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21/03/2013 | FRANCE | N°11PA01241

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 21 mars 2013, 11PA01241


Vu le recours, enregistré par télécopie le 8 mars 2011 et régularisé par le dépôt de l'original le 10 mars 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ; le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0714388 en date du 20 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la SAS Cabinet Deslandes au titre de la période du 1er avril 200

2 au 31 mars 2005 et de remettre ces impositions à la charge de la SAS Cabine...

Vu le recours, enregistré par télécopie le 8 mars 2011 et régularisé par le dépôt de l'original le 10 mars 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ; le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0714388 en date du 20 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la SAS Cabinet Deslandes au titre de la période du 1er avril 2002 au 31 mars 2005 et de remettre ces impositions à la charge de la SAS Cabinet Deslandes à concurrence de 19 940 euros ;

2°) à titre subsidiaire, de réformer le même jugement en tant qu'il a prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la SAS Cabinet Deslandes au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2003 et de remettre ces impositions à la charge de la SAS Cabinet Deslandes à concurrence de 5 239 euros ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2013 :

- le rapport de Mme Oriol, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dhiver, rapporteur public ;

1. Considérant que la SAS Cabinet Deslandes, qui exerce une activité de syndic de copropriété et d'administration d'immeubles, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er avril 2002 au 31 mars 2005 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée procédant de la limitation des droits à déduction de taxe exercés par la société en application de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts ; qu'à la suite du refus de l'administration de faire droit à la réclamation de la SAS Cabinet Deslandes tendant à la décharge des rappels de taxe litigieux procédant de la proposition de rectification qui lui a été notifiée le 7 octobre 2006, l'intéressée a porté le litige devant le Tribunal administratif de Paris qui, par un jugement du 20 octobre 2010, lui a accordé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er avril 2002 au 31 mars 2005 ; que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que le ministre soutient que c'est à tort que pour accorder à la SAS Cabinet Deslandes la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés, le tribunal administratif, en estimant que les activités de placement financiers de l'intéressée présentaient un caractère accessoire par rapport à son activité principale de syndic et de gestion d'immeuble en ne recourant que de façon marginale aux moyens y concourant, a jugé que le service n'était pas fondé à réintégrer le chiffre d'affaires généré par l'activité regardée comme accessoire au dénominateur du prorata de déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de service effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel " ; que le versement d'une somme ne peut être regardé comme la contrepartie d'une prestation de service rendue à titre onéreux et comme entrant par suite dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, qu'à la condition notamment qu'il existe un lien direct entre ce versement et une prestation nettement individualisable fournie par le bénéficiaire du versement à la personne qui l'effectue ; qu'aux termes de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " 1. Les redevables qui, dans le cadre de leurs activités situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations utilisées pour effectuer ces activités. Cette fraction est égale au montant de la taxe déductible obtenu, après application, le cas échéant, des dispositions de l'article 207 bis, multiplié par le rapport existant entre : a) Au numérateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations ouvrant droit à déduction y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; b) Au dénominateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations figurant au numérateur ainsi qu'aux opérations qui n'ouvrent pas droit à déduction, et de l'ensemble des subventions, y compris celles qui ne sont pas directement liées au prix de ces opérations (...) " ; que, selon l'article 219 de la même annexe, une fraction de la taxe, calculée dans les conditions prévues par l'article 212, est déductible lorsque l'utilisation de services ou de biens ne constituant pas des immobilisations aboutit concurremment à la réalisation d'opérations dont les unes ouvrent droit à déduction et les autres n'y ouvrent pas droit ; qu'il résulte des dispositions précitées du b du 1 de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts que le chiffre d'affaires porté au dénominateur du prorata de déduction est afférent aux opérations entrant dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée ;

4. Considérant, d'autre part, que selon les dispositions de l'article 19, paragraphe 2 de la sixième directive 77/388/CEE susvisée, alors transposées à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, il est fait abstraction, pour le calcul du prorata de déduction de taxe sur la valeur ajoutée, du montant du chiffre d'affaires afférent au produit des opérations financières accessoires ; que dès lors, les produits financiers entrant dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée mais exonérés en application de l'article 13 B sous d) de la même directive, ne sont pas exclus du dénominateur du prorata de déduction s'ils ne présentent pas un tel caractère accessoire ;

