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28/09/2015 | FRANCE | N°15PA00708

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 28 septembre 2015, 15PA00708


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 du préfet de police en tant que celui-ci lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination, ainsi que l'arrêté du 7 janvier 2015 par lequel le préfet de police l'a placée en rétention administrative.

Par un jugement n° 1422643/8 du 9 janvier 2015, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêt

é du 7 janvier 2015 plaçant Mme B...en rétention administrative, a rejeté les conclusio...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 du préfet de police en tant que celui-ci lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination, ainsi que l'arrêté du 7 janvier 2015 par lequel le préfet de police l'a placée en rétention administrative.

Par un jugement n° 1422643/8 du 9 janvier 2015, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 7 janvier 2015 plaçant Mme B...en rétention administrative, a rejeté les conclusions dirigées contre les décisions du 29 août 2014 lui faisant obligation de quitter le territoire français et portant fixation du pays de destination, et a renvoyé à une formation collégiale le jugement du surplus des conclusions.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 février 2015, Mme B..., représentée par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1422643 du 9 janvier 2015 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris en tant que celui-ci a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions du 29 août 2014 lui faisant obligation de quitter le territoire français et portant fixation du pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 29 août 2014 ou, à titre subsidiaire, d'annuler les décisions du 29 août 2014 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, avec autorisation de travail, dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le premier juge a entaché son jugement d'une irrégularité dès lors qu'il n'a pas répondu au moyen tiré de ce que la décision lui refusant l'admission au séjour méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur le refus d'admission au séjour :

- la décision de refus d'admission au séjour est insuffisamment motivée ;

- le préfet de police n'a pas procédé à un examen suffisamment circonstancié de sa situation personnelle ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination :

- elles sont insuffisamment motivées ;

- la requérante n'a pas été mise à même de présenter des observations écrites ou orales préalablement à l'adoption de ces décisions ;

- ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elles méconnaissent également les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2015, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions dirigées contre le refus de séjour sont irrecevables dès lors que le magistrat délégué de première instance n'a pas statué sur ce point ;

- les moyens soulevés à l'appui des autres conclusions ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Petit a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeB..., de nationalité nigériane, née le 1er avril 1990 et entrée en France selon ses déclarations le 18 décembre 2011, a sollicité la délivrance d'une carte de résident au titre de l'asile ; qu'à la suite des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile refusant de lui reconnaître la qualité de réfugiée, le préfet de police, par un arrêté en date du 29 août 2014, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que MmeB... a ensuite fait l'objet d'une décision portant placement en rétention administrative prise le 7 janvier 2015 par le préfet de police ; que, par un jugement du 9 janvier 2015, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 7 janvier 2015 de placement en rétention, a rejeté les conclusions dirigées contre les décisions du 29 août 2014 faisant obligation à l'intéressée de quitter le territoire français et portant fixation du pays de destination, et a renvoyé à une formation collégiale le soin de statuer sur les conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour; que Mme B...fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté une partie de ses conclusions et demande à la Cour d'annuler l'arrêté du préfet de police du 29 août 2014 ;

Sur la recevabilité des conclusions :

2. Considérant que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris n'a pas statué, par le jugement n° 1422643/8 rendu le 9 janvier 2015, sur la légalité du refus de titre de séjour et a renvoyé à une formation collégiale le soin de statuer sur les conclusions dirigées contre cette décision ; qu'ainsi, la requête d'appel de Mme B...n'est recevable qu'en tant qu'elle concerne l'obligation de quitter le territoire et la décision fixant le pays de destination ;

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 29 août 2014 comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui constituent le fondement du refus de séjour ; que le refus de séjour est ainsi suffisamment motivé au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 et qu'en vertu de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision faisant obligation à la requérante de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour ; que, par ailleurs, il ne ressort pas de la motivation de l'arrêté du 29 août 2014 ni des autres pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen circonstancié de la situation de MmeB... ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédures administratives et contentieuses auxquelles sont soumises les décisions portant obligation de quitter le territoire français ainsi que les décisions qui l'accompagnent, telle que la décision fixant le pays de destination ; que, par suite, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne saurait être utilement invoqué par la requérante à l'encontre des décisions attaquées ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui. " ; que si Mme B...soutient qu'elle vit de manière stable, paisible et continue depuis plus de deux ans sur le territoire français, la requérante, qui est célibataire et sans charge de famille, ne justifie pas de l'ancienneté, de la stabilité et de l'intensité de ses liens familiaux et privés sur le territoire français ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle n'aurait plus d'attaches au Nigéria ; qu'ainsi, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne porte pas, au regard des objectifs en vue desquelles elle a été prise, une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, elle ne méconnaît pas les stipulations précitées ; que, pour les mêmes motifs, le préfet de police n'a pas entaché d'erreur manifeste son appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de MmeB... ;

6. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; que l'obligation de quitter le territoire français n'implique pas par elle-même le renvoi de Mme B... au Nigéria ; que, par suite, le moyen tiré de ses craintes en cas de retour dans ce pays est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; que Mme B... se prévaut de la méconnaissance de ces stipulations par la décision fixant le pays de destination et soutient qu'elle a été contrainte de quitter son pays afin d'échapper aux risques qu'elle encourait pour sa vie et sa sécurité, compte-tenu de menaces exercées par le groupe islamique " Boko Haram " sur les populations chrétiennes ; qu'elle fait également état des risques engendrés par le virus Ebola qui sévit au Nigéria ; que, toutefois, la requérante, dont la demande d'asile a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 février 2013 confirmée par celle de la cour nationale du droit d'asile le 23 juillet 2013 au motif que ses explications, trop confuses, ne permettaient pas de considérer comme établis les faits allégués, n'apporte aucun élément de nature à établir qu'elle serait personnellement exposée à des traitements prohibés par les stipulations précitées, le risque de contamination par le virus Ebola n'entrant pas, au demeurant, dans le champ de ces stipulations ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision fixant le pays de destination, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M.Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 septembre 2015.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLOLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA00708


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00708
Date de la décision : 28/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : FOUCHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-09-28;15pa00708 ?
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