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09/05/2012 | FRANCE | N°10PA04297

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 09 mai 2012, 10PA04297


Vu, I, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 août et 27 octobre 2010 sous le n° 10PA04297, présentés pour le SYNDICAT POUR L'ELECTRIFICATION DES COMMUNES DU SUD DE TAHITI (SECOSUD), BP 7013 à Taravao (98719) en Polynésie française, par la Scp Chansin-Wong-Usang ; le syndicat SECOSUD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900476/1 en date du 1er juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé, à la demande de Mme Valentina , maire de la commune de Teva I Uta et agissant pour le compte de cette commune, l

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Vu, I, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 août et 27 octobre 2010 sous le n° 10PA04297, présentés pour le SYNDICAT POUR L'ELECTRIFICATION DES COMMUNES DU SUD DE TAHITI (SECOSUD), BP 7013 à Taravao (98719) en Polynésie française, par la Scp Chansin-Wong-Usang ; le syndicat SECOSUD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900476/1 en date du 1er juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé, à la demande de Mme Valentina , maire de la commune de Teva I Uta et agissant pour le compte de cette commune, la délibération du comité syndical en date du 25 août 2009 approuvant l'avenant n° 5 à la concession de distribution d'énergie électrique conclue avec la société Electricité de Tahiti et autorisant son président à le signer et a enjoint au syndicat, s'il ne peut obtenir de cette société la résolution amiable de cet avenant, de saisir le juge du contrat à l'effet de voir prononcer la résiliation de l'avenant litigieux ;

2°) de rejeter la demande de Mme devant le Tribunal administratif de la Polynésie française ;

3°) de prescrire à la commune de Teva I Uta de produire l'intégralité des actes préparatoires ayant abouti à la délibération non communiquée par le tribunal portant délégation à son maire d'ester en justice ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Teva I Uta la somme de 5 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu, II, la requête, enregistrée le 24 août 2010 sous le n° 10PA04298, présentée pour le syndicat SECOSUD, par la Scp Chansin-Wong et Usang ; le syndicat SECOSUD demande à la Cour de prononcer le sursis à exécution du jugement susvisé ;

.....................................................................................................................

Vu, III, la requête, enregistrée le 28 septembre 2010 sous le n° 10PA04837, présentée pour la SA ELECTRICITE DE TAHITI (EDT), BP 8021 à Faa'a-Puurai (98703) en Polynésie française, par le cabinet Jones Day ; la société EDT demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900476 en date du 1er juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé, à la demande de Mme Valentina , maire de la commune de Teva I Uta et agissant pour le compte de cette commune, la délibération du comité syndical SECOSUD en date du 25 août 2009 approuvant l'avenant n° 5 à la concession de distribution d'énergie électrique conclue avec la société EDT et autorisant son président à le signer et a enjoint au syndicat, s'il ne peut obtenir de cette société la résolution amiable de cet avenant, de saisir le juge du contrat à l'effet de voir prononcer la résiliation de l'avenant litigieux ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Teva I Uta la somme de 5 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens éventuels ;

.....................................................................................................................

Vu, IV, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 septembre et 14 octobre 2010 sous le n° 10PA04838, présentée pour la société EDT, par le cabinet Jones Day ; la société EDT demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement susvisé et de mettre à la charge de la commune de Teva I Uta la somme de 5 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la loi du pays n° 2009-21 du 7 décembre 2009 relative au cadre réglementaire des délégations de service public de la Polynésie française et de ses établissements publics

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2012 :

- le rapport de M. Dellevedove, rapporteur,

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

- les observations de Me Brice, pour la SOCIETE D'ELECTRICITE DE TAHITI,

- et connaissance prise de la note en délibéré en date du 13 avril 2012, présentée pour la SOCIETE D'ELECTRICITE DE TAHITI, par Me Brice ;

