Vu la requête, enregistrée le 13 janvier 2011 au greffe de la Cour, présentée pour la société Pygmalyon et la société PLEG Lyon, représentée par Me B...en qualité de mandataire liquidateur, dont les sièges sont situés 66, rue Louis Becker à Villeurbanne (69100), par MeA... ; la société Pygmalyon et la société PLEG Lyon demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0718102/3-2 du 10 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, rejeté leur demande tendant à la condamnation de la Société nationale des chemins de fer (SNCF) à verser à la société PLEG Lyon les sommes de 157 124,42 euros au titre de la perte de marge, 50 000 euros au titre des troubles et inconvénients occasionnés et 320 000 euros au titre de l'atteinte à la réputation commerciale, ainsi que les intérêts moratoires correspondants, en réparation du préjudice résultant de la résiliation du marché que la société Pygmalyon s'était vu confier le 14 décembre 2006 pour la restructuration du bâtiment voyageurs de la gare d'Aix-les-Bains et, d'autre part, condamné la société Pygmalyon à verser à la SNCF une somme de 474 564,75 euros, en mettant à sa charge les frais d'expertise et les frais irrépétibles ;
2°) de condamner la SNCF à verser à la société PLEG Lyon, venue aux droits de la société Pygmalyon, la somme de 333 106,31 euros au titre des travaux réalisés et du manque à gagner, la somme de 50 000 au titre des troubles et inconvénients occasionnés par la résiliation en cause et la somme de 320 000 euros au titre de l'atteinte à la réputation commerciale, ainsi que les intérêts moratoires calculés sur chacune de ces sommes aux taux de refinancement de la BCE de 4% majoré de 7 points, soit un taux de calcul de 11% ;
3°) de mettre à la charge de la SNCF une somme de 4 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le cahier des clauses et conditions générales applicables aux marchés de travaux de la SNCF, daté du 24 octobre 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 avril 2013 :
- le rapport de Mme Sirinelli, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Dewailly, rapporteur public ;
1. Considérant que, le 14 décembre 2006, la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) a confié à la société Pygmalyon un marché de travaux publics relatif à la restructuration du bâtiment voyageurs de la gare d'Aix-les-Bains, pour un prix de 831 484,79 euros HT ; que les travaux ont débuté par ordre de service du 2 janvier 2007 ; que, par lettre en date du 29 août 2007, la SNCF a mis en demeure la société Pygmalyon, d'une part, de lui communiquer, dans un délai de quinze jours, les avoirs et les factures demandés par ordres de service, ainsi que le plan de redressement demandé par une précédente mise en demeure en date du 2 juillet 2007, et, d'autre part, de réaliser les travaux de gros oeuvre dans la zone de chantier UO voie ; que, par courrier en date du 14 septembre 2007, reçu le 17 septembre 2007, la SNCF a prononcé la résiliation du marché litigieux aux torts exclusifs de la société requérante ; que la société Pygmalyon et la société PLEG Lyon, qui déclare venir à ses droits, relèvent appel du jugement du 10 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, rejeté la demande tendant à la condamnation de la Société nationale des chemins de fer (SNCF) à verser à la société PLEG Lyon les sommes de 157 124,42 euros au titre de la perte de marge, 50 000 euros au titre des troubles et inconvénients occasionnés par la résiliation en cause et 320 000 euros au titre de l'atteinte à la réputation commerciale, ainsi que les intérêts moratoires correspondant, en réparation du préjudice résultant de la résiliation susmentionnée et, d'autre part, condamné la société Pygmalyon à verser à la SNCF une somme de 474 564,75 euros, en mettant à sa charge les frais d'expertise et les frais irrépétibles ;
Sur les conclusions à fin d'annulation du jugement :
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires des sociétés :
2. Considérant qu'aux termes du point 1 de l'article 80 du cahier des clauses et conditions générales (CCCG) applicable aux marchés de travaux de la SNCF : " (...) lorsque l'entrepreneur ne se conforme pas aux stipulations du marché ou aux ordres de service, la personne responsable du marché le met en demeure d'y satisfaire dans un délai déterminé, par une décision qui lui est notifiée par écrit. (...) " ; qu'aux termes du point 2 de l'article 80 : " Si l'entrepreneur n'a pas déféré à la mise en demeure, une mise en régie peut être ordonnée, ou la résiliation du marché peut être décidée dans les conditions définies aux articles 81 à 83 " ; qu'enfin, aux termes du point 62 de l'article 82 : " La SNCF peut résilier le marché, après mise en demeure préalable restée infructueuse, lorsque l'entrepreneur ne se conforme pas aux stipulations du marché ou aux ordres de service, comme indiqué au point 2 de l'article 80 " ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 