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25/03/2013 | FRANCE | N°12PA04087

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 25 mars 2013, 12PA04087


Vu la requête, enregistrée le 16 octobre 2012, présentée par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207643 du 19 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. A...B..., d'une part, en annulant l'arrêté du préfet en date du 29 mars 2012 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination, d'autre part, en faisant injonction au préfet de police de lui délivrer un ti

tre de séjour temporaire dans un délai de trois mois, enfin, en mettant...

Vu la requête, enregistrée le 16 octobre 2012, présentée par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207643 du 19 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. A...B..., d'une part, en annulant l'arrêté du préfet en date du 29 mars 2012 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination, d'autre part, en faisant injonction au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai de trois mois, enfin, en mettant à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de M. B...devant le Tribunal administratif de Paris ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 2013 :

- le rapport de Mme Bailly, rapporteur,

- et les conclusions de M. Ladreyt, rapporteur public ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité serbe, a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 29 mars 2012, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ; que le préfet de police relève régulièrement appel du jugement du 19 septembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté précité ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et le mémoire, ainsi que les pièces produites par les parties sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ;

3. Considérant qu'il ressort de l'examen du dossier de première instance que M. B... a produit le 1er août 2012, à la demande du tribunal, onze pièces complémentaires qui n'ont pas été communiquées au préfet de police ; qu'il ressort de la motivation du jugement attaqué que, pour annuler l'arrêté du 29 mars 2012 rejetant la demande de titre de séjour de M. B... et l'obligeant à quitter le territoire français, le Tribunal administratif de Paris a cependant tenu compte de ces pièces, dont ni le nombre ni le volume ou les caractéristiques ne faisaient obstacle à leur communication, et qui permettaient d'établir la communauté de vie du couple depuis 2007 ; que le tribunal aurait dû, dès lors, soumettre ces pièces au débat contradictoire pour permettre au préfet de police d'en prendre connaissance et éventuellement de produire un mémoire en réplique ; que, par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté contesté, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit: (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " et qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la copie de l'acte de mariage produit par M.B..., que celui-ci a épousé le 24 novembre 2007 MlleC..., de nationalité croate, résidant régulièrement sur le territoire français sous couvert d'une carte de résident valable jusqu'au 9 février 2020 ; que, contrairement à ce que fait valoir le préfet de police, les pièces versées au dossier par M.B..., et notamment plusieurs relevés de compte bancaire de la Banque Populaire, adressés au couple entre 2009 et 2010 et faisant état de mouvements bancaires réguliers, des échéanciers de paiement EdF pour les années 2008, 2009 et 2011, également adressés au couple, et les nombreuses attestations rédigées, pour certaines en des termes très circonstanciés, par des commerçants et des résidents de l'immeuble dans lequel son épouse exerce ses charges de concierge, et qui certifient que M. B...réside dans la loge de son épouse depuis 2007 et lui apporte son aide en contribuant aux charges de gardiennage, celle-ci souffrant de diabète, établissent la réalité de la communauté de vie entre M. B...et son épouse depuis 2007 ; que, par suite, et nonobstant la circonstance que l'intéressé pourrait bénéficier du regroupement familial et aurait conservé des attaches familiales en Serbie, celui-ci est fondé à soutenir que, par l'arrêté contesté du 29 mars 2012, le préfet de police a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et a par suite méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'arrêté du préfet de police en date du 29 mars 2012 rejetant la demande d'admission au séjour de M. B...et l'obligeant à quitter le territoire français, qui est entaché d'illégalité, doit être annulé ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

9. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de police délivre à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet de police de délivrer un tel titre de séjour à M. B...dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire en l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1207643 du 19 septembre 2012 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police du 29 mars 2012 rejetant la demande d'admission au séjour de M. B... et l'obligeant à quitter le territoire français sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M.B..., dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 12PA04087


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04087
Date de la décision : 25/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme STAHLBERGER
Rapporteur ?: Mme Pascale BAILLY
Rapporteur public ?: M. LADREYT
Avocat(s) : BESSIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-03-25;12pa04087 ?
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