Considérant que le SYNDICAT POUR L'ELECTRIFICATION DES COMMUNES DU SUD DE TAHITI (SECOSUD), établissement public de coopération intercommunale constitué entre les communes de Taiarapu Est, Taiarapu Ouest et Teva I Uta par arrêté gubernatorial du 10 février 1975 modifié le 26 juin 1975, rejointes par la commune de Hitiaa O Te Ra en 1998, a pour objet la construction, l'exploitation et la gestion d'installations de production et de distribution d'énergie électrique sur le territoire des communes membres ; que le syndicat SECOSUD a concédé pour une durée de 25 ans à compter du 1er janvier 1989 la distribution publique d'énergie électrique dans la zone géographique de compétence du syndicat à la société ELECTRICITE DE TAHITI (EDT), soit jusqu'au 31 décembre 2013 ; que, par la délibération litigieuse du 25 août 2009, le comité syndical du syndicat a autorisé son président à signer l'avenant n° 5 à cette délégation de service public, avenant qui a notamment pour objet d'en proroger la durée pour une période supplémentaire de 16 ans et 9 mois, soit jusqu'au 30 septembre 2030, terme de la délégation de service public attribuée à cette même société pour la distribution d'énergie électrique pour la zone Nord de l'île ; que le syndicat SECOSUD et la société EDT font appel du jugement en date du 1er juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a annulé, à la demande de Mme , maire de la commune de Teva I Uta et agissant pour le compte de la commune, cette délibération et a enjoint au syndicat, s'il ne peut obtenir de cette société la résolution amiable de l'avenant n° 5, de saisir le juge du contrat à l'effet de voir prononcer la résiliation de cet avenant et demandent à la Cour de prononcer le sursis à exécution dudit jugement ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les interventions du syndicat SECOSUD :

