Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2013, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me C...; Mme B... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1007098/1 en date du 19 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Melun n'a fait que partiellement droit à sa demande en condamnant l'État à lui verser la somme de 1 700 euros, en réparation des divers préjudices qu'elle a subis résultant de la destruction fautive de son véhicule à la suite de sa mise en fourrière, somme augmentée des intérêts légaux à compter du 26 juin 2009 ;
2°) de condamner l'État à lui verser la somme de 26 080 euros au titre des préjudices subis, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 26 juin 2009 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la responsabilité de l'État n'est plus en litige puisque l'État l'a reconnue ;
- la valeur de remplacement du véhicule doit être indemnisée à hauteur de 3 000 euros en raison de l'entretien régulier du véhicule, et notamment du remplacement des pneus en 2005 avec une garantie de cinq ans, en sorte que cette valeur peut être fixée au prix du marché par référence à la publication de la " centrale des particuliers " ;
- les dépenses exposées pour se rendre à la fourrière et à la casse sont justifiées à hauteur de 80 euros ;
- le préjudice de jouissance, évalué à hauteur de 15 000 euros, résulte de la perte d'autonomie et de mobilité qu'elle subit dans sa vie personnelle et professionnelle en raison de son état de santé et de ses horaires de travail, incompatibles avec la prise des transports en commun ;
- le préjudice moral, réclamé à hauteur de 8 000 euros, résulte des procédures administratives qu'elle a subie, du choc psychologique et de la dépression qui s'en est suivie ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;
Il fait valoir que :
- à titre principal, la requête est irrecevable comme dépourvue de moyens d'appel ;
- à titre subsidiaire, il s'en rapporte à ses écritures de première instance et notamment à l'évaluation du préjudice matériel à la somme de 1500 euros, en augmentation par rapport à l'évaluation à hauteur de 600 euros faite par l'expert, et à l'évaluation du préjudice de jouissance et du préjudice moral, l'intéressée n'apportant aucun élément nouveau justifiant ses horaires de travail alors, d'ailleurs, qu'entre le 16 novembre 2008 (date du début du stationnement irrégulier) et le 24 décembre 2008 (date de notification à la requérante du placement de son véhicule à la frontière pour stationnement abusif de plus de sept jours), la requérante n'était aucunement gênée dans sa vie quotidienne professionnelle ou privée ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 avril 2015, présenté pour Mme B...par Me C..., qui confirme ses précédentes écritures ;
Vu la décision n° 2013/026831en date du 24 octobre 2013 par laquelle la section Cour administrative d'appel du bureau d'aide juridictionnelle de Paris a admis Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 2015 ;
- le rapport de M. Dellevedove, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;
1. Considérant qu'il ressort des dispositions des articles L. 325-1 et L. 325-7 du code de la route, dans leur rédaction alors applicable, que le législateur a attribué à l'administration le pouvoir de procéder à la destruction des véhicules réputés abandonnés parce qu'ils n'ont pas été retirés de la fourrière par leur propriétaire après la notification à ce dernier d'une mise en demeure d'avoir à les retirer dans le délai de dix jours, s'agissant des véhicules qu'un expert désigné par l'administration aura estimés d'une valeur marchande inférieure à un montant fixé par arrêté interministériel et déclarés hors d'état de circuler dans des conditions normales de sécurité ; qu'il résulte de l'instruction que, sur ordre d'un officier de police judiciaire, le véhicule de Mme B...a été mis en fourrière à compter du 24 novembre 2008 pour avoir été laissé en stationnement abusif plus de sept jours sur la voie publique ; que, toutefois, sur autorisation de l'officier de police judiciaire en date du 18 décembre 2008, l'entreprise de démolition Casse Auto de Cuisy a procédé à la destruction du véhicule de Mme B...dès le 23 décembre 2008, alors même que la notification de la mise à la fourrière avec mise en demeure de retirer le véhicule prescrite par les articles L. 325-7, R. 325-31 et R. 325-32 de ce code faite à une mauvaise adresse n'était parvenue à l'intéressée que le 24 décembre 2008 ; qu'il n'est pas contesté que, en procédant à la destruction du véhicule de la requérante dans ces conditions, l'administration a, comme l'a jugé le tribunal administratif, commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que, dès lors, Mme B... doit être regardée comme faisant appel du jugement en date du 19 avril 2013, en tant seulement que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Melun n'a fait que partiellement droit à sa demande en condamnant l'État à lui verser la somme globale de 1 700 euros, dont 1 500 euros au titre du préjudice matériel, et 200 euros au titre du préjudice de jouissance, subis par suite de la destruction fautive de son véhicule ;