84 du cahier susmentionné : " La résiliation prononcée aux torts de l'entrepreneur peut être soit simple, soit aux frais et risques de l'entrepreneur. En cas de résiliation simple, les effets de celle-ci sont limités à ceux énoncés à l'article 83. En cas de résiliation aux frais et risque de l'entrepreneur, il est en outre passé des marchés avec d'autres entrepreneurs pour l'achèvement des travaux. Le Maître d'ouvrage notifie à l'entrepreneur dont le marché est résilié sa décision d'exécution par défaut et lui fait part du nom des entrepreneurs titulaires des nouveaux marchés. L'entrepreneur est autorisé à suivre l'exécution de nouveaux marchés passés à ses frais et risques sans pouvoir entraver les ordres du maître d'oeuvre. Il peut cependant émettre des réserves motivées sur l'exécution des travaux " ; que les sociétés requérantes soutiennent que la résiliation prononcée aux torts de la société Pygmalyon doit être regardée comme entrant dans le champ des stipulations précitées de l'article 84 du cahier des clauses et conditions générales qui prévoient, en cas d'exécution par défaut, la communication d'informations concernant les marchés conclus avec d'autres entrepreneurs pour l'achèvement des travaux, et qu'en l'absence de communication de ces éléments, cette résiliation était donc irrégulière ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction, en particulier des termes de la lettre de résiliation du 14 septembre 2007, que la SNCF aurait entendu se placer dans le cadre d'une résiliation aux frais et risques de l'entrepreneur ; que, dès lors, dans le cadre d'une résiliation simple prononcée aux torts de l'entrepreneur, elle n'était pas tenue, en application des stipulations précitées, de communiquer à la société Pygmalyon les informations concernant les nouveaux marchés ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de résiliation doit donc être écarté ;
4. Considérant, en second lieu, que les sociétés requérantes soutiennent que la résiliation en cause était infondée, aucun grief ne pouvant être reproché à la société Pygmalyon dès lors que les difficultés rencontrées sur le chantier ont eu pour seule origine les fautes du maître d'ouvrage et du maître d'oeuvre ; que, toutefois, il est constant que la société Pygmalyon ne s'est pas conformée à plusieurs ordres se services, décidant unilatéralement l'interruption des travaux, et que les mises en demeure qui lui ont été adressées sont également restées infructueuses ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que la SNCF a prononcé la résiliation du marché aux torts exclusifs de la société Pygmalyon ; que, par suite, les sociétés requérantes ne peuvent prétendre à l'indemnisation des préjudices qui résulteraient de cette résiliation, et ne sont ainsi pas fondées à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a, par le jugement attaqué, rejeté leur demande ;
En ce qui concerne le règlement du décompte général :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 13.34 du cahier des clauses et conditions générales applicables au marché de travaux litigieux (CCCG) : " Le décompte général est signé par la personne responsable du marché et notifié à l'entrepreneur par ordre de service avant la plus tardive des deux dates ci-après : quatre-vingt-dix jours après la date de réception, par le maître d'oeuvre, du projet de décompte final ; trente jours après la publication des indices ou index de référence permettant la révision du solde. Au vu du décompte général qui lui est notifié, l'entrepreneur émet la facture pour solde du montant résultant du calcul établi par le maître d'oeuvre et la transmet à celui-ci qui l'adresse, à son tour, à la personne responsable du marché " ; qu'aux termes de l'article 13.35 du même cahier : " L'entrepreneur dispose d'un délai de quarante-cinq jours pour signer et renvoyer au maître d'oeuvre ce décompte général, sans ou avec réserves. Si la signature est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne les intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché. Si la signature est donnée avec réserves, l'entrepreneur doit motiver ces réserves dans un mémoire de réclamation joint au renvoi du décompte qui précise le montant dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et n'ayant pas fait l'objet de paiement définitif. Le règlement du différend intervient alors selon les modalités indiquées à l'article 85 (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article 85.2 : " Si l'entrepreneur refuse de signer sans réserve le décompte général, la personne responsable du marché dispose, à compter de la date de réception par le maître d'oeuvre du mémoire de réclamation exprimant ces réserves et remis dans les conditions du paragraphe 35 de l'article 13, d'un délai de six mois pour notifier sa décision. L'absence de notification de décision dans le délai de six mois vaut rejet de la demande de