La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/10/2014 | FRANCE | N°14PA02909-14PA03253

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 02 octobre 2014, 14PA02909-14PA03253


Vu, I, la requête, enregistrée le 3 juillet 2014, présentée pour le syndicat Confédération générale du travail des salariés des hôtels de prestige et économiques (CGT-HPE), dont le siège est 3 place du général Koenig à Paris (75017), par Me Vaudoiset ; le syndicat des salariés des hôtels de prestige et économiques CGT (CGT-HPE) demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402928/3-2 du 23 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande du syndicat et du comité d'entreprise tendant à l'annulation de la décision en date du 2 janvier

2014 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, d...

Vu, I, la requête, enregistrée le 3 juillet 2014, présentée pour le syndicat Confédération générale du travail des salariés des hôtels de prestige et économiques (CGT-HPE), dont le siège est 3 place du général Koenig à Paris (75017), par Me Vaudoiset ; le syndicat des salariés des hôtels de prestige et économiques CGT (CGT-HPE) demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402928/3-2 du 23 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande du syndicat et du comité d'entreprise tendant à l'annulation de la décision en date du 2 janvier 2014 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'hôtel Lutetia ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre solidairement à la charge de l'Etat et de la société L. Hôtel une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le comité d'entreprise de l'hôtel Lutetia a rendu ses avis à l'issue d'un délai de trois mois à compter de la tenue de la première réunion d'information alors que le nombre de suppressions d'emploi ne s'établit pas à 211 mais à plus de 250 en tenant compte des contrats de travail à durée déterminée ; par suite, les deux réunions du comité d'entreprise devaient se tenir dans un délai de quatre mois conformément à l'article L. 1233-30 du code du travail ;

- le plan de sauvegarde de l'emploi qui a été soumis au comité d'entreprise n'est pas le même que celui qui a été homologué ;

- les mesures d'accompagnement social sont illégales ;

- le plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisant au regard des moyens du groupe Alrov auquel appartient l'hôtel Lutetia, bénéficiaire au premier semestre 2013 et dont les résultats d'exploitation sont largement excédentaires depuis plusieurs années, et non comme l'a fait le tribunal au regard du secteur d'activité ; que les mesures sont insuffisantes à un double titre ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 août 2014, présenté par le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social ; il demande le rejet de la requête ; il fait valoir qu'aucun des moyens n'est fondé ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 août 2014, présenté pour la société L. Hôtel, par Me Dumont ; elle demande le rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du requérant la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir qu'aucun des moyens n'est fondé ; le délai de consultation du comité d'entreprise dépend du nombre de licenciements et non de l'effectif et constitue en tout état de cause un maximum et non un impératif opposable à l'entreprise ; le comité d'entreprise a bien été saisi du projet de document unilatéral et le document transmis à l'administration ne diffère de celui-ci que sur deux points, qui améliorent en outre la situation des intéressés, alors que le code du travail n'impose pas une stricte identité entre ces documents ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 septembre 2014, présenté pour le syndicat requérant ; il conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 septembre 2014, présenté pour la société L. Hôtel ; elle conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ; elle porte sa demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à la somme de 5 000 euros ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2014, présenté pour le syndicat requérant ;

Vu, II, la requête, enregistrée le 23 juillet 2014, présentée pour le comité d'entreprise de l'hôtel Lutetia, dont le siège est 43 boulevard Raspail à Paris (75006), par Me Vaudoiset ; le comité d'entreprise de l'hôtel Lutetia demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402928/3-2 du 23 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande du syndicat et du comité d'entreprise tendant à l'annulation de la décision en date du 2 janvier 2014 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'hôtel Lutetia ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre solidairement à la charge de l'Etat et de la société L. Hôtel une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le comité d'entreprise de l'hôtel Lutetia a rendu ses avis à l'issue d'un délai de trois mois à compter de la tenue de la première réunion d'information alors que le nombre de suppressions d'emploi ne s'établit pas à 211 mais à plus de 250 en tenant compte des contrats de travail à durée déterminée ; par suite, les deux réunions du comité d'entreprise devaient se tenir dans un délai de quatre mois conformément à l'article L. 1233-30 du code du travail ;

- le plan de sauvegarde de l'emploi qui a été soumis au comité d'entreprise n'est pas le même que celui qui a été homologué ;

- les mesures d'accompagnement social sont illégales ;