5. Considérant qu'il résulte des décisions rendues par la Cour de justice des Communautés européennes dans les affaires 306/94 " Régie dauphinoise " le 11 juillet 1996, 77/01 " EDM " le 29 avril 2004, 98/07 " Nordania Finans et BG Factoring " le 6 mars 2008 et 174/08 " NCC Construction Danmark A/S " le 29 octobre 2009, qu'une activité économique ne saurait être qualifiée d'accessoire au sens des dispositions de l'article 19, paragraphe 2 de la sixième directive, si elle constitue le prolongement direct, permanent et nécessaire de l'activité taxable de l'entreprise ou si elle implique une utilisation significative de biens et de services pour lesquels la taxe sur la valeur ajoutée est due ; que lorsqu'une activité constitue le complément indispensable, direct et permanent d'une activité taxable au point d'en constituer une condition nécessaire, il n'y a pas lieu de tenir compte du critère quantitatif de l'utilisation des moyens concourant à l'activité taxable ;

6. Considérant qu'outre ses activités de syndic et de gestion d'immeubles, la SAS Cabinet Deslandes place à court terme, pour son propre compte auprès d'organismes financiers, les fonds déposés en garantie par ses locataires et copropriétaires ; que ces opérations de placement, en visant la production de produits financiers à caractère permanent, ont le caractère d'une activité économique menée par une assujettie agissant en tant que telle, dès lors qu'elles constituent le prolongement direct, permanent et nécessaire de son activité taxable de gestion immobilière, sans laquelle elles n'existeraient pas ; qu'il n'y a dès lors pas lieu, ainsi qu'il a été dit, de tenir compte du critère quantitatif de l'utilisation des moyens concourant à l'activité taxable ; que le ministre est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que si l'activité de placement de la SAS Cabinet Deslandes constituait le prolongement direct, permanent et nécessaire de son activité de syndic et de gestion d'immeuble, cette condition n'était pas suffisante, à elle seule elle, pour estimer, en se fondant sur le recours limité aux moyens concourant à l'exercice de son activité principale de gestion, qu'elle n'était que l'accessoire de ladite activité ;

7. Considérant qu'il y a lieu, pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par l'intimée dans sa demande présentée devant le Tribunal administratif de Paris et la Cour ;

8. Considérant que la SAS Cabinet Deslandes se prévaut du principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu duquel est admise la déductibilité de la taxe payée en amont pour des opérations financières exonérées présentant un lien direct et immédiat avec l'activité économique assujettie ;

9. Considérant toutefois, ainsi qu'il vient d'être dit, qu'il n'y a pas lieu de tenir compte du critère quantitatif de l'utilisation des moyens lorsqu'une activité constitue le complément indispensable, direct et permanent d'une activité taxable au point d'en constituer une condition nécessaire ; que ce principe est conforme à l'exigence de neutralité qui sous-tend le droit à déduction dont le mécanisme du prorata doit permettre la concrétisation dans le cas où, comme en l'espèce, l'assujettie utilise des biens et services pour effectuer à la fois des opérations taxées et des opérations exonérées de taxe sur la valeur ajoutée ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a accordé à la SAS Cabinet Deslandes la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er avril 2002 au 31 mars 2005 ;

Sur les conclusions de la SAS Cabinet Deslandes tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme que demande la SAS Cabinet Deslandes sur leur fondement ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0714388 du Tribunal administratif de Paris en date du 20 octobre 2010 est annulé.

Article 2 : Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la SAS Cabinet Deslandes au titre de la période du 1er avril 2002 au 31 mars 2005 d'un montant de 19 940 euros sont remis à sa charge.

Article 3 : Les conclusions de la SAS Cabinet Deslandes présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 11PA01241

Classement CNIJ :

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA01241
Date de la décision : 21/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-03 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Cas des entreprises qui n'acquittent pas la TVA sur la totalité de leurs affaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: Mme Christelle ORIOL
Rapporteur public ?: Mme DHIVER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS P.D.G.B.

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-03-21;11pa01241 ?
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