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12/05/2015 | FRANCE | N°14PA04530

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 12 mai 2015, 14PA04530


Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me C... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1309907/3 du 16 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2013 du préfet du Val-de-Marne refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

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°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fo...

Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2014, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me C... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1309907/3 du 16 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2013 du préfet du Val-de-Marne refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'une irrégularité ; c'est à tort que les premiers juges ont rejeté comme irrecevables ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de délai de départ volontaire ;

- le préfet devait saisir la commission du titre de séjour dès lors qu'il pouvait prétendre à un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il démontre sa résidence habituelle en France, ainsi que son intégration par le travail ;

- la décision lui refusant un titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle méconnait des dispositions des articles L. 313-10, L. 313-11 et L. 314-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnait les dispositions de la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour, qui en constitue le fondement légal ;

- elle méconnait les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la circulaire du 28 novembre 2012 et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnait les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 avril 2015, présenté pour M.A..., par

MeC..., qui maintient les conclusions de sa requête par les mêmes moyens et demande, en outre, à la Cour d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ou, à défaut, de réexaminer sa demande de titre de séjour ;

Vu les pièces dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet du

Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le décret n° 2008-1281 du 8 décembre 2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires ;

Vu la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 2015 :

- le rapport de M. Romnicianu, premier conseiller,

- et les observations de Me C..., pour M. A... ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant turc né le 1er juillet 1991 à Kovanvilar (Turquie), arrivé en France en 2008 selon ses déclarations, a sollicité le 21 mars 2013 un titre de séjour ; que, par un arrêté du 29 octobre 2013, le préfet du Val-de-Marne lui a opposé un refus assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ; que M. A...relève appel du jugement du 16 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêté du 29 octobre 2013, qui prévoit que " Monsieur B...A...est obligé de quitter le territoire français dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêté ", qu'aucune décision portant refus de délai de départ volontaire n'a été prise à l'encontre de M.A... ; qu'au contraire, même, l'auteur de la décision litigieuse a laissé à l'intéressé un délai de trente jours pour quitter volontairement le territoire français ; que M. A...n'est pas, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté comme irrecevables ses conclusions tendant à l'annulation de la dite décision en ce qu'elles étaient dirigées contre une décision inexistante ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, que le refus de titre de séjour en litige comporte l'énoncé des éléments de fait et de droit suffisamment précis et circonstanciés sur lesquels il se fonde ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient M.A..., il est suffisamment motivé ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-10-1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. /La carte porte la mention "salarié" lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention "travailleur temporaire" lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois.(...)" ; que l'article L. 5221-2 du code du travail qui a repris les dispositions de l'article L. 341-2 dispose : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail " ;

5. Considérant qu'il est constant que M. A...n'était pas titulaire, au moment de sa demande de renouvellement de son titre de séjour, d'un contrat de travail visé par la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ; que, dès lors, le préfet du Val-de-Marne a pu légalement rejeter la demande de titre de séjour de M. A...présentée sur le fondement de l'article L. 313-10-1 précité ; que, si le requérant se prévaut d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la SARL EFB et signé le 8 septembre 2014, cette circonstance est postérieure à la décision contestée et donc sans influence sur la légalité de celle-ci ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation dans sa circulaire du 28 novembre 2012 ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; que M. A...fait valoir qu'il est entré en France en 2008, qu'il y réside de manière habituelle et continue depuis, qu'il y a travaillé, qu'il bénéficiait lors de sa demande de titre d'une promesse d'embauche pour un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de maçon et qu'il a signé le 8 septembre 2014 un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de chef d'équipe ; qu'il soutient être intégré et avoir fixé le centre de ses intérêts en France du fait notamment de la présence de son frère ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M.A..., célibataire et sans charge de famille, n'établit pas la présence de son frère en France ni l'insertion dont il se prévaut et qu'il ne justifie pas d'une présence habituelle en France, les documents qu'il produit étant en nombre insuffisant et peu probants ; que, en outre, la circonstance qu'il a signé un contrat de travail, postérieurement à la date de la décision litigieuse, n'est pas de nature à démontrer une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français, l'arrêté contesté du préfet de police n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, l'arrêté contesté n'a méconnu ni les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

7. Considérant en quatrième lieu que si M. A...soutient que cette décision méconnait les dispositions de l'article L. 314-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien fondé ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour, laquelle n'a ni pour objet ni pour effet de contraindre M. A...à retourner dans son pays d'origine et doit être écarté pour ce motif ;

9. Considérant, en dernier lieu, que M. A...n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour ; que, par suite, le préfet n'était pas tenu, avant de rejeter sa demande, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour sur le fondement de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que si M. A...soutient que cette décision méconnait les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien fondé ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'il y a lieu, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance de la circulaire du

28 novembre 2012, de la violation des articles 8 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de M.A... ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

13. Considérant, en premier lieu, que l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales concernant l'interdiction de la torture stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que si M. A... a entendu se prévaloir de ces stipulations, il ne produit aucun élément de nature à établir qu'il serait personnellement exposé à un risque de torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ; que le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté ;

14. Considérant, en deuxième lieu, qu'il y a lieu, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés respectivement au point 6 et au point 11, d'écarter les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de la violation des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. B... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 16 avril 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Vettraino, président de chambre,

Mme Terrasse, président assesseur,

M. Romnicianu, premier conseiller,

Lu en audience publique le 12 mai 2015.

Le rapporteur,

M. ROMNICIANULe président,

M. VETTRAINO

Le greffier,

E. CLEMENT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 11PA00434

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N° 14PA04530


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14PA04530
Date de la décision : 12/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Michel ROMNICIANU
Rapporteur public ?: Mme BONNEAU-MATHELOT
Avocat(s) : POUGET

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-05-12;14pa04530 ?
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