Vu la requête, enregistrée le 5 janvier 2015, présentée pour Mme B... E...épouse A...D..., demeurant..., par MeC... ;
Mme E...épouse A...D...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1403817 du 2 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mars 2014 du préfet de Seine-et-Marne refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Mme E...soutient que l'arrêté litigieux :
- est entaché d'un vice d'incompétence ;
- a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puisqu'elle réside en France depuis mai 2013 avec son époux titulaire d'un titre de séjour ainsi que leur enfant né en France le
11 juillet 2013 ;
- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation du préfet de Seine-et-Marne quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistrée le 23 juin 2015, présenté par le préfet de
Seine-et-Marne qui conclut au rejet de la requête en faisant valoir que :
- le signataire de la décision attaquée avait régulièrement reçu délégation ;
- la décision vise les éléments de fait et les textes sur lesquels elle est fondée ;
- l'entrée en France de la requérante est très récente et la naissance d'un enfant deux mois après son arrivée ne lui confère aucun droit au séjour ;
- elle relève de la procédure du regroupement familial ;
- elle s'est maintenue en France alors qu'elle ne disposait pas d'un visa de long séjour ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juillet 2015 le rapport de Mme Terrasse, président assesseur ;
1. Considérant que MmeE..., de nationalité tunisienne, née le 23 octobre 1983 et entrée en France le 14 mai 2013, a sollicité auprès du préfet de Seine-et-Marne un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ; que par un arrêté en date du 26 mars 2014, le préfet de Seine-et-Marne a opposé un refus à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme E...relève appel du jugement du 2 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté son recours tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté n° 12/PCAD/84 du 30 juillet 2012, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Seine-et-Marne, le préfet de Seine-et-Marne a donné à M. Serge Gouteyron, secrétaire général de la préfecture, délégation à l'effet de signer tous arrêtés et décisions, relevant des attributions de l'Etat ; que par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux manque en fait ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien : " Sans préjudice des dispositions du b) et du d) de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : [...] 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;
4. Considérant que MmeE..., entrée en France en mai 2013, se prévaut de son mariage depuis 2010 avec un compatriote titulaire d'un titre de séjour valable jusqu'en septembre 2016, union dont est issu un enfant le 11 juillet 2013 ; que , toutefois sa communauté de vie avec son époux, datant de moins d'un an à la date de la décision attaquée, présente un caractère récent ; qu'aucune circonstance n'est de nature à faire obstacle à ce que soit la cellule familiale se reconstitue dans le pays d'origine, son époux étant de la même nationalité, soit la requérante reparte temporairement en Tunisie et revienne ensuite s'installer en France par une procédure régulière avec un visa de long séjour ; que Mme E...ne justifie pas être dépourvue de toute attache personnelle et familiale dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente ans, y compris depuis son mariage; que, dans ces circonstances, eu égard aux conditions de son entrée en France, sous couvert d'un visa de court séjour délivré par l'Allemagne, pays où elle est arrivée en premier lieu, et à la brièveté de son séjour, l'arrêté litigieux n'a pas porté au droit de Mme E...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris et n'a, dès lors, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant que pour les mêmes motifs, il n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation du préfet de Seine-et-Marne quant conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E...épouse A...D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2015, à laquelle siégeaient :
Mme Vettraino, président de chambre,
Mme Terrasse, président assesseur,
M. Romnicianu, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 31 juillet 2015.
Le rapporteur,
M. TERRASSELe président,
M. VETTRAINO
Le greffier,
F. TROUYET
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 11PA00434
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N° 15PA00010