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19/12/2013 | FRANCE | N°13PA01276

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre, 19 décembre 2013, 13PA01276


Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Boukhari Saou ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1209515/2-3 du 27 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 6 février 2012 refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français, d'autre part, à enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour et, enfin, à ce que soit mis à la charge de l'Etat la s

omme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et...

Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Boukhari Saou ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1209515/2-3 du 27 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 6 février 2012 refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français, d'autre part, à enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour et, enfin, à ce que soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation, sous astreinte et en lui octroyant une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention entre le Gouvernement de la République française et Gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes, signée à Bamako le 26 septembre 1994 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2013 :

- le rapport de M. Polizzi, président assesseur,

- et les observations de Me Boukhari Saou, avocat de M.A... ;

1. Considérant que M.A..., né en 1963 et de nationalité malienne, entré en France, selon ses déclarations, le 2 septembre 2000, a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 6 février 2012, le préfet de police a opposé un refus à sa demande de titre de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. A...relève appel du jugement du 27 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté mentionné ci-dessus ;

Sur la légalité de la décision de refus du titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 alinéa 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ; que M. A...soutient être entré en France le 2 septembre 2000 et y résider habituellement depuis lors, soit depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que, toutefois, afin d'attester sa présence en France, il ne produit au titre des années 2009 et 2010 qu'une lettre de l'Assurance maladie du 29 janvier 2009 et une lettre du Ministère de la santé du 8 janvier 2010, ainsi que des factures relatives au rechargement d'une carte Navigo de novembre 2009 à décembre 2010 dont il ne prouve d'ailleurs toujours pas être le titulaire ; que ces documents ne sauraient à eux seuls établir le caractère habituel de la présence de l'intéressé en France au cours de la période en cause ; que, par suite, le préfet de police n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure en l'absence de la saisine de cette commission doit, dès lors, être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que la décision attaquée vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle mentionne que le requérant, entré en France le 2 septembre 2000, ne peut prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'ancienneté de séjour sur le territoire français ne constitue pas une considération humanitaire ou un motif exceptionnel au sens de ces dispositions ; que la décision, qui énonce de manière précise et circonstanciée les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement, est ainsi suffisamment motivée dès lors en outre que l'administration n'était pas tenue de mentionner les années spécifiques pour lesquelles elle estime que les justificatifs de présence en France apportés par M. A...sont insuffisants ;

4. Considérant, en troisième lieu, que l'argumentation retenue par les juges de première instance, fondée sur des éléments produits par les parties et soumis au débat contradictoire, n'avait pas par elle-même à faire l'objet d'un débat contradictoire ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ; qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'établit pas résider en France de façon continue depuis l'année 2000 ; que l'intéressé est sans charge de famille en France et ne conteste pas que sa femme et ses trois enfants vivent au Mali ; que, par suite, il n'établit pas l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels permettant son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale ; que M. A...fait également valoir qu'il a exercé plusieurs emplois en France, d'abord en tant qu'agent d'entretien au sein de l'association " F.A.I.R.E " du 1er novembre 2001 au 31 décembre 2001, puis en tant que plongeur du 4 août 2003 au 31 mars 2008 au sein de la société " Villennes-sur-Seine Invest Hotel ", et enfin en tant qu'agent de service pour la société " Sodexo " de manière ponctuelle à l'été 2008 ; que ces circonstances ne sont pas de nature à établir que le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant le bénéfice de l'admission exceptionnelle au séjour en tant que " salarié " pour une profession qui, au surplus, ne figure pas sur la liste des métiers en tension annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 et ce alors même que M. A...déclare ses revenus ;

6. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 15 de la convention du 26 septembre 1994 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes : " Les points non traités par la convention en matière d'entrée et de séjour des étrangers sont régis par la législation de l'Etat d'accueil " ; qu'en vertu de l'article 10 de la convention : " Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les nationaux maliens doivent posséder un titre de séjour. / Ces titres de séjour sont délivrés et renouvelés conformément à la législation de l'Etat d'accueil " ; qu'enfin, aux termes de l'article 11 de la convention " Après trois années de résidence régulière et non interrompue, les nationaux de chacune des Parties contractantes établis sur le territoire de l'autre Partie, peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans, dans les conditions prévues par la législation de l'État d'accueil (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations que le titre de séjour sollicité par M. A...devait être délivré sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel a d'ailleurs été invoqué par l'intéressé lui-même lors de sa demande de titre ainsi qu'il ressort tant des termes de la décision attaquée que de la requête elle-même ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 5, M. A...est sans charge de famille sur le territoire français ; qu'il ne conteste pas que sa femme et ses trois enfants résident au Mali où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 37 ans ; que, dans ces conditions et alors au surplus qu'il n'établit pas avoir tissé des liens en France, l'arrêté du 6 février 2012 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) " ;

10. Considérant que, ainsi qu'il a été dit au point 3, la décision refusant à M. A...le renouvellement du titre de séjour sollicité est suffisamment motivée ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français, prise en application des dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que, les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écarté par voie de conséquence ;

12. Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet de police dans les conséquences de sa décision sur sa situation personnelle, développés par M. A...à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que ce dernier texte énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que si M. A...invoque le risque pour lui de retourner au Mali en raison de la situation politique instable, il n'assortit ce moyen d'aucune précision relative à sa situation personnelle qui permettrait d'en apprécier le bien fondé ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

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N° 10PA03855

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N° 13PA01276


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3 ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA01276
Date de la décision : 19/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. MOREAU
Rapporteur ?: M. Francis POLIZZI
Rapporteur public ?: Mme MACAUD
Avocat(s) : BOUKHARI SAOU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-12-19;13pa01276 ?
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