2. Considérant, en premier lieu, que Mme B...soutient que la valeur de remplacement du véhicule détruit à tort par l'administration, indemnisée par les premiers juges à hauteur de 1 500 euros, devrait être portée à 3 000 euros ; que, toutefois, contrairement à ce qu'elle prétend, les premiers juges, qui ont relevé que le véhicule présentait un faible kilométrage et était régulièrement entretenu, doivent être regardés comme ayant tenu compte de l'ensemble des éléments d'évaluation produits au dossier ; qu'en particulier, si Mme B... soutient que les pneus du véhicule ont été remplacés en 2005 et bénéficiaient d'une garantie de cinq ans, il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté que la fiche descriptive du véhicule avant enlèvement signalait le " très mauvais état général " extérieur du véhicule faisant état de dégâts importants sur la carrosserie et que l'expert diligenté par l'administration avait constaté dans son rapport établi le 2 décembre 2008 des dommages multiples et évalué la valeur du véhicule à 600 euros ; que, si Mme B...se réfère aux annonces de la publication de la " centrale des particuliers ", l'extrait de cette publication produit par la requérante fait apparaître à plusieurs occurrences des annonces de véhicules identiques au sien, mis en circulation la même année 1999, proposés au prix de 1 500 euros, ce prix se situant dans la fourchette basse des prix annoncés ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante de la valeur de remplacement du véhicule en fixant le montant à 1 500 euros, correspondant, d'ailleurs, à la somme proposée initialement à titre de transaction par l'administration ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement attaqué sur ce point ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que les premiers juges ont écarté toute indemnisation au titre des frais de taxi qu'aurait supportés Mme B...pour se rendre à la fourrière et à la casse au motif qu'elle ne produisait aucun document probant de nature à justifier ces dépenses ; que l'intéressée s'est bornée à produire en première instance les copies de deux reçus de paiement de carte bancaire totalement illisibles et ne produit en appel aucun document de nature à contester la motivation des premiers juges ; que, dès lors, il y a lieu de confirmer sur ce point le jugement attaqué ;
4. Considérant, en troisième lieu, que, si Mme B...soutient qu'elle a subi un important trouble de jouissance en termes de pertes d'autonomie et de mobilité et de pénibilité lors de ses déplacements, il résulte, toutefois, de l'instruction que les pièces qu'elle produit ne sont pas de nature à remettre en cause l'évaluation du préjudice faite par les premiers juges ; qu'en particulier, elle n'établit pas que la destruction de son véhicule le 23 décembre 2008 lui aurait causé un trouble dans les conditions d'exercice de son activité professionnelle ; qu'il résulte, au contraire, de l'instruction, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, que Mme B...a été affectée au cours des années 2008 et 2009 dans des établissements de restauration à Paris et bénéficiait dès le mois de septembre 2008 d'une carte d'abonnement aux transports parisiens prise en charge par son employeur ; que, si elle produit des fiches récapitulatives de pointages établissant qu'elle a travaillé quelques nuits au mois de janvier et février 2009, elle n'établit ni même n'allègue qu'elle aurait été contrainte d'utiliser un taxi pour se rendre sur son lieu de travail ou regagner son domicile parisien ni qu'elle aurait même entrepris d'acquérir un nouveau véhicule au cours de cette période alors qu'elle avait délibérément laissé son véhicule en stationnement irrégulier à son ancien domicile à Serris (Seine et Marne) à partir du 16 novembre 2008, se désintéressant à ce point de ce véhicule qu'elle ne s'était pas même aperçu de l'enlèvement de celui-ci ; que, si elle soutient qu'elle est sujette aux entorses, en tout état de cause, elle ne produit aucun certificat médical de nature à établir que son état de santé serait incompatible avec l'utilisation des transports en commun parisiens ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante du trouble de jouissance subi par la requérante en limitant son montant à 200 euros ;
5. Considérant, en quatrième lieu, que Mme B...soutient qu'elle a subi un important préjudice moral en raison du choc psychologique qu'elle a ressenti lorsqu'elle a appris la destruction de son véhicule et fait état de la dépression qui s'en serait suivie, il résulte, toutefois, de l'instruction que l'intéressée ne justifie d'aucun élément probant de nature à établir la réalité d'un tel préjudice moral ;
6. Considérant qu'il résulte tout de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a mis à la charge de l'Etat une indemnité de 1 700 euros a rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une quelconque somme au titre des frais exposés par Mme B...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 5 mai 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Coënt-Bochard, président de chambre,
- M. Dellevedove, premier conseiller,
- M. Cantié, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 mai 2015.
Le rapporteur,
E. DELLEVEDOVELe président,
E. COËNT-BOCHARD Le greffier,
A. LOUNIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13PA04727