Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2014 par lequel le maire de Paris, agissant en qualité de président du conseil d'administration du centre communal d'action sociale de la Ville de Paris, a prononcé sa révocation.
Par un jugement n° 1404250/2-1 du 25 novembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 14 janvier et 14 avril 2015, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 25 novembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2014 du maire de Paris, président du conseil d'administration du centre communal d'action sociale de la Ville de Paris ;
3°) d'enjoindre au centre communal d'action sociale de la Ville de Paris de le réintégrer dans ses fonctions ou, subsidiairement, de le mettre à la retraite ou de lui trouver une autre affectation ;
4°) de condamner le centre communal d'action sociale de la Ville de Paris à lui payer la somme de 5000 euros en réparation du préjudice subi ;
5°) de mettre à la charge du centre communal d'action sociale de la Ville de Paris la somme de 2500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la mesure de suspension ne pouvait, en vertu de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983, être prorogée au-delà d'un délai de 4 mois, en l'absence de poursuites pénales ; l'illégalité de cette prorogation entache d'illégalité la révocation ;
- il n'a pas obtenu la communication de la totalité des pièces présentes dans le dossier qui a été communiqué au conseil de discipline ; par suite, le principe des droits de la défense a été méconnu ;
- il n'a pas eu connaissance du rapport disciplinaire, prévu à l'article 90 de la loi du 26 janvier 1984, qu'aurait rédigé l'autorité territoriale ;
- la composition de la commission administrative paritaire méconnaît le principe d'impartialité, l'un de ses membres ayant ensuite siégé au sein du conseil supérieur des administrations parisiennes ;
- le conseil de discipline n'a pas délibéré à huis clos, en méconnaissance des dispositions de l'article 10 du décret du 18 septembre 1989 ;
- le procès-verbal du conseil de discipline a été rédigé par des personnes n'ayant pas siégé à la séance ;
- l'article 9 du décret du 18 septembre 1989, qui impose la lecture du rapport disciplinaire lors de la séance du conseil de discipline, a été méconnu ;
- l'administration a fait usage de faux dans la procédure disciplinaire, certaines pièces annexées au rapport disciplinaire n'ayant pas été signées par le fonctionnaire désigné comme l'auteur de ce rapport ;
- la sanction est disproportionnée ;
- il a fait l'objet d'une double sanction, sous la forme du non-versement de ses allocations de chômage pendant plus de cinq mois.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2015, le centre d'action sociale de la Ville de Paris, représenté par la Selarl Claisse et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1800 euros soit mise à la charge de M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les conclusions indemnitaires sont irrecevables ;
- le moyen tiré de l'illégalité de la mesure de suspension est inopérant ;
- les autres moyens soulevés à l'appui des autres conclusions ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 16 juin 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 juillet 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n°89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;
- le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 portant dispositions statutaires relatives aux personnels des administrations parisiennes ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Petit,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- et les observations de Me E...représentant le centre d'action sociale de la ville de Paris.
