Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...C...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 3 février 2014 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui accorder le bénéfice du regroupement familial pour son fils.
Par un jugement n° 1402858/9 du 12 novembre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 25 novembre 2014, M.C..., représentée par Me Dell'Asino, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1402858/9 du 12 novembre 2014 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du préfet de Seine-et-Marne du
3 février 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui accorder le regroupement familial pour son fils dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte d'un montant que la Cour fixera sans être inférieur à 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 198,88 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de renonciation à la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
- le préfet a commis une erreur d'appréciation en estimant qu'il ne remplissait pas la condition de ressources suffisantes prévue à l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il démontre qu'il est marié et que les ressources de son couple sont supérieures au seuil légal ;
- en exigeant des seuls étrangers la justification d'un revenu supérieur à celui que perçoit un français, l'article R. 313-22-1 2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pose une condition discriminatoire non justifiée par un intérêt légitime.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu la décision la décision n° 2015/004019 du 27 février 2015 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a admis M. C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle.
En application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, le préfet de Seine-et-Marne a été mis en demeure, le 5 août 215, de produire ses observations en défense, dans un délai de 15 jours.
Par décision du 5 octobre 2015, le président de la 2ème chambre à fixé la clôture de l'instruction au 22 octobre 2015.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme Appèche a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.C..., né le 3 septembre 1969 à Bamako (Mali), de nationalité malienne, a sollicité, le 9 février 2013, le bénéfice du regroupement familial pour son fils MoussaC..., né le 1er janvier 2000 ; que, par décision du 3 février 2014, le préfet de Seine-et-Marne a refusé de faire droit à sa demande, aux motifs que les conditions prévues par l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étaient pas réunies, les conditions de ressources n'étant pas remplies, celles-ci étant insuffisantes pour subvenir aux besoins de son enfant et ne lui permettant pas de l'accueillir dans les meilleures conditions possibles ; que M. C...relève régulièrement appel du jugement
n° 1402858/9 du 12 novembre 2014 du Tribunal administratif de Melun rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
3. Considérant que malgré la mise en demeure, qui lui a été adressée le 5 août 2015 en application des dispositions de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas produit d'écritures en défense dans le délai qui lui était imparti ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ; - cette moyenne majorée d'un dixième pour une famille de quatre ou cinq personnes ; cette moyenne majorée d'un cinquième pour une famille de six personnes ou plus (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-4 du même code : " A l'appui de sa demande de regroupement, le ressortissant étranger présente les copies intégrales des pièces suivantes : (...) 3° Les justificatifs des ressources du demandeur et, le cas échéant, de son conjoint, tels que le contrat de travail dont il est titulaire ou, à défaut, une attestation d'activité de son employeur, les bulletins de paie afférents à la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande, ainsi que le dernier avis d'imposition sur le revenu en sa possession, dès lors que sa durée de présence en France lui permet de produire un tel document, et sa dernière déclaration de revenus. La preuve des revenus non salariaux est établie par tous moyens (...) " ;
5. Considérant que M. C...fait valoir qu'il justifie de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille ; qu'il résulte des dispositions susmentionnées que la période de référence est celle des douze mois précédant la dépôt de la demande de l'étranger ; que l'intéressé a déposé sa demande auprès de la préfecture de Seine-et-Marne en date du 9 avril 2013 ; que la période de référence s'étend donc d'avril 2012 à mars 2013 ;
6. Considérant que M.C..., qui se prévalait devant le tribunal administratif non seulement de ses propres ressources mais aussi de celles de Mme B...A..., produit pour la première fois devant la Cour un acte de mariage établi par l'officier d'état civil de la commune de Montereau-Fault-Yonne, établissant que celle-ci est son épouse depuis le
10 juillet 2010 ; qu'il ressort également des pièces produites par M. C...en appel que Mme A...a, outre les trois enfants qu'elle a eus avec l'intéressé, un autre fils, Desmond Tajou Conteh né en 1998, et qui vit à leur foyer ; que dans ces conditions, il y a lieu, pour l'application des dispositions susénoncées, de tenir compte, non seulement des revenus de M.C..., comme l'ont fait les premiers juges, mais également de ceux de Mme A...épouseC..., ainsi que de la présence, à leur foyer, du fils de cette dernière, Desmond Tajou Conteh
7. Considérant, d'une part, que le requérant établit avoir perçu, sur la période de référence allant d'avril 2012 à mars 2013, et hormis le mois de janvier 2013 pour lequel aucun justificatif n'est versé au dossier, des ressources d'un montant total brut de 16 685 euros soit un montant mensuel moyen de 1390 euros ; que, d'autre part, les pièces produites attestent que son épouse disposait de ressources dont le montant moyen mensuel était de
1 168,42 euros sur la période de référence ; que le couple établit ainsi avoir perçu, sur ladite période, des ressources régulières d'un montant mensuel brut moyen de 2 558 euros soit un montant supérieur à la moyenne mensuelle, majorée d'un cinquième, du salaire minimum de croissance applicable sur la période de référence ; qu'ainsi, en estimant que M. C...ne remplissait pas la condition de ressources prévue à l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de Seine-et-Marne s'est fondé sur un motif erroné ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
9. Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet de Seine-et-Marne fasse droit à la demande de regroupement familiale présentée le 9 avril 2013 par M. C...pour son fils Moussa, mais seulement que le préfet de Seine-et-Marne se prononce à nouveau, sur cette demande, dont il reste saisi ; qu'il y a lieu, sans prononcer d'astreinte, d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de procéder à ce réexamen dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 :
10. Considérant que M. C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de 25 % ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée de 1 000 euros, sous réserve que Me Dell'Asino, avocat de M.C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1402858/9 du 12 novembre 2014 du Tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : La décision préfectorale du 3 février 2014 est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de Seine-et-Marne de procéder, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, au réexamen de la demande de regroupement familial présentée par M. C...pour son fils Moussa
Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me Dell'Asino, avocat de M.C..., en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Dell'Asino renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C..., au ministre de l'intérieur, au préfet de Seine-et-Marne et à Me Dell' Asino.
Délibéré après l'audience du 18 novemebre 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme, Brotons, président,
- Mme Appèche, président assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 décembre 2015.
Le rapporteur,
S. APPECHELe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA04760