- le plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisant au regard des moyens du groupe Alrov auquel appartient l'hôtel Lutetia, bénéficiaire au premier semestre 2013 et dont les résultats d'exploitation sont largement excédentaires depuis plusieurs années, et non comme l'a fait le tribunal au regard du secteur d'activité ; que les mesures sont insuffisantes à un double titre ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 août 2014, présenté pour la société L. Hôtel, par Me Dumont ; elle demande le rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du requérant la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle fait valoir qu'aucun des moyens n'est fondé ; le délai de consultation du comité d'entreprise dépend du nombre de licenciements et non de l'effectif et constitue en tout état de cause un maximum et non un impératif opposable à l'entreprise ; le comité d'entreprise a bien été saisi du projet de document unilatéral et le document transmis à l'administration ne diffère de celui-ci que sur deux points, qui améliorent en outre la situation des intéressés, alors que le code du travail n'impose pas une stricte identité entre ces documents ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 août 2014, présenté par le ministre du travail ; il demande le rejet de la requête ; il fait valoir qu'aucun des moyens n'est fondé ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 septembre 2014, présenté pour le comité d'entreprise requérant ; il conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 26 septembre 2014, présentées pour les requérants ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi ;

Vu le décret n° 2013-5454 du 27 juin 2013 relatif à la procédure de licenciement collectif pour motif économique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2014 :

- le rapport de M. Polizzi, président assesseur,

- les conclusions de M. Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Vaudoiset, avocate des requérants, de M. A...pour le ministre du travail et de Me Dumont, avocat de la société L. Hôtel ;

1. Considérant que les requêtes sont dirigées contre le même jugement et la même décision et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par le même arrêt ;

2. Considérant que la société L. Hôtel, exploitante de l'hôtel Lutetia, propriété du groupe Alrov, a décidé la fermeture de cet hôtel pour une durée de trois années, à compter du mois d'avril 2014, en vue d'y réaliser des travaux de restructuration et de rénovation ; que cette société a, le 9 septembre 2013, adressé aux membres du comité d'entreprise un projet de licenciement collectif pour motif économique concernant 211 salariés et comprenant un projet de plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'après une première réunion d'information et de consultation du comité d'entreprise, le 16 septembre 2013, l'employeur a, le 17 septembre 2013, notifié à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) d'Ile-de-France un projet de licenciement collectif ; que des réunions du comité d'entreprise se sont tenues les 17 et 28 octobre, 2 et 9 décembre 2013 ; que le comité d'entreprise a été consulté le 13 décembre sur un projet de document unilatéral ; que l'accord collectif signé le 9 décembre 2013 avec deux des quatre organisations syndicales représentatives présentes dans l'entreprise n'étant pas majoritaire, la société L. Hôtel a, le 16 décembre 2013, transmis à la Dirrecte d'Ile-de-France le plan de sauvegarde de l'emploi élaboré unilatéralement aux fins d'homologation en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail ; que le syndicat Confédération générale du travail des salariés des hôtels de prestige et économiques (CGT-HPE) et le comité d'entreprise de l'hôtel Lutetia demandent notamment l'annulation du jugement du 23 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision en date du 2 janvier 2014 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a homologué le plan de sauvegarde de l'emploi et de cette décision ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-24-1 du code du travail : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en oeuvre des licenciements. Cet accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-24-2 du même code : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63. / Il peut également porter sur : / 1° Les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise / 2° La pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements mentionnés à l'article L. 1233-5 ; / 3° Le calendrier des licenciements ; / 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées ; / 5° Les modalités de mise en oeuvre des mesures de formation, d'adaptation et de reclassement prévues aux articles L. 1233-4 et L. 1233-4-1. " ; que l'article L. 1233-24-4 du même code dispose que : " A défaut d'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité d'entreprise fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-61 de ce code : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile. " ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que le licenciement économique d'au moins dix salariés pendant une même période de trente jours dans une entreprise d'au moins cinquante salariés ne peut intervenir qu'après la conclusion d'un accord collectif portant sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et pouvant également porter sur les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 ou, à défaut d'accord collectif, après l'élaboration par l'employeur d'un document fixant notamment le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ; que l'article L. 1233-57-1 du code du travail dispose que cet accord collectif ou ce document de l'employeur est transmis à l'autorité administrative pour validation de l'accord ou homologation du document ;

Sur la régularité de la procédure de consultation du comité d'entreprise :

En ce qui concerne le délai de consultation du comité d'entreprise :

5. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 1233-30 du code du travail : " I.- Dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins cinquante salariés, l'employeur réunit et consulte le comité d'entreprise sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, (...). / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi. / Les éléments mentionnés au 2° du présent I qui font l'objet de l'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1 ne sont pas soumis à la consultation du comité d'entreprise prévue au présent article. / Le comité d'entreprise tient au moins deux réunions espacées d'au moins quinze jours. II.- Le comité d'entreprise rend ses deux avis dans un délai qui ne peut être supérieur, à compter de la date de sa première réunion au cours de laquelle il est consulté sur les 1° et 2° du I, à : (...) / 2° Trois mois lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à cent et inférieur à deux cent cinquante ; / 3° Quatre mois lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à deux cent cinquante. (...) / En l'absence d'avis du comité d'entreprise dans ces délais, celui-ci est réputé avoir été consulté. (...) " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société L. Hôtel employait 211 salariés en contrat à durée indéterminée et 59 salariés en contrats à durée déterminée à la date à laquelle elle a engagé la procédure de licenciement collectif pour motif économique ; que les requérants soutiennent que les salariés en contrat à durée déterminée auraient dû être pris en compte pour déterminer le nombre de licenciements et que, par suite, le délai de consultation du comité d'entreprise aurait dû être fixé à quatre mois ; que toutefois, ainsi que cela résulte de la lettre même des dispositions précitées et comme l'a jugé à bon droit le tribunal, le délai dans lequel le comité d'entreprise rend ses deux avis est un délai maximum ; qu'il est au demeurant expressément prévu par les dispositions précitées qu'en l'absence d'avis dans ce délai, le comité d'entreprise est réputé avoir été consulté ; qu'en l'espèce, le comité d'entreprise a tenu plus de deux réunions espacées de quinze jours et rendu l'ensemble de ses avis dans le délai de trois mois ; qu'en tout état de cause les requérants n'établissent pas que, eu égard à l'illicéité des contrats à durée déterminée, la fin de ceux-ci devait être assimilée à un licenciement et que le délai de consultation ait pu en conséquence être régulièrement porté à quatre mois ; qu'il suit de ce qui précède que le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne les différences entre le document soumis à homologation et le plan de sauvegarde de l'emploi soumis au comité d'entreprise :

7. Considérant, ainsi qu'il a été dit au point 2, que l'employeur, prenant acte du caractère minoritaire de l'accord collectif du 9 décembre 2013, a adressé au comité d'entreprise, le 10 décembre 2013, un projet modifié de plan de sauvegarde de l'emploi en vue de la dernière réunion qui s'est tenue le 13 décembre 2013 ; qu'il a ensuite adressé à l'administration pour homologation un document différent de ce dernier ;

8. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 1233-24-4 du code du travail n'imposent à l'employeur ni de soumettre au comité d'entreprise un projet de document unilatéral identique au document ayant fait l'objet de l'accord minoritaire, ni de consulter le comité d'entreprise sur le dernier état du document qu'il a élaboré unilatéralement avant de le soumettre à l'autorité administrative pour homologation ; qu'il y a seulement lieu, afin que la procédure de consultation prévue par ces dispositions ne soit pas viciée, que l'avis du comité d'entreprise ait été recueilli sur l'ensemble des éléments substantiels du plan et que l'employeur ait pu prendre en compte les observations formulées au cours des réunions du comité ;

9. Considérant, d'une part, que le document unilatéral soumis à homologation comporte, par rapport à l'accord minoritaire notamment une première différence, relative aux formations d'adaptation à l'emploi des salariés qui quitteraient l'entreprise dans le cadre de départs volontaires et porte de 2 000 euros à 5 000 euros, et de 3 000 euros à 6 000 euros dans le cas des salariés handicapés, le montant des aides aux actions de formation d'adaptation ; qu'une deuxième différence, relative aux aides à la création ou à la reprise d'une entreprise par ces mêmes salariés, ouvre la possibilité d'appréhender collectivement le critère de détention de la majorité du capital de l'entreprise reprise ou créée dans l'hypothèse où plusieurs salariés sont concernés ; qu'il ressort du procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 13 décembre 2013 que ces deux modifications ont été présentées par l'employeur en séance et que la seconde résulte de la prise en compte d'une demande du secrétaire du comité d'entreprise formulée au cours de cette réunion ;

10. Considérant, d'autre part, que le document unilatéral comporte des différences qui ne portent que sur le montant de certaines mesures et présentent un caractère mineur par rapport au projet de plan de sauvegarde de l'emploi soumis au comité d'entreprise le 13 décembre ; que ces modifications apportent en outre des améliorations aux mesures initiales ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le moyen doit être écarté ;

