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19/06/2015 | FRANCE | N°14PA00228

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 19 juin 2015, 14PA00228


Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2014, présentée pour Mme B...A..., demeurant au..., par la SELAS CCPE ;

Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1218242/7-1 du 18 novembre 2013 en ce que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de la pénalité de 40 % pour absence de dépôt de déclaration dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, mise à sa charge au titre des années 2008, 2009 et 2010 ;

2°) de prononcer la décharge des pénalités mises à sa charge pour un montant de

31 2

39 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'artic...

Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2014, présentée pour Mme B...A..., demeurant au..., par la SELAS CCPE ;

Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1218242/7-1 du 18 novembre 2013 en ce que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de la pénalité de 40 % pour absence de dépôt de déclaration dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, mise à sa charge au titre des années 2008, 2009 et 2010 ;

2°) de prononcer la décharge des pénalités mises à sa charge pour un montant de

31 239 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- en ce qui concerne le jugement, à titre principal le Tribunal a fait une analyse erronée des obligations qui pèsent sur l'administration quant à la précision suffisante de la mise en demeure et à titre subsidiaire: le Tribunal n'a pas répondu à son argumentation tendant à démontrer qu'elle n'était pas en situation d'absence de déclaration ;

à titre principal :

- la mise en demeure reçue est insuffisamment motivée, de sorte que le délai de 30 jours pour y répondre ne peut lui être opposé et, par voie de conséquence, les pénalités de 40% pour défaut de réponse dans ce délai ne peuvent lui être appliquées ;

à titre subsidiaire :

- elle n'était pas en situation d'absence de déclaration, mais en situation d'insuffisance de déclaration, de sorte qu'aucune pénalité ne pouvait lui être appliquée ;

- il existe une disproportion manifeste entre l'importance de la pénalité appliquée et le retard de quelques jours dans la production des déclarations et ce, alors même qu'un délai supplémentaire avait été expressément demandé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2014, présenté par le Ministre des finances et des comptes publics qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- aucune dispositions législative ou réglementaire n'impose que la mise en demeure mentionne les immeubles concernés et il appartient à tout contribuable de déclarer spontanément les revenus perçus au cours de l'année civile ; que les courriers adressés à la suite de cette mise en demeure ne font d'ailleurs pas état d'une quelconque incompréhension quant aux immeubles concernés ; la mise en demeure était suffisamment précise ;

- la jurisprudence considère que les dispositions de l'article 1728 du CGI, qui proportionnent les pénalités selon les agissements commis par le contribuable et prévoient des taux de majoration différents selon la qualification qui peut être donnée au comportement de celui-ci, sont conformes au principe communautaire de proportionnalité ce qui ne permet pas à la requérante d'invoquer le caractère disproportionné de l'infraction sanctionnée ;

- la taxe sur les bureaux est due local par local et des avis d'imposition ont été émis distinctement, ce qui ne permet pas à Mme A...de soutenir qu'elle était en situation d'insuffisance de déclaration ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 juillet 2014, présenté pour Mme A... qui conclut aux mêmes fins que sa requête et par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que :

- la pratique habituelle de l'administration est un indice sérieux des mentions qu'elle juge nécessaires pour assurer l'efficacité de l'acte ;

- les pénalités doivent être ramenées de 40% à 10%, par application de l'article 1728-1 du code général des impôts ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 juillet 2014, présenté par le Ministre des finances et des compte publics qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire ; Il soutient en outre qu'il ne ressort pas des dispositions de l'article 231 ter VII du code général des impôts que 1'administration devrait mentionner, sur la mise en demeure de déposer les déclarations, les immeubles en litige ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2015 :

- le rapport de Mme Mosser, président assesseur,

- les conclusions de M. Boissy, rapporteur public ;

- et les observations de Me C...pour MmeA... ;

1. Considérant que MmeA..., propriétaire de plusieurs immeubles à Paris, a été destinataire de rehaussements de ses impositions au titre de la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux en Ile-de-France ; qu'elle a, notamment, demandé à être déchargée de la somme de 31 239 euros, qui correspondrait aux pénalités dont ont été assortis les compléments de taxe sur les locaux à usage de bureaux en Ile-de-France auxquels elle a été assujettie au titre des années

2008, 2009 et 2010, à raison de trois de ses immeubles situés à Paris 239 rue Saint Martin,

8 rue Beauregard et 20 rue du Sentier ; qu'elle interjette appel du jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 18 novembre 2013 en tant qu'il a rejeté cette demande en décharge ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Paris n'a ni visé, ni répondu au moyen soulevé à titre subsidiaire par la requérante tiré de ce qu'elle ne se trouvait pas en situation d'absence de déclaration dans le délai de trente jours prévu par l'article 1728 du code général des impôts mais en situation d'insuffisance de déclaration ; que, dès lors, Mme A...est fondée à soutenir qu'en ne répondant pas à ce moyen qui n'était pas inopérant, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen soulevé sur la régularité du jugement, l'article 2 du jugement attaqué doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur le bien-fondé de l'imposition restant en litige :

