Vu la requête, enregistrée le 9 septembre 2011, présentée pour la SNC Piana 2005, élisant domicile au siège de la SARL Domigestion Pacifique, BP 40195 à Papeete (98713), Polynésie française, par Me Martin ;
la SNC Piana 2005 demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100158 du 7 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie Française a rejeté sa demande tendant à la décharge de la majoration de 80 % dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009 ;
2°) de prononcer la décharge de la majoration en cause ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des impôts de la Polynésie française ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 novembre 2012:
- le rapport de M. Couvert-Castéra, président-assesseur,
- les conclusions de M. Blanc, rapporteur public,
- et les observations de Me Martin, avocat de la S.N.C Piana 2005 ;
1. Considérant que la SNC Piana 2005, dont le siège est à Paris, a pour objet l'acquisition, la location et l'exploitation, directe ou indirecte, de tous matériels destinés à des entreprises situées dans les départements et territoires d'outre-mer, entrant dans le cadre des activités visées par l'article 199 undecies B du code général des impôts, disposition qui ouvre aux contribuables domiciliés en France un droit à une réduction d'impôt sur le revenu à raison de certains investissements productifs neufs réalisés outre-mer ;
2. Considérant que cette société a déclaré exercer en Polynésie française au cours des années 2007 à 2009 une activité, soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, de location à la SARL " Funéraires Min Chiu " des aménagements d'une chapelle funéraire ;
3. Considérant que la SNC Piana 2005 a procédé, en application des articles 345-4 et 345-20-1 du code des impôts de la Polynésie française, à la déduction au titre du 3ème trimestre de l'année 2007, du 1er trimestre de l'année 2008 et du 1er trimestre de l'année 2009, de plusieurs fractions de la taxe qui avait grevé le prix de ces aménagements, présentés comme ayant été acquis par elle de la SARL " Funéraires Min Chiu " selon la facture n°2005 émise le 16 décembre 2005 par cette dernière société et un contrat de vente conclu le 26 décembre suivant ;
4. Considérant que le service des contributions de la Polynésie française a remis en cause, à l'issue d'une procédure de redressement contradictoire, les déductions ainsi opérées par la SNC Piana 2005 pour un montant total de 1 781 408 F CFP, et l'a assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 107 612 F CFP au titre du 3ème trimestre de l'année 2007, du même montant au titre du 1er trimestre de l'année 2008, et de 100 452 F CFP au titre du 1er trimestre de l'année 2009 ; que ces rappels ont été assortis de la majoration de 80 % prévue par l'article 511-5 du code des impôts de la Polynésie française ;
5. Considérant que la SNC Piana 2005 relève appel du jugement en date du 7 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette majoration ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 345-4 du code des impôts de la Polynésie française : " La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / Pour ouvrir droit à déduction, la dépense engagée doit être nécessaire à l'exploitation et affectée exclusivement aux besoins de l'exploitation (...) " ; qu'aux termes de l'article 345-20-1 du même code : " Le droit à déduction de la taxe qui a grevé l'acquisition, la construction ou la création dans le territoire de biens mobiliers ou immobiliers ouvrant droit à défiscalisation métropolitaine ne peut s'exercer que par cinquième au cours de la période de 60 mois durant laquelle les investisseurs métropolitains sont tenus de maintenir l'investissement correspondant dans le territoire./ Le montant de la déduction opérée annuellement est à ajuster au prorata temporis de la date de début d'exploitation.(...) " et qu'aux termes de l'article 511-5 de ce code : " 1- Lorsque la déclaration mentionnée à l'article LP 511-4 fait apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'un des impôts prévus au code des impôts insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 511-1 et d'une majoration de 40% si la mauvaise foi de l'intéressé est établie, ou de 80% s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses (...) " ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par la société requérante que les aménagements d'une chapelle funéraire qu'elle aurait achetés neufs à la SARL " Funéraires Min Chiu " par contrat du 26 décembre 2005, puis donnés en location à celle-ci par contrat du même jour, n'existent pas, cette dernière société disposant déjà d'une chapelle funéraire aménagée préalablement à la prétendue acquisition des aménagements de cette chapelle auprès de l'entreprise B résultant d'une facture fictive établie le 14 septembre 2005 ;
8. Considérant que la société requérante fait cependant valoir qu'elle n'avait pas connaissance du caractère fictif des opérations d'achat et de location de ces agencements, réalisées à l'initiative et par l'intermédiaire d'un expert-comptable, M. A ;
