Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le ministre de la culture et de la communication a demandé au juge des référés du Tribunal administratif de Paris, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner solidairement la société Bodin et associés, la société Gec Ingénierie, le GIE Ceten Apave International, la société Sort et Chasles et la société Groupe Second Marché à lui verser une provision d'un montant de 788 582, 55 euros TTC au titre de la garantie décennale des constructeurs.
Par une ordonnance n° 1315395 du 2 octobre 2014, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a condamné solidairement la société Bodin et associés, la société Gec Ingénierie, le GIE Ceten Apave International et la société Sort et Chasles à verser à l'Etat une provision de 788 582, 55 euros TTC et a rejeté le surplus de la demande de l'Etat.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 16 octobre 2014, la société Gec Ingénierie, représentée par la Selas Larrieu et Associés, demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance n° 1315395 du 2 octobre 2014 du juge des référés du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande de provision présentée par le ministre de la culture et de la communication devant le juge des référés du Tribunal administratif de Paris ;
3°) subsidiairement, de condamner la société Ceten Apave International et la société Sort et Chasle à la garantir de la condamnation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat ou de la société Ceten Apave International et de la société Sort et Chasle le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que n'ayant pas été chargée d'intervenir sur les lots architecturaux, en particulier le lot n° 6 " Plâtrerie-Staff ", la responsabilité décennale ne peut être engagée à son encontre.
Par des mémoires en défense enregistrés les 19 décembre 2014, 29 juin 2015 et 11 septembre 2015, le GIE Ceten Apave, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête, à ce que les sociétés Bodin et associés, Gec Ingénierie et Sort et Chasles soient condamnées à le garantir de toute condamnation éventuelle prononcée à son encontre, et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Gec Ingénierie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la société Gec Ingénierie avait une mission de direction et de surveillance de l'ensemble des travaux, de sorte que la responsabilité de cette entreprise est engagée ;
- le contrôleur technique n'ayant commis aucune faute, les conclusions d'appel en garantie présentées par la société Gec Ingénierie doivent être rejetées ; dans l'hypothèse où la Cour condamnerait le GIE Ceten apavae International à garantir la société Gec Ingénierie d'une partie de la condamnation prononcée à l'encontre de celle-ci, il y aurait lieu de condamner in solidum les sociétés Bodin et associés, Gec Ingénierie et Sort et Chasles à garantir le GIE Ceten Apave international de toute condamnation prononcée à son encontre.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 décembre 2014, le ministre de la culture et de la communication, représenté par la Selas Adamas, demande à la Cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de la société Gec Ingénierie la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 9 septembre 2015, la société GEC ingénierie reprend les conclusions de sa requête et demande en outre à la Cour, à titre subsidiaire, de condamner in solidum la société Ceten Apave International, la société Sort et Chasles et la société cabinet Philippe Votruba, venant aux droits de la société cabinet Tomasina à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.
Elle soutient que la société cabinet Tomasina faisait partie, en qualité d'économiste, de l'équipe de maîtrise d'oeuvre, et que sa responsabilité est dès lors engagée.
Un mémoire, enregistré le 14 septembre 2015, postérieurement à la clôture d'instruction, a été présenté pour la société Bodin et associés, représentée par MeD....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Petit, premier conseiller
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la société Gec Ingénierie, celles de Me F..., représentant le ministre de la culture et de la communication et celles de Me B... représentant le GIE Ceten Apave International.
1. Considérant que l'Etat, représenté par le ministre de la culture et de la communication, a fait réaliser, à compter de l'année 1997, des travaux sur des immeubles lui appartenant, situés dans le Palais de Chaillot, en vue de la création de la cité de l'architecture et du patrimoine, sous la maîtrise d'ouvrage déléguée de l'établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels, dont la mission a pris fin après la délivrance d'un quitus ; que la maîtrise d'oeuvre des travaux de réaménagement intérieur de l'aile Paris du Palais de Chaillot a été confiée à un groupement solidaire composé de la société Bodin et associés et, après la signature d'un avenant au marché initial, de la société Gec Ingénierie ; que le contrôle technique de ces travaux a été assuré par le GIE Ceten Apave International ; qu'enfin, la société Sort et Chasles a exécuté les travaux du lot n° 6 " Plâtrerie-Staff " ; qu'après la liquidation judiciaire de cette société, prononcée par un jugement du 13 février 2008 du Tribunal de commerce de Nantes, la même juridiction, par un jugement du 11 avril 2008, a arrêté la cession à la société Groupe Second Marché, du fonds de commerce et des biens nécessaires à l'activité de l'entreprise, tout en maintenant Me E...comme mandataire judiciaire pour poursuivre la liquidation ; que postérieurement à la réception prononcée au cours de l'année 2007, le faux plafond du Hall d'About, s'est effondré le 8 septembre 2011 révélant l'existence de désordres affectant également la bibliothèque ; que le ministre de la culture et de la communication a saisi le juge des référés du Tribunal administratif de Paris en vue d'obtenir des constructeurs une provision correspondant à la réparation de ces désordres, au titre de la responsabilité décennale ; que par une ordonnance du 2 octobre 2014, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a estimé que la responsabilité décennale de quatre constructeurs était engagée ; qu'il a ainsi condamné solidairement la société Bodin et associés, la société Gec Ingénierie, le GIE Ceten Apave International et la société Sort et Chasles à verser à l'Etat une provision de