Sur la légalité des mesures d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi :

12. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1222-6 du code du travail : " Lorsque l'employeur envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3, il en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de réception. / La lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus. / A défaut de réponse dans le délai d'un mois, le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée. " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du même code : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques " ; que l'article L. 8241-2 du code du travail dispose que : " (...) Le prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif conclu entre entreprises requiert : / 1° L'accord du salarié concerné ; (...) / 3° Un avenant au contrat de travail (...) / Un salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir refusé une proposition de mise à disposition (...) " ;

13. Considérant que le dispositif en cause prévoit notamment le maintien, pendant la période de fermeture de l'hôtel Lutetia, du contrat de travail du salarié de cet hôtel qui accepte la modification de ce contrat consistant en sa mise à disposition pendant cette période auprès d'autres entreprises, assortie d'un dispositif d'indemnisation pendant les périodes non travaillées, entre deux mises à disposition, avec mise en place d'une convention d'activité partielle ; qu'il prévoit aussi que le refus du salarié d'accepter deux mises à disposition, regardées comme des offres valables d'emploi par la cellule de reclassement, entraîne son licenciement pour motif économique ;

14. Considérant que ces modifications de leur contrat de travail, proposées aux salariés de l'hôtel Lutetia dans le cadre des dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail, à raison de la fermeture temporaire du site sur lequel ils travaillaient et dont le refus pouvait être cause, en application de l'article L. 1233-3 dudit code, de leur licenciement pour motif économique ne sauraient par elles-mêmes constituer des éléments, au sens des articles L. 223-61 à L. 1223-63 du code du travail, d'un plan de sauvegarde de l'emploi dont l'établissement et la mise en oeuvre ne sont requis que parce que, du fait du nombre des licenciements projetés, le respect de ces dispositions le requiert ; que leur illicéité ne peut, par suite, avoir pour effet de vicier la décision homologuant le plan de sauvegarde de l'emploi et ce quand bien même, s'inscrivant dans une démarche globale de prise en compte des effets de la fermeture temporaire de l'hôtel, ce dispositif a été un des éléments de la négociation, qu'il a été soumis à la consultation du comité d'entreprise en application de l'article L. 1233-24-2 du code du travail et qu'il apparaît dans le document soumis à homologation de l'administration en application de l'article L. 1233-57-3 du même code ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le moyen est sans influence sur la légalité de la décision attaquée et doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi :

16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail : " En l'absence d'accord collectif (...), l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et

L. 6321-1. (...) " ;

17. Considérant que les requérants soutiennent que le plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisant au regard des moyens financiers du groupe Alrov, dont le résultat net consolidé, évalué à 33 millions d'euros en 2012, lui permettrait de maintenir la rémunération nette des salariés pendant trois ans et de proposer des formations qualifiantes ; qu'ils soutiennent à cet égard que la mesure d'accompagnement prévue est insuffisante dès lors, d'une part, que l'indemnisation des salariés entre deux mises à disposition est en partie prise en charge par l'Etat alors qu'elle pourrait l'être par le groupe et, d'autre part, que les primes, très importantes, ne sont pas incluses dans l'assiette des congés payés, ce qui induit une perte de rémunération très importante ; qu'il résulte toutefois de ce qui a été dit aux points 14 et 15 qu'il n'incombait pas à l'autorité administrative de se prononcer sur l'adéquation de la modification du contrat aux moyens de l'entreprise et du groupe auquel elle appartient ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation présentées par le comité d'entreprise de l'hôtel Lutetia et le syndicat CGT des salariés des hôtels de prestige et économiques doivent être rejetées ;

Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de la société L. Hôtel, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme demandée par les requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accorder à la société L. Hôtel la somme qu'elle demande sur ce fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes du syndicat Confédération générale du travail des salariés des hôtels de prestige et économiques (CGT-HPE) et du comité d'entreprise de l'hôtel Lutetia sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de la société L. Hôtel tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat Confédération générale du travail des salariés des hôtels de prestige et économiques (CGT-HPE), au comité d'entreprise de l'hôtel Lutetia, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société L. Hôtel.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Polizzi, président assesseur,

- Mme Julliard, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 2 octobre 2014.

Le rapporteur,

F. POLIZZILe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

5

N° 10PA03855

2

Nos 14PA02909, 14PA03253


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02909-14PA03253
Date de la décision : 02/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Francis POLIZZI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : VAUDOISET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2014-10-02;14pa02909.14pa03253 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award