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31/03/2015 | FRANCE | N°14PA02425

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 31 mars 2015, 14PA02425


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 juin 2014 et

12 juin 2014, présentés par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400080/6-2 du 29 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. C...B..., d'une part, en annulant son arrêté du 29 novembre 2013 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, d'autre part, en lui faisant injonction de délivrer à l'inté

ressé un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 juin 2014 et

12 juin 2014, présentés par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400080/6-2 du 29 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. C...B..., d'une part, en annulant son arrêté du 29 novembre 2013 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, d'autre part, en lui faisant injonction de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois, enfin, en mettant à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'articleL. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de M. B...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Il soutient que :

- le jugement attaqué méconnaît les stipulations de l'article 6 -1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- s'agissant des autres moyens soulevés en première instance par M. B...examinés par l'effet dévolutif de l'appel, il s'en réfère en son mémoire en défense de première instance ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2014, présenté pour M. B... par

Me D. Sultan ; M. B...conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de

2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mars 2015 :

- le rapport de M. Pagès, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C...B..., né le 9 juin 1965, de nationalité algérienne, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que par un arrêté du 29 novembre 2013 le préfet de police a opposé un refus à sa demande et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que par jugement du 29 avril 2014 le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté comme ayant méconnu les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, enjoint au préfet de police de délivrer un titre de séjour à M. B... et mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de

1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que le préfet de police relève régulièrement appel de ce jugement ;

Sur les conclusions du préfet de police dirigées contre le jugement du Tribunal administratif de Paris :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1° au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;

3. Considérant que pour l'année 2003, M. B...produit une lettre du 5 août 2003 du service Hygiène habitat de la ville de Saint-Ouen relative à l'appartement qu'il louait au 51 rue Charles Schmidt à Saint-Ouen, en vertu d'un contrat de location daté du 1er janvier 2002 signé avec la SCI Ychel, l'informant d'une nouvelle mise en demeure adressée à son propriétaire pour la réalisation des travaux permettant de remédier à l'insalubrité ; qu'il verse en outre un avis de loyer, ainsi que deux quittances de loyer signées, une attestation de domiciliation administrative du 21 mai 2003 chez Inser Asaf au 28 rue Traversière à Paris 12ème et une attestation signée de dépôt de demande d'asile du 22 mai 2003 à son adresse de domiciliation postale ; que pour l'année 2004, M. B...fournit un nouveau contrat de bail pour le même appartement signé par LBA Immo, société de gestion locative, au nom de M. E...D...du fait de la saisie-adjudication ordonnée par le tribunal de grande instance de Bobigny le 16 octobre 2003 sur l'immeuble appartenant à la SCI Ychel au bénéfice de MM. E...et A...D...et

G...F... ; qu'il produit l'ensemble des quittances signées par LBA Immo pour un loyer de 380 euros jusqu 'en juin 2004, puis pour un loyer de 330 euros jusqu'en décembre 2004 ; qu'en outre, il verse des factures EDF datées de février, juin, juillet et novembre 2004 libellées à son nom et correspondant à l'appartement loué, ainsi qu'un avis d'imposition également à cette adresse ; que pour l'année 2005, M. B...produit le détail de ses relevés bancaires de février à juillet démontrant de nombreux mouvements bancaires, dont une dizaine de retraits par mois, notamment à Saint-Ouen, ainsi que des remises de chèque ; qu'il verse par ailleurs une demande de renseignement des services fiscaux du 27 juin 2005 pour la taxe d'habitation exigible pour son appartement, ainsi que les factures EDF des mois de janvier, mars, mai, juillet et septembre et les quittances de loyer informatisées de février à septembre établies par ATI gestion pour un montant de 330 euros ; que s'agissant de l'année 2006, M. B...produit les quittances de loyer de janvier et février, ainsi qu'un protocole de transaction qu'il a conclu avec la SNC Turenne le 23 mars 2006, duquel il ressort que la gestion de l'immeuble, acquis le 4 janvier 2005 par cette dernière société, avait été confiée à la société ATI gestion et que l'ampleur des travaux de réhabilitation nécessitait une résiliation du bail moyennant une indemnité de 5 000 euros et la dispense de payer un arriéré de loyer d'un montant de

1 680 euros ; que la réalité de cette transaction est corroborée par l'opération créditrice de

5 000 euros portée sur le relevé bancaire de M. B...le 1er avril suivant, par le commandement de payer adressé le 8 février 2006 par huissier de justice au requérant pour des loyers impayés d'un montant de 1 650 euros, ainsi que par l'extrait de compte locataire établi par la société ATI Gestion du 1er février 2005 au 1er février 2006 ; qu'en outre, M. B...a notamment produit ses relevés bancaires de janvier à juillet 2006 faisant apparaître de nombreux mouvements bancaires, ainsi qu'une attestation d'élection de domicile pour l'aide médicale d'Etat du 27 décembre 2006 au Relais logement 3 cité Debergue à Paris 12ème; que s'agissant de l'année 2007,

M. B...verse une promesse d'embauche du 7 avril de l'entreprise BCE Rénovation accompagnée de la photocopie de la carte d'identité de l'employeur, le détail de ses relevés bancaires de janvier à décembre attestant d' une remise de chèques environ tous les deux mois, deux procès-verbaux d'infraction dressés par la RATP en février et novembre 2007, ainsi que diverses factures et deux ordonnances médicales ; que pour l'année 2008, M. B...présente le décompte de ses relevés bancaires de janvier à décembre faisant apparaître plusieurs retraits par mois et des remises de chèque régulières, deux bordereaux d'opération bancaire signés le 30 janvier 2008, ainsi que sa souscription d'un pass Navigo en septembre et la preuve de sa recharge pour les mois d'octobre et décembre ; qu'il justifie en outre du dépôt d'une demande de passeport auprès du consulat algérien à Paris le 3 mai 2008 et produit un avis d'imposition envoyé à sa nouvelle adresse de domiciliation postale à l'Association Entraide Batignolles à Paris 17ème, ainsi que diverses factures ; que pour l'année 2009, M. B...présente de nouveau le décompte de ses relevés bancaires de janvier à décembre faisant apparaître plusieurs retraits par mois et des remises de chèque régulières, un contrat d'abonnement à une salle de sport, un avis d'imposition à son adresse de domiciliation postale, et des factures ; qu'enfin, pour l'année 2010, M. B...verse une attestation de dépôt de demande de l 'aide médicale d'Etat du 23 juillet 2010 et l 'attestation d'admission du 19 août 2010, le décompte de ses relevés bancaires de janvier à décembre faisant apparaître de nombreuses opérations chaque mois et la preuve des rechargements de son pass Navigo entre avril et décembre, ainsi qu'un avis d'imposition et des factures d'achat ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que les pièces ainsi produites, par leur nombre, leur valeur probante et leur caractère concordant, permettaient d'établir la résidence habituelle de M. B... en France au titre des années 2003 à 2010, la valeur probante desdites pièces n'étant pas affectée par la seule circonstance qu'au cours de cette période de 8 ans l'intimé ait déménagé ou se soit fait livrer certains courriers à une adresse de domiciliation administrative ; que la résidence habituelle de M. B... en France au titre des années 2011 à 2013 n'étant pas contestée par le préfet de police, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'arrêté litigieux avait méconnu les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M.B... ;

Sur les conclusions de M. B...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. B...une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M.B....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 17 mars 2015 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président,

M. Luben, président assesseur,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 31 mars 2015.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

J. KRULIC Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA02425


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02425
Date de la décision : 31/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : D. SULTAN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-03-31;14pa02425 ?
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