Considérant que le syndicat SECOSUD a intérêt au maintien de la délibération litigieuse ; que, dès lors, ses interventions dans les requêtes n°s 10PA04837 et 10PA04838 sont recevables ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que les requérants soutiennent que le tribunal administratif ne leur aurait pas communiqué le document produit par Mme le 14 mai 2010 alors même que le tribunal s'est fondé sur ce document, la délibération du 4 avril 2008 du conseil municipal de la commune de Teva I Uta, pour juger que l'intéressée, maire de la commune de Teva I Uta, justifiait d'une habilitation l'autorisant à agir au nom de la commune ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. " ; qu'aux termes de l'article R. 613-2 de ce code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne (...) " ; que le respect de ces dispositions impose aux juridictions de communiquer de leur propre initiative à la partie adverse les pièces que produit l'une d'entre elles et qui sont de nature à influer sur le sens de leur décision ; qu'il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pas pu préjudicier aux droits des parties ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande était présentée par Mme , en qualité de maire de la commune de Teva I Uta et de membre du comité syndical du syndicat SECOSUD ; qu'en réponse à diverses mesures d'instruction demandant notamment à l'intéressée si sa demande était présentée en son nom propre ou au nom de la commune, Mme a confirmé expressément, par les mémoires enregistrés les 6 et 27 janvier 2010 au greffe du tribunal, agir tant en sa qualité de maire de la commune et de membre du syndicat, qu'en son nom propre en qualité d'administré de la commune et donc d'usager du service public et a produit une délibération en date du 26 novembre 2009 du conseil municipal de la commune de Teva I Uta l'autorisant à s'attacher les services d'un avocat pour défendre les intérêts de la commune en justice ; que les défendeurs, par les mémoires enregistrés les 26 janvier et 10 février 2010, prenant acte que la demande était également exercée par Mme en qualité de maire, donc en représentation de la commune, lui ont opposé notamment la fin de non-recevoir tirée de ce qu'elle n'avait pas été autorisée à ester en justice au nom de la commune dans le cadre du présent litige ; que, par la mesure d'instruction en date 11 mai 2010, le tribunal a demandé à l'intéressée de verser au dossier " la copie de la délibération autorisant le maire à ester en justice et non à choisir un avocat " ; que l'intéressée a produit le 14 mai 2010, soit le jour de la clôture de l'instruction, une nouvelle délibération en date du 4 avril 2008 par laquelle le conseil municipal de la commune de Teva I Uta avait, sur le fondement de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, autorisé son maire à ester en justice ; que le jugement attaqué a été rendu à l'issue d'une audience publique en date du 18 mai 2010 ; qu'en l'absence d'ordonnance précisant les dates de clôture de l'instruction, l'instruction a été close, en application des dispositions précitées, trois jours francs avant la date d'audience, soit le 14 mai 2010 à minuit ; qu'aucun élément du dossier ne permet d'établir que la pièce produite par Mme aurait été communiquée ; que, dans les circonstances de l'espèce et compte tenu notamment de la nature du débat intervenu entre les parties à ce propos, il appartenait au tribunal, en application des dispositions susmentionnées, de communiquer ce document de nature à influer sur le sens de son jugement et, le cas échéant, de rouvrir l'instruction et de renvoyer l'affaire à une audience ultérieure ; qu'en se fondant ainsi, pour écarter la fin de non-recevoir susmentionnée, sur un document dont les défendeurs à l'instance n'avaient pas eu connaissance, les premiers juges ont méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure ; que, dès lors, les requérants sont fondés à demander, pour ce motif, l'annulation du jugement attaqué ; que la circonstance invoquée par l'intimée que la délibération en date du 4 avril 2008 a été transmise à la tutelle et affichée à la mairie, et a donc été incorporée au droit positif, et qu'il appartenait à toute personne d'en prendre connaissance est, à cet égard, sans incidence dès lors qu'elle avait elle-même produit auparavant la délibération du 26 novembre 2009, seule soumise au débat contradictoire des parties qui lui avaient opposé une fin de non-recevoir ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme devant le Tribunal administratif de la Polynésie française ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'une partie peut invoquer, à tout moment de la procédure devant le juge administratif, y compris pour la première fois en appel, une qualité lui donnant un intérêt à agir ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande était présentée par Mme en qualité de maire de la commune de Teva I Uta et de membre du comité syndical du syndicat SECOSUD ; qu'en réponse à une mesure d'instruction du tribunal, Mme a déclaré expressément agir tant en sa qualité de maire de la commune et de membre du syndicat, qu'en son nom propre en qualité d'administré de la commune et donc d'usager du service public, ainsi qu'il a été dit ; qu'elle doit être ainsi regardée comme ayant entendu par sa demande agir notamment au nom de la commune, personne morale membre du syndicat, ce qu'avaient reconnu, d'ailleurs, en première instance le syndicat et la société défendeurs ; qu'elle réaffirme cette qualité en appel ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou en partie, et pour la durée de son mandat : / 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le conseil municipal peut légalement donner au maire une délégation générale pour ester en justice au nom de la commune pendant la durée de son mandat dans les cas définis par le conseil municipal ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par la délibération en date du 4 avril 2008, le conseil municipal de la commune de Teva I Uta avait, sur le fondement de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, autorisé son maire à intenter " au nom de la commune toutes actions en justice pour l'ensemble du contentieux de la commune notamment pour la constitution de partie civile et ce, en première instance, en appel ou en cassation, que la commune soit demanderesse ou défenderesse " ; que, contrairement à ce que soutiennent le syndicat SECOSUD et la société EDT, cette délégation générale, qui ne se borne pas à reprendre les dispositions de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriale, et qui définit les cas dans lesquels le maire peut ester en justice au nom de la commune, n'était pas illégale et a régulièrement habilité le maire de Teva I Uta à représenter la commune dans le présent litige ; que, si le syndicat SECOSUD soutient en appel que la commune n'établit pas que les conseillers municipaux auraient été régulièrement convoqués à la séance au cours de laquelle a été adoptée cette délibération, il n'assortit ce moyen d'aucun commencement de preuve de nature à susciter un doute sur la régularité des convocations alors, d'ailleurs, que la délibération en cause comporte dans ses visas la référence de la lettre portant convocation du conseil municipal ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ; que la circonstance que, à la suite de cette délégation, des dissensions se soient faites jour au sein du conseil municipal sur l'opportunité pour le maire d'avoir introduit la demande en cause est sans incidence sur la légalité de la délégation consentie dès lors qu'il n'est pas même allégué que cette délégation aurait été retirée ou même abrogée ; que la circonstance, à la supposer établie, que le maire n'aurait pas même rendu compte au conseil municipal, en application de l'article L. 2122-23 du code général des collectivités territoriales, de l'introduction de la demande dans le cadre de la délégation qui lui a été ainsi consentie demeure sans influence sur la validité de cette délégation pour représenter la commune en justice ;