4. Considérant que dans le dernier état de ses écritures devant le Tribunal administratif de Paris, Mme A...demande uniquement à être déchargée de la somme de 31 239 euros, correspondant aux pénalités dont ont été assortis les compléments de taxe sur les locaux à usage de bureaux en Ile-de-France auxquels elle a été assujettie au titre des années 2008, 2009 et 2010 ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts dans sa version alors applicable : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R 231 ter VII du même code : " Les redevables sont tenus de déposer une déclaration accompagnée du paiement de la taxe, avant le 1er mars de chaque année, auprès du comptable public compétent du lieu de situation des locaux imposables. " ;

6. Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la mise en demeure de produire la déclaration n° 6705 B relative à la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage dans la région Ile-de-France a été notifiée par pli recommandé à Mme A...le 29 avril 2011 ; que celle-ci n'a accompli les formalités de déclaration pour les immeubles situés 239 rue Saint Martin et 20 rue du Sentier que le

3 juin 2011, soit plus de trente jours après la réception de la première mise en demeure ; qu'en tout état de cause, l'administration fiscale n'était pas tenue d'accorder à Mme A...un délai supplémentaire au-delà du délai de trente jours prévu par les dispositions précitées de l'article 1728 ;

7. Considérant, d'autre part, que l'administration n'était pas tenue de préciser dans la mise en demeure, qui n'a pas pour objet de déterminer l'assiette d'imposition, les motifs de droit ou de fait pour lesquels elle estimait que Mme A...était redevable de la taxe sur les locaux à usage de bureau en Ile-de-France, ni pour quel immeuble elle était en conséquence tenue de déposer ses déclarations ; que la mise en demeure adressée à la requérante, dès lors qu'elle indiquait le formulaire, l'imposition et les années concernés, était suffisamment précise ; qu'il appartenait non pas à l'administration mais à la requérante, qui n'avait pas spontanément déposé ses déclarations, de déterminer les locaux à déclarer en application de l'article R 231 ter VII du code général des impôts précités ;

8. Considérant, enfin, qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que la mise en demeure de produire prévue par les dispositions citées au point 5 n'ait à viser qu'une seule imposition ; que s'agissant de la taxe sur les bureaux, il résulte de l'article R. 231 ter VII du code général des impôts qu'une déclaration distincte doit être faite en fonction du lieu de situation des locaux imposables ; qu'ainsi, la circonstance que l'administration n'ait adressé à Mme A...qu'une seule mise en demeure de produire plusieurs déclarations, ne saurait avoir d'incidence sur l'obligation de déclaration distincte prévue par ces dispositions ; qu'ainsi, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que, pour les immeubles en litige, elle n'était pas en situation d'absence de déclaration mais d'insuffisance de déclaration au motif qu'elle avait déjà souscrit une déclaration n° 6705 B au titre des années considérées pour d'autres immeubles qui lui appartenaient,

rue Montmartre et rue de Verneuil ;

9. Considérant qu'il résulte des points 6 à 8 que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées ne lui était pas applicable ;

10. Considérant, en second lieu, que les dispositions de l'article 1728 du code général des impôts précité proportionnent la pénalité à la gravité des agissements du contribuable en prévoyant des taux de majoration différents selon que le défaut de déclaration dans le délai est constaté sans mise en demeure ou après une ou deux mises en demeure infructueuses ; que le juge de l'impôt, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, décide, dans chaque cas, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir le taux auquel l'administration s'est arrêtée, soit de lui substituer un taux inférieur parmi ceux prévus par le texte s'il l'estime légalement justifié, soit de ne laisser à la charge du contribuable que les intérêts de retard, s'il estime que ce dernier ne s'est pas abstenu de souscrire une déclaration ou de déposer un acte dans le délai légal ; qu'il n'appartient toutefois pas au juge de l'impôt de moduler l'application du barème résultant de l'article 1728 du code général des impôts ; que, par suite, il résulte du point 9 que Mme A...ne peut pas utilement se prévaloir du caractère excessif de la majoration ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à obtenir la décharge de la majoration contestée pour l'imposition relative aux immeubles situés à Paris 239 rue Saint Martin, 20 rue du Sentier, et 8 rue Beauregard ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme A... la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 18 novembre 2013 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme A...et les conclusions de la requête présentées sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au Ministre de l'Economie et des Finances.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France Est.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2015, où siégeaient :

Mme Driencourt, président de chambre,

Mme Mosser, président assesseur,

Mme Stahlberger, président,

Lu en audience publique, le 19 juin 2015.

Le rapporteur,

G. MOSSERLe président,

L. DRIENCOURT

Le greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA00228


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA00228
Date de la décision : 19/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève MOSSER
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : C.C.P.E

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-06-19;14pa00228 ?
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