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie à verser à Mme A...la somme de 2 000 euros, tous intérêts compris, en réparation des divers préjudices subis au cours de la période du 15 avril 2005 au 14 novembre 2011 ;
- rejeté le surplus des conclusions de la requête de MmeA....
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 15 avril 2015, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler la décision implicite du 9 janvier 2012 du président de l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie, mentionnée ci-dessus ;
2°) d'enjoindre à l'université de lui verser le montant de son traitement jusqu'à sa réintégration effective, avec régularisation de son assurance vieillesse ;
3°) de condamner l'université à lui verser la somme de 10 931, 42 euros en réparation de la perte d'une chance de titularisation, et la somme de 10 931, 42 euros en réparation du harcèlement moral dont elle est victime ;
4°) de mettre à la charge de l'université le versement de la somme de 11 960 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à la part contributive de l'État.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué n'a pas répondu à sa demande de jonction, ce qui aurait permis le traitement cohérent de l'ensemble de ses demandes ;
- elle n'a pas été complètement indemnisée à la suite de l'annulation de la décision par laquelle il a été mis fin illégalement à son contrat de travail ; la somme allouée ne tient pas compte de la revalorisation indiciaire ; elle n'indemnise pas la diminution de sa pension de retraite ;
- la somme de 52 875, 66 euros constitue un acompte, indépendamment de la qualification qui peut lui être donnée par l'université ;
- sa réintégration dans son emploi d'assistante des bibliothèques doit s'accompagner de la reconstitution de sa carrière et doit, compte tenu de la date de sa première entrée en fonction, soit le 3 février 1998, de la circonstance qu'elle doit être regardée comme ayant été titulaire d'un unique contrat à durée indéterminée à partir de cette date, et de l'évolution moyenne constatée par les organisations syndicales, s'accompagner de son reclassement dans la classe normale de l'échelle statuaire prévue à l'article 9 du décret du 18 novembre 1994 avec l'indice 384 à partir de décembre 2012, ce qui correspond à une rémunération brute de 1 763, 90 euros, hors indemnité de résidence ; l'attribution d'un autre indice méconnaitrait l'autorité de chose jugée qui s'attache au jugement du Tribunal administratif de Paris du 5 octobre 2011 ; elle doit être indemnisée sur la base de la rémunération correspondant à cet indice ;
- l'indemnisation accordée ne tient pas compte de la possibilité d'une progression au choix ;
- la période d'indemnisation ne peut s'arrêter à la date de versement de l'acompte de 52 875, 66 euros puisque la réintégration n'a pas été faite et puisque la rémunération a été suspendue au mois de septembre 2012 ;
- l'indemnisation doit porter sur un montant brut ; l'université ne démontre pas avoir régularisé sa situation au regard de l'assurance vieillesse ;
- elle doit être indemnisée à raison de la perte d'une chance de titularisation ;
- compte tenu de sa demande préalable du 9 novembre 2011, elle est recevable et fondée à demander à être indemnisée à raison du harcèlement moral dont elle est victime.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2015, l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie, représentée par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de mettre à la charge de Mme A...le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conclusions de Mme A...tendant à être indemnisée à partir du 3 février 1998 et au-delà du 15 novembre 2011, et ses conclusions tendant à être indemnisée à raison d'actes de harcèlement moral, sont irrecevables en l'absence de réclamation et de décision préalables ;
- les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 21 octobre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 novembre 2015.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 4 juin 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le décret n° 94-1016 du 18 novembre 1994 ;
- le décret n° 2001-326 du 13 avril 2001 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet, rapporteur,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- et les observations de Me D...pour l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie.