Considérant, en deuxième lieu, que la délibération litigieuse susmentionnée du comité syndical en date du 25 août 2009 approuvant l'avenant n° 5 à la concession de distribution d'énergie électrique conclue avec la société EDT et autorisant son président à le signer a, compte tenu de l'objet de cet avenant, nécessairement une incidence sur les finances communales ; qu'en particulier, l'absence de consultation d'un autre prestataire ne permet pas d'affirmer que les nouvelles conditions retenues dans l'avenant seraient optimales à cet égard ; que, dès lors, la commune justifie d'un intérêt à agir contre cette délibération ;

Considérant, en troisième lieu, que le syndicat SECOSUD et la société EDT soutiennent que la demande était tardive, le délai de recours contentieux ayant, selon eux, commencé à courir le 25 août 2009, date de la délibération contestée, en raison de la convocation de Mme à la séance au cours de laquelle a été adoptée la délibération en litige et alors même qu'un autre délégué de la commune a effectivement siégé ; que, toutefois, lorsqu'une commune membre d'un syndicat intercommunal introduit un recours pour excès de pouvoir contre une délibération du syndicat, le délai de recours contentieux ne saurait être regardé comme ayant commencé à courir à son égard à la date de cette délibération du seul fait de la participation de ses délégués à cette délibération, la commune ne pouvant être tenue comme ayant acquis de ce fait la connaissance de la délibération à la date à laquelle celle-ci a été adoptée ; qu'il n'est pas allégué, d'ailleurs, que cette délibération aurait été publiée dans les conditions de l'article L. 5211-48 du code général des collectivités territoriales, applicable à la Polynésie française en vertu de l'article L. 5842-12 de ce code ; que, dès lors, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande, en tant qu'elle était exercée pour le compte de la commune, ne peut qu'être écartée ;

Sur la légalité de la délibération du 25 août 2009 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués par la commune de Teva I Uta :

Considérant que la commune de Teva I Uta soutient que la délibération du 25 août 2009 par laquelle le comité syndical du syndicat SECOSUD a autorisé son président à signer l'avenant n° 5 à la concession de distribution d'énergie électrique susmentionnée, avenant qui a notamment pour objet d'en proroger la durée pour une période supplémentaire de 16 ans et 9 mois, est illégale comme ayant méconnu les principes généraux de la commande publique applicables même sans texte à cette délégation de service public ;

En ce qui concerne l'application des principes généraux du droit de la commande publique :

Considérant qu'aux termes de l'article 49 de la loi organique susvisée du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française : " La Polynésie française fixe les règles relatives à la commande publique des communes, de leurs groupements et de leurs établissements publics dans le respect des principes de liberté d'accès, d'égalité de traitement des candidats, de transparence des procédures, d'efficacité de la commande publique et du bon emploi des deniers publics " ; que les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, qui sont des principes généraux du droit de la commande publique tels que rappelés par cette loi organique en vigueur sur le territoire de la Polynésie française, sont applicables même sans texte notamment aux délégations de service public mises en oeuvre sur le territoire ; que, dès lors, contrairement à ce que soutiennent le syndicat SECOSUD et la société EDT, la délibération litigieuse du comité syndical en date du 25 août 2009 approuvant l'avenant n° 5 à la concession de distribution d'énergie électrique conclue avec la société EDT et autorisant son président à le signer était soumise à ces principes alors même que la Polynésie française avait seulement défini les règles législatives applicables aux délégations de service public postérieurement par la loi du pays susvisée du 7 décembre 2009 relative au cadre réglementaire des délégations de service public de la Polynésie française et de ses établissements publics ; que, en tout état de cause, d'une part, la société EDT n'est pas fondée à invoquer un principe de sécurité juridique pour l'opposer à l'application des principes susmentionnés, ceux-ci ayant été rappelés par la loi organique précitée ; que, d'autre part, la société EDT ne saurait pas davantage invoquer utilement la méconnaissance du principe de sécurité juridique et de non rétroactivité par rapport aux règles instaurées par la loi du pays précitée, cette loi postérieure n'étant pas applicable à la délibération litigieuse ; que la circonstance que, par l'article LP30 de cette loi, certaines des règles qu'elle prévoit, comme celle de l'article LP5 relatif à l'obligation de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, ne soient pas applicables lorsque l'autorité habilitée a expressément pressenti un délégataire avant la date de promulgation de cette loi et que celui-ci a, en contrepartie, engagé des études et des travaux préliminaires, est sans incidence sur la légalité de la délibération litigieuse intervenue antérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi qui, ainsi qu'il a été dit, ne lui est pas applicable ; que la circonstance que, sur le territoire métropolitain, des concessionnaires bénéficient de monopoles légaux est pareillement sans incidence sur l'application des principes susmentionnés à la délégation de service public en cause ;