1. Considérant que M.B..., adjoint administratif de première classe exerçant les fonctions d'agent instructeur au centre d'action sociale de la ville de Paris (CASVP), après avoir été condamné, pour des faits d'escroquerie commis entre les mois de janvier 2010 et juin 2011, par le Tribunal de grande instance de Paris statuant en matière correctionnelle, à une peine d'emprisonnement de six mois avec sursis, a été révoqué de ses fonctions par un arrêté du 13 juillet 2012 du maire de Paris, président du CASVP ; que cet arrêté a été annulé, pour un vice de légalité externe, par le Tribunal administratif de Paris par un jugement du 29 octobre 2013, confirmé par la Cour administrative d'appel de Paris par un arrêt du 31 juillet 2014 ; qu'en exécution de ce jugement, M. B...a été réintégré dans ses fonctions, à compter du 1er août 2012, par un arrêté du 2 janvier 2014 ; que par un arrêté du 16 janvier 2014, le maire de Paris, président du conseil d'administration du CASVP, a révoqué à nouveau M. B...de ses fonctions, pour les mêmes motifs ; que par un jugement du 25 novembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté ; que le requérant fait appel de ce jugement ;
Sur les conclusions indemnitaires :
2. Considérant que ces conclusions sont nouvelles en appel et, par suite, ainsi que le soutient le CASVP, irrecevables ;
Sur la légalité de l'arrêté du 16 janvier 2014 :
En ce qui concerne la légalité externe
3. Considérant, en premier lieu, que M. B...soutient que la mesure de suspension ne pouvait, en vertu de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983, être prorogée au-delà d'un délai de 4 mois, en l'absence de poursuites pénales, et que l'illégalité de cette prorogation entache d'illégalité la révocation ; que, toutefois, une mesure de suspension ou la prorogation de celle-ci ne présentant pas le caractère d'un acte préparatoire à la sanction disciplinaire ultérieurement prononcée, son illégalité ne peut être utilement invoquée à l'appui de conclusions dirigées contre la sanction disciplinaire ; que le moyen ne peut dès lors qu'être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 : " Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier " ; que l'administration ne peut adresser au conseil de discipline des pièces auxquelles l'agent n'aurait pas eu accès ; que M. B...soutient que le dossier administratif qui lui a été communiqué ne comportait pas la totalité des pièces qui ont été présentées ensuite aux membres du conseil de discipline et que, par suite, le principe des droits de la défense aurait été méconnu ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le conseil de discipline aurait été destinataire de pièces autres que celles composant le dossier auquel le requérant a pu accéder, à l'exception de quelques courriers émanant de M. B...lui-même, relatifs à la procédure disciplinaire ; que, dans ces conditions, le principe du respect des droits de la défense n'a pas été méconnu ; que, par ailleurs, la circonstance que le conseil de disciplinaire n'aurait pas été destinataire de l'arrêté de prolongation de la suspension n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure disciplinaire ;
5. Considérant, en troisième lieu, que selon le septième alinéa de l'article 90 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le conseil de discipline est saisi par un rapport de l'autorité territoriale. Ce rapport précise les faits reprochés et les circonstances dans lesquelles ils ont été commis " ; qu'aux termes de l'article 5 du décret du 18 septembre 1989 : " Lorsqu'il y a lieu de saisir le conseil de discipline, le fonctionnaire poursuivi est invité à prendre connaissance, dans les mêmes conditions, du rapport mentionné au septième alinéa de l'article 90 de la loi du 26 janvier 1984 précitée et des pièces annexées à ce rapport " ; qu'aux termes de l'article 9 du même décret : " Le rapport établi par l'autorité territoriale et les observations écrites éventuellement présentées par le fonctionnaire sont lus en séance " ; qu'en vertu de l'article 5 du décret du 24 mai 1994 : " Pour l'application aux administrations parisiennes des dispositions mentionnées à l'article 4 : 1° Les mots : " chef de l'administration parisienne concernée " sont substitués aux mots : " autorité territoriale " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil de discipline a été saisi au vu d'un rapport rédigé par M.A..., directeur de la section du 19ème arrondissement du centre d'action sociale de la Ville de Paris ; que si ce rapport a été initialement rédigé à l'attention de la sous-directrice des interventions sociales du CASVP, il a été adressé par cette dernière au directeur adjoint du centre d'action sociale de la Ville de Paris, qui bénéficiait, en vertu d'un arrêté du 26 mai 2011 publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 3 juin 2011, d'une délégation de signature, à cet effet, du président du conseil d'administration, et qui, en transmettant le rapport au conseil de discipline en qualité de chef de l'administration parisienne concernée, s'en est nécessairement approprié le contenu ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'aucun rapport disciplinaire régulier n'aurait été établi ; que si M. B...soutient que le rapport serait un faux, la signature n'étant pas selon lui celle de M. A..., l'expertise graphologique qu'il invoque ne présente pas, notamment eu égard aux réserves émises par l'expert lui-même, un caractère probant suffisant ; qu'en tout état de cause, le chef de l'administration