788 582, 55 euros TTC ; que la société Gec Ingénierie fait appel de cette ordonnance ; qu'elle soutient à titre principal que l'existence d'une créance de l'Etat est, en ce qui la concerne, sérieusement contestable, et demande à titre subsidiaire que les autres constructeurs soient condamnés à la garantir de la condamnation prononcée en première instance ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : "Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie " ;
3. Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par la société requérante en appel que les désordres affectant le faux plafond du Hall d'About du Palais de Chaillot, qui s'est effondré, ainsi que la coque de la bibliothèque, qui menaçait partiellement de le faire, ont pour origine une exécution des travaux du lot n° 6 " Plâtrerie-Staff " non conforme aux spécifications du document technique unifié 25-51 et aux clauses du cahier des clauses techniques particulières ; qu'il ressort de l'annexe 2 à l'acte d'engagement du marché de maîtrise d'oeuvre, en date du 15 décembre 1999, que tous les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre, notamment la société Bodin et associés et la société Jacobs Serete Constructions, étaient chargés de la direction de l'exécution de l'ensemble des travaux ; que l'avenant n° 1 à ce marché de maîtrise d'oeuvre, conclu le 20 septembre 2000 a prévu que la société GEC Ingénierie se substituait dans ses droits et obligations à la société Jacobs Serete Constructions ; qu'ainsi, elle était également tenue de diriger l'exécution de l'ensemble des travaux ; que la société requérante ne peut, pour soutenir qu'elle ne se serait vue confier aucune mission relative au lot n° 6, utilement invoquer un extrait de l'annexe 2 du " cahier des clauses techniques communes ", intitulé " limites des prestations ", et ne mentionnant pas le lot n° 6, ce document ne constituant pas une pièce constitutive du marché de maîtrise d'oeuvre ; que les membres du groupement de maitrise d'oeuvre se sont engagés conjointement et solidairement non seulement à diriger les travaux, mais encore à réparer les malfaçons susceptibles de rendre l'immeuble impropre à sa destination, dont les constructeurs sont pendant 10 ans à compter de la réception des travaux responsables à l'égard du maître de l'ouvrage sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 1170 du code civil ; qu'aucune convention à laquelle l'Etat aurait été partie ne prévoyait la part des membres du groupement dans la direction des travaux ; qu'ainsi, même si la société GEC Ingénierie n'a exécuté aucune mission relative au lot n° 6, sa responsabilité est engagée à l'égard du maitre d'ouvrage en raison de ces désordres ; que, dans ces conditions, l'existence d'une créance de l'Etat sur la société GEC Ingénierie n'est pas sérieusement contestable ;
4. Considérant que le montant de la provision accordée par le juge des référés du Tribunal administratif de Paris n'est pas contesté ;
5. Considérant, enfin, que si le rapport d'expertise a proposé un partage de responsabilité entre la société requérante, le GIE Ceten Apave International et la société Sort et Chasles, la part de responsabilité de chaque constructeur ne peut être déterminée en l'état du dossier compte tenu des éléments contenus dans les écritures de ceux-ci ; que dans ces conditions l'existence d'une créance de la société GEC Ingénierie sur l'ensemble des constructeurs ne peut, être regardée comme non sérieusement contestable ; que, par suite, les conclusions présentées à titre subsidiaire par la société Gec Ingénierie, tendant à ce que les autres constructeurs les garantissent du montant de la provision doivent être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur les conclusions présentées à ce titre par le GIE Ceten Apave International ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris l'a condamnée, solidairement avec d'autres sociétés, à verser à l'Etat une provision de 788 582, 55 euros TTC ; que les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la société Gec Ingénierie ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'Etat et le GIE Ceten Apave International au titre des mêmes dispositions ;
DECIDE
Article 1er : La requête de la société GEC Ingénierie est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de se prononcer sur les conclusions du GIE Ceten Apave International tendant à ce que les sociétés Bodin et associés, Gec Ingénierie et Sort et Chasles soient condamnées à le garantir de toute condamnation éventuelle prononcée à son encontre.
Article 3 : Les conclusions présentées par l'Etat et le GIE Ceten Apave International au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société GEC Ingénierie, au ministre de la culture et de la communication, au GIE Ceten Apave International, à la société Bodin et associés, à Me E..., liquidateur judiciaire de la société Sort et Chasles et à la société Groupe Second Marché.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- Mme Petit, premier conseiller,
Lu en audience publique le 28 septembre 2015.
Le rapporteur,
V. PETITLe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLO
La République mande et ordonne au ministre de la culture et de la communication en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition certifiée conforme.
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N° 14PA04268