En ce qui concerne les conditions de passation de l'avenant :

Considérant qu'un avenant ne peut modifier substantiellement l'un des éléments essentiels de la délégation de service public, tels que son objet, sa durée ou le volume des investissements mis à la charge du délégataire ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'avenant litigieux comporte la prorogation de la concession pour une durée supplémentaire de 16 ans et 9 mois soit du 1er janvier 2014 au 30 septembre 2030 par rapport à une durée initiale de 25 ans, l'augmentation de la participation du concessionnaire aux " frais de fonctionnement " du syndicat dont le montant est fixé pour l'année 2009 à la somme mensuelle de 2,5 millions de F CFP, l'accroissement du montant annuel maximal des travaux à réaliser arrêté à 36 millions de F CFP pour l'année 2009, l'amélioration des conditions de contrôle de la concession, la réalisation d'un programme prioritaire d'extension de 54 millions de F CFP pour les années 2009 et 2010 et l'objectif de réaliser de l'ordre d'un milliard de F CFP d'investissements en matière de production d'énergies renouvelables, alors d'ailleurs que l'objet de la convention initiale était limité à la distribution d'énergie électrique ; que, selon les estimations mêmes de la société EDT, ces stipulations devraient se traduire par une augmentation de près de 30 % de la participation aux frais de fonctionnement du concédant et conduire globalement à réaliser de 1,7 à 2,7 milliards de F CFP d'investissements supplémentaires alors que la valeur des biens prévus dans la concession initiale s'élevait à moins d'un milliard de F CFP ; que, dans ces conditions, d'une part, cet avenant, qui modifie l'objet et le volume des investissements mis à la charge du concessionnaire, modifie substantiellement la durée de la concession, élément essentiel de la délégation de service public, et est donc entaché sur ce point d'illégalité ; que, d'autre part, l'avenant en cause présente les caractères d'un nouveau contrat dont la passation devait respecter les principes susmentionnés de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ; qu'en se bornant à en négocier le contenu avec la société EDT, seule consultée, sans susciter d'autres candidatures, le syndicat SECOSUD n'a pas respecté ces principes ; que, dès lors, la délibération litigieuse est également entachée sur ce point d'illégalité ; que la circonstance que le nouveau terme de la concession, fixé au 30 septembre 2030 par l'avenant litigieux, coïncide avec le terme de la concession d'énergie électrique dévolue par ailleurs à la société EDT pour la région Nord de l'Ile et autoriserait à ce terme une remise en concurrence globale des concessions pour l'ensemble de l'Ile est sans incidence sur la légalité de la délibération litigieuse ; que la circonstance que l'avenant litigieux permettrait " l'adossement " de la concession à la concession existante de distribution d'énergie électrique pour la région Nord de l'Ile en tirant bénéfice de la péréquation des coûts entre les deux concessions est pareillement sans incidence, alors, d'ailleurs, que la mise en oeuvre d'une telle technique comptable pourrait avoir pour effet de fausser le jeu de la concurrence entre les candidats éventuels ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la délibération en date du 25 août 2009 par laquelle le comité syndical du syndicat SECOSUD a approuvé l'avenant n° 5 à la concession de distribution d'énergie électrique conclue avec la société EDT et autorisant son président à le signer ne peut qu'être annulée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

Considérant que la demande comportait des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au président du syndicat SECOSUD de prendre les mesures nécessaires pour anéantir l'avenant litigieux, soit par voie de résiliation, soit par voie d'une action en nullité devant le juge du contrat ;