l'entrepreneur. Si dans le délai de trois mois à partir de la notification de décision ou de l'expiration du délai de réponse de six mois de la personne responsable du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal compétent, il est considéré comme ayant adhéré à la décision de la personne responsable du marché et toute réclamation se trouve éteinte " ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant qu'à la suite de la résiliation du marché en cause, l'entreprise a notifié à la SNCF, par courrier en date du 10 décembre 2007, son projet de décompte final ; que, par ordre de service du 9 juin 2008, notifié le 17 juin suivant, la SNCF a notifié à la société Pygmalyon le décompte général ; que, par courrier en date du 7 juillet 2008, la société a refusé de signer ledit décompte et adressé à la SNCF un mémoire énonçant ses réclamations, qui ont été rejetées par la SNCF par courrier du 9 janvier 2009 ; qu'en application des stipulations précitées de l'article 85.2 du cahier des clauses et conditions générales applicables au marché en cause et ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la société Pygmalyon disposait donc d'un délai de trois mois, à compter de la décision expresse de rejet de ses réclamations, pour contester la décision de la SNCF devant le tribunal administratif ; qu'en l'absence d'une telle contestation, ce décompte est devenu définitif, et la SNCF est fondée à demander le versement des sommes qui y figurent comme lui étant dues ; que si les sociétés requérantes soutiennent que ce décompte n'a pu devenir définitif du fait de son irrégularité, dans la mesure où il n'était pas assorti des éléments concernant les marchés de substitution, il résulte de ce qui précède que la SNCF n'était pas tenue de communiquer de tels éléments ; qu'enfin, si les sociétés font également valoir que ce décompte ne comportait pas non plus, selon les termes de leur requête, " les justificatifs dont il doit être accompagné en application du CCCG ", elles n'assortissent pas cette allégation des précisions nécessaires pour permettre au juge d'en apprécier le bien-fondé ; que, dans ces conditions, les société Pygmalyon et PLEG Lyon ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu l'obligation de verser à la SNCF la somme globale de 474 564,75 euros, dont il est constant qu'elle figure au décompte général ;
7. Considérant, en second lieu, que les sociétés requérantes soutiennent, d'une part, que la société Pygmalyon ne pouvait être condamnée à verser à la SNCF la somme de 474 564,75 euros, non plus que les frais d'expertise et les frais irrépétibles, dès lors que le litige en cause avait été repris par la société PLEG Lyon conformément au traité de scission signé le 31 décembre 2008, qui a eu pour objet d'apporter à cette dernière l'ensemble des éléments d'actif et de passif constituant la branche d'activité concernant " l'entreprise de gros oeuvre et de bâtiment à ossature de bois " ; que, d'autre part, la société PLEG Lyon ayant fait l'objet d'une procédure collective par décision du tribunal de commerce du 29 décembre 2009, la demande de la SNCF, qui n'a pas déclaré sa créance au mandataire dans les conditions et délais légaux, est irrecevable à son encontre ;
8. Considérant, toutefois, qu'il ne ressort pas des termes du traité de scission qui, s'agissant de la société Pygmalyon, ne mentionne pas le sort des litiges en cours, que la société PLEG Lyon aurait succédé à cette société dans l'intégralité de ses droits et obligations, alors d'ailleurs qu'il ressort des extrait du K bis produits par la SNCF que la société Pygmalyon, à tout le moins pour son établissement désormais situé à Vannes, a poursuivi une activité dans le domaine du bâtiment public ; qu'ainsi, c'est à bon droit, et sans entacher leur jugement d'une omission à statuer, que les premiers juges ont mis à la charge de la société Pygmalyon la somme due à la SNCF ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les conclusions présentées à titre subsidiaire par la SNCF, que les sociétés Pygmalyon et PLEG Lyon ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a, par le jugement attaqué, fait droit à la demande de la SNCF et condamné la société Pygmalyon à lui verser la somme de 474 564,75 euros, ainsi que les frais d'expertise et les frais exposés et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SNCF, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par les sociétés Pygmalyon et PLEG Lyon au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
11. Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Pygmalyon une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SNCF et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société Pygmalyon et de la société PLEG Lyon est rejetée.
Article 2 : La société Pygmalyon versera à la SNCF une somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
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N° 11PA00211