Vu la requête, enregistrée le 9 janvier 2014, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par
Me Jacqmin, avocat ; M. B... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1301962/7-1 du 18 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du
4 décembre 2012 par lequel le préfet de police a décidé son expulsion du territoire français ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté préfectoral ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de le remettre en possession de sa carte de résident, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de
100 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 8 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2014 :
- le rapport de M. Romnicianu, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Bonneau-Mathelot, rapporteur public ;
1. Considérant que M.B..., ressortissant sri-lankais né le 8 juin 1977 à Puttur
(Sri Lanka), entré en France en 1999 et ayant obtenu le statut de réfugié politique en 2001, fait appel du jugement du 18 novembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du
4 décembre 2012 prononçant son expulsion du territoire français en application de l'article
L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté litigieux :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui :/ - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; et qu'aux termes de l'article 3 de cette loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;
3. Considérant que l'arrêté d'expulsion contesté vise notamment l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'avis émis le 13 novembre 2012 par la commission spéciale d'expulsion ; qu'il énonce que M. B...a été condamné le
23 novembre 2009 par le Tribunal correctionnel de Paris à une peine de trois années d'emprisonnement pour participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme, financement d'entreprise terroriste, terrorisme, extorsion par violence, menace ou contrainte de signature, promesse, secret, fonds, valeur ou bien ; qu'il précise qu'en raison de l'ensemble de son comportement la présence de l'intéressé sur le territoire français constitue une menace grave pour l'ordre public ; que cette décision, qui comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est, dès lors, suffisamment motivée au regard des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;
En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté litigieux :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles
L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public " ; que les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public ; que lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour prononcer l'expulsion d'un étranger, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision ;
5. Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police, qui, après avoir rappelé la condamnation pénale dont l'intéressé avait fait l'objet, s'est référé dans l'arrêté litigieux à l'ensemble de son comportement, n'ait pas en l'espèce examiné l'ensemble des éléments relatifs au comportement de M. B...et aux différents aspects de sa situation afin de déterminer si, après les infractions commises par ce dernier, sa présence sur le territoire français constituait, à la date de l'arrêté contesté, une menace grave pour l'ordre public ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'erreur de droit, à raison du défaut d'examen de l'ensemble de la situation personnelle de l'intéressé, doit être écarté ;
6. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., entré en France en 1999 et titulaire d'une carte de résident en qualité de réfugié délivrée en 2001, a participé aux activités du " Comité de coordination tamoul de France ", dont l'objet était de collecter des fonds pour financer le " mouvement des Tigres de libération de l'Eelam tamoul " (LTTE), en qualité de co-responsable de la collecte à Paris ; qu'il a été condamné à trois ans d'emprisonnement par le Tribunal correctionnel de Paris le 23 novembre 2009 pour participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme, financement d'entreprise terroriste et terrorisme (extorsion par violence, menace ou contrainte de signature, promesse, secrets, fonds, valeur ou bien) ; que, si M. B...soutient qu'aucun autre fait ne peut lui être reproché depuis cette condamnation et qu'il a bénéficié d'une mesure de libération conditionnelle, ces circonstances ne sont pas suffisantes, eu égard à la gravité des faits qui lui sont reprochés et à leur caractère relativement récent, pour établir que le préfet de police aurait commis une erreur d'appréciation en estimant que sa présence sur le territoire français constituait une menace grave pour l'ordre public ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance./ 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant que M. B...fait valoir qu'il a purgé sa peine et que son épouse a été autorisée à le rejoindre en 2013 au titre du regroupement familial ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est sans charge de famille en France , à l'exception de son épouse, entrée en France postérieurement à la date d'adoption de l'arrêté préfectoral litigieux ; que dans ces conditions, en dépit de la durée de son séjour en France et eu égard à la menace grave pour l'ordre public que constitue la présence de M. B...sur le territoire français, il ne ressort pas des pièces du dossier que la mesure d'expulsion prise à son égard aurait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts qu'elle poursuit ; que, par suite, cette décision n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant ;
9. Considérant, en troisième et dernier lieu, que, contrairement à ce que soutient
M.B..., les circonstances que, d'une part, la juridiction pénale n'ait pas prononcé à son encontre la peine complémentaire d'interdiction du territoire de trois ans requise par le procureur de la République et que, d'autre part, la commission d'expulsion ait émis un avis défavorable à son expulsion lors de sa séance du 13 novembre 2012, ne faisaient pas obstacle à ce que l'autorité préfectorale prononce son expulsion sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 4 décembre 2012 décidant son expulsion du territoire français ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
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N° 11PA00434
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N° 14PA00080