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un jugement du 13 mai 2009, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision de l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie, mettant fin aux fonctions de bibliothécaire adjointe que Mme C...E...A...avait exercées en exécution de contrats de travail à durée déterminée du 3 février 1998 au 14 avril 2005, et a enjoint à l'université de la réintégrer dans son emploi ; que, par un jugement du 5 octobre 2011, le tribunal a enjoint à l'université, dans le cadre des dispositions de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, de procéder à la réintégration de Mme A...dans un emploi d'assistant des bibliothèques de classe normale à temps complet ; que l'université lui a proposé un contrat de travail à durée indéterminée le 14 novembre 2011 ; que, par un courrier du 9 novembre 2011, Mme A...lui a en outre demandé à être indemnisée à hauteur de
127 829,75 euros, à raison des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait de la décision mettant fin à ses fonctions, et de mettre fin au harcèlement moral dont elle s'estimait victime ; qu'elle a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite de rejet née le 9 janvier 2012 du silence conservé par le président de l'université sur cette demande, et, dans le dernier état de ses écritures, de condamner l'université à lui verser la somme de
132 883,46 euros, soit la somme de 80 007, 80 euros après déduction du montant de 52 875,66 euros versé par l'Université ; que, par un jugement n° 1200669/5-3 du 25 mars 2015, le tribunal a notamment constaté un non lieu à statuer sur ses conclusions indemnitaires à concurrence du montant de 52 875, 66 euros, condamné l'université à lui verser la somme de 2 000 euros en réparation des divers préjudices subis et rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; que Mme A...doit être regardée comme demandant l'annulation de ce jugement en tant qu'il a partiellement rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'en s'abstenant de se prononcer dans le jugement attaqué sur les conclusions de la nouvelle demande dont Mme A...l'avait saisi par ailleurs sous
le n° 1313912/5-3, aux fins d'annulation de l'arrêté du 11 avril 2013 du président de l'université la plaçant en congé sans rémunération pour une durée d'un an, et des décisions implicites rejetant son recours gracieux et son recours hiérarchique contre cet arrêté, qu'il a rejetées par un jugement du 28 octobre 2015, le tribunal a implicitement mais nécessairement rejeté ses conclusions tendant à la jonction de cette nouvelle instance avec le présent litige ; qu'en n'usant pas de son pouvoir de joindre les deux affaires et en s'abstenant de motiver son jugement sur ce point, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'irrégularité ;
Sur le montant de l'indemnité compensatrice :
3. Considérant qu'il résulte des tableaux produits par l'université en pièces 3-1 et 3-1 bis à l'appui de ses mémoires en défense enregistrés les 4 et 22 décembre 2012 au greffe du tribunal administratif, que, pour fixer à 52 875, 66 euros, puis à 53 599, 88 euros, le montant de l'indemnité compensatrice de traitement due à Mme A...pour la période d'éviction de ses fonctions allant du 15 avril 2005 au 14 novembre 2011, l'université s'est fondée d'abord, pour la période du 15 avril au 30 juin 2005, sur la rémunération nette correspondant à l'indice brut 298, soit l'indice nouveau majoré 290, alors applicable au 1er échelon du corps des assistants des bibliothèques selon les dispositions du décret du 18 novembre 1994 fixant les dispositions statutaires communes applicables à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B, du décret du 13 avril 2001 portant dispositions statutaires applicables au corps des assistants des bibliothèques alors en vigueur, et des arrêtés pris pour leur application ; qu'il résulte en outre des mêmes tableaux que l'université a ensuite, pour la période allant jusqu'au 14 novembre 2011, tenu compte des changements de la valeur du point d'indice, de deux avancements d'échelon en avril 2008 et avril 2011, des changements dans le taux des cotisations sociales et des réformes statutaires ;
4. Considérant, en premier lieu, que, si Mme A...conteste le montant de la rémunération sur laquelle l'université s'est fondée pour déterminer le montant de l'indemnité compensatrice de traitement qui lui est due, elle ne fournit aucun élément sur la rémunération qu'elle percevait en vertu de son dernier contrat conclu le 7 février 2005, avant la fin de ses fonctions le 14 avril 2005, et dont elle a été effectivement privée du fait de son éviction ; qu'elle ne saurait utilement se référer à la date de sa première entrée en fonctions, soit le 3 février 1998, pour demander à être indemnisée pour la période du 15 avril 2005 au 14 novembre 2011, sur la base des rémunérations prévues du 5ème au 9ème échelon du corps des assistants des bibliothèques ; qu'elle ne saurait davantage invoquer l'autorité de chose jugée qui s'attache au jugement du 5 octobre 2011 qui ne comporte aucune précision sur ce point ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que, compte tenu de sa réintégration par contrat le 15 novembre 2011, Mme A...n'est, pas fondée à demander à être indemnisée au-delà de cette date même si elle a été placée en congé de maladie sans traitement par la suite ;
6. Considérant, en troisième lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'université n'aurait pas tenu compte des revalorisations indiciaires ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que Mme A...ne démontre pas avoir été privée de la possibilité d'une " progression au choix " ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'en se fondant sur le montant net des rémunérations dont Mme A...avait été privée en raison de son éviction, l'université a correctement évalué le préjudice subi par l'intéressée, qui, si elle peut par ailleurs solliciter le rétablissement de ses droits à pension, n'est pas fondée à réclamer une indemnité calculée sur la base des rémunérations brutes qui lui auraient été attribuées si elle était demeurée en fonctions ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par l'université, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a partiellement rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation de la perte de rémunération ;
Sur le surplus des conclusions de MmeA... :
10. Considérant, d'une part, que Mme A...ne démontre pas avoir été privée d'une chance de titularisation dont elle serait fondée à demander à être indemnisée ; qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation de ce préjudice comme non fondées ;
11. Considérant, d'autre part, qu'il résulte du courrier que Mme A...a adressé à l'université le 9 novembre 2011, que, si elle lui a demandé de mettre fin au harcèlement moral dont elle s'estimait victime, elle n'a présenté aucune demande tendant à être indemnisée des préjudices qu'elle soutient avoir subis de ce fait ; que l'université a conclu à titre principal à l'irrecevabilité de ces conclusions à défaut de liaison du contentieux sur ce point ; qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation de ces préjudices comme irrecevables ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Université Paris VI-Pierre et Marie Curie qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme A...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
13. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...la somme que l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie tendant l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...E...A...et à l'Université Paris VI Pierre et Marie Curie.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique le 14 décembre 2015.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLe président,
O. FUCHS-TAUGOURDEAU
Le greffier,
A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLO
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA01546
Classement CNIJ :
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