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31/03/2015 | FRANCE | N°14PA01772,14PA01901

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 31 mars 2015, 14PA01772,14PA01901


Vu I°) sous le n° 14PA01772 la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 21 et 29 avril 2014, présentés pour M. A... D...C..., demeurant au..., par Me B... ; M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1312474 du 21 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 22 août 2013 lui refusant le renouvellement de sa carte de résident ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lu

i renouveler sa carte de résident dans le délai de quinze jours à compter de la notificati...

Vu I°) sous le n° 14PA01772 la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 21 et 29 avril 2014, présentés pour M. A... D...C..., demeurant au..., par Me B... ; M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1312474 du 21 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 22 août 2013 lui refusant le renouvellement de sa carte de résident ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui renouveler sa carte de résident dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail sous la même condition d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les premiers juges commettent une erreur de droit en considérant que le refus de renouvellement de titre de séjour non assorti d'une obligation de quitter le territoire français n'empêche pas le requérant de continuer à exercer une activité salariée ;

- la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

Vu II°) la requête, enregistrée le 28 avril 2014 sous le n° 14PA01901, présentée pour

M. A...D...C..., par MeB... ; M. C...demande à la Cour, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'annuler le jugement n° 1312474 du 21 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 22 août 2013 lui refusant le renouvellement de sa carte de résident ;

2°) de suspendre, en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est présumée dans les cas de refus de renouvellement de titre de séjour ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article

L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les premiers jugent commettent une erreur de droit en considérant que le refus de renouvellement de titre de séjour non assorti d'une obligation de quitter le territoire français n'empêche pas le requérant de continuer à exercer une activité salariée ;

- la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les pièces dont il résulte que les requêtes ont été communiquées au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mars 2015 :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;

1. Considérant que par une première requête, enregistrée le 21 avril 2014 sous le

n° 14PA01772, M.C..., de nationalité turque, demande à la Cour d'annuler le jugement

n° 1312474 du 21 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 août 2013 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement d'une carte de séjour ; que, par une seconde requête enregistrée le 28 avril 2014 sous le n° 14PA01901, M. C...demande à la Cour d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'arrêté préfectoral litigieux ; que ces requêtes, présentées par le même requérant présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident peut être retirée à tout employeur, titulaire de cette carte, ayant occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L. 341-6 du code du travail "; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que la sanction prévue à l'article L. 314-6 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a pour effet, sauf lorsqu'elle n'est pas assortie d'une obligation de quitter le territoire français et s'accompagne de la délivrance d'un autre titre de séjour, de mettre fin au droit au séjour de l'étranger concerné ;

4. Considérant qu'il est constant qu'à l'issue d'un contrôle du restaurant " Extra Donner " diligenté par l'unité territoriale de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi il est apparu que M. C... exerçait les fonctions de gérant de fait de la société Tolga, qui exploitait ledit restaurant ; que l'intéressé a fait l'objet, à la date du 18 juin 2013, d'un procès-verbal dressé par les inspecteurs du travail de l'unité territoriale pour des faits d'emploi d'étrangers démunis de titre de séjour et d'autorisation de travail ; que le préfet de police, en application des dispositions précitées de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a refusé à M. C... le renouvellement de sa carte de résident dont la validité avait expiré le 2 mai 2013;

5. Considérant que si le préfet de police n'a pas obligé M. C...à quitter le territoire français, il résulte toutefois des pièces du dossier qu'il n'a pas délivré à l'intéressé un titre de séjour sur un autre fondement et s'est borné à constater que celui-ci disposait de la faculté de solliciter la délivrance d'une carte de séjour temporaire ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales peut être utilement invoqué par M. C... à l'appui de son recours dirigé contre l'arrêté du 22 août 2013 ;

6. Considérant que si les faits de travail dissimulé reprochés à M. C...permettaient, en l'espèce, au préfet de police de ne pas renouveler sa carte de résident sur le fondement de l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il résulte toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, entré en France en octobre 1992 selon ses déclarations, vit en France depuis plus de vingt ans sous couvert d'un titre de séjour ; qu'il est bien intégré ; qu'il a notamment exercé une activité professionnelle et consolidé des liens familiaux ou privés ainsi que le relève le préfet de police dans sa décision ; qu'en effet, il vit en concubinage avec une compatriote résidant régulièrement en France sous couvert d'un titre de séjour " vie privée et familiale ", que le couple a eu un enfant né le 16 décembre 2010 ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de l'intéressé en France, et en dépit de la gravité de l'atteinte portée à l'ordre public, l'arrêté contesté, qui n'a pas été assorti de la délivrance d'un titre de séjour, a, porté au droit de M. C...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 22 août 2013 refusant le renouvellement de sa carte de résident ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à M. C...une carte de résident ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de police de délivrer ce titre dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à la suspension de la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l' instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...). Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision dans les meilleurs délais. La suspension prend fin au plus tard lorsqu'il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision " ; qu'aux termes de l'article R. 811-17 du même code : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction " ;

10. Considérant que le présent arrêt statue sur les conclusions de M. C...à fin d'annulation du jugement et de l'arrêté préfectoral attaqués ; que, dès lors, les conclusions présentées par M. C...dans sa requête n° 14PA01901 sont devenues sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante en la présente instance, le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de M. C...n°14PA01901.

Article 2 : Le jugement n° 1312474 du 21 février 2014 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police du 22 août 2013 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. C...une carte de résident dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. C...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 17 mars 2015 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président,

M. Luben, président assesseur,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

Lu en audience publique le 31 mars 2015.

Le rapporteur,

A. MIELNIK-MEDDAH

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA01772, 14PA01901


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01772,14PA01901
Date de la décision : 31/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-01-05-01 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement. Action en recouvrement.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : KARASU

Origine de la décision
Date de l'import : 06/05/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-03-31;14pa01772.14pa01901 ?
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