Considérant que l'annulation d'un acte détachable d'un contrat n'implique pas nécessairement la nullité dudit contrat ; qu'il appartient au juge de l'exécution, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, d'enjoindre à la personne publique de résilier le contrat, le cas échéant avec un effet différé, soit, eu égard à une illégalité d'une particulière gravité, d'inviter les parties à résoudre leurs relations contractuelles ou, à défaut d'entente sur cette résolution, à saisir le juge du contrat afin qu'il en règle les modalités s'il estime que la résolution peut être une solution appropriée ;

Considérant que les illégalités d'une particulière gravité dont sont entachés la délibération et l'avenant litigieux, qui sont de nature à avoir eu une incidence déterminante sur le contenu du contrat et le choix du délégataire, justifient qu'il soit enjoint à la personne publique d'obtenir de son cocontractant la résolution de l'avenant en cause, ou, à défaut d'entente sur cette résolution, de saisir le juge du contrat pour qu'il en règle les modalités s'il estime que la résolution peut être une solution appropriée ; qu'il ne résulte de l'instruction aucune circonstance de nature à démontrer une atteinte excessive à l'intérêt général de ce fait dès lors que la convention initiale demeure en vigueur jusqu'à son terme fixé au 1er janvier 2014 dans des conditions propres à assurer la continuité du service public et qu'il est loisible au syndicat de reprendre la procédure de passation du contrat en cause ; qu'il y a lieu d'enjoindre au syndicat SECOSUD d'obtenir de son cocontractant la résolution amiable de l'avenant n° 5 ou, à défaut, de saisir le juge du contrat dans le délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt pour qu'il en règle les modalités ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

Considérant que le présent arrêt statue sur les conclusions du syndicat SECOSUD et de la société EDT à fin d'annulation du jugement attaqué ; que, dès lors, leurs conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement, présentées dans les requêtes susvisées n°s 10PA04298 et 10PA04838, sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions tendant à la communication de documents :

Considérant que, si le syndicat SECOSUD demande à la Cour de prescrire à la commune de Teva I Uta de produire l'intégralité des actes préparatoires ayant abouti à la délibération du conseil municipal non communiquée par le tribunal en date du 4 avril 2008 portant délégation au maire d'ester en justice ainsi que la lettre de convocation du 27 mars 2008 à la séance au cours de laquelle a été adoptée cette délibération et la preuve de sa notification personnelle à chaque conseiller à son domicile personnel, en tout état de cause, il appartient au juge, dans le cadre de l'instruction, de demander la communication des pièces qu'il estime être nécessaires à la résolution du litige, et, en cas de refus, de joindre cet élément de décision, en vue de l'arrêt à rendre, à l'ensemble des données fournies par le dossier ; qu'il n'y a pas lieu de demander la communication de ces documents ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce et compte tenu des succombances respectives des parties, il y a lieu de mettre à la charge du syndicat SECOSUD et de la société EDT la somme de 1 000 euros chacun, au titre des frais exposés par la commune de Teva I Uta et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les interventions du syndicat SECOSUD dans les requêtes susvisées n°s 10PA04837 et 10PA04838 sont admises.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes susvisées n° 10PA04298 et 10PA04838 présentées respectivement par le syndicat SECOSUD et la société EDT.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de la Polynésie française du 1er juin 2010 ainsi que la délibération du comité syndical du syndicat SECOSUD du 25 août 2009 approuvant l'avenant n° 5 à la concession de distribution d'énergie électrique susvisée et autorisant son président à le signer sont annulés.

Article 4 : Il est prescrit au syndicat SECOSUD d'obtenir de la société EDT la résolution amiable de l'avenant n° 5 ou, à défaut, de saisir le juge du contrat dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt pour qu'il en règle les modalités.

Article 5 : Le syndicat SECOSUD et la société EDT verseront chacun à la commune de Teva I Uta la somme de 1 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les surplus des conclusions des parties sont rejetés.

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N°s 10PA04297,10PA04298,10PA04837,

10PA04838


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 10PA04297
Date de la décision : 09/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PERRIER
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : USANG-KARA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-05-09;10pa04297 ?
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