9. Considérant que la SNC Piana 2005, qui soutient avoir acheté les agencements en cause auprès de la SARL " Funéraires Min Chiu ", ne produit pas devant le juge de l'impôt la facture n°2005 en date du 16 décembre 2005 au titre de laquelle elle a procédé aux déductions de taxe sur la valeur ajoutée à l'origine des rappels qui ont été assortis des majorations en litige ;
10. Considérant, par ailleurs, qu'il résulte de l'instruction que la SARL " Funéraires Min Chiu " n'a présenté à la société requérante, lorsqu'elle lui a vendu les biens en cause, aucun document probant justifiant qu'elle avait elle-même effectivement acquis neufs les agencements qu'elle prétendait lui revendre ;
11. Considérant, tout d'abord, en effet, que la SARL " Funéraires Min Chiu " n'a présenté à la société requérante, pour justifier qu'elle avait acquis neufs les biens en cause, qu'une facture prétendument établie par l'entreprise B le 14 septembre 2005, dépourvue de toutes précisions quant aux quantités de matériaux et à la main d'oeuvre nécessaire à la réalisation de l'agencement de la chapelle funéraire en cause ; que le service des contributions a d'ailleurs établi à l'occasion de la vérification de la comptabilité de cette entreprise que cette facture présentait un caractère fictif, M. B certifiant ne pas l'avoir établie ;
12. Considérant, ensuite, que le constat d'huissier dressé le 16 décembre 2005 à la demande de M. A se bornait à constater que la SARL " Funéraires Min Chiu " lui avait désigné une construction terminée à usage de chapelle en déclarant en prendre possession à l'état neuf ; que, compte tenu de ces mentions, ce constat était manifestement insuffisant pour permettre d'établir que l'entreprise B avait effectivement réalisé en 2005 les travaux d'agencement de cette chapelle, tels que décrits dans la facture du 14 septembre 2005 ; qu'au demeurant, il n'est pas contesté que M. B exerçait seulement une activité de terrassement sans main d'oeuvre salariée et sans disposer du matériel spécifiquement nécessaire à certains travaux mentionnés sur cette facture, tels que les travaux de maçonnerie ou de montage de charpente métallique ; que, par ailleurs, l'administration soutient sans être contredite qu'aucun permis de construire ou aucune autorisation administrative se rapportant à la réalisation de travaux d'agencement d'une chapelle funéraire n'a été produit par la SARL " Funéraires Min Chiu " ;
13. Considérant, enfin, que la SARL " Funéraires Min Chiu " ne justifiait pas davantage par la production d'une facture acquittée qu'elle avait effectivement réglé le prix des travaux d'agencement en cause à l'entreprise B ;
14. Considérant, par ailleurs, qu'il est constant que les contrats en date du 26 décembre 2005 par lesquels la SNC Piana 2005 est censée avoir acheté puis donné en location les agencements en cause à la SARL " Funéraires Min Chiu " ne comportent aucune désignation précise de ces biens, l'annexe de ces contrats relative à la désignation du bien loué ne comportant que l'indication " Agencement chapelle " ;
15. Considérant qu'il résulte également de l'instruction que la société Domigestion Pacifique, chez laquelle la société requérante est domiciliée, a pour gérant M. , qui est également le gérant de la société Domigestion, société qui est elle-même le gérant de la société requérante ; que la société Domigestion Pacifique fait partie du groupe " Financière Magenta ", qui est spécialisé dans les opérations de défiscalisation d'investissements outre-mer ; que, dans ces conditions, eu égard à sa qualité de professionnel des investissements défiscalisés outre-mer, la SNC Piana 2005 savait nécessairement qu'il lui incombait de s'assurer de l'existence des biens sur lesquels portaient les opérations d'achat et de location en litige, tâche dont la société requérante ne pouvait ignorer que M. A, son intermédiaire dans cette opération d'investissement, ne s'était pas acquitté, faute d'éléments attestant dans les documents remis à la contribuable la réalisation par l'entreprise B d'une chapelle funéraire aménagée au cours de l'année 2005 ;
16. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des circonstances susmentionnées, d'une part, que la SNC Piana 2005 ne pouvait ignorer qu'elle n'était pas en droit de procéder à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui avait grevé les frais se rapportant à l'acquisition des agencements d'une chapelle funéraire, compte tenu du caractère fictif de cette acquisition et, d'autre part, que cette société a participé à un montage, résultant de la passation le même jour de plusieurs actes destinés à donner une apparence de réalité à l'opération d'investissement en cause, montage qui lui a permis de bénéficier indûment de cette déduction et d'éluder ainsi la taxe sur la valeur ajoutée normalement due, alors même qu'elle soutient qu'elle n'aurait eu aucun intérêt économique à participer à un tel montage ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a assorti les droits rappelés de la majoration de 80 % prévue par les dispositions de l'article 511-5 du code des impôts précité ;
17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNC Piana 2005 n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette majoration ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SNC Piana 2005 est rejetée.
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N° 11PA04086