parisienne concernée s'étant approprié le contenu du rapport, la circonstance qu'un agent autre que M. A...aurait signé le rapport ne serait pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure disciplinaire ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que M. B...soutient que la composition du conseil de discipline, lors de sa séance du 26 juin 2012, méconnaîtrait le principe d'impartialité, l'une des personnes ayant assisté à cette séance ayant ensuite siégé au sein du conseil supérieur des administrations parisiennes, lors de l'examen du recours formé contre la sanction de révocation, le 22 novembre 2012 ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette personne n'a assisté à la séance du 26 juin 2012 qu'en qualité de secrétaire de séance, sans prendre part aux délibérations ; qu'au demeurant, la régularité de la procédure suivie devant le conseil supérieur des administrations parisiennes est sans incidence sur la légalité de l'arrêté de révocation, qui est intervenu antérieurement à cette procédure ; que le moyen doit dès lors, être écarté ;
7. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de l'article 9 du décret du 18 septembre 1989 que, lors de la séance du conseil de discipline, le rapport disciplinaire établi par le chef de l'administration parisienne concernée est lu ; que, toutefois, la communication du rapport émanant de cette autorité, en temps utile avant la séance, au fonctionnaire déféré devant le conseil de discipline et aux membres de celui-ci satisfait aux fins en vue desquelles sa lecture a été prévue par ces dispositions, et notamment au respect des droits de la défense ; qu'ainsi, la lecture du rapport en séance ne peut être regardée, en elle-même, comme une garantie dont la seule méconnaissance suffirait à entacher d'illégalité la décision prise à l'issue de la procédure ; que, par suite, la circonstance que le rapport disciplinaire n'a pas été lu, lors de la séance du conseil de discipline du 26 juin 2012 n'est pas de nature à entacher d'illégalité la décision de révocation ;
8. Considérant, en sixième lieu, que selon l'article 10 du décret du 18 septembre 1989 : " Le conseil de discipline délibère à huis clos hors la présence du fonctionnaire poursuivi, de son ou de ses conseils et des témoins " ; que la présence, lors du délibéré de la séance du 26 juin 2012, de la secrétaire du conseil de discipline, ainsi que d'un autre agent du CASVP, lesquels n'ont pas participé aux débats, ne sont pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie, au regard des dispositions précitées ;
9. Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que le projet de procès-verbal de la séance du conseil de discipline aurait été amendé par les supérieurs hiérarchiques de la secrétaire de séance est, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de la procédure disciplinaire, dès lors que le procès-verbal définitif a été signé, conformément à l'article 12 du décret du 18 septembre 1989, par le président du conseil de discipline, qui s'en est alors nécessairement approprié le contenu et l'a transmis au chef de l'administration parisienne concernée ;
En ce qui concerne la légalité interne :
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par un jugement du tribunal de grande instance de Paris du 15 décembre 2011, devenu définitif, M. B...a été reconnu coupable de faits d'escroquerie pour avoir, dans l'exercice de ses fonctions, entre les mois de janvier 2010 et juin 2011, créé des dossiers fictifs de demande d'aides sociales ou provoqué la levée de suspension de telles aides puis avoir fait transiter sur les comptes de tiers les aides ainsi obtenues qui lui étaient rétrocédées par la suite, pour un montant total d'environ 33 000 euros ; que les agissements du requérant n'ont cessé que lorsqu'ils ont été découverts à l'occasion d'un contrôle ; que ces faits étaient de nature à justifier une sanction disciplinaire ; que s'il ressort des pièces du dossier que M. B...se trouvait dans une situation financière difficile et que ses problèmes de santé l'avaient conduit à solliciter et à obtenir un congé de longue durée, l'autorité disciplinaire n'a pas, en l'espèce, eu égard à la gravité des faits, pris une sanction disproportionnée en décidant de révoquer le requérant ;
11. Considérant que si M. B...soutient qu'il aurait fait l'objet d'une " double sanction ", sous la forme du non-versement de ses allocations de chômage pendant plus de cinq mois, cette circonstance, postérieure à la décision de révocation, est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de celle-ci ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que le présent arrêt n'implique, dès lors, le prononcé d'aucune mesure d'injonction ; que les conclusions présentées par le requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent également, en conséquence, qu'être rejetées ; qu'enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le CASP au titre des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre d'action sociale de la Ville de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3: Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au centre d'action sociale de la Ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- Mme Petit, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 octobre 2015.
Le rapporteur,
V. PETITLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